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Richelieu à l'Académie

Publié le 09/02/2012

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richelieu

 

Dans une allocution, Richelieu trace un plan de travaux aux membres de

l'Académie française.

C'est toujours avec une joie singulière que, dérobant une heure à des

occupations accablantes, je viens m'asseoir au milieu de vous. Le souvenir

des jardins d'Académus revit en vos réunions, auxquelles l'antique Sagesse

préside, non sous ses graves bandeaux accoutumés, mais parée de grâces

souriantes et familières. Où rencontrerais-je des plaisirs plus délicats, un

plus noble délassement ? Et j'y trouve encore cette satisfaction de comprendre

mieux, en vous écoutant, Messieurs, la grandeur des services que votre

société est appelée à rendre.

richelieu

« qui serait advenu si Malherbe, dans son intrépide indignation, n'eût jeté dehors cette cohue d'étrangers.

Enfin, voici le terme d'une trop longue période d'inconstance et de dé­ .

sordre.

Les auteurs ne seront plus réduits à écrire sur un sable mouvant; toute cette poussière de mots qu'est aujourd'hui la langue, va devenir entre vos mains un marbre pur que le temps respectera.

Mais avant d'affermir cette matière si diverse, la nécessité s'impose de la nettoyer.

Il ne convient pas, en effet, qu'elle demeure dans son état actuel, avec les vocables inutiles qui l'encombrent et les mots grossiers qui la souillent.

Que toutes les locu­ tions vicieuses contractées dans la bouche des artisans, parmi les chicanes du Palais et jusqu'à la cour ou dans les salons, rentrent d'abord là d'où elles n'eussent point dû sortir.

Il sera temps alors de songer à fixer la langu~, pour l'empêcher, non pas de changer du tout, ce qui est une chimère et serait peut-être un mal, mais de changer aussi souvent et aussi promptement qu'elle a fait, en sorte que les écrivains de notre époque puissent être compris sans peine dans .

cinq siècl~s et plus.

· Avisez donc immédiatement aux moyens les plus propres à atteindre ce résultat.

A mon sens, il importe avant tout de travailler à un Dictionnaire où seront consignés, avec leur signification, tous les mots que vous aurez jugés dignes d'être maintenus, c'est-à-dire ceux que l'usage des honnêtes gens et des meilleurs auteurs aura ·consacrés.

Comme leur présence dans cette sorte de recueil officiel constituera la preuve authentique qu'ils sont bons vocables de France, vous verrez bientôt le public se piquer de ne les employer qu'eux seuls; faute d'être prononcés~ les autres tomberont en dé­ suétude.

Cette rédaction ne sera point définitive; de loin en loin, on publiera une nouvelle édition du même ouvrage, où seront admises les expressions créées dans l'intervalle, et qui rempliront les conditions suffisantes d'utilité, de justesse et de dignité.

Encore prendra-t-on soin de ne les introduire qu'après..

une longue attente à la porte : ce dernier point est d'une extrême importance.

La langue n'étant pas seulement constituée par les mots, mais aussi par leurs relations et combinaisons, une Grammaire me paraît le complément obligé du dictionnaire.

Les règles en devront être accessibles au commun, et par conséquent, exposées err toute simplicité et clarté; de longs et savants raisonnements n'auraient d'autre avantage que d'amuser les habiles.

Ici -encore, la pratique des bons écrivains et de la bonne compagnie sera votre meilleur guide.

Une Rhétorique et une Poétique seraient également, ce me semble, d'une utilité appréciable.

Les habitudes les plus éloignées de la véritable éloquence règnent au barreau et dans la chaire; ceux qui cultivent la poésie s'égarent trop souvent dans le mauvais goût.

On rassemblerait dans le premier ouvrage les plus beaux préceptes d'Aristote, de Quintilien et de Longin.

Pour remplir le second, l'étude d'Homère, de Virgile, d'Horace et de Térence nous instrui­ rait du secret de leurs chefs-d'œuvre; et Malherbe nous fournirait les prin­ cipes et procédés de notre propre versification: Un dictionnaire et une grammaire, une rhétorique et une poétique! l'entre­ prise est, je l'avoue, délicate et vaste; mais votre compétence, Messieurs, me garantit son achèvement.

Et puisqu'une œuvre de cette nature ne peut devenir féconde que si lé public y prête les· mains, l'autorité que donne à votre société le prestige de vos vertus et de vos talents personnels vous assure cette collaboration.

En dehors de la certitude du succès, plusieurs ·pensées vous animeront à la tâche.

Considérez que l'éclat du monument que vous élevez rayonnera sur chacun de vos noms; du plus lointain des âges,. »

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