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oral louise labé je vis je meurs

Publié le 20/04/2024

Extrait du document

« V1 Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ; J’ai chaud extrême en endurant froidure : La vie m’est et trop molle et trop dure. J’ai grands ennuis entremêlés de joie. V5 Tout à un coup je ris et je larmoie, *tout à un coup = en même temps Et en plaisir maint grief tourment j’endure ; * grief= grave, pénible Mon bien s’en va, et à jamais il dure ; Tout en un coup je sèche et je verdoie. Ainsi Amour inconstamment me mène ; V10 Et, quand je pense avoir plus de douleur, Sans y penser je me trouve hors de peine. Puis, quand je crois ma joie être certaine, Et être au haut de mon désiré heur*, *heur = bonheur Il me remet en mon premier malheur. Louise Labé, Elégies et Sonnets, 1555 Introduction Au XVIè siècle, l’Ecole Lyonnaise promeut la poésie féminine : elle accorde aux femmes une large place dans les salons littéraires, favorisant ainsi l’éclosion d’une nouvelle lyrique amoureuse.

Parmi ces poétesses se trouve Louise Labé, femme d’exception, qui publie le recueil Elégies et Sonnets, en 1555.

Louise Labé (surnommée « la belle cordière » en raison de la profession de son père et de son mari, fabricants de cordes, est née à Lyon, vers 1524.

Elle y reçut une éducation très avancée pour une femme de son temps, pratiquant les langues étrangères, la musique et l’équitation. Malgré une réputation parfois peu flatteuse de courtisane, elle devint célèbre dans le cercle des poètes lyonnais de sa génération et son œuvre lui valut plus tard l’admiration des membres de la Pléiade.

Reconnut comme une grande poétesse de la Renaissance, elle mourut en 1566.

Le sonnet "Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie" est publié en 1555, et s’inscrit dans la tradition Pétrarque de la poésie amoureuse : c’est un sonnet en décasyllabe à rimes embrassées. Lyrique, ce sonnet a pour sujet l’amour, mais il prend toute son originalité par la variété des émotions que l’auteur évoque et opère à l’intérieur d‘une forme fixe. Comment Louise Labé rendt-elle dans son poème la puissance du sentiment amoureux ? Au cours de cet oral, nous allons montrer que le thème de l’amour contrarié est omniprésent, nous nous intéresserons ensuite à la façon dont l’autrice traduit le désordre amoureux pour, enfin, rendre compte de la puissance de l’amour à travers le poème. I.

Confession et introspection lyrique 1.

Le « je » au centre du poème 2.

Un aveu progressif 3.

L'amour et sa toute puissance II.

Les marques du désordre amoureux 1.

Des sensations au sentiment 2.

La fusion des contraires III.

Confrontation d’une vie de femme au phénomène amoureux : le pouvoir de l'amour 1.

L'amour n'est pas maîtrisable 2.

La dépossession du sujet I.

Confession et introspection lyrique 1) Le « je » au centre du poème Louise Labé, dans une longue plainte évoque les tourments que lui cause l’amour, c’est pourquoi, assumant la position de sujet de l’énonciation, elle se met en scène à la 1ère personne.

Omniprésence de la 1ère personne : 13 occurrences du pronom « je ». Louise Labé exprime ses sensations et ses sentiments à la 1ère personne du singulier : présence du pronom je dès le 1 er mot du poème, la 1ère personne est omniprésente dans tout le sonnet : 3 occurrences dans le v 1, mais on la rencontre aussi en position de complément COD au v 9 « me mène » / on peut également relever les déterminants possessifs : « ma joie » v12 ou « mon bien v 7. 2)Un mal d’abord non identifié Mais c’est progressivement que la poétesse va nous faire part de ce qui la hante ; les deux premiers quatrains exposent les symptômes d’un mal inquiétant qui met en péril sa santé "je vis, je meurs". Les rimes embrassées traduisent sur le plan sonore cette opposition : noie/joie v 1 et 4.

La poétesse décrit un état contradictoire avec des sensations et sentiments simultanés -on peut alors s’interroger sur la nature du mal.

La réponse nous est donnée bien plus tard au 1 er tercet (vers 9) : c’est l’amour. 3) Le thème récurrent de l’amour Dans le 1er tercet, le mot à l’origine du trouble est enfin lâché c’est l’amour, l’un des motifs lyriques majeurs de la poésie, v9 : Le sentiment est personnifié « Ainsi Amour inconstamment me mène » (cette personnification proche de l’allégorie est un topos, un lieu commun).

L’Amour est mis en valeur par la majuscule, personnifié et souligné encore par le hiatus. II.

