NELLIGAN Émile : sa vie et son oeuvre

NELLIGAN Émile (1879-1941). Poète canadien d'expression française, né et mort à Montréal. Il fut le premier créateur littéraire important de sa « nation », malgré le paradoxe d’une inspiration formelle toute française. Rebelle à toute discipline, le jeune Nelligan se heurte dès son adolescence à son père, qui le contraint, en 1898, à s’embarquer comme matelot pour Liverpool, puis, à son retour, à accepter un emploi de comptable. Cependant il avait dé jà fait ses débuts en poésie : dès juin 1896, le journal le Samedi avait publié quelques-uns de ses textes. L’année suivante, grâce au parrainage de son ami Arthur de Bussière, il est admis au sein de ce qu’on a appelé l’« école de Montréal », dont il sera le plus jeune membre. Atteint d’un mal incurable, Nelligan sombra dans la mélancolie, puis dans la psychose dépressive. On ignore dans quelles conditions réelles il fut interné à la retraite de Saint-Benoît (1899), puis, vingt-six ans plus tard, à Saint-Jean-de-Dieu, où il demeura muré, affreusement silencieux, jusqu’à sa mort.

 

Sa carrière poétique fut étrangement précoce et brève, et son œuvre, réunie et publiée par Louis Dantin en 1903, quatre ans après sa mort psychique, reste marquée par un réseau d’influences littéraires facilement — trop facilement — décelables. Tournant le dos à une veine nationale caractéristique de la génération précédente au Québec, Nelligan adopte les thèmes chers aux poètes européens et les formes littéraires françaises. Nostalgie légère des romantiques, exotisme, rêve et désespoir bau-delairiens ou symbolistes alimentent son angoisse vécue.