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Pensez-vous que« la photo a usé le monde, et par là-même le voyage » ?

Publié le 05/02/2013

Extrait du document

Car la photographie est un certain regard porté sur les choses, sur le voyage. Elle peut en effet mettre en valeur les aspects humains, sociaux du voyage, qui n'apparaissent pas dans les brochures touristiques. Le grand reporter W. Bischoff mettait sa photographie au service d'un idéal du monde; ses photos de l'après-guerre en Allemagne, de la misère et de la guerre ailleurs, sont empreintes de révolte. Roland et Sabrina Michaud ont fait connaître aux Européens les Afghans, pas l'Afghanistan.

« RÉSUMÉ -VOCABULAIRE -DISCUSSION fixé, en opposition avec le temps du voyage qui s'écoule, irrémé­ diablement ; elle recherche une sorte de victoire sur cette dispari­ tion.

Intervient aussi le sentiment de l'appropriation de ce que 30 l'on voit, de ce que l'on vit: sécurisation face à l'inconnu, à l'étranger auxquels le voyageur est confronté.

Ce qui séduit le photographe, c'est la fierté de montrer de belles choses vues, ou de se montrer soi-même grandi devant des sites ou des monuments exceptionnels ; c'est, également, l'attrait 35 du souvenir : qu'il reste une trace du voyage.

Rapporter quelque chose devient une habitude, presque un devoir.

Dans le même sens, s'il prend des photos (ce qui est fréquent) pour ainsi dire identiques aux cartes postales qu'il peut trouver sur place, ou aux images qu'il a pu voir dans des livres, c'est pour prouver 40 qu'il y est allé en personne.

Pascal, déjà, avait évoqué cet utilitarisme du voyage : « Le plus souvent, on ne veut savoir que pour en parler.

Autrement on ne voyagerait pas sur la mer, pour ne jamais en rien dire, et pour le seul plaisir de voir, sans espérance d'en jamais communiquer.

» 45 Les raisons de photographier en voyage ne manquent pas.

Mais tout cela n'est pas sans l'influencer, très profondément, on pourrait dire, même, sans l'altérer.

Au commencement, la photographie elle-même permettait de faire connaître du jamais vu, qui diminue au fur et à mesure de la généralisation des 50 images.

Le Kodak n° 1, dès la fin du siècle passé, met d'ailleurs la photographie à la portée de tous.

«Appuyez sur le bou­ ton ...

», on connaît la formule; c'est bien, en effet, une photo­ graphie presse-bouton qui est inaugurée.

Ce déferlement de photographes, la frénésie du cliché, la 55 prolifération des images du monde entier ont transformé, en quelques décennies, le jamais vu en trop vu et conduit au paradoxe d'un ailleurs partout présent.

La fraîcheur, la nou­ veauté, voire l'émerveillement produit par les anciennes photo­ graphies, qui incidemment nous permettent de voyager dans le 60 temps, font place à une surdose de clichés qui devient aussi le lot de la carte postale.

La photo a usé le monde, et par là-même le voyage.

Elle fait partie, également, de ces chaînes niveleuses -la standardisation des moyens de transport, les aéroports et les hôtels « internationaux »partout identiques, les voyages organi- 65 sés aux itinéraires invariables, l'exotisme passe-partout des prospectus d'agences ...

-qui uniformisent, appauvrissent et falsifient le monde.

J'ai parlé d'appropriation ; de celle-ci, on passe insensible­ ment à la conquête : on prend en photo, on braque son appareil 70 comme pour se défendre contre le trop étranger.

Et même si c'est sans violence, cela ne se fait pas impunément ; il existe des régions où se faire photographier est devenu une véritable industrie.

21. »

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