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Un Texte de Marot: De soi-même

Publié le 13/02/2012

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marot

Marot, voicy, si tu le veux sçavoir,

Qui faict à l'homme heureuse vie avoir :

Successions, non bien acquis à peine,

Feu en tout temps, maison plaisante et saine,

Jamais procès, les membres bien dispos,

Et au dedans un esprit bien repos;

Contraire à nuls et n'avoir nuls contraires;

Peu se mêler des publicques affaires,

Sage simplesse, amis à soy pareils,

Table ordinaire et sans grands appareils;

Plus haut qu'on est ne vouloir point atteindre;

Ne désirer la mort ni ne la craindre;

Voilà, Marot, si tu le veux sçavoir,

Qui faict à l'homme heureuse vie avoir (1).

Traduction en prose moderne et commentaire succinct. Remarques sur le vocabulaire et la versification. Que pensez-vous de ces recettes ? Connaissez-vous d'autres formules du bonheur ? En possédez-vous une? Faites-la connaître et justifiez-la brièvement. Marot fut, à tout prendre, un pauvre homme et un assez triste sire. Fut-il malheureux ? On n'ose l'affirmer, le bonheur étant si relatif, l'âme du bohême et du poète si déconcertante !

marot

« Il place le pronom complement le avant le verbe : si to le veux sgavoir, pratique courante durant tout le xvue siècle, et reprise par certains ecrivains du xix' (Chateaubriand).

- II ecrit scavoir, et cette orthographe est fautive, savoir venant de sapere et non de scire, le 5 a ete introduit au xvie siècle par des pedants mal instruits.

- II emploie qui pour ce qui.

Il se permet maintes inversions que, plus tard, reprouvera Malherbe et qui sont une des marques du style marotique : heureuse vie avoir.

« Il parle, eat dit le reformateur bourru, comme a Heidelberg ou a Bale; les Francais ne rejettent pas ainsi les infinitifs a la fin des propositions! » - Autre caracteristique de ce style, la multiplicite des ellipses.

(Des) successions, (des) biens, (du) feu, (de) proces; (n'etre) contraire a nuls, (une) sage simplesse, (des) amis, etc... Sans doute, en souvenir du latin.

Il use d'expressions claires, concises mais pour nous desuetes biens acquis a peine; notes y ajouterons au moins repithete grand' (a grand'peine).

Jamais procks, passerait, de nos jours, pour du « petit negre », cela rappelle aux anciens combattants leurs conversations avec les « camarades Senegal » ou les « camarades Soudan ».

- Marot se soucie peu des hiatus.

Vers Ia fin de sa vie, il evitera les plus criards; en attendant, il ecrit tranquillement feu en tout temps, et an dedans.

- Le mot repos est pour lui un adjectif au memo titre que dispos; en bonne logique it a raison, mais I'usage lui donne tort.

Le « tyran des mots et des syllabes lui eut certainement aussi reproche repos rimant avec dispos, It cause de leur parente trop proche.

Le double emploi de nul, pronom indefini, au vers 7, est fortement archaique.

- le c de publlegues, comme eelui de faict au vers 2, se justifie par l'etyrnologie.

Simplesse a, pour succedane, sim- plicite.

Simplesse correspondrait maintenant It simplot et simplicite a simple. Appareils signifie ici apprets.

II conserve ce sens au xvue siècle. Mit tout cet appareil retomber stir ma tete It faut patter, lisons-nous dans 1phigente.

Et le mot appareil designe le fer, le bandeau, la flamme, taus les preparatifs du sacrifice. Les rimes, plates, n'offrent Hen de remarquable.

Deux peuvent passer pour riches : pareils et appareils; sgavotr et avoir; les autres sont suffisantes.

Le vers decasyllabique, avec la cesure apres le quatrieme pied, est le metre pre- fere de Marot; it le manie avec dexterite.

Remarquons encore la reprise finale des deux premiers vers; it affectionne cette sorte de refrains, partie integrante des rondeaux, des ballades et des petits genres en honneur chez les grands rhetoriqueurs.

