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TRISTAN L'HERMITE, François L'Hermite, seigneur du Solier, dit (vie et oeuvre)

Publié le 08/11/2018

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TRISTAN L'HERMITE, François L'Hermite, seigneur du Solier, dit (1601-1655). Après avoir été un des auteurs les plus admirés de ses contemporains, Tristan L’Hermite a connu un oubli injustifié. La redécouverte des auteurs libertins à la fin du xixe siècle (publications de F. Lachèvre) et, plus récemment, la remise en honneur du baroque ne lui ont rendu que partiellement justice. Son œuvre, d’ailleurs, ne peut être enfermée dans ces deux mouvements. Plus original et plus nuancé, Tristan n’a été reconnu pour un auteur de premier rang que depuis les années 1960, où de nouvelles publications et l’activité de l’Association des amis de Tristan L’Hermite ont entrepris de rendre sensible et accessible la richesse de son œuvre.

 

Un aristocrate qui fait « profession d'écrire »

 

François L’Hermite est né d’une ancienne famille de la Marche, riche surtout d’un passé prestigieux : les généalogistes du xviie siècle lui donnaient pour ancêtres Pierre L’Ermite, le prédicateur de la première croisade, et Tristan L’Hermite, le grand chambellan de Louis XI. Son père, Pierre L’Hermite, qui a été royaliste dans une province ligueuse, est compromis dans une affaire criminelle en 1591; gracié en 1595 par Henri IV, mais ruiné, il rétablit sa situation en épousant Élisabeth Miron, dont la famille est puissante. François, leur fils aîné, est élevé par sa grand-mère, puis placé à cinq ans comme « gentilhomme d’honneur» d’Henri de Verneuil, fils bâtard d’Henri IV. Des jeux de son enfance avec les jeunes princes et leurs pages, il gardera nombre d’amitiés qui seront plus tard des atouts importants. L’éducation que lui dispense Claude Du Pont l’initie aux lettres : il apprend par cœur récits mythologiques, fables et romans (l’Asrree). Son roman le Page disgracié (1642), sans être une véritable autobiographie, nous renseigne sur son enfance (farces et dissipation), ses aventures d’adolescent (après un duel à treize ans, il serait parti vers l’Angleterre, l’Écosse, la Norvège), et sur ses vrais débuts dans les lettres, au service de l’historien Scévole de Sainte-Marthe, puis de grands seigneurs (le duc de Mayenne; Gaston d’Orléans, qu’il suit au siège de Mon-tauban en 1622; le duc de Guise).

 

On sait peu de chose de sa vie privée. Sa carrière reflète les vicissitudes politiques et les heurs ou malheurs de ses protecteurs. Tristan est un homme de clientèle, malchanceux dans ses choix; les Vers héroïques (1648), les dédicaces et certaines lettres montrent qu’il cherche des protecteurs, aides passagères que lui valent ses liens familiaux ou amicaux, aides intermittentes (Gaston d’Orléans), aides durables et efficaces (le duc de Saint-Aignan, le duc de Guise, le chancelier Séguier). Pourtant, il semble s’être mal résolu aux contraintes du clientélisme. La « profession d’écrire », à laquelle il se voue dès 1624 (en adoptant le nom de Tristan), est une façon de marquer son autonomie. Ainsi, il travaille activement à faire reconnaître les droits des auteurs (vente de ses manuscrits de poésie à un libraire; appui à Quinault pour obtenir un pourcentage sur la représentation d’une pièce). Sa vie a servi à illustrer le mythe du génie pauvre, mais il compte, en fait, parmi les écrivains favorisés; plus dépensier (joueur) que pauvre, il est surtout peu assidu à faire sa cour aux grands, ce qu’il justifie à la fois par son caractère, sa morale, et sa fonction même de poète :

 

En effet, Monsieur, il semble que la mesme planète qui nous dispose à faire des vers nous vienne imposer la paresse (...) Comme il est difficile d'embrasser la vie active et la contemplative tout à la fois, il est mal aisé de se rendre grand courtisan et grand écrivain tout ensemble. L'art des Muses demande trop de repos, et celuy de la Cour trop de révérences. De moy qui suis né trop libre pour faire le mes-tier des esclaves, j'ay suivy jusqu'à cette heure la Cour sans me la proposer pour eschole. Jamais je n'ay fait le dessein d'acquérir d j bien pource que je n'ay jamais fondé de bonheur sur les richesses.

 

(Lettre au comte de Moret)

 

Il privilégie donc sa carrière littéraire. Son goût précoce pour les lettres l’a vite lié avec d’autres écrivains : dès 1625 il est l’ami de Théophile, de Hardy, de Farct, de Saint-Amant, plus tard de D’Assoucy et de Scarron. Le succès vient aussitôt à ses deux premières œuvres importantes : en 1633, les Plaintes d'Acante lui valent une réputation de poète docte et mondain, puis, en 1636, la Mariamne est l’un des événements littéraires qui passionnent le public. Rapidement considéré comme un maître à qui poètes débutants et seigneurs demandent des vers, Tristan ne connut pas pour autant un succès constant. Il a pratiqué la polygraphie, normale au xvne siècle, sans échec marquant, mais ses Lettres meslées (1642), genre à la mode, innovent peu, et la critique moderne ne confirmera pas le succès que le public accorda à VOffice de la Sainte Vierge (1646). Pour trois genres cependant, Tristan apparaît comme un maître, et cela seul suffirait à lui assurer une place exceptionnelle.

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