RÉCITS DE VIE
Publié le 19/01/2020
Extrait du document
> QUESTION [4 points]
Caractérisez les relations entre auteur, narrateur et personnage principal de ces récits de vie. Votre réponse n’excédera pas une vingtaine de lignes.
> TRAVAIL D'ÉCRITURE [16 points]
I - Commentaire
Vous ferez le commentaire du texte de Sartre.
II - Dissertation
Le récit de vie doit-il nécessairement éveiller la sympathie pour le personnage qu’il met en scène ? Vous organiserez votre réponse en vous appuyant sur les textes du corpus et sur vos connaissances et lectures personnelles.
III - Écrit d'invention
Relatez, en le développant, l’un des épisodes raconté par Tallement des Réaux dans son premier paragraphe en imaginant que vous êtes La Fontaine, parlant ironiquement de lui-même.
> Corpus
1. G, TALLEMENT DES RÊAUX, Historiettes, édition posthume de 1834 (l’auteur est né en 1619 et mort en 1690).
2. A.R. LESAGE, Histoire de GilBios de Santillane (1715-1735).
3. J.-P. Sartre, Les Mots, 1964.
Texte 3 : Jean-Paul Sartre, Les Mots, 1964
Un jour — j’avais sept ans - mon grand-père n’y tint plus : il me prit par la main, annonçant qu’il m’emmenait en promenade. Mais, à peine avions-nous tourné le coin de la rue, il me poussa chez le coiffeur en me disant : « Nous allons faire une surprise à ta mère. » J’adorais les surprises. Il y en avait tout le temps chez nous. Cachottteries amusées ou vertueuses, cadeaux inattendus, révélations théâtrales suivies d’embrassements : c’était le ton de notre vie. Quand on m’avait ôté l’appendice, ma mère n’en avait pas soufflé mot à Karl pour lui éviter des angoisses qu’il n’eût, de toute manière, pas ressenties. Mon oncle Auguste avait donné l’argent ; revenus clandestinement d’Arcachon, nous nous étions cachés dans une clinique à Courbevoie. Le surlendemain de l’opération, Auguste était venu voir mon grand-père : « Je vais, lui avait-il dit, t’annoncer une bonne nouvelle. » Karl fut trompé par l’affable solennité de cette voix : « Tu te remaries ! » « Non, répondit mon oncle en souriant, mais tout s’est très bien passé. » « Quoi, tout ? », etc. Bref les coups de théâtre faisaient mon petit ordinaire et je regardais avec bienveillance mes boucles rouler le long de la serviette blanche qui me serrait le cou et tomber sur le plancher, inexplicablement ternies ; je revins glorieux et tondu.
Il y eut des cris mais pas d’embrassements et ma mère s’enferma dans sa chambre pour pleurer : on avait troqué sa fillette contre un garçonnet. Il y avait pis : tant qu’elles voltigeaient autour de mes oreilles, mes belles anglaises1 lui avaient permis de refuser l’évidence de ma laideur. Déjà, pourtant, mon œil droit entrait dans le crépuscule2. Il fallut qu’elle s’avouât la vérité. Mon grand-père semblait lui-même tout interdit ; on lui avait confié sa petite merveille, il avait rendu un crapaud : c’était saper à la base ses futurs émerveillements.
Éditions Gallimard
1. Anglaises : boucles de cheveux.
2. Sartre a perdu l’usage d’un œil dès l’enfance.
«
~
Centresétrangers 1, juin 2004 SUJET 12
main.
Une autre fois il se saisit d'une petite chienne qui était chez la
lieutenante-générale 2 de Château-Thierry, parce que cette chienne était de
20 trop bonne garde, et le mari étant absent, il se cache sous une table de la
chambre, qui était couverte d'un tapis à housse.
Cette femme avait retenu
à coucher une de ses amies.
Quand il vit que cette amie ronflait, il
s'approche du lit, prend la main à la Lieutenante, qui ne dormait pas.
Par
bonheur, elle ne cria point, et il lui dit son nom en même temps.
Elle prit
25 cela pour une si grande marque d'amour, que je crois, quoiqu'il ait dit qu'il
n'en eut que la petite oreille, qu'elle lui accorda toute chose.
1.
Ordinaire : le porteur du courrier royal.
2.
Lieutenante-générale : la femme du lieutenant-général, c'est-à-dire d'un haut person
nage investi à titre exceptionnel de l'autorité du roi.
