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Malherbe et Bordier

Publié le 13/02/2012

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malherbe

 

Dans ses Historiettes, Tallemant des Réaux raconte sur Malherbe l'anecdote suivante : « Comme un jour un faiseur de vers se plaignait à lui qu'il n'y avait de récompense que pour ceux qui servent le roi dans ses armées et que l'on était cruel pour ceux qui excellaient dans les lettres, Malherbe répondit que c'était sottise de faire métier de rimeur, qu'un bon poète n'est pas plus utile à l'Etat qu'un joueur de quilles et qu'il doit se contenter du plaisir que lui procure la poésie. «

La scène se passe chez Racan, entre Bordier, rimeur, et Malherbe. En faire le récit sous forme de narration critique, de dialogue, de dissertation, de discours, de lettre, ou encore un mélange de ces genres, comme on le juge à propos...

malherbe

« l'ecrivain aux regles de Part.

Dans la soumission des officiers a leur chef, entre plus de desir de plaire au prince que d'acquiescement raisonne a un plan estime le meilleur.

Le devouement des gens d'epee, necessaire a funite d'action et au succes, est d'ailleurs .toujours honorablement recompense, ce que ne peuvent guere esperer pour eux-memes les ecrivains de notre temps.

Pourquoi donc nous demander le sacrifice d'idees personnelles qui peuvent etre excellentes, alors que personne ne nous tiendra compte de cette abnegation? - Auriez-vous, s'ecria Malherbe, la pretention de comparer les merites d'un rimeur a ceux d'un general? - Comme leurs services, leurs merites sont differents; mais le soin de recompenser les uns ne devrait pas faire oublier la justice qu'on doit aux mitres.

Cependant, vous conviendrez avec moi, Monsieur, que toutes les faveurs des princes sont pour les hommes de guerre.

Vont-elles s'egarer sur un ecrivain, c'est un evenement dont, tout le premier, it demeure Ronne.

Et pourtant, les lettres ne sont-elles pas la gloire d'un regne? - La gloire d'un regne? Quelle impertinente prkention! En quoi done un bon poke peut-il etre utile a l'Etat, ninon a l'egal d'un joueur de quilles? En assemblant des rimes, en abattant des quilles, ils occupent tous deux a un delassement honnete des heures que d'autres emploient a mal faire.Si leur habilete distrait pour quelques instants les passants ou les lecteurs, cette bienveillance qu'on leur temoigne n'est-elle pas une suffisante recom- pense? Et vous voudriez que le prince les traitat comme un ambassadeur? - Pericles et l'empereur Auguste... - Laissez-moi cette antiquaille et les contes que les pedants nous font la-dessus (1).

Si Pericles honora Sophocle et Euripide, si l'empereur Auguste admit dans sa familiarite Horace et Virgile, c'etait par politique.

Aujour- d'hui, les interets des princes sont tout autres.

D'ailleurs, la poesie se meurt; on ne sait plus exprimer tine pensee sage dans la langue des dieux.

Dans le fatras de sonnets, de madrigaux, de psaumes dont nous sommes inondes, pourriez-vous titer vingt strophes dont la posterite se souviendra? - Vous oubiez les votres, Monsieur, que le feu roi Henri tenait en si haute estime.

- Henri le Grand await compris mon merite.

Mais aujourd'hui, combien de sots, qui n'ont aucune relation avec moi, s'imaginent faire des progres dans un art dont j'ai la clef (2)? Et ils s'etonnent que le roi ne fasse aucun cas de leurs oeuvres!...

J'ai appris a une cour italienne et gasconne les regles du francais; voila mon meilleur ouvrage et ce qui m'a valu d'etre honors comme ceux qui servent dans les armees. La vanite de Malherbe rayonnait; elle debordait, declaigneuse, sur les hommes et leurs oeuvres.

Mal avise qui eat contredit le dictateur.

Racan, Colomby, Touvent et Bordier ecoutaient l'orgueileux poke, se jouant lui-meme la symphonie d'un hymne dithyrambique. a La guerre et la diplomatie, continua-t-il, voila les affaires des princes; les generaux et les ambassadeurs sont done leurs instruments.

A nous autres, pokes, de tresser des couronnes; trop heureux si les vainqueurs daignent les accepter.

Laissez done a MM.

de Bassompierre et de Schoenberg, de Sourdis et Metezeau la gloire de reduire La Rochelle; c'est justice que les places et les pensions soient la recompense de leur valeur.

Portons moins haut notre ambition.

Pendant que les gens de guerre bataillent et s'exposent aux (1) « Malherbe eut cet orgueil de nature qui se revele a tout propos et ne souffre aucune supdriorite d'aucune sorte.

Aussi y jojgnait -il un dedain souverain pour les autres; per- sonne ne comptait devant lui.

Il ne fespectait rien de tout ce qu'on respecte; ni les Ile- breas, dit Mlle de Gournay, ni les Latins, ni toute l'Antiquaille, les envoyant tons paistre comme bestes.

Il n'aimait pas du tout les Grecs; Virgile, pas plus que Pindare, n'avait Phonneur de lui plaire.

» F.

Brunot, Doctrine de Malherbe, p.

75. (2) Il voulait que sa parole eut force de chose jugee.

It fallait la connaitre pour faire son chemin dans le monde.

Ce qui ne lui agreait pas, it le traitait d'imaginations bestiales; et ce rude demolisseur ne menageait personne « depuis le cadre jusqu'a l'hysope ».

