Devoir de Philosophie

THÈME, CRITIQUE THÉMATIQUE

Publié le 14/10/2018

Extrait du document

THÈME, CRITIQUE THÉMATIQUE. Issu au xiiie siècle du latin thema, mot du vocabulaire de la rhétorique emprunté au grec, « thème » signifie, étymologiquement, « ce qu’on pose », « sujet posé » (résultat concret de l’« action de poser » qu’est la « thèse »), puis, au xvie siècle, « sujet de composition scolaire », et au xviiie siècle, l’exercice de traduction dans une langue étrangère d’un texte écrit dans la langue maternelle de l’élève. La critique littéraire moderne restaure le sens premier de « sujet », conservé au xviiie siècle par le vocabulaire de la musique, où le thème est un motif qui donne matière à des variations.

 

Le concept

 

Quel est le sujet? Question classique de la philosophie, qui admet de multiples réponses, selon le poids accordé au collectif ou à l’individuel, à la raison ou au sentiment, au conscient ou à l’inconscient. Le sujet, dès qu’il devient objet de pensée, fuit comme en un jeu de miroirs. Il n’en va pas autrement, en critique littéraire, du thème, ce sujet du discours. De quoi parle-t-on? Les uns s’en tiennent à l’explicite, au contenu manifeste, et s’engagent dans la thématologie; les autres recherchent des sens latents — ou, du moins, décalés par rapport à la chaîne logique, mais superficielle, des mots — et construisent une thématique.

 

Les diversités de la thématologie

 

La prolifération des études de thèmes, depuis la fin du XIXe siècle, semble un des contrepoids à l’essor de l’histoire littéraire. A la stricte continuité chronologique, à la quête d’une causalité scientifique (l’œuvre, par la médiation de l’homme qui l’écrit, est soumise aux conditions politiques, économiques, sociales...), la thématologie substitue un ordre proprement littéraire, un objet plus spécifique, abrité des convoitises des sciences humaines, sans renoncer aux principes et à la méthodologie positivistes (établissement des textes; recensements exhaustifs; objectivité...) et sans quitter le bercail universitaire (par opposition à l’impressionnisme de la critique journalistique, ou à cette recherche d’un autre « moi » créateur qu’esquisse Proust dans son Contre Sainte-Beuve).

« œuvres , elle explore une troisième voie : les images, les idées, les rapports à la fois forme ls et sémantiques, récurrents dans un texte ou un en sem ble de textes, jugés essen tiels pour leur compréhension ou leur explica tion et, pour cette raison , appelés « th èmes» (parce que d'au­ tres éléments, plus nombreux et plus manifestes, en sont les variations, les modulations ou les transfo rm ations).

Le thème apparaît ainsi comme une cellule ori gi n elle ou une matrice première, qui en gendre ou catalyse des traits multip les qui s'appa rentent quand on découvr e Je foyer caché d'où ils empru nten t leur lumière et leur couleur .

Père vér itable de la thématique, Je philosophe Gaston Bachelard ( 1884-1962) cherche à «fixe r, dans le règne de l'imagination , une loi des quatre élémen ts» (le feu, l'air, l'eau, la terre); car, «pour qu'une rêverie se pour­ suive avec assez de constance pour donner une œuvre écrite, pour qu 'elle ne soit pas s implement la vacance d 'un e heure fugitive, il faut qu'elle trouve sa matière, il fau t qu'un élément matéri el lui donne sa propre substance, sa propre règle, sa poétique spécifique ».

Chercher le thème , proprement « élémentaire» sous la complexité des age ncements littéraires, c'est «trouver derriè re les images qui se montrent les ima ges qui se cachen t, a ll er à la racine même de la force imaginan te » et, en fin de compte, aux archétypes que la psychanalyse a r évélés.

D e stricte obédience freudienne, Charles Mau­ ron ( 1899-1966 ) entreprend, chez.

certains auteur s, «la recherche des thèmes obsédant s et l'é tude de leurs varia­ tions », pour atteindre le « mythe personnel » qui hante une œuvre.

Jean -Paul Weber , plus biographe, entend par « thème» «un évé nement ou une sit uation infantiles» qui se manifesteraient incon sciemment; Roland Barthes, un «réseau organisé d'obs ess ions», et Jean-Pierre Richard, «une co nstellatio n de mots, d'idées, de co ncepts » qui mènent à «certaines structures inté rieu­ res, certaines atti tudes d'exi ste nce» carac téristiques, au moment «où le monde prend un sens par l'acte qui Le décrit».

George s Poulet recherche, dans un texte, « une prise de conscience initiale» de J'es pace et du temps, et Jean Starob lnski «ce rtaines corre spondances sign ificati­ ves qui n'ont pas été aperçues par l'écrivain» et révè lent la singu larit é d'une œuvre ...

L es définition s et les conceptions du thème sont donc nombreuses et quelque peu co n tradictoires, même si elles indiquent toutes un centre secret, invisible au pre­ mier abord, inaperçu de l'auteur lui-même, et si la thé­ matique subit deux influences philosophiq ues princi­ pales, celle d e la phénoménologie (dans la quête d'une relatio n premi ère entre le sujet et les phénomèn es aux­ quels il donne sens) et celle de la psychanaly se (dans une certaine « crypto manie », une passio n pour le latent, le soute rrain, le codé).

L es objections ont porté sur le c hoix arbitraire des thèmes, la subjectivité de démarches plus intuitives que rationnelle s, la fragmentation des œuvres selon des catégories qui pullu lent à 1' infin i (le chaud, le froid, le mat, l'éclatant, le tangent...),!' « essen­ tialisat ion » des textes par l'absence des divers contex­ tes, laissés aux myop ies d'une vaine érudition.

Il reste que les ap pro ches thématiques, e n bousculant les habitu­ des de lecture, les liais ons ressassées, tou te la banalité des évidences superfic ielles, ont renouvelé notre contact avec beaucoup d'écrivains en n o us donnant à ressentir leur vision, Je tissu de leur rêver ie, le geste de leur écriture.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles