Morale et sagesse dans les Fables de La Fontaine

« E X P 0 S É S F C H E S (A.

Versaille).

Dans les livres VII à XII, la patience est toujours prônée (X, 7); la prudence est toujours recommandée(« Le moins qu'on peut laisser de prise aux dents d'autrui,/ C'est le mieux» (X, 8); les belles paroles sont toujours aussi trom­ peuses ( « l'on ne doit jamais avoir de confiance / En ceux qui sont mangeurs de gens », « Les poissons et le cormoran »,X, 3, v.

41-42).

On retrouve la dénonciation permanente de la loi du plus fort (X, 6 ; XII, 2), de la tyrannie (VII, 1 ), de l'égoïsme (VII, 3), de la «fureur» d'accumuler des biens matériels (VIII, 3 ; VIII, 27).

Morale et anthropologie L'homme est ainsi représenté comme un composé de passions qui se donne pour un être doué de raison.

Mais précisément les animaux eux-mêmes dénoncent à travers l'allégorie cette duplicité(« Les compagnons d'Ulysse» (XII, 1, v.

93- 94 ; voir aussi X, 1, v.

25-26).

La morale des fables souligne par ailleurs que l'homme n'est pas libre : d'une part il est gouverné par la démesure (IX, 11, v.

23-24); d'autre part il doit subir la place qui lui revient dans le monde (IX, 12 ; X, 9) ou les coups de la fortune (VII, 11 ; VIII, 16, VIII, 23 ...

).

Il est finalement à la merci de tous les déterminismes.

D'où la vision pessimiste et augustinienne qui imprègne les Fables .

.,,.

Ill -DE LA MORALE À LA SAGESSE La recherche de la mesure « Un sage assez semblable au vieillard de Virgile» (XII, 20, v.

4) corrige dans son jardin les excès de la nature et montre par là la voie de la sagesse car il ne réprime pas aveuglément : en ôtant le superflu, «Le reste en profite d'autant».

Savoir ailé que la lourdeur du philosophe scythe ne comprendra pas.

La morale souligne alors qu'il ne s'agit pas de« retrancher de l'âme/ Désirs et passions» mais elle fait entendre qu'il s'agit de maîtriser leur force, d'apprendre à les domes­ tiquer car ils sont« le principal ressort» de notre cœur (v.

35).

La recherche de la transparence « Apprendre à se connaître est le premier des soins » (XII, 29, v.

39) ; pour cela, dit le solitaire, il faut se retirer dans des « lieux pleins de tranquillité ».

Lui-même se trouve « près d'une source pure », symbole du miroir dans lequel on peut se contempler à l'abri du regard d'autrui, loin de toute corruption, dans une innocence native retrouvée.

L'amitié comme idéal social Mais l'idéal de sagesse refuse aussi bien l'éradication des désirs que la retraite misanthropique qui vise à fuir ses semblables.

Le cercle des ami(e)s se présente comme le lieu où les passions sublimées peuvent s'exprimer à loisir.

L'amitié neutralise l'amour-propre en même temps qu'autrui nous devient transparent(« Il cherche vos besoins au fond de votre cœur », « Les deux amis », VIII, 11, v.

27).

Ce sentiment semble venir nuancer le pessimisme des Fables.

Conclusion : Les morales de La Fontaine puisent dans le fonds tradition­ nel, mais elles sont loin d'être impersonnelles.

Dans les livres VII à XII, elles sont souvent marquées par la personnalité de l'auteur et traduisent sa vision de la sagesse.

LES FABLES DE LA FONTAINE =:=TI]. »