L'oeuvre de L'Arioste
Publié le 19/04/2012
Extrait du document
ORLANDO FURIOSO (ROLAND FURIEUX) (1532)
RINALDO ARDJTO (Fragment)
COMÉDIES
LA CASSARIA (1508)
I SUPPOSITI (1509)
IL NEGROMANTE (1520)
LA LENA (1529)
LA SCOLASTICA (Achevée et publiée par Gabriel, son frère)
POÉSIES
CARMINA (1493-1503)
ELEGIE (vers 1500)
EGLOGA DELLA CONGIURA (1506)
CINQU E CANTI (vers 1533)
SATIRE (1534)
«
-L'épopée chevaleresque, venue de Bojardo et de la légende féerique où serpentaient les
invisibles personnages d'un rêve peut-être provisionné, transmis de soir en soir à la veillée, c'est-à
dire
au cours de séances visionnaires collectives, surgira, de nouveau, dans le romanesque préno
minal (Clorinde, Casimir, Angélique, Olivier),
et l'opéra, pendant la Restauration française.
Médor,
dans le Roland, est, on le sait, un Sarrasin.
Il épouse Angélique, ce qui pousse Roland,
amoureux de la dite, aux extrêmes de la folie.
Sous Charles X, Médor fleurit en masse comme
nom
de chien.
Elle jouera un rôle encore plus lointain dans l'élaboration de noms littéraires
comme
Clara d'Ellébeuse.
L'Arioste a écrit, à force de ratures,
un grand récit versifié.
Le soin qu'il prend de terminer
chacun de ses « chants » (sauf, évidemment, le dernier) par deux vers où il convie à l'attente
de ce qui va suivre (tout comme mon grand-père, quand il nous racontait une histoire à la nuit,
s'arrêtait à l'improviste et disait : « Maintenant, on va se coucher ») donne l'impression fugitive
du pastiche.
Il semble qu'il faisait semblant d'écrire pour le grand public, c'est-à-dire pour le
peuple.
Mais le
ton italien est tel qu'on ne saurait y distinguer, dans la tessiture même, à la diffé
rence
de ce qui se produit pour le français, le miaulement distingué qui n'en veut qu'à l'« élite ».
Le ton italien est à jamais plébéien en lui-même.
De même qu'il était malaisé au cardinal
Bembo de ne le point comparer au latin, il nous reste difficile de ne pas, instinctivement, le mettre
en parallèle avec le français
du xvue siècle, extraordinaire esperanto d'une humanité censément
théorique, essorée
en son éden emperruqué, avec du fard sur le mal aux dents.
N'étant ni le latin
ni le français, l'italien
de l'Arioste, dès lors qu'il emploie une certaine contracture elliptique issue
du premier, démontre une richesse et une abondance à quoi, évidemment, nul poète français
du même temps ne saurait prétendre.
Ce feuilleton, qui se déroule aux époques d'un Charlemagne
de féerie, est un Bottin rythmé, où l'artiste, bien avant la .fille de Pasiphaé, se complaît à l'ajustement
entre eux,
pour la musique poétique, de vocables étranges ou sonores fournis par les chroniques
ou forgés sur la table.
Le
débit du Roland, dans l'impitoyable ronron motorisé de ses octaves à la file, s'insurge
contre
la monotonie par la double montagne russe de l'« action )) proprement dite et de cette
autre action, plus subtile mais évidente, qui s'affirme dans la presque d'un bout à l'autre soutenue
variété des effets, des digressions, des surprises.
Du narratif il saute au sentencieux.
Le voici
philosophe et,
tout à trac, historien.
Son prosaïsme discoureur se rompt, soudain, pour une méta
phore inattendue, insertion de catharsis brémondienne dans un texte qui, dans l'ensemble, se
raccorde à la poésie plutôt par la virtuosité prosodique et, surtout, par une masse d'évocations
mouvementées
et spécifiées que par le délire immédiat de la phrase.
Inégalable dans le sport
qui consiste à faire sauter le casque, et la tête, de ses masculins adversaires, sans compter le
bouclier qu'elle
leur écartèle et leur haubert qu'elle démaille à coups de lance, la guerrière
Bradamante, comme une gentille dactylo, a un chagrin d'amour.
Ce qu'elle dit alors, c'est
tendre, féminin, suave et,
en somme conventionnel.
La romance après le communiqué.
L'Arioste vécut
et mourut la main serrée sur les cheveux de la Fortune.
De même que le
personnage de Rabelais paraît rabelaisien, il semble pris, lui-même, peu ou prou, dans cette
mythologie
qu'il exploite, redondante, érudite, géographiquement dispersée de l'Inde aux
Hespérides et entre l'Islande et la Bulgarie.
A la différence du tragique Torquato Tasso, lequel nous
laisse
l'odeur vivante de son âme renfrognée par des problèmes, l'Arioste tend à prendre place
parmi les figures incertaines, gigantesques et translucides de cette chevalerie sorcière à laquelle
il ne croyait pas.
Son nom semble celui d'un beau cheval patient, pâle et fuligineux, dressé à
labourer des champs de bataille apocryphes, chargé d'héroïnes élégantes, nourri d'une crème
de dictionnaires, pensionné aux écuries mondaines du duc d'Este, et brodé en tapisserie dans les
palais
de l'Italie..
»
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