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Mme de Lafayette. La Princesse de Clèves. « Il parut alors une beauté à la cour ». Commentaire composé.

Publié le 17/01/2022

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Texte à commenter. « Il parut alors une beauté à la cour, qui attira les yeux de tout le monde, et l'on doit croire que c'était une beauté parfaite … et sa personne étaient pleins de grâce et de charmes. « Il parut alors une beauté à la cour, qui attira les yeux de tout le monde, et l'on doit croire que c'était une beauté parfaite, puisqu'elle donna de l'admiration dans un lieu où l'on était si accoutumé à voir de belles personnes. Elle était de la même maison que le vidame de Chartres, et une des plus grandes héritières de France. Son père était mort jeune, et l'avait laissée sous la conduite de madame de Chartres, sa femme, dont le bien, la vertu et le mérite étaient extraordinaires. Après avoir perdu son mari, elle avait passé plusieurs années sans revenir à la cour. Pendant cette absence, elle avait donné ses soins à l'éducation de sa fille ; mais elle ne travailla pas seulement à cultiver son esprit et sa beauté ; elle songea aussi à lui donner de la vertu et à la lui rendre aimable. La plupart des mères s'imaginent qu'il suffit de ne parler jamais de galanterie devant les jeunes personnes pour les en éloigner. Madame de Chartres avait une opinion opposée ; elle faisait souvent à sa fille des peintures de l'amour ; elle lui montrait ce qu'il a d'agréable pour la persuader plus aisément sur ce qu'elle lui en apprenait de dangereux ; elle lui contait le peu de sincérité des hommes, leurs tromperies et leur infidélité, les malheurs domestiques où plongent les engagements ; et elle lui faisait voir, d'un autre côté, quelle tranquillité suivait la vie d'une honnête femme, et combien la vertu donnait d'éclat et d'élévation à une personne qui avait de la beauté et de la naissance. Mais elle lui faisait voir aussi combien il était difficile de conserver cette vertu, que par une extrême défiance de soi-même, et par un grand soin de s'attacher à ce qui seul peut faire le bonheur d'une femme, qui est d'aimer son mari et d'en être aimée. Cette héritière était alors un des grands partis qu'il y eût en France ; et quoiqu'elle fût dans une extrême jeunesse, l'on avait déjà proposé plusieurs mariages. Madame de Chartres, qui était extrêmement glorieuse, ne trouvait presque rien digne de sa fille ; la voyant dans sa seizième année, elle voulut la mener à la cour. Lorsqu'elle arriva, le vidame alla au-devant d'elle ; il fut surpris de la grande beauté de mademoiselle de Chartres, et il en fut surpris avec raison. La blancheur de son teint et ses cheveux blonds lui donnaient un éclat que l'on n'a jamais vu qu'à elle ; tous ses traits étaient réguliers, et son visage et sa personne étaient pleins de grâce et de charmes.

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« réguliers ».

La notation de la blondeur aura son importance par la suite : au tournoi, M.

de Nemours choisit de porterle jaune, la couleur aimée de Mme de Clèves qui « était fâchée d'être blonde parce qu'elle n'en pouvait mettre ».Quant aux deux autres détails, ils servent à accumuler des abstractions, favorisant par la même les interprétationsles plus subjectives.

Le narrateur suggère plutôt que décrit d'une manière réaliste ce qui émane de la jeune fille : «l'éclat », « la grâce », « les charmes ».

Ces concepts indéfinissables et vagues suggèrent des connotationsmélioratives qui enchantent le lecteur.

L'art de la litote se conjugue aux hyperboles et aux superlatifs les plusflatteurs : « une beauté parfaite », « un éclat que l'on n'a jamais vu qu'à elle ».

Pour les capacités intellectuelles etmorales, Mme de La Fayette saisit la formation intellectuelle de son héroïne dans une formule qui rassemble lesfacultés mentales et les dispositions physiques : sa mère « travailla [...] à cultiver son esprit et sa beauté ».

Mais lagrande préoccupation de Mme de Chartres, « dont [...] la vertu et le mérite étaient extraordinaires », n'est pasd'ordre intellectuel mais moral.

Elle se propose un objectif paradoxal : non seulement « lui donner de la vertu », mais« la lui rendre aimable ».

Mme de La Fayette expose dans ce passage les idées qui lui tiennent à cœur. Une mère initiatrice.Les conseils de sa mère. Mme de Chartres, éloignée de la cour à cause de son veuvage, « avait donné ses soins à l'éducation de sa fille ».

