RICHARD (Jean-Pierre)

RICHARD (Jean-Pierre), critique littéraire français (Marseille 1922). L'œuvre de Jean-Pierre Richard s'attache, jusqu'à Microlectures (1979) et Pages Paysages (1984), à dessiner l'imaginaire existentiel des écrivains. Elle reprend ainsi la suggestion de Sartre à la fin de l'Être et le Néant : le rapport du sujet au monde porte ses propres modalités et sa propre dynamique, il est une manière de remplir ce monde par l'imagination de l'existence. Littérature et Sensation (1954), Poésie et Profondeur (1955), V Univers imaginaire de Mallarmé (1961), Onze études sur la poésie moderne (1964), Paysage de Chateaubriand ( 1967), Etudes sur le romantisme (1971), Proust et le monde sensible (1974) indiquent explicitement que la sensation assure le lien au monde et qu'elle nourrit le mouvement de l'imaginaire. Ainsi rapporté à la sensation, cet imaginaire n'est jamais stricte imagination ni tentation de déréalisation, mais le moyen d'assurer la présence du sujet au milieu des objets du monde et de rendre le sujet adéquat à ce monde. Car, dans la fidélité aux intuitions sartriennes, Richard lit toujours, chez l'écrivain, un déficit premier, un déséquilibre entre le moi et le réel, sous des aspects spécifiques : le pâteux et le fluide qui attestent, dans l'œuvre de Flaubert, l'expérience de l'inconsistance, la fadeur chez Verlaine, le stérile chez Saint-John Perse, la nausée chez Céline. L'épreuve de la vie et l'entreprise créatrice permettent de corriger ce déficit, en un échange entre les données biographiques et

l'invention littéraire. Il ne faut pas comprendre que l'œuvre est une biographie indirecte et corrigée de l'écrivain ou encore, dans une perspective adlérienne, un système de compensation visant à rétablir son équilibre psychique, mais qu'elle expose la réforme des liens d'une subjectivité aux objets, et qu'elle désigne ainsi, dans la diversité d'une œuvre, la présence constante d'un ego auquel la lecture remonte inévitablement.