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Zazie dans le métro

Publié le 17/01/2013

Extrait du document

INTRODUCTION « Elle est quand même fortiche la jeunesse d'aujourd'hui « : en choisissant de placer la petite Zazie au centre de leurs oeuvres, Raymond Queneau et Louis Malle nous invitent à voir dans leur roman et dans leur film une image de la jeunesse contemporaine, cette « nouvelle génération « (p. 16) du début des années 1960. Le moins que l'on puisse dire, c'est que la représentation de cette « mouflette « rompt avec une certaine imagerie de l'enfance. La zazie du film et celle du roman partagent avant tout une même énergie, un élan vital fait d'appétit, de curiosité et d'irrévérence. Cette force est loin d'être sans conséquence sur le monde des adultes avec lequel elle entretient un rapport explosif, agissant sur lui tantôt comme un révélateur tantôt comme un agent de destruction. Mais son action est plus profonde encore : elle s'apparente à une contamination généralisée, à la fois des adultes qui l'entourent et qui vont se trouver modifiés à son contact, mais aussi de la forme qui lui donne existence : l'esprit à la fois farceur, irrévérencieux et ludique de cette enfant est à l'oeuvre autant dans l'écriture du roman que dans la mise en scène du film. I. ZAZIE, UNE « FORCE QUI VA « : ÉNERGIE, APPÉTIT ET IMPERTINENCE Dans le roman aussi bien que dans le film, ce qui frappe d'abord dans le personnage de Zazie, c'est l'impression qu'elle possède un élan vital presque inépuisable. Loin de se laisser conduire et conseiller par les adultes, cette enfant est mue par un appétit insatiable et semble absolument dépourvue de limites, voire de surmoi. 1. Autonomie Zazie n'entretient aucun rapport de dépendance à l'égard des adultes : à son arrivée à la gare, c'est elle qui prend l'initiative : elle reconnaît Gabriel et se présente sans sa mère (« une mouflette surgit qui l'interpelle - Chsuis Zazie, jparie que tu es mon tonton Gabriel « p. 9). Dans le film, elle fait irruption depuis le hors champ, alors que Gabriel regarde encore au loin (chap. 1, 3'04). Placée sous la garde de son oncle, Zazie &e...

« Mais son appétit est parfois d’ordre intellectuel : tout au long du film, elle entend satisfaire sa curiosité et comprendre ce qu’est un « hormosessuel » (p.

65), question à laquelle les adultes refuseront systématiquement d’apporter une réponse valable et qu’elle s’acharnera à reposer avec plus ou moins de violence.

Le caractère sans limite de ses aspirations et de ses fantasmes est également illustré par sa manière de se projeter dans l’avenir : elle désire d’abord être institutrice pour « faire chier les mômes (…).

Ceux qu’auront [s]on âge dans dix ans, dans vingt ans, dans cinquante ans, dans cent ans, dans mille ans, toujours des gosses à emmerder », puis se ravise : elle sera astronaute pour « pour aller faire chier les martiens » (p.

23).

4.

Un être sans limites : ni convenance, ni politesse, ni tabou.

L’énergie de Zazie se déploie avec d’autant plus de vigueur qu’elle semble n’être bornée par aucune limite de convenance.

Elle dit vertement à chacun ses vérités, sans retenue aucune : son appréciation sur l’état de son taxi de Charles (« Il est rien moche son bahut » p.

12), son avis sur le physique de la veuve Mouaque (« Et ma tante est drôlement mieux que vott’ pomme » p.

129), l’hypocrisie de Pédro-surplus (« Alors, vous mentiez tout à l’heure ? » p.

53).

Ces déclarations sont clairement revendiquées comme une affirmation de liberté et d’indifférence à l’égard des adultes et de leurs règles : « Grandes personnes mon cul » (p.

102) ; « la nouvelle génération, dit Zazie, elle t’… » (p.

16).

Sa parole n’est entravée par aucun tabou ; Zazie n’a en particulier aucune difficulté à aborder les questions sexuelles.

Si son insistance sur « l’hormosessualité » de Gabriel peut être mise sur le compte de l’ignorance, le récit du fait divers qui la met en scène avec ses propres parents montre en revanche le naturel avec lequel elle aborde la question de l’inceste (chap.

5).

On observe à cet égard une nette différence entre le roman et le film : Louis Malle a en effet largement atténué la charge de scandale du chapitre 5 dans lequel Zazie raconte la tentative d’inceste dont elle a été l’objet.

Certains passages, les plus innocents, sont audibles tandis que ceux qui explicitent vraiment la tentative d’inceste sont rendus inaudibles car la bande son est montée à l’envers et que les paroles sont couvertes par la musique (26’).

Nous n’entendons donc pas ces passages du roman : « voilà qu’il se met à me faire des papouilles zozées, alors je dis ah non parce que je comprenais où c’est qu’il voulait en arriver le salaud », « il bavait même un peu quand il proférait ces immondes menaces et finalement immbondit dssus » (p.

54).

5.

… et sans innocence ? L’écart entre le roman et le film Zazie a donc une position plus radicalement étrangère aux questions sexuelles dans le film que dans le livre, ce qui lui permet de poser ses questions sans créer de trouble sur sa propre position.

C’est en ce sens que l’on peut interpréter l’écart d’âge qui sépare la Zazie du roman de celle du film.

Louis Malle a expliqué son choix dans un entretien : « Zazie, dans le roman, est un personnage de treize-quatorze ans, très petite femme ; elle a un côté Lolita qui nous gênait beaucoup parce qu’il enlevait de la force à notre démonstration et ça en faisait un personnage qui était un tout petit peu déjà du monde des adultes.

Alors on lui a enlevé quatre ans.

C’est une enfant » (« Entretien avec Louis Malle », André FONTAINE, Le Monde, 27 octobre 1960).

Par « enfant », Louis Malle entend une forme de pureté : « [Zazie] est, si vous voulez, un personnage pur et dur à la fois, comme sont les enfants ».

Dans le roman, les passages qui abordent la question sexuelle sont plus nombreux et plus explicites : aussi bien dans l’évocation des possibles pulsions pédophiles de Pédrosurplus (« C’est un dégoûtant satyre, dit Gabriel.

Ce matin, il a coursé la petite jusque chez elle.

Ignoble.

» p.

175), que dans les manœuvres de charme que Zazie exerce consciemment (« C’est pas gentil pour moi, ça, dit Zazie en se tortillant.

– Si maintenant elle se met à te faire du charme, dit Gabriel, on aura tout vu » p.

124).

• La confusion entre les deux mondes et une maturité précoce La confusion entre le monde des adultes et celui des enfants s'incarne dans le personnage de Zazie.

Elle peut tout aussi bien jouer l'enfant innocente ou bien faire preuve d'une grande maturité.

Pour échapper à Turandot qui veut l'empêcher de fuguer, elle hurle :. »

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