Lemouvement suivant est longuement développé et prend la forme de conversations entre la mère et la fille souventrépétées comme le soulignent les imparfaits : « elle lui montrait», « elle lui contait », « elle lui faisait voir ».

Mme deChartres fonde non seulement son action sur la parole, mais sait aussi qu'il n'y a pas d'éducation sans imprégnation.Une méthode originale. Mme de Chartres s'éloigne de l'usage courant : « La plupart des mères s'imaginent qu'il suffit de ne parler jamais degalanterie devant les jeunes personnes pour les en éloigner ».

Elle n'accepte pas le silence qui entoure l'éducationdes filles : elle « avait une opinion opposée ; elle faisait souvent à sa fille des peintures de l'amour ».

On peut enconclure que les rapports entre la mère et la fille sont fondés sur la confiance réciproque.

Mme de Chartres veut «persuader » et non contraindre : elle s'adresse à l'intelligence de sa fille, à sa raison et en tire la conviction que saconfiance ne sera pas déçue. Amour et vertu. Ne pas parler d'amour quand la vertu est le but avoué de l'éducation, c'est prendre le risque de voir tous ses effortsréduits à néant.

Aussi Mme de Chartres consacre-t-elle l'essentiel de ses discours à montrer le désordre qui suit lapassion, alors qu'elle en peint les charmes bien plus brièvement.

Entre vertu et amour, le contraste est saisissant.Vivre, c'est assumer l'antinomie entre aimer la vertu et refuser la passion.

Les deux figures de l'amour apparaissent :« elle lui montrait ce qu'il a d'agréable pour la persuader plus aisément sur ce qu'elle lui en apprenait de dangereux ».

C'est ce second aspectque Mme de Chartres développe dans deux tableaux fortement contrastés : d'un côté « les malheurs domestiques »pour qui fait bon accueil aux « engagements », de l'autre, pour qui a choisi la vertu, la « tranquillité », « l'éclat » et« l'élévation ».

Les deux derniers termes sont propres à séduire une âme d'élite.

Si l'amour tire son prestige desrisques qui l'accompagnent, une âme passionnée découvrira rapidement que la vertu est aussi un maître tyrannique :« elle lui faisait voir aussi combien il était difficile de conserver cette vertu, que par une extrême défiance de soi-même ».L'amour conjugal. Mme de Chartres met en garde contre la cour, « très agréable mais aussi très dangereuse pour une jeune personne».

Elle évoque un monde peu vertueux : « elle lui contait le peu de sincérité des hommes, leurs tromperies et leurinfidélité ».

Les termes sont nets et la peinture sans indulgence : c'est un monde cruel où règne l'apparence, lafemme ne peut que souffrir.

Le seul refuge est donc l'amour conjugal, qui ne coïncide pas avec la passion : « ce quiseul peut faire le bonheur d'une femme [...] est d'aimer son mari et d'en être aimée ».

L'amour se trouve alorsagrémenté de la vertu, ce qui règle l'antinomie.

Dans l'amour conjugal, avec la réciprocité, la tranquillité, « lebonheur » est même possible.

Mais on peut se demander si l'amour est encore « agréable » et si ce qui unit à unépoux est vraiment de l'amour.

On tombe sur un nouveau paradoxe fréquemment débattu dans les salons : « Il n'estrien de si commun que de se marier et rien qui le soit si peu que d'être heureux dans le mariage.

» (Le MercureGalant) Une entrée dans la vie mondaine.Une éducation à rude épreuve. L'entrée dans le microcosme de la cour soulève une question : comment Melle de Chartres va-t-elle se comporter ?En effet, elle fait partie de cette élite.

C'est un être exceptionnel qui concentre toutes les perfections : perfectionde la beauté, perfection de l'éducation, perfection de la position sociale.

Elle est « une des plus grandes héritièresde France ».

Aussi sa mère « ne trouvait presque rien digne de sa fille ».

Il était donc assuré que plusieurs hautspersonnages en tombent amoureux.

Le prince de Clèves d'abord, qui, par le jeu des cabales, réussira à satisfaire lesprétentions de Mme de Chartres.

Le chevalier de Guise et le maréchal de Saint-André seront des amoureux discretsparce que sans espoir.

Le duc de Nemours enfin était le seul qui pouvait l'emporter puisqu'il était « ce qu'il y avaitde mieux fait et de plus agréable à la cour ».

Aussi « se voyant souvent et se voyant l'un et l'autre ce qu'il y avaitde plus parfait à la cour, il était difficile qu'ils ne se plussent infiniment ».. »

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