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Vigny prêtant une voix à la Nature lui fait dire (La maison du berger)

Publié le 12/02/2012

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vigny

Elle me dit : « Je suis l’impassible théâtre Que ne peut remuer le pied de ses acteurs ; Mes marches d’émeraude et mes parvis d’albâtre, Mes colonnes de marbre ont les dieux pour sculpteurs. Je n’entends ni vos cris ni vos soupirs ; à peine Je sens passer sur moi la comédie humaine Qui cherche en vain au ciel ses muets spectateurs.

« Je roule avec dédain, sans voir et sans entendre, À côté des fourmis les populations ; Je ne distingue pas leur terrier de leur cendre, J’ignore en les portant les noms des nations. On me dit une mère et je suis une tombe. Mon hiver prend vos morts comme son hécatombe, Mon printemps ne sent pas vos adorations.

Ces vers célèbres traduisent les sentiments d'Alfred de Vigny envers la Nature, qui tient une si large place dans la littérature romantique. Nous essaierons d'abord de déf$ager la pensée philosophique exprimée dans ces deux strophes, la qualite de l'émotion du poète et ses procédés d'expression. Après quoi nous serons en mesure de le comparer à ses émules : Lamartine, Hugo, Musset, et de marquer en quoi ses conceptions touchant la Nature diffèrent des leurs....

vigny

« marbre...

Mais tandis que nous cherchons vainement a associer ces divers elements, nous nous representons un edifice a Pantique, avec ses parvis, son escalier monumental, ses portiques aux colonnes de marbre, son fron- ton sculpte.

La Nature specifie d'ailleurs qu'elle ne doit rien aux hommes; ce sont les dieux -- les forces naturelles - qui l'ont faconnee.

Conception paIenne, soulignons-le au passage. Les trois vers suivants semblent la consequence du quatrieme.

Parce que la Nature n'est redevable qu'aux dieux, le sort des hommes ne Pinteresse pas.

Elle n'entend ni leurs cris de douleur ou de revolte, ni leurs soupirs d'amour ou de tristesse.

A peine je sens passer sur moi la comedie humaine. « A peine place a la fin du vers 5, deux syllabes opposees aux dix prece- dentes, traduit Pindifference et le (Wain.

Balzac venait precisement de donner a l'ensemble de son oeuvre le titre de Comedie humaine.

Vigny a pu s'en souvenir.

Comedie ne signifie pas ici : piece gaie, it garde ici le sens large du xvii' siècle : piece dramatique.

Le poke deiigne par la les vicissitudes de la vie.

La Nature en park avec mepris, comme si nos cris et nos soupirs n'etaient pour elle qu une representation sans importance. Les acteurs, comme au theatre, cherchent l'approbation, les encourage- ments des spectateurs.

Vain espoir.

Le ciel - les etres surnaturels auxquels Phomme est en spectacle - ne s'occupe pas de lui.

C'est le theme du Mont des Oliviers.

La divinite reste muette en face de nos plus violentes dou- leurs.

Elle n'entend pas les prieres des meilleurs d'entre nous; celles meme du Christ ne l'ont point &nue.

Les habitants du ciel se taisent, tout comme s'ils n'existaient pas.

La strophe suivante est plus sombre encore.

La Nature ne s'en tient pas a un silence dedaigneux, elle se complait a detruire cette humanite qui l'adore.

Elle est identifiee ici avec la Terre, roulant dans l'espace tout ce qui vita sa surface : fourmis et populations.

Insectes infimes-et rois de la crea- tion, c'est tout un a ses yeux.

Rapprochement intentionnel, destine a humi- her l'homme qui se croft un etre a part dans l'univers.

Nous agissons ainsi , pour marquer notre mepris a des etres que nous jugeons vils : nous affec- tons de ne les pas voir et, s'ils ont une voix, de ne les pas entendre; tels ces mendiants sordides, indignes de notre pale, qui donnent en spectacle leurs plaies, leurs infirmites.

Et In Nature insiste cruellement : elle ne dis- tingue pas la fourmiliere, ou grouille la vie, des tombeaux plus ou moins pretentieux, ou git in cendre de nos morts.

L'adjectif possessif leur est employe incorrectement, mais a dessein, pour mieux identifier fourmis et populations. Le vers 11 offre une autre incorrection.

Grammaticalement it signifierait que la Nature porte les noms des nations.

Le lecteur averti ne s'en choque pas et s'accommode de cette syntaxe irreguliere; it retablit spontanement le sens : j'ignore les noms des nations que je porte.

Et voici le vers principal de cette seconde strophe, un des plus souvent cites : On me dit une mere, et je suis une tombe. Sentence.

brutale, bannissant toute illusion, tranchante et definitive comme un coup d'epee.

Mere, que de fois in Nature a ete saluee de ce nom quasi adorable; tant l'amour maternel est, ici-bas, ce qui se rapproche le plus de l'amour divin! Elle est, en effet, pour nous la source apparente de toute chose.

C'est elle qui nourrit l'homme; celui-ci ne saurait pas plus se passer d'elle que l'enfant du sein maternel.

Elle lui fournit, en outre, de pures Vigny: des spectacles, des harmonies, des parfums qui ravissent ses sens. Vigny oublie tant de bienfaits pour ne voir que notre fin miserable.

