VIGNEULLES Philippe : sa vie et son oeuvre
Publié le 12/11/2018
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VIGNEULLES Philippe de (1471-1528). Conteur et chroniqueur, né à Vigneulles, près de Metz, Philippe a fait lui-même le récit de sa vie dans un Journal et dans une Chronique de la ville de Metz fort précieux pour l’historien. D’origine modeste, autodidacte et assez aventureux, il travaille quelque temps comme apprenti drapier, à Metz; avec quelques compagnons, il part à pied pour Rome en 1486, s’arrête en chemin au service d’un chanoine de Genève, traverse l’Italie en changeant souvent de maître, séjourne un moment à Naples, revient en conduisant des chevaux au roi de France, mais abandonne le convoi en route aux abords de Lyon. Au bout de ces cinq années d’errance picaresque, le revoilà drapier dans sa bonne ville prise par la guerre; malgré quelques nouvelles aventures (il est fait prisonnier en Lorraine), sa vie va s’écouler à Metz — dont il devient l’un des plus riches marchands —, entre deux foires, deux pèlerinages et quelques épidémies : lorsqu’il ne peut plus bouger, cet homme actif écrit, malheureux de ne point connaître le latin depuis son enfance, mais très curieux de livres — y compris des livres italiens rapportés de son périple. Cette passion d’écrire, jointe à la modestie de son savoir, le mène dans deux voies :
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pied
pour Rome en 1486, s'arrête en chemin au service
d'un chanoine de Genève, traverse l'Italie en changeant
souvent de maître, séjourne un moment à Naples, revient
en conduisant des chevaux au roi de France, mais aban
donne le convoi en route aux abords de Lyon.
Au bout
de ces cinq années d'errance picaresque, le revoilà dra
pier dans sa bonne ville prise par la guerre; malgré quel
ques nouvelles aventures (il est fait prisonnier en Lor
raine), sa vie va s'écouler à Metz -dont il devient l'un
des plus riches marchands -, entre deux foires, deux
pèlerinages et quelques épidémies : lorsqu'il ne peut plus
bouger, cet homme actif écrit, malheureux de ne point
connaître le latin depuis son enfance, mais très curieux
de livres - y compris des livres italiens rapportés de
son périple.
Cette passion d'écrire, jointe à la modestie
de son savoir, le mène dans deux voies : la Chronique de
sa ville, forme traditionnelle, où il mêle ses expériences
personnelles aux légendes historiques, et la nouvelle, où
son recueil (les Cent Nouvelles nouvelles) constitue l'un
des maillons les plus intéressants de la littérature fran
çaise, derrière les Cent Nouvelles nouvelles bourgui
gnonnes du xve siècle, qu'il connaît bien, et avant tout le
développement de ce genre illustré par Bonaventure Des
Périers et Marguerite de Navarre.
S'il reprend le titre des nouvelles bourguignonnes (en
ajoutant d'ailleurs une dizaine de titres au corpus habi
tuel d'une centaine) et s'il semble se souvenir de Boc
cace ou d'autres conteurs italiens, c'est sans doute à son
propre goût pour les anecdotes vécues sous ses yeux, et
pour une tradition orale qui peut bien être à 1' origine de
farces réelles, qu'il doit le plus.
Son inspiration est à la
fois très convenue et très surprenante quand le rire doit
naître de bons tours qui ne concernent pas un public
cultivé et humaniste : non que leur caractère obscène ou
scatologique soit très prononcé (la tradition humaniste
en connaît bien d'autres), mais leur insignifiance même nous
révèle bien davantage à quel point ce rire n'est plus
le nôtre, en particulier dans le cycle des nouvelles aux
vengeances anodines, où le non-sens se développe mieux
que le comique.
Malgré les quelques retouches que l'au
teur a apportées à son manuscrit -confessant son peu
de métier -, la raideur du style et l'état fragmentaire
d'un assez grand nombre de nouvelles contribuent à
dérouter encore plus le lecteur.
Tel qu'il est, cependant, ce texte naïf et bonhomme
vient conforter la thématique traditionnelle anticléricale
et antiféministe, à laquelle il donne la vigueur d'un
regard lucide sur le réel: on voit ainsi s'opposer à une
hiérarchie ecclésiastique plus cultivée et plus sensée une
cohorte de frères prêcheurs rapaces et bavards (les
« questains » ); plus que les gros bourgeois de Metz,
Vigneulles décrit tout le menu peuple des campagnes et
de la ville au travail, peuple dont les trajets, les objets,
les habitudes sont bien présents.
Enfin, quoique dans ses
facéties il préfère de loin le récit d'un bon tour à un bon
mot, Vigneulles aime jouer du latin déformé, des jargons
et, surtout, de son parler de la région de Metz, sur lequel
il est l'un des meilleurs témoins que l'on puisse
imaginer.
BIBLIOGRAPHIE Œuvres.
-Le Journal a été publié par H.
Michelant,
Gedenkbuch des Metzer Bürgers Philippe von Vigneulles, Stutt
gart, 1852; la Chronique de Philippe de Vigneulles, par Charles
Bruneau, Metz, 1927-1933; les Cent Nouvelles nouvelles, par
Charles H.
Livingston, Genève, Droz, T.H.R., 1972.
On se repor
tera à cette édition pour des renseignements concernant l'auteur
et ses sources.
A consulter.
-Marie Dorner, «Philippe de Vigneulles, un
chroniqueur messin des xve et XVIe siècles », Mémoires de l'aca
démie de Metz, 1913-1914, p.
45-110; Krystyna Kasprzyk,
Nicolas de Troyes et le genre narratif en France au xvi" siècle,
Klincksieck, 1963..
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