Sido (1930) suivi de Les Vrilles de la vigne (1908), Colette
Publié le 29/05/2023
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«
1ère RECAPITULATIF DES ACTIVITÉS PRÉPARATOIRES À L’ÉPREUVE
ANTICIPÉE DE FRANÇAIS.
SEQUENCE 4
Sido (1930) suivi de Les Vrilles de la vigne (1908), Colette
Objets d’étude : Le roman et le récit du Moyen-âge au XXIème siècle.
Parcours : La célébration du monde.
● 3 extraits ayant donné lieu à des lectures linéaires :
o LL 1 : Sido, Le merle et les cerises, de « D’où, de qui… », à « son
gibus vide ».
o LL 2 : Les Vrilles de la vigne, “Jour gris”, de « Et si tu passais… »,
à « écoute bien, car… »
o LL 3 : Les Vrilles de la vigne, “Le dernier feu”, de « Et les
violettes… » à « m’enivre.
»
Parcours associé : « La célébration du monde »
o LL 4 : Albert Camus, Noces, 1938, de “Sur le rivage…” à “vaut
bien tout leur savoir-vivre.”
LL1 : Sido, Le merle et les cerises, 1930
D’où, de qui lui furent remis sa rurale sensibilité, son goût fin de la province? Je ne
saurais le dire.
Je la chante, de mon mieux.
Je célèbre la clarté originelle qui, en elle,
refoulait, éteignait souvent les petites lumières péniblement allumées au contact de ce
qu’elle nommait “le commun des mortels”.
Je l’ai vue suspendre, dans un cerisier, un
épouvantail à effrayer les merles, car l’Ouest, notre voisin, enrhumé et doux, secoué
d’éternuements en série, ne manquait pas de déguiser ses cerises en vieux chemineaux et
coiffait ses groseilliers de gibus poilus.
Peu de jours après, je trouvais ma mère sous
l’arbre, passionnément immobile, la tête à la rencontre du ciel d’où elle bannissait les
religions humaines…
-Chut!...Regarde…
Un merle noir, oxydé de vert et de violet, piquait les cerises, buvait le jus, déchiquetait la
chair rosée…
-Qu’il est beau!...chuchotait ma mère.
Et tu vois comme il se sert de sa patte? Et tu vois les
mouvements de sa tête et cette arrogance? Et ce tour de bec pour vider le noyau? Et
remarque bien qu’il n’attrape que les plus mûres…
-Mais, maman, l’épouvantail…
-Chut!...l’épouvantail ne le gêne pas…
-Mais, maman, les cerises!...
Dans ses yeux passa une sorte de frénésie riante, un universel mépris, un dédain
dansant qui me foulait avec tout le reste, allégrement…Ce ne fut qu’un moment, - non pas
un moment unique.
Maintenant que je la connais mieux, j’interprète ces éclairs de son
visage.
Il me semble qu’un besoin d’échapper à tout et à tous, un bond vers le haut, vers
une loi écrite par elle seule, pour elle seule, les allumait.
Si je me trompe, laissez-moi errer.
Sous le cerisier, elle retomba encore une fois parmi nous, lestée de soucis, d’amour,
d’enfants et de mari suspendus, elle redevint bonne, ronde, humble devant l’ordinaire de sa
vie:
-C’est vrai, les cerises…
Le merle était parti, gavé, et l’épouvantail hochait au vent son gibus vide.
LL 2 :
Les Vrilles de la vigne , “Jour gris”, 1908
Et si tu passais, en juin, entre les prairies fauchées, à l'heure où la lune ruisselle
sur les meules rondes qui sont les dunes de mon pays, tu sentirais, à leur parfum, s'ouvrir
ton cœur.
Tu fermerais les yeux, avec cette fierté grave dont tu voiles ta volupté, et tu
laisserais tomber ta tête, avec un muet soupir…
Et si tu arrivais un jour d'été dans mon pays, au fond d'un jardin que je connais, un
jardin noir de verdure et sans fleurs, -si tu regardais bleuir, au lointain une montagne ronde
où les cailloux, les papillons et les chardons se teignent du même azur mauve et
poussiéreux, tu m'oublierais, et tu t'assoirais là, pour n'en plus bouger jusqu'au terme de ta
vie!
Il y a encore, dans mon pays, une vallée étroite comme un berceau où, le soir s'étire
et flotte un fil de brouillard, un brouillard ténu, blanc, vivant, un gracieux spectre de brume
couché sur l’air humide… Animé d'un lent mouvement d'onde, ils se fond en lui-même et se
fait tour à tour nuage, femme endormie, serpent langoureux, cheval à cou de chimère… Si
tu restes trop tard penché vers lui sur l’étroite vallée, à boire l'air glacé qui porte ce
brouillard vivant comme une âme, un frisson te saisira, et toute la nuit tes songes seront
fous…
Écoute encore, donne tes mains dans les miennes: si tu suivais, dans mon pays, un
petit chemin que je connais, jaune et bordé de digitales d'un rose brûlant, tu croirais gravir
le sentier enchanté qui mène hors de la vie… Le chant bondissant, des frelons fourrés de
velours t'y entraîne et bat à tes oreilles comme le....
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