Les marques du désordre amoureux 1) Des sensations au sentiment L’amour est également présent dans les sonorités du poème : le sonnet est construit à partir de quatre rimes seulement "oi", "ure", "ène" et "eur".

L’amour fait l’unité du poème, pourtant basé sur des oppositions.

C’est un sentiment puissant qui fait ressentir à l’âme des états extrêmes et contradictoires, soit simultanément soit successivement comme le montre les répétitions sonores. Le champ lexical des sensations et des émotions est omniprésent : plaisir, malheur, je ris, joie, douleur… Mais aussi des sensations au sentiment : Le toucher (molle / dure) Les éléments (terre, feu, eau) L’amour engage l’être tout entier mais dans ce sonnet, les sensations sont d’abord physiques : corps soumis aux éléments s’ajoutant aux perceptions des sens.

Tout se passe comme si la conscience des sentiments était en retard sur les perceptions, ce qui souligne l’aspect involontaire de l’amour qui suscite le désordre. Les champs lexicaux il apparait que ces effets s’organisent autour d’une antinomie des mots plaisir souffrance ( plaisir : je vis/ joie/ je ris/ plaisir/ désiré heur et souffrance : je meurs, je larmoie, tourment, j’endure, douleur, grands ennuis, premier malheur).

On peut noter qu’elle opte pour un vocabulaire concret, surtout dans les quatrains, pas d’idéalisation, ni d’intellectualisation de l’amour mais manifestations physiques et morales.

Ce lexique comporte parfois des connotations érotiques : brûle/ chaud/ molle/ dure/ sèche/ verdoie…Jeu de l’auteur ? Les sonorités dans le 2ème quatrain : “r” : ris, larmoie, grief, endure...

Des assonances en “u” : j’endure, dure, ce qui donne une certaine âpreté On a aussi des sons fricatifs “ f et v” ce qui exprime un essoufflement, une fièvre.

Le rythme est irrégulier et heurté par l’effet de la polysyndète (= multiplication des conjonctions de coordination) ce qui met en valeur chaque mot et souligne le désordre, et les monosyllabes qui décrivent la nervosité. V1.

On reconnait le champ lexical de la maladie : symptômes moraux (tourments) sont associés aux symptômes physiques (fièvre) On ne connaît pas la cause de son histoire : c’est une plainte, une révolte. 2) La fusion des contraires Le poème est entièrement constitué d’antithèses.

Tout au long du sonnet, le sentiment amoureux s’exprime dans une durabilité qui oppose des antithèses quant aux émotions libres, la douleur, puis la joie).

Le texte est fondé sur des contrastes : ardeur / froidure, mort / vie, molle / dure, ennui / joie, rit / larmoie. Le premier quatrain décrit des états contrastés sans explications : cela montre la rapidité des symptômes.

Dans le deuxième quatrain les symptômes sont expliqués et approfondis : ” j’endure” exprime la passion.

Les antithèses sont mises en valeurs par le système des coupes.

En effet la coupe intervient entre un élément positif et un élément négatif pour marquer la coupure, ce rythme et la répétition de la même idée pourraient conduire à la monotonie, mais le poète inverse les termes positifs/négatifs et renouvelle les images (métaphores) et les formes syntaxiques : juxtaposition, coordination, utilisation du participe présent...

Enfin, le poète utilise la rime pour marquer davantage encore ces antithèses.

Les contradictions du sentiment amoureux sont évoqués dans la confusion des sensations physiques et psychologique présentée dans les antithèses (à justifier avec exemples).

Le langage utilisé est métaphorique => métaphores stéréotypées (pour ne pas mentionner les comparés).

On observe que le langage métaphorique est réservé aux quatrains, alors que les tercets sont facilement compréhensibles L’amour est donc ressenti comme un état contradictoire.

Il fait se succéder le bonheur et le malheur (cf.

tercets), mais plus paradoxalement, il fait coexister le plus grand bonheur avec le plus grand malheur.

Paradoxalement encore, l’idée de Louise Labé est qu’il existe un bonheur aussi douloureux par son excès que le malheur (et peut-être un malheur qui n’est pas sans douceur).

Les antithèses ne séparent pas seulement les états contraires mais les rapprochent également.

Ainsi « je meurs » peut signifier du plaisir et la brûlure n’est pas que douleur mais aussi extase.

(« trop molle » = trop douce).

Les antithèses sont renforcées par des hyperboles et par des superlatifs : « extrêmes », « grands », « trop », « maint »...

Ainsi l’amour est vécu comme un état extrême, il ne connaît pas la tiédeur : soit glacé, soit brûlant , ce qui illustre l’absence d’équilibre.

Le poème est rédigé au présent, le présent à valeur d’énonciation rappelle le travail du.... »

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