PRICE-MARS (Jean)
Publié le 15/03/2019
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PRICE-MARS (Jean), homme politique et écrivain haïtien (Grande-Rivière-du-Nord 1876 - Pétionville 1970). Médecin, il réagit contre les théories raciales du sociologue français Gustave Le Bon et dès 1917 tenta de définir ce que devait être en son pays la Vocation de l'élite. Son ouvrage capital, Ainsi parla l'oncle (1928), marque un tournant dans l'évolution des lettres haïtiennes : sans pour autant rejeter la culture française, il incite ses compatriotes à approfondir leur hérédité africaine, en particulier dans le domaine de la langue (le créole) et de la religion (le vaudou). Il écrira sur ce thème de nombreux essais, esquissera des Silhouettes de nègres et de négrophi-les (1960) à travers le monde et publiera deux solides volumes d'histoire sur la République d'Haïti et la République Dominicaine (1953). Sénateur, deux fois ministre des Affaires étrangères, ambassadeur à Paris, il a présidé en 1956 le Premier Congrès international des écrivains et des artistes noirs, et reste vénéré comme un des initiateurs du mouvement de la négritude.
«
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Jean (1876-1969).
Écrivain haïtien
d'expression française.
Littérateur, ethnologue, diplo
mate, politicien, professeur, celui qu'on appelait le doc
teur Priee-Mars avait fait des études de médecine, dans
les années 1895-1900, à Port-au-Prince et à Paris.
Lors
des séjours qu'il effectua aux États-Unis, entre 1903 et
1910, comme représentant de son pays, il fut frappé du
mépris dans lequel était tenue la population noire.
Ce
choc initial devait orienter son existence, tout entière
consacrée à la réhabilitation de l'africanité en tant que
civilisation originaire de la population haïtienne.
A partir
de 1920, il étudie parallèlement le folklore haïtien et
l'ethnographie africaine, à la lumière, notamment, des
travaux de Leo Frobenius.
Le résultat de ses travaux se
traduit par des conférences populaires prononcées dans
son pays, par des articles publiés dans la Revue haïtienne
et dans la Revue indigène de Jacques Roumain après
1925.
Il est le promoteur de l'« indigénisme », qui va
lancer toute une génération d'écrivains dans la quête de
1' authenticité haïtienne au cœur des traditions paysannes.
La somme de cette recherche fut présentée dans Ainsi
parla l'oncle (1928), ouvrage fondateur qui révèle, selon
Senghor, « les trésors de la négritude ».
En fait la démar
che de Priee-Mars va plus loin qu'une pure et simple
réhabilitation de la race noire.
Devançant les positions
sei en ti fiques les plus récentes, il s'élève contre « ce que
renferme d'illusoire et d'erroné le concept même de la
race appliqué à la nature humaine».
Ce que Priee-Mars
veut réhabiliter, c'est le rôle essentiel du folklore dans la
genèse et la nourriture de toute culture féconde.
L'échec
d'Haïti -après un siècle d'indépendance - à s'affran
chir d'une tutelle qui ne fait, au contraire, que s'appesan
tir trouve son origine, d'après Priee-Mars, dans le fait
que «la communauté nègre d'Haïti [revêt) la défroque
de la civilisation occidentale », au lieu de chercher ses
forces dans le tissu vi va nt de sa propre culture populaire.
Certains de ses épigones n'ayant retenu de Priee-Mars
que l'exaltation étroite d'un particularisme, il faut souli
gner que, dans Ainsi parla l'oncle, retour aux sources du
folklore haïtien, Priee-Mars démontre simultanément et
à diverses reprises l'universalité des thèmes structuraux
des différents folklores.
Tl se révèle ainsi comme un
précurseur de Vladimir Propp et de sa fameuse Morpho
logie du conte, lorsqu'il relève la proximité d'un conte
irlandais et d'un conte haïtien, ou du Lévi-Strauss des
Structures de la parenté, lorsqu'il note l'analogie des
rites matrimoniaux à Rome ou dans une tribu bantoue; il
se démarque, en revanche, des thèses de Spengler sur
l'étanchéité des cultures, ou de celles de Frobenius sur
la distinction des « âmes » ( « apollinienne>>, « faus
tienne »,etc.).
Si Priee-Mars se fait le champion de l'haï
tianité et, au-delà, de l' africanité, jamais il ne prononcera
les mots d'« âme noire ».
Si les folklores -comme les
racines -ne sont pas interchangeables, ce n'est pas
parce qu'ils sont de nature différente, c'est parce que ces
folklores sont racines et que les racines ne se greffent
pas.
De même on trouve, dans Ainsi parla l'oncle, une
certaine prise de distances, derrière un hommage formel,
avec les très critiquables positions de Lévy-Bruhl sur
la «mentalité primitive».
Avec beaucoup de finesse et
d'humour, Priee-Mars montre l'animisme comme créa
teur de cosmogonies et de mythologies, à la source même
de la« civilisation » et subsistant, en son cœur, dans une
indéracinable superstition qui travaille l'homme le plus
« rationnel ».
La réflexion de Priee-Mars s'était esquissée dans les
textes de la Vocation de l'élite (1919); elle se prolonge
dans la République d'Haïti et la république Dominicaine
(1953), De Saint-Domingue à Haïti, essai sur la culture,
les arts, la littérature (1959), Silhouettes de nègres et de
négrophiles (1960).
Cependant, les articles, conférences, préfaces
qu'il multiplia au cours de son existence sont
trop souvent anodins et ne retrouvent qu'exceptionnelle
ment la vigueur de Ainsi parla l'oncle.
[Voir aussi
CARAlBES.
Littérature d'expression française].
BIBLIOGRAPHIE Numéro spécial de la revue Conjonction (n° 132, déc.
1976-
j a n v.
1977); René Depestre,.
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