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Faut-il enterrer le passé ?

Publié le 17/02/2004

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Les convertis ne reculaient pas devant la confession de leurs anciennes débauches : le passé, enterré au sens où nous l'avons entendu, n'est pas un passé oublié, effacé. Il semble bien qu'en tant que dimension de la conscience, le passé soit incontournable. A. La mémoire, principe d'existence Tout homme élabore, à mesure qu'il avance dans la vie, le récit de son passé. Cette construction individuelle dépasse le simple souvenir personnel et intègre en général des éléments du récit familial, par exemple ce qui concerne les circonstances de la naissance. À l'échelle collective, les peuples fabriquent aussi leur passé, à travers des mythes ou, de manière plus rationnelle, à partir des travaux d'historiens. Au-delà même du simple souvenir, la conscience humaine semble avoir besoin d'une représentation de son passé, de ses origines. Loin de vouloir l'effacer, l'enterrer, elle veut le mettre au jour, l'exhumer, le conserver. Est-il possible, dans ces conditions, d'enterrer le passé ? B.

« toujours par faire retour d'une manière ou d'une autre.

Au mieux, sous forme d'un débat après-coup, d'une mauvaiseconscience tardive (c'est le cas aujourd'hui en France au sujet du régime de Vichy) ; au pire, sous la forme d'unerenaissance : ce qui n'a pas été clairement inscrit dans le passé, peut toujours prétendre au présent, aspirer à serejouer comme si c'était pour la première fois.

Ce qu'une trop forte culpabilité force à refouler, risque fort derenaître.

En ce sens, le passé qu'on a « enterré » n'est jamais vraiment mort. Transition Il n'est donc pas possible d'abolir la dimension du passé.

Changer son rapport au passé ne revient pas à l'« ensevelir» afin de ne plus avoir à en parler.

Quant aux épisodes du passé que l'on « enterre », on se condamne à les revivred'une manière ou d'une autre.

Il n'y a donc qu'une seule manière possible d'« enterrer » le passé : l'enterrer commeon enterre les morts. 3.

Le souvenir est la condition de l'oubli A.

Enterrer le passé comme on enterre ses mortsL'inhumation d'un défunt n'a pas pour vocation de produire l'oubli : la sépulture est au contraire un acte de mémoire,qui permet la commémoration, le recueillement sur la tombe par exemple.

Pourtant, c'est aussi parce qu'ils enterrentainsi leurs morts que les vivants peuvent poursuivre leur vie et se délivrer de la nostalgie, de l'attente du retour dudéfunt.

Nous ne vivrions la mort que comme une absence si rien ne venait la signifier, la symboliser.

Un passé qui nelaisse derrière lui aucune trace de sa disparition n'est pas vraiment mort.

Les symboles du passé nous aident donc àla fois à nous en souvenir et à nous en libérer.

Ainsi faut-il se rendre présent le passé pour pouvoir l'oublier. B.

La parole comme sépultureLa sépulture, l'enterrement aident à faire passer le passé d'un être.

Les événements, eux, n'ont pas d'autresépulture que les mots qui les disent, les décrivent, les discutent, les comprennent.

Les mots sont donc aussi, à leurmanière, les symboles, les « tombeaux » de ce qui n'est plus.

Ce n'est pas en taisant le passé qu'on l'enterre : c'estau contraire en le célébrant par la parole, en l'énonçant qu'on peut l'inscrire dans l'ordre de la mémoire.

AinsiAugustin fait-il, dans ses Confessions très chrétiennes, le récit de sa vie pécheresse, d'avant la grâce. Conclusion On peut enterrer le passé : c'est même à cette seule condition qu'on s'en libère, qu'on se rend disponible auprésent, à l'innovation.

Enterré, c'est-à-dire symbolisé, pensé, souvenu, le passé devient mémoire.

Il vient enrichirle sol de l'existence sur lequel on vit, on marche et on bâtit.

Ce sol est un fondement : on ne le voit pas mais il estlà, sous nos pieds, comme la mémoire sur laquelle tout notre être se fonde.. »

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