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Publié le 06/09/2018

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accentuées par la présence d’une polysyndète. Le regard est encore le lieu de la souffrance de Phèdre puisque ses « yeux le retrouvaient dans les traits de son père », v.290 : la vue, véhicule de l’amour est aussi le lieu de la souffrance. Une fois Hippolyte éloigné, c’est encore la vue qui réveillera la douleur de Phèdre : « J’ai revu l’ennemi que j’avais éloigné. / Ma blessure trop vive aussitôt a saigné », v.303-304 : la vue de l’être aimé éveille la blessure morale. Le corps est donc un miroir de l’âme.
Dans le même temps, si les yeux sont le véhicule del’histoire d’amour, la bouche se trouve singulièrement empêchée. Il y a un réel divorce entre le regard qui crée l’amour et le renouvelle et la parole qui est acculée au mutisme. Quand elle a vu Hippolyte, Phèdre avoue « je ne pouvais parler » v.276 et c’est précisément cette impossibilité de parler qui est mise en valeur dans cette scène d’aveu : Phèdre se met à parler, mais pour son malheur car ce qu’elle dit ne peut être entendu. Sa parole est impuissante à combattre son amour et cet aveu n’est pas une libération. C’est d’ailleurs par la parole qu’elle essaie de s’en délivrer : sa bouche « implorait le nom de la déesse » v.285, pour faire mourir cette passion, mais ces paroles ne font que révéler que « j’adorais Hippolyte » v.286. Sa parole devra d’ailleurs se faire « cri » (de manière ambiguë : ce sont des cris exprimant l’amour qui la ronge mais qui sont interprétés comme des cris de haine) et mensonge pour que ses tourments s’apaisent un temps, lorsqu’elle parviendra à chasser Hippolyte. La parole est donc soit empêchée de dire la vérité des sentiments, soit obligée de les déguiser. Cette scène de la parole enfin en liberté dit plus que jamais la difficulté à parler.
Cette scène constitue donc une scène d’aveu, aveu d’une relation amoureuse dont les étapes topiques, de même que ses manifestations physiques, révèlent le dysfonctionnement. En effet, cet amour est d’emblée marqué par la souillure et la nature des relations de Phèdre et Hippolyte en font un amour interdit.

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« soumises à un traitement particulier, dû au fait que cet amour n’est pas réciproque. Ainsi, l’affermissement du sentiment amoureux se fait dans une tentative de la part de Phèdre de se défaire de cet amour, grâce à ses invocations répétées à Vénus.

Alors que l’amoureux éconduit implore généralement les dieux pour obtenir l’affection de la personne qu’il aime, ici Phèdre les honore au contraire pour cesser d’aimer : « Par des vœux assidus, je crus les détourner », v.279. De même, la séparation, motif là encore traditionnel des récits amoureux n’est-elle pas le fait de la fatalité (généralement, le sort sépare cruellement le couple d’amoureux) mais bien de Phèdre elle-même qui cherche à éloigner celui qu’elle aime en feignant de le haïr : « Je pressai son exil », v.295.

Ces deux dernières étapes prouvent que Phèdre essaie de combattre son amour, en vain.

Cette séparation apporte un certain réconfort à Phèdre : « mes jours moins agités coulaient dans l’innocence » v.298, apaisement mimé par une allitération des consonnes « m » et « l » qui donnent une impression de douceur et de légèreté. A l’inverse, les retrouvailles, au lieu de donner lieu à des amours épanouies et à des débordements de joie, ne sont qu’une étape de plus qui approfondit la douleur de la jeune femme : « ma blessure trop vive aussitôt a saigné » v.304. Toutes ces étapes classiques du cheminement amoureux sont donc minées par le caractère particulier de cet amour : les étapes sont classiques mais leur contenu est profondément déterminé à la fois par l’absence de réciprocité de ce sentiment (mais c’est un schéma là encore classique), et surtout par le fait que Phèdre, tout en succombant à son amour, tente à tout prix de s’en défaire, ce qui révèle d’une certaine manière son innocence. Phèdre, ici, ne se contente pas de retracer les étapes chronologiques de sa passion, mais se livre même à une physiologie de cet amour et à une description presque médicale. B - Les manifestations de l’amour Toutes les évocations de l’amour, dans le texte, sont liées à la manifestation physique de ce sentiment.

Cet élément appartient à une longue tradition de description du sentiment de l’âme par ses manifestations visibles. Mais cela correspond, en l’occurrence peut -être aussi au fait que les manifestations physiques renvoient à une forme de sensualité, proscrite dans le théâtre classique, mais ici suggérée, de manière à insister davantage encore sur la dimension criminelle, parce qu’essentiellement physique, de cet amour.

Le désir physique est considéré par la morale classique comme condamnable parce que répondant à de bas instincts.

Ainsi, les premières réactions de Phèdre, quand elle voit Hippolyte, sont-elles physiques : « je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue », v.273 : le visage de Phèdre offre un portrait de son amour, passant de la rougeur à la pâleur, de l’émotion de l’amour qui naît à la honte de le découvrir si monstrueux.

Les deux émotions de Phèdre manifestées par son visage sont entourées, dans le vers, par la mention de la « vue » d’Hippolyte, en un chiasme qui enferme Phèdre dans cette contemplation : l’amour naît du regard et se réfléchit dans le visage de celle qui aime.

Le corps tout entier de l’amoureuse continue de traduire ce sentiment nouveau : « Je sentis tout mon corps et transir et brûler », v.276 : la chaleur et le froid emplissent dans le même moment la jeune femme, tout en sentiments contradictoires, à la fois transie de honte, et brûlant d’un désir qui renvoie cette fois clairement à une sensualité diffuse, deux sensations accentuées par la présence d’une polysyndète.

Le regard est encore le lieu de la souffrance de Phèdre puisque ses « yeux le retrouvaient dans les traits de son père », v.290 : la vue, véhicule de l’amour est aussi le lieu de la souffrance.

Une fois Hippolyte éloigné, c’est encore la vue qui réveillera la douleur de Phèdre : « J’ai revu l’ennemi que j’avais éloigné.

/ Ma blessure trop vive aussitôt a saigné », v.303-304 : la vue de l’être aimé éveille la blessure morale.

Le corps est donc un miroir de l’âme.. »

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