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PASCAL

Publié le 02/09/2013

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pascal

 

1623 -1662

ON n'avait certes pas attendu le xvne siècle, et la France, pour s'apercevoir que l'homme pense et que c'est la pensée qui fait son mouvement. Mais ce n'est que là, à ce moment-là, que le terme de pensée a pris son juste sens, et nous le devons à Pascal. « L'homme, il ne faut pas que l'univers entier s'arme pour l'écraser : une vapeur, une goutte d'eau suffit pour le tuer. Mais, quand l'univers l'écraserait, l'homme serait encore plus noble que ce qui le tue, parce qu'il sait qu'il meurt, et l'avantage que l'univers a sur lui, l'univers n'en sait rien. «

Auparavant, on avait surtout parlé de raison. On en parle encore, du reste, et ce n'est pas fini, mais avec moins de hauteur qu'autrefois pourtant, quels que soient les airs que l'on se donne. C'est que la raison, finalement, ce serait trop beau. Autant se figurer en nous des prin¬cipes écrits, la vérité pour tous, le bien et le mal, notre vocation, tout ce qu'il faudrait. Nous ne sommes pas si riches. Pour être plus modestes, mais pour être plus libres aussi, et c'est là que fut l'erreur, on s'est rabattu depuis sur l'idée de conscience. Mais ce n'est plus qu'un regard sur un monde étranger, s'il n'est pas hostile. Séduire, être séduits, saisir, abandonner, puis être abandonnés c'est en avoir trop peu. D'enfant gâté des dieux qu'il était au départ, sachant ce qu'il voulait et pouvant l'obtenir, l'homme est devenu de nos jours une misère inutile, à qui l'on ne peut demander que la contemplation, un peu désespérante s'il ne s'en distrait pas, de sa vie et de la mort. Entre les deux, la pensée proposait, au prix de quelque effort, une recherche honnête et qui ne s'arrêtait pas, une méthode exacte et qui ne se perdait pas, ni en soi ni ailleurs, avec au bout le salut peut-être, grâce à Dieu. Une chance à courir, la seule. On n'en a pas voulu. C'était trop difficile : il fallait s'ouvrir et communiquer.

Ni pierre ni Dieu, un peu plus que rien, beaucoup moins que tout, ça ne suffisait pas. On voulait tout avoir, sans secours de personne et dans le silence du tyran. On a gagné, puisqu'on n'a plus rien, autrement dit que dalle, celle du tombeau. C'est à recommencer.

pascal

« ÜN sait que l'apport de Pascal fut grand dans le domaine des sciences exactes.

A l'âge de seize­ dix-sept ans, c'est-à-dire cinq ou six ans après l'histoire du premier livre d'Euclide, il énonce le fameux théorème, encore cité sous son nom dans nos manuels de mathématiques élémentaires, sur l'hexagone inscrit dans un cercle, dont les côtés opposés se coupent deux à deux en trois points situés en ligne droite, et il l'étend aussitôt à toute section conique, pour donner l'hexagramme mystique.

Cinq années plus tard, en l 645, il construit la première machine à calculer qui fonc­ tionne, et la met dans le commerce.

En 1647, il publie ses expériences nouvelles touchant le vide, réfute la théorie à la mode, à savoir que la nature aurait horreur du vide et, dans sa lettre au R.

P.

Noël, jésuite comme par hasard, il formule la règle suivante, à ne jamais oublier quand on se mêle de penser : « Pour faire qu'une hypothèse soit évidente, il ne suffit pas que les phénomènes s'en ensuivent, au lieu que, s'il sensuit quelque chose de contraire à un seul des phénomènes, cela suffit pour assurer de sa fausseté.

» On va par ce moyen beaucoup plus loin qu'avec la méthode de Descartes.

Ce qu'on retrouve là, c'est la rigueur dialectique de Socrate et le terrible coefficient d'incertitude qui affecte chacune de nos affirmations, rien de ce que nous disons n'ayant effecti­ vement le droit d'être reconnu pour vrai, tant qu'une menace d'objection subsiste (Gorgias 473, b).

Mais Socrate s'arrêtera tout de suite, en comptant pour le reste sur le courage.

Pascal, non.

Qu'on ne s'étonne pas de le voir s'en aller, plutôt, vers la seule vérité qu'on ne puisse pas mettre en doute et qui est théologique: tout est grâce.

Non seulement la vie, mais le génie est grâce, la vertu est grâce, la foi même est grâce, et le bonheur qu'elle donne.

Comment alors communiquer autre­ ment que dans l'ordre de la charité? Comment alors vivre d'une existence selon la nature autre­ ment que dans la crainte et le tremblement de saint Paul? Comment ne pas se méfier des mots? On dirait que Pascal a reçu là, sous la forme du vide en haut du tube de verre, la première révé­ lation de la distance, infranchissable par la seule raison, qui est entre l'infini et nous, entre la certitude et notre connaissance, entre la paix et notre désir de la paix.

La santé, la science, l'autorité ne suffisent pas, il y faut la grâce.

QuATRE ans plus tard, son père est mort (1651), puis sa sœur est entrée à Port-Royal (1652), Pascal s'est débattu entre le monde et elle, il a tracé le programme de ses travaux géométriques, il l'a adressé à l'Académie parisienne de mathématiques (1654), il sait qu'il a fondé une science nouvelle, comme par hasard, celle du hasard, la meilleure approche de la grâce, et il se convertit pour la deuxième fois.

« Certitude, sentiment, joie, paix ...

Renonciation totale et douce.

» Il faudra six ans et peut-être huit pour y arriver.

Pendant cette dernière période de sa vie de savant, qui le mènera presque jusqu'à la mort, Pascal va s'engager de plus en plus à la poursuite des nombres.

Son besoin de s'emparer des secrets de Dieu, avant d'y renoncer, semble l'entraîner là par une passion irrésistible.

Derrière le triangle arithmétique, il y a l'idée qu'il faudrait inventer une science qui soit fondée sur la « nature intime des nombres », et non sur le caractère conventionnel de la numé­ ration, décimale pour ce qui est de nous.

Leibniz, à son tour, y réfléchira, croira la découvrir, mais, j'imagine, grâce surtout à sa confiance en la possibilité d'un algorithme universel, alors que Pascal vivait et pensait dans la méfiance des mots et des expressions.

On aimerait avoir de ses derniers ouvrages mathématiques, des traités sur la roulette en particulier, une édition commentée avec soin par un mathématicien d'aujourd'hui.

Car, en se contentant, comme on le fait d'ordinaire, de nous traduire les idées de Pascal en formules du calcul intégral moderne, on ne résout pas le problème, on l'évite plutôt : Pascal a certainement cherché, et il a cru tenir, on en a la preuve par l'histoire de la roulette, le principe de ce qui est devenu quelques années plus tard, grâce à Leibniz, le fondement du calcul infinitésimal.

Seulement, ce n'est pas de lui que part l'invention, c'est de Leibniz.

Lui est resté en deçà du moment où tout débouche sur un autre horizon.

La figure sur laquelle il construira bientôt son court traité des sinus du quart de cercle, qui a si vivement frappé Leibniz, est encore celle qui sert de nos jours dans les collèges à l'explication de la dérivée.

Mais la proposition qu'il en tire est peut-être fausse, certainement obscure.

Car il dit ceci : la somme des sinus d'un arc quelconque de cercle est égale à la portion de la base comprise entre les sinus extrêmes, multipliée par le rayon.

S'il n'en résulte pas que la surface du quart de cercle serait égale à r2 , ce qui n'est pas possible, on ne sait pas. »

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