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TAILHADE (Laurent)

Publié le 18/05/2019

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TAILHADE (Laurent), écrivain français (Tarbes 1854 - Combs-la-Ville 1919). Poète (il fut tôt couronné par l'académie des jeux Floraux), il écrit dans la veine parnassienne et décadente : le Jardin des rêves (1880), Vitraux (1892) — ce nihiliste n'est pas un iconoclaste —, Poèmes élégiaques (1907), Plâtres et Marbres (1913). Il chante la Noire Idole (1907), la morphine, comme les Fleurs d'Ophé-lie, en particulier les « Asphodèles, soleils héraldiques et beaux, / Mandragores criant d'une voix surhumaine / Au pied des gibets noirs que hantent les corbeaux ». Mais il cherche surtout à attirer l'attention par ses œuvres polémiques, où il met à l'épreuve son goût des sonorités et de l'invective. Au pays du mufle (1891) — le mufle, c'est le bourgeois — est salué par Mallarmé. En 1893, Tailhade s'écrie au cours d'un banquet littéraire, le soir de l'attentat de Vaillant (1893) : « Qu'importent les victimes, si le geste est beau ! Qu'importe la mort de vagues humanités, si par elle s'affirme l'individu ! » Et qu'importe si lui-même est gravement blessé peu de temps après lors de l'attentat anarchiste du restaurant Foyot (1894) : il persiste (il sera condamné pour provocation au meurtre lors de la visite du tsar en 1901). Ce goût du scandale lui vaut, avec quelques duels, la célébrité. Il exploite le même filon, qu'il s'agisse de vers ou de prose, avec À travers les groins (1899), Imbéciles et Gredins (1900), où il attaque violemment tous les antidreyfusards et Dix-Huit Ballades familières pour exaspérer le mufle (1904). Ses pamphlets en vers ont été réunis dans les Poèmes aristophanesques (1904). Traducteur du Satiricon (1902), il finira par renier l'anarchie pour l'ordre et la
 
foi ( Un monde qui finit, 1910; Quelques Fantômes de jadis, 1919).

« Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)TAILHADE Laur ent Bernard Pau l-Marie (1854- 1919) .

P oète puis pamphlétai re , anarchiste puis catholi­ que, Laurent Tailh ade a suivi un itinéraire surprenant.

Né à Tarbes, d'un père magistrat austère et d'une mère dévote, il fait ses études au lycée de Pau, puis part pour Toulouse.

Couronné par l'académie des jeux Floraux, cet étudiant en droit va s'intéresser surtout à la li ttéra ture.

Après un premier et bref intermède conjugal, il monte à Paris, et son argent file rapidement entre les mains des cafetiers, des croupiers et de ses nouveaux amis.

Tailhad e, qui fait paraître en 1880 son Jardin des rêves préfacé par Banville, rencontre à cet te époque Moréas, avec qui il ne tardera pas à se brouiller, Verlaine, Barrès, J ean Lorrain puis Rachilde.

Grâce à Henr y Bauër , il entre a lors à l'Écho de Paris, auquel ses chroniques acides, parues sous le pseudonyme de TYBA LT, valent notammen t un procès avec les curés des Hau tes-Pyrénées .

N'ün­ porte : Tailhade ne se laisse pas démonter et travaille beaucoup .

On voit sa signature dans le Décadent, dans la Pléiade, et dans le Mercu re de France, ainsi que sur la co u verture de ses nouvea ux recueils : Un dizain de sonnets (1882) et Vitraux (1891).

Ce n'est po urtant qu'a­ vec les poèmes satiriques d 'Au pays du mufle (189 1), salués par Malla rm é, qu'il devient célèbre.

Le tempéra­ ment batailleur qu'on y découvre (et dont il fera bientô t preuve au momen t d'une conférence mouvementée sur Ibsen) le pousse à prendr e des attitudes politiques extrê­ mes, à professer avec virule n ce l'a nticlé ricalisme et l'anarchisme, y compris après un atte ntat en 1894, où il perd un œil.

Naturellement, au moment de l'affa ire Dreyfus, cet admirateur de Jaurès et de Zola s'attaque à ceux qu'il pourfend depuis toujours, et publie à cette occasion A travers les groins, 1899 (qu'on retrouve dans ses Poème s aristophanesques, 1904), puis Imbéciles et gredins, 1900.

Sur sa l a ncée, Tailhade ira d'ailleu rs plu s loin puisqu'un de ses art ic les , paru dans le Libertaire du 15 septembre 1901, au moment de la visite du tsar Nico­ las II, lui vaut d 'être condamné pour provocation au meurtre.

Après un séjour en prison, Tailhade se retrou ve bientôt sans argent et, surtout, malade de cette toxico­ manie dont la Noire Idole (1907) porte témoignage .

TI change alors complèteme nt d'o pi nions et, dans des arti­ cles que publie le Gaulois d'Arthur Meyer, r en ie l 'anar­ chie.

Mais cette palinodie, pas plus que ses articles de critique, s es souvenirs ou la réédition de ses poèmes, ne change rien au sort de Tailhade, qui meurt pauvre et un peu oublié à Combs-la- Vi lle .

Malgré sa conversion, Tai lhad e reste surtout connu pour les Uvres de son époque anarchis te et polémique .

Et l'on doit reconnaître qu'i l montre là un véritable talent : en effet, il n'est pas toujours facile d'être méchan t, de l'être surtout avec art; en cela, certains poè­ mes de Tailhade peuvent faire penser à Juvénal, sur tou t lors q u'il attaque la « décad e nce» de son temps, et, ave c brio, vilipende les vieille s actrices, les bourgeo is stupi­ des en goguette et les moines malodorants.

A Juvénal certes (et à Pétrone, dont il tradui t le Satiricon), mais aussi à Huy smans pour la complaisance de certaines des ­ criptio ns, pour cette fascina tion du laid comme matière de l'œuvre d'art : la S e ine charriant d es chiens crevés, les vieilles, « la mouche des cacas sur le lilas » et, «comm e un porc que l'on châtre, le calicot folâtre».

Tailhade montre en effet une jouissance particulière à tro uve r 1' épithète ou l'image percutantes : il traite Moréas de « graeculus » et compose une « ballade touchant l'ignominie de la classe moyenne».

Il y a sou­ vent chez lui une férocité qu' on peu t mett re en rapport avec son goüt pour la corrida; mais, en bon aficionado, Tailhade exécute sa mise à mort dans les règles de l'ar t, c'est-à-dire a vec esprit et générosité .

Car son agressivité épargne toujours d es figures comme Rabelais, Diderot, Balzac ou Zola - Oscar Wild e auss i et, en général, les insurgés , les sou ffrants et les bannis (que défend le Jésus anarchiste de Tailhade).

Mais cette révolte, cette déno n­ ciation permanente, perd, par son excès même, un peu de son efficacité, tourne au procédé.

Tailhade, a-t-on dit, est un rhéteur, capable, et on 1' a vu, de retourner ses injures contre ses amis d'hier.

Faut-il alors me ttre en doute sa sincérité? Mieux vaut peut-être comprendre que cette révolte est dans la logique d'une attitude esthétique .

Puisque l'artiste n'existe que par oppositio n à la soc iété , puisque son langage même doit être exceptionnel, rien d'étonnant à ce qu 'il s'engage sur le terrain politique et à ce que le dandysme de la forme se fasse imprécatoi re : «Vous tombe rez au pourrissoir, comme un tas de fumier qui sou.illait la pureté du ciel et dont l'orage seul des révoltés en marche peut laver la sournoise, la féroce, la tén éb r euse puanteur» .. »

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