Enfin constatons que les vers de cette enumeration sont passablement prosaIques; on peut meme affirmer qu'ils sont totalement depourvus de poem. *. Valent-ils davantage par le fond que par la forme? Cette piece, dit Nisard, appreciant Pepigramme de Martial, « est pleine nine philosophie deuce et honnete et d'une morale aimable ».

Passe pour un paten, mais de Marot, auteur de l'Oraison devant le Crucifix, on serait en droit d'attendre autre chose.

La verite est que les onze recettes qu'il nous propose expriment une sagesse un peu courte. Le traducteur des psaumes, l'ami des protestants i se defend d'être here- tique est, en somme, et avant tout, tin epicurien (I), qu on ennemi de l'effort, revant d'une vie aisee de parasite, on kgoiste incapable de se donner, meme dans Famine, de se depenser au service d'une grande cause.

Il ne fut point depourvu d'une certaine ambition, puisqu'il se poussa jusqu'aupres des grands, et tenta de jouer son role dans le grand drame de la Reforme.

Il manqua de sagesse, puisque, etourdiment, follement, it compromit a phi- sieurs reprises une situation enviee.

11 n'a pas connu la joie d'un paisible foyer; il eut maints proces; it n'a pas recueilli, que nous saehions, de bril- lantes successions, y compris Ia charge de valet de chambre du roi, leguee par son Ore, plus honorifique que lucrative (240 livres).

Son esprit parait avoir ete assez inquiet.

II eut des ennemis, et par sa faute.

Imprudent, il mit le nez, on peu plus qu'il n'efit fallu, dans les c publicques affaires (1) Si Marot a traduit Martial, c'est qu'il pensalt comma lui; il a dit, de sou propre chef : Pour tous souhaits, ne desire en ce monde Fors que sante et toujours mille escus. Il place le pronom complément le avant le verbe : si tu le veux sçavoir, pratique courante durant tout le xvu• siècle, et reprise par certains écrivains du XIX• (Chateaubriand).- Il écrit sçavoir, et cette orthographe est fautive, savoir venant de sapere et non de scire, le ç a été introduit au XVI" siècle par des pédants mal instruits.

- Il emploie qui pour ce qui.

Il se permet maintes inversions que, plus tard, réprouvera Malherbe et qui sont une des marques du style marotique : heureuse vie avoir.

« Il parle, eût dit le réformateur bourru, comme à Heidelberg ou à Bâle; les Français ne rejettent pas ainsi les infinitifs à la fln des propositions! :.

-Autre caractéristique de ce style, la multiplicité des ellipses.

(Des) successions, (des) biens, (du) feu, (de) procès; (n'être) contra1re à nuls, (une) sage simplesse, (des) amis, etc ...

Sans doute, en souvenir du latin.

- Il use d'expressions claires, concises mais pour nous désuètes : biens acquis à peine; nous y ajouterons au moins l'épithète grand' (à grand'peine).

Jamais procès, passerait, de nos jours, pour du «petit nègre», cela rappelle aux anciens combattants leurs conversations avec les « camarades Sénégal » ou les « camarades Soudan ».

-Marot se soucie peu des hiatus.

Vers la fln de sa vie, il évitera les plus criards; en attendant, il écrit tranquillement feu en tout temps, et au dedans.

-Le mot repos est pour lui un adjectif au même titre que dispos; en bonne logique il a raison, mais l'usage lui donne tort.

Le « tyran des mots et des syllabes » lui eût certainement aussi reproché repos rimant avec dispos, à cause de leur parenté trop proche.

- Le double emploi de nul, pronom indéfini, au vers 7, est fortement archaïque.

- le c de J!Ublicques, comme celui de faict 1 au vers 2, se justifie par l'étymologie.

- Slmplesse a, pour succédané, sim­ plicité.

Simplesse correspondrait maintenant à simplot et simplicité à simple.

- Appareils signifie ici apprêts.

Il conserve ce sens au xvn• siècle.

Dût tout cet appareil retomber sur ma tête Il faut parler, lisons-nous dans Iphigénie.

Et le mot appareil désigne le fer, le bandeau, la flamme, tous les préparatifs du sacrifice.

Les rimes, P.lates, n'offrent rien de remar. »

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