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Littérature et modernité

Publié le 29/03/2011

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   Citant la devise de Rimbaud : « Il faut être absolument moderne «, un critique contemporain dénonce l'usage frelaté et commercial que, selon lui, trop d'écrivains ont fait depuis de cette idée. Il conclut ainsi : « La modernité fait vendre : des marchandises, des discours, des idées. «    Vous vous interrogerez sur ce problème, et vous direz si, à votre avis, la modernité peut être un critère en littérature.   

On se trouve ici devant un bloc de problèmes dans lequel il est difficile de distinguer ce qui revient « au critique contemporain «, curieusement anonyme, et ce qui revient à l'auteur de la question posée. Il semble cependant que l'auteur de la question n'est pas très éloigné du critique, comme en témoigne le caractère légèrement dubitatif de l'expression : « vous direz si, à votre avis, la modernité peut être un critère en littérature « (c'est moi qui souligne). Qu'on accepte de le reconnaître ou non, une direction est au moins suggérée par la manière dont la question est posée, et le candidat n'est pas complètement libre. Pourquoi?   

« A quoi peut conduire cet ensemble de remarques et de questions? 1) A composer : — une introduction : la mise en perspective historique, par exemple, peut en tenir lieu; — une première partie qui vise à expliquer le sujet et à l'expliciter : c'est-à-dire à montrer où il conduit, à interrogersa validité, etc; A cette première partie pourra s'ajouter ce qui va suivre, et qui serait, dans ce type de plan, la deuxième partie :essai de définition.

Qu'est-ce qu'être moderne en littérature? On peut très bien imaginer un devoir composé de cettemanière. 2) A rien!!! Je m'explique : il se peut que ce travail ne retrouve pas toute sa place dans la copie.

Mais qu'il ait été indispensablepour réfléchir, éviter les contradictions, les pièges divers, les affirmations sans fondement, etc.

: c'est trèsexactement ce que j'appelle dans les conseils généraux de ce guide : savoir perdre du temps. Essai de définition Pascal disait que ce sont les modernes qu'il faudrait appeler anciens, parce qu'ils ont accumulé des connaissancesque les « anciens » n'avaient pas.

Quant à ces « anciens », ils avaient été modernes en leur temps...

Rien de plusconfus donc, ni de plus relatif que cette notion. Il est bien évident que le mot de « moderne » a toujours, chez ceux qui l'utilisent, comme Rimbaud par exemple, etle revendiquent, une valeur offensive et polémique : moderne vise non-moderne.

Qu'est-ce qui n'est pas moderne?La réponse est peut-être plus facile à trouver de cette façon.

C'est un principe utile d'ailleurs d'une façon générale :prendre une question « à l'envers ou par la négative » peut être productif. N'est pas moderne en littérature et donc sans intérêt pour des lecteurs qui vivent pleinement leur temps, qui le font: — ce qui traite de sujets sans relation avec les préoccupations actuelles (ceci surtout dans les périodes derenouvellement et de bouleversements sociaux, politiques ou moraux profonds); — ce qui est donné à lire dans des formes perçues comme des procédés vieillis et artificiels, mais continuant àbénéficier d'un indiscutable prestige (exemple : Cyrano de Bergerac et le théâtre en vers à la fin du XIXe siècle), lesdeux n'étant pas séparables : c'est l'incapacité à avoir sur le monde moderne une vision neuve qui conduit les troisquarts des romanciers contemporains à écrire des romans dont la structure, la technique, la « psychologie » sontbalzaciennes. Deux exemples : écrire en 1825 des tragédies en vers, en style noble, conformes aux trois unités, et qui traitent desujets gréco-romains est alors anti-moderne pour un lecteur/spectateur qui a connu la chute de l'Empire, laRestauration, qui est romantique, républicain, et qui voit la machine à vapeur devenir « la reine du monde ».

C'estce que dit Stendhal, dans Racine et Shakespeare et dans la préface d'Armance. Écrire dans le dernier quart du XXe des romans patiemment descriptifs, narratifs, sur la province, l'adultère...,comme on en écrivait au XIXe, est anti-moderne pour un public dont la perception même de la réalité a changé. Il faut toutefois apporter une nuance : c'est toujours une avant-garde et une minorité qui proteste contre la vieillelittérature.

A côté, le grand public continue de se satisfaire des formes du passé : — On a consommé de la tragédie pseudo-classique longtemps après que le Romantisme avait renouvelé le théâtre ettoute l'esthétique littéraire. — On continue (voir ci-dessus) à consommer du roman pseudo-balzacien, après que se sont imposées les formesnouvelles de perception du réel.

Ce « retard » a sûrement des causes très complexes : ronronnement de la tradition,désir inconscient de retrouver le passé, absence de culture qui fait choisir plutôt la littérature de représentation,comme sont préférés les tableaux « qui montrent quelque chose », au moment même où s'impose la peinture nonfigurative. Est donc moderne en littérature : — Ce qui emprunte ses sujets à des zones directement intéressantes pour les lecteurs. — Ce qui invente des moyens nouveaux de dire ou de percevoir le réel. — Ce qui ne se contente pas d'être actuel parce qu'il est d'actualité (sinon le reportage serait la forme suprême de. »

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