Dans une vive antithese - qui cloche quelque peu, car maratre est le veritable antonyme de mere - it oppose ce nom si doux, si riant, au nom sinistre et cruel de tombe.

Comme tout, apparemment, nait de la Nature, tout, a en juger par nos seuls yeux de chair, retourne a la terre.

Deux autres formules, aussi apres, aussi dicourageantes, confirment et renforcent he pessimisme de la precedente. La Nature personnifie les saisons t leur attribue des sentiments hostiles ou meprisants.

L'Hiver a de feroces exigences, comme ces dieux antiques a qui l'on immolait des victimes pour les apaiser, les remercier ou se les concilier.

C'est comme un droit, un tribut preleve sur he troupeau humain. Il lui Taut, ii prend son hecatombe...

non plus les 100 boeufs que l'on offrait marbre ...

Mais tandis que nous cherchons vainement à a~socier ces divers éléments, nous nous représentons un édifice à l'antique,' avec ses parvis, son escalier monumental,...ses portiques aux colonnes de .marbre, son fron­ ton sculpté.

La Nature spécifie d'ailleurs qu'elle ne doit rien aux hommes; ce sont les dieux ----:les forces naturelles - qui l'ont façonnée.

Conception païenne, soulignons-le au passage.

· · Les trois vers suivants semblent la conséquence du quatrième.

Parce que la Nature n'est redevable qu'aux dieux, le sort des hommes ne l'intéresse pas.

Elle n'enteJ;td ni leurs cris de douleur ou de révolte, ni leurs soupirs d'amour ou de tristesse.

A peine je sens passer sur moi la comédie humaine.

« A peine », placé à la fin du vers 5, deux syllabes opposées aux dix précé­ dentes, traduit l'indifférence et le dédain.

Balzac venait précisément de donner à l'ensemble de son œuvre le titre de Comédie humaine.

Vigny a pu s'en souvenir.

Comédie ne signifie pas ici : pièce gaie, il garde ici le sens large du xvn• siècle : pièce dramatique.

Le poète déSigne par Jà les vicissitudes de la vie.

La Nature en parle avec mepris, comme si nos cris et nos soupirs n'étaiént pour elle qu'une représentation sans importance.

Les acteurs, comme au théâtre, cherchent l'approbation, les encourage­ ments des spectateurs.

Vain espoir.

Le ciel- les êtres surnaturels auxquels l'homme est en spectacle- ne s'occupe pas de lui.

C'est le thème du Mont des Oliviers.

La divinité reste muette en face de -nos plus violentes dou­ leurs.

Elle n'entend pas les prières des meilleurs d'entre nous; celles même du Christ ne l'ont point émue: Les habitants du ciel se taisent, tout comme s'ils n'existaient pas.

La strophe smvante est plus sombre encore.

La Nature ne s'en tient pas à un silence dédaigneux, elle se complaît à détruire cette humanité qui l'adore.

Elle est identifiée ici avec la Terre, roulant dans l'espace tout ce qui vit à sa surface : fourmis et populations.

Insectes infimes~et rois de la créa­ tion, c'est tout un à ses yeux.

Rapprochement intentionnel, destiné à humi­ lier l'homme qui se croit un être à part dans l'univers.

Nous agissons ainsi pour marquer notre mépris à des êtres que nous jugeons vils : nous affec­ tons de ne les pas voir et, s'ils ont une voix, de ne les pas entendre; tels ces mendiants sordides, indignes de notre pitié, qui donnent en spectacle leurs plaies, leurs infirmités.

Et la Nature insiste cruellement : elle ne dis~ tingue pas la fourmilière, où grouille la vie, des tombeaux plus ou moins prétentieux, où gît la cendre de nos morts.

L'adjectif possessif leur est employé incorrectement, mais à dessein, pour mieux identifier fourmis et populations.

· Le vers 11 offre une autre incorrection.

Grammaticalement il signifierait que la Nature porte les noms des nations.

Le lecteur averti ne s'en choque pas et s'accommode de cette syntaxe irrégulière; il rétablit spontanément le sens :.

j'ignore les noms des nations que je porte.

Et voici le vers principal de cette seconde strophe, un des plus souvent cités : On me dit une mère, et je suis une tombe.

Sentence.

brutale, bannissant toute illusion, tranchante et définitive comme un coup d'épée.

Mère, que de fois la Nature a été saluée de ce nom quasi.

adorable; tant l'amour maternel est, ici-bas, ce qui se rapproche le plus de l'amour divin! Elle est, en effet, pour nous la source apparente de toute chose.

C'est elle qui nourrit l'homme; celui-ci ne saurait pas plus se passer d'elle que l'enfant du sein maternel.

Elle lui fournit, en outre, de pures joies : des spectacles, des harmonies, des parfums qui ravissent ses sens.

Vigny oublie tant de bienfaits pour ne voir que notre fin misérable.

Dans une vive antithèse ----: qui cloche quelque peu, car marâtre est le véritable antonyme de mère - il oppose ce nom si doux; si riant, au nom sinistre et cruel de tombe.

Comme tout, apparemment, naît de la Nature, tout, à en juger par nos seuls yeux de chair, retourne à la terre.

Deux autres formules, aussi âpres, aussi d. »

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