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O'NEDDY Philothée

Publié le 27/11/2018

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O'NEDDY Philothée, pseudonyme anagrammatique de Théophile Auguste Marie Dondey (1811-1875). Don-dey connut une vie étriquée, toute différente de celle que rêva O’Ncddy, une vie bien étriquée pour ce bousingot qui fit les quatre cents coups avec l'avant-garde littéraire du romantisme. Oublié, relégué parmi les « petits romantiques », il témoigne d’une veine marginale par rapport à l'inspiration littéraire des années 1830; mais là encore, il demeure aujourd'hui à l’ombre des fureurs verbales d’un Pétrus Borel...

 

Sa mère, très pieuse, lui avait donné le goût de l’absolu. Mais il devait repousser plus tard cet héritage, trop traditionaliste :

 

Oh! pourquoi le culte de ma mère

 

N'est-il que jonglerie, imposture, chimère?

 

C’est l’époque des refus — politiques, religieux, littéraires — et des enthousiasmes : Dondey participe aux « émeutes » romantiques, applaudit à la révolution de Juillet, s’adonne à la poésie. Enthousiasmes de courte durée, brisés par la mort de son père en 1832 : obligé de soutenir sa famille, le jeune bousingot rejoint, au ministère des Finances, le bureau qu’il avait abandonné; mais les tracasseries administratives l’ennuient, son caractère s’aigrit. D'autant que son recueil poétique, Feu et Flamme (1833), qu’il publie sous le pseudonyme de Philothée O'Neddy, passe inaperçu. Après cet échec, O’Neddy ne fait plus paraître que quelques pages dans les journaux (feuilletons, sonnets de 1839 à 1841), une pièce de 200 vers, Une fièvre de l'époque (1841) et une quinzaine de comptes rendus dramatiques. Il soutient les Burgraves (1843) contre le «sot public», montrant sa

« fidélité à l'idole de ses vingt ans et aux principes romantiques.

Amours, santé, succès ...

, tout le fuit.

Il range sa plume de 1846 à 1856, se cloîtrant dans sa vie de célibataire.

A l'orée des années 1860, il retrouve l'inspiration, com­ pose de nouveaux vers, où il tente de ressusciter les souvenirs envolés : L'esprit nouveau revint sur moi, brûlant et fort, Et sans rien profaner de mon deuil extatique, Il sut galvaniser mon cœur paralytique.

En 1861, sa mère meurt.

Demeuré seul avec sa sœur, il attend la retraite puis la mort.

Ses Poésies posthumes paraissent en 1877, mais elles ne le sortent pas de l'oubli auquel sa vie l'avait confiné.

Au reçu de Feu et Flamme, Chateaubriand répond à O'Neddy : «Je voudrais, monsieur, n'avoir lu que votre lettre >>.

Formule abrupte qui n'est que la première des critiques violentes que le livre essuiera.

Asselineau peut bien parler du recueil dans sa Bibliographie romantique (et donc le consacrer), il n'en épargne pas pour autant ses sarcasmes, trouvant les personnages ridicules et accusant leur auteur de « singer les allures des chefs de son groupe >>.

Théophile Gautier, ami de Dondey, s'en prend, pour sa part, à la versification : « S'il ne s'était retiré si tôt, il se serait fait assurément une place dans le bataillon sacré >>.

Mais c'est pour ajouter: «Il façonne bien le vers sur l'enclume; il lui donne, au milieu d'une pluie d'étincelles, la forme qu'il désire, avec son opiniâtre et pesant marteau >>.

Il est vrai que, dans ses alexandrins, Dondey confond souvent vigueur et pesanteur, origina­ lité et bizarrerie : ...

Après quelque silence, un visage mauresque Leva tragiquement sa pâleur pittoresque, Et, faisant osciller son regard de maudit Sur le conventicule, avec douleur il dit...

Échec cuisant donc, mais échec inévitable.

Dès la Préface, l'emphase d'O'Neddy est provocatrice.

Ne s'adresse-t-il pas «aux ouvriers musculeux et forts >> de « la nouvelle Babel artistique et morale >>, criant son mépris des « anciennistes >> et de l'Académie, des reli­ gions, et proclamant sa croyance en la poésie rénova­ trice? Profession de foi romantique d'un jeune homme qui s'imagine poète parce qu'il aime Hugo.

Les mêmes thèmes hantent ses autres œuvres : l'amour, la désespérance, et, surtout, l'impuissance du créateur: Je suis comme ce glaive, et je dis au Destin : Pourquoi seul dans mon type ai-je un sort clandestin? Ignores-tu quelle est la trempe de mon âme? ...

(« les Deux Lames »).

De cette débauche de déclarations naïves émergent trois courts romans -l'Abbé de Saint-Or (octobre 1839); l'Histoire d'un anneau enchanté, roman de che­ valerie (mars 1842); le Lazare de l'amour (février 1843) - , où se développe une conception mystique de la pas­ sion.

Partout transparaissent des souvenirs de légendes celtes, de romans moyenâgeux ou picaresques, rien de profondément personnel.

L'écrivain semble d'ailleurs mal à l'aise dans le genre narratif, maniant les temps de façon incertaine : commencé au passé, le récit se poursuit au présent dans les moments forts, comme si Dondey ne savait suggérer autrement l'intensité.

Il convient encore de citer, inédits, un drame, Miranda, plein, lui aussi, de mystique amoureuse mais fort incohérent, et les Visions d'un mort vivant (1861- 1862), qui symbolisent atrocement une vie d'infortune : quand le héros veut s'emparer des merveilles qui devraient le combler, une force invisible le couche dans un cercueil recouvert d'un« long drap noir>>, où il atten­ dra la mort, assiégé par toutes les tentations.

Ce thème sera repris dans le Cul-de-jatte (1863), dont l'épigraphe, empruntée au Misanthrope, annonce : C'est moi-même, messieurs, sans nulle vanité.

Jamais comme dans cet ouvrage Dondey n'aura autant essayé d'être sincère et de lutter contre sa grandilo­ quence.

Enfin un chef-d'œuvre? Tout au plus la plainte ultime d'une âme romanesque, éprise de sublime, de grandeur hugolienne et mise au supplice par la médio­ crité d'un destin.

BIBLIOGRAPHIE Les Œuvres complètes de Philothée O'Neddy ont été repu­ bliées en 1968, à Genève, par Slatkine Reprints.

On trouvera, en tête du tome II, une notice d'Hernest Havet, sur l'écrivain, et l'on pourra consulter, pour complément, l'arti­ cle de Théophile Gautier (dans le Bien public du 14 avril 1872), qui devait constituer un chapitre d'une Histoire du romantisme.

M.

GIOV ACCHINI. »

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