Ill Texte 2: Alain René LESAGE, Histoire de Gif Blas de Santillane, 1715-1735
Je demandai à souper dès que je fus dans l'hôtellerie.
C'était un jour
maigre.
On m'accommoda des œufs.
Pendant qu'on me les apprêtait, je
liai conversation avec l'hôtesse que je n'avais point encore vue.
Elle me
parut assez jolie et je trouvai ses allures si vives, que j'aurais bien jugé, quand
5 son mari ne me l'aurait pas dit, que ce cabaret devait être fort achalandé 1•
Lorsque l'omelette qu'on me faisait fut en état de m'être servie, je m'assis
tout seul à une table.
Je n'avais pas encore mangé le premier morceau, que
l'hôte entra, suivi de l'homme qui l'avait arrêté dans la rue.
Ce cavalier
portait une longue rapière et pouvait bien avoir trente ans.
Il s'approcha de
10 moi d'un air empressé : Seigneur écolier, me dit-il, je viens d'apprendre que
vous êtres le seigneur Gil Blas de Santillane, l'ornement d'Oviedo et le
flambeau de la philosophie.
Est-il bien possible que vous soyez ce savantis
sime, ce bel esprit dont la réputation est si grande en ce pays-ci ? Vous ne
savez pas, continua-t-il en s'adressant à l'hôte et à l'hôtesse, vous ne savez
15 pas ce que vous possédez.
Vous avez un trésor dans votre maison.
Vous
voyez dans ce jeune gentilhomme la huitième merveille du monde.
Puis se
tournant de mon côté et me jetant les bras au cou : excusez mes transports,
ajouta+il, je ne suis point maître de la joie que votre présence me cause.
Je ne pus lui répondre sur-le-champ, parce qu'il me tenait si serré que
20 je n'avais pas la respiration libre, et ce ne fut qu'après que j'eus la tête
dégagée de l'embrassade, que je lui dis: Seigneur cavalier, je ne croyais pas
mon nom connu à Pefiaflor.
Comment connu ! reprit-il sur le même ton.
Nous tenons registre de tous les grands personnages qui sont à vingt lieues
à la ronde.
Vous passez ici pour un prodige et je ne doute pas que l'Espagne
25 ne se trouve un jour aussi vaine2 de vous avoir produit, que la Grèce d'avoir
vu naître ses sages.
Ces paroles furent suivies d'une nouvelle accolade, qu'il
me fallut encore essuyer, au hasard d'avoir le sort d'Antée 3• Pour peu que
j'eusse eu d'expérience, je n'aurais pas été la dupe de ses démonstrations ni
159.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- CHENIER, André (1762-1794) Poète, il n'écrit rien avant 1792, mais produit durant les deux dernières années de sa vie des textes variés abordant plusieurs genres dont l'épopée avec Hermès et L'Amérique, récits retraçant l'histoire de la civilisation humaine.
- Paul Valéry écrit dans Regards sur le monde actuel, (Propos sur le progrès, 1931 ) : « Supposé que l'immense transformation que nous vivons et qui nous meut, se développe encore, achève d'altérer ce qui subsiste des coutumes, articule tout autrement les besoins et les moyens de la vie, bientôt l'ère toute nouvelle enfantera des hommes qui ne tiendront plus au passé par aucune habitude de l'esprit. L'histoire leur offrira des récits étranges, presque incompréhensibles ; car rien dans le
- Paul Valéry écrit dans Regards sur le monde actuel, (Propos sur le progrès, 1931) : « Supposé que l'immense transformation que nous vivons et qui nous meut, se développe encore, achève d'altérer ce qui subsiste des coutumes, articule tout autrement les besoins et les moyens de la vie, bientôt l'ère toute nouvelle enfantera des hommes qui ne tiendront plus au passé par aucune habitude de l'esprit. L'histoire leur offrira des récits étranges, presque incompréhensibles ; car rien dans leu
- THÈME 1 : La Terre, la vie et l’organisation du vivant Thème 1A : Transmission, variation et expression du patrimoine génétique Chapitre 1 : Les divisions cellulaires, transmission du programme génétique chez les eucaryotes
- « L’art de la vie se rapproche de l’art de la lutte : il faut se tenir prêt sans broncher à répondre aux coups qui fondent sur nous, même s’ils sont imprévus » Marc Aurèle