H a dit, en vers et en prose, l'estime incroyable que lui inspiraient ses oeuvres.

« Je ne crois pas, ecrivait-il a Balzac, qu'il y ait de quoi m'accuser de presomption quand je dirai qu'il faudrait qu'un homme vint de l'autre monde pour ne pas savoir qui je suis.

» l'écrivain aux règles de l'art.

Dans la soumission des offiCiers à leur chef, entre plus de désir de plaire au prince que d'acquiescement raisonné à un plan estimé le meilleur.

Le dévouement des gens d'épée, nécessaire à l'unité d'action et au succès, est d'ailleurs .toujours honorablement récompensé, ce que ne peuvent guère espérer pour eux-mêmes les écrivains de notre temps.

Pourquoi donc nous demander le sacrifice d'idées personnelles qui peuvent être excellentes, alors que personne ne nous tiendra compte de cette abnégation? - Auriez-vous, s'écria Malherbe, la prétention de comparer les mérites d'nn rimeur à ceux d'un général? - Comme leurs services, leurs mérites sont différents; mais le soin de récompenser les uns ne devrait pas faire oublier la justice qu'on doit aux autres.

Cependant, vous conviendrez avec moi, Monsieur, que toutes les faveurs des princes sont pour les hommes de guerre.

Vont-elles s'égarer snr un écrivain, c'est un événement dont,· tout le premier, il demeure étonné.

Et pourtant, les lettres ne sont-elles pas la gloire d'un règne? -La gloire d'un règne? Quelle impertinente prétention! En quoi donc un bon poète peut-il être utile à l'Etat, sinon à l'égal d'un joueur de quilles? En assemblant des rimes, en abattant des .

quilles, ils occupent tous deux à un délassement honnête des heures que d'autres emploient à mal faire.

Si leur habileté distrait pour quelques instants les passants ou les lecteurs, cette bienveillance qu'on leur témoigne n'est-elle pas une suffisante récom­ pense? Et vous voudriez que le prince les traitât comme un ambassadeur? - Périclès et l'empereur Auguste ...

- Laissez-moi cette antiquaille et les contes que les pédants nous font là-dessus (1).

Si Périclès honora Sophocle et Euripide, si l'empereur Auguste admit dans sa familiarité Horace et Virgile, c'était par politique.

Aujour­ d'hui, les intérêts des princes sont tout autres.

D'ailleurs, la poésie se meurt; on rie sait plus exprimer une pensée sage dans la langue des dieux.

Dans le fatras de sonnets, de madrigaux, de psaumes dont nous sommes inondés, pourriez-vous citer vingt strophes dont la postérité se souviendra? -Vous oubiez les vôtres, Monsieur, que le feu roi Henri tenait en si haute estime.

-Henri le Grand avait compris mon mérite.

Mais aujourd'hui, combien de sots, qui n'ont aucune relation avec moi, s'imaginent faire des progrès dans un art dont j'ai la clef (2)? Et ils s'étonnent que le roi ne fasse aucun cas de leurs œuvres!...

J'ai appris à une cour italienne et gasconne les règles du français; voilà mon meilleur ouvrage et ce qui m'a valu d'être honoré comme ceux qui servent dans les armées.

La vanité de Malherbe rayonnait; elle débordait, dédaigneuse, sur les hommes et leurs œuvres.

Mal avisé qui eût contredit le dictateur.

Racan, Colomby, Touvent et Bordier écoutaient l'orgueileux poète, se jouant à lui-même la symphonie d'un hymne dithyrambique.

«La guerre et la diplomatie, continua-t-il, voilà les affaires des princes; les généraux et les ambassadeurs sont donc leurs instruments.

A nous autres, .

poètes, de tresser des couronnes; trop heureux si les vainqueurs daignent les accepter.

Laissez donc à MM.

de Bassompierre et de Schomberg, de Sourdis et Métézeau la gloire de réduire La Rochelle; c'est justice qU:e les places et les pensions soient la récompense de leur valeur.

Portons moins haut notre ambition.

Pendant que les gens de guerre bataillent et s'exposent ·aux (1) « Malherbe eut cet orgueil de nature qui se révèle à tout propos et ne souffre aucune supériorité d'aucune sorte.

Aussi y jq.ignai.t-il un dédain souverain pour les autres; per­ sonne ne comptait devant lui.

Il ne ~spectait rien de tout ce qu'on respecte; ni les Hé­ breux, dit Mlle de Gournay, ni les Latins, ni toute l'Antiquaille, les envoyant tous paistre comme bestes.

Il n'aimait pas du tout les Grecs; Virgile, pas plus que Pindare, n'avait l'honneur.

de lui plaire.

» F.

Brunot, Doctrine de Malherbe, p.

75;' · (2) Il voulait que sa parole eut force de chose jugée.

Il fallait la connaitre pour faire son c:hemin dans le monde.

Ce qui ne lui agréait pas, 11 le traitait d'imaginations bestiales; et œ rude démolisseur ne ménageait personne « depuis le cèdre jusqu'à l'hysope ».

11 a dit, en vers et en prose, l'estime incroyable CJ.Ue lui inspiraient ses œuvres.

« Je ne crois pas, écrivait-il à Balzac, qu'il Y· ait de quoi m accuser de ,présomption quand je dirai qu'il faudrait qu'un homme vint de l'autre monde pour.

ne pas savoir qui je suis.

». »

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