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Wanda de Alfred de VIGNY - Recueil : "Les Destinées"

Publié le 15/02/2011

Extrait du document

vigny

« Elle n'est qu'une femme... Aux douceurs du ciel bleu. « Elle n'est qu'une femme et mange le pain noir, Le pain qu'à son mari donne la Sibérie. Et parmi les mineurs s'assied, pâle et flétrie, Et bois chaque matin les larmes du devoir. En ce temps-là ma sœur, sur le seuil de la porte Me dit : « Vivez en paix, je vais garder ma foi Gardez ces vanités, au monde je suis morte Puisque le seul que j'aime est mort devant la loi Des splendeurs de mon front conservez les ruines Je le suivrai partout, jusques au fond des mines Vous qui savez aimer, vous feriez comme moi; L'empereur tout puissant qui voit d'en haut les choses Du prince mon seigneur voulut faire un forçat Dieu seul peut réviser un jour les grandes causes Entre le souverain, le sujet et l'état Pour moi, je porterai mes fils sur mon épaule Tandis que mon mari, sur la route du pôle Marche et traîne un boulet, conduit par un soldat. J'irai dans les caveaux, dans l'air empoisonneur, Conservant seulement, pour toute ma richesse, L'aiguille, et le marteau pour luxe et pour honneur;

Et puisqu'il est écrit que In race des Slaves Doit porter et le nom et le joug des esclaves, Je descendrai vivante au tombeau des mineurs; Là j'aurai soin d'user ma vie avec la sienne, Je soutiendrai son bras quand il prendra l'épieu, Je briserai mon corps pour que rien ne retienne Mon âme quand son âme aura monté vers Dieu. Et bientôt, nous tirant des glaces éternelles, L'ange de mort viendra nous prendre sous ses ailes, Pour nous porter ensemble aux douceurs du ciel bleu.

Les circonstances :    Vigny, dans ce passage nous communique l'impression profonde laissée sur son âme par une conversation à laquelle il prit part au cours d'une représentation de Chatterton; la comtesse Kowaskowska lui avait appris que sa sœur, la princesse Troubetzkoï, avait suivi son époux, condamné aux travaux forcés dans les mines de l'Oural, puis à la déportation en Sibérie.    Impression d'ensemble :    Vigny, en exposant les articles d'un programme qui est une profession de foi, nous montre le travail produit sur une âme d'une noblesse rare par un grand choc moral qui en libère l'héroïsme latent, qu'une vie sans heurt n'aurait pu révéler, et qui, se haussant au niveau de circonstances exceptionnelles, atteint d'un seul essor les sommets de la grandeur.

vigny

« sont émouvants les stigmates d'une fatigue causée par une acclimatation atroce.

En buvant ses larmes, Wanda seraidit devant la souffrance, car elle sait que la plainte déflore le sacrifice.

Non seulement l'acceptation de celui-cicrée pour elle la seule qui soit possible, mais encore il lui fera connaître une âpre volupté qui transcendera la notiondu simple bonheur, et dans lequel l'âme de Wanda trouvera son expression la plus haute dans un crescendopathétique. « En ce temps-là ma sœur., sur le seuil de [la porte, Nous dit : « Vivez en paix, je vais garder [ma foi. Gardez ces vanités : au monde je suis [morte.

» L'expression « en ce temps-là » semble reculer le sacrifice de Wanda dans une sorte de lointain, et lui confère unetonalité biblique.

Wanda est représentée au moment de sa rupture avec le monde; en elle se manifeste un paisibledétachement.

La religion du serment et le mariage, qui revêt une valeur sacramentelle, impriment à sa vie uneorientation toute différente au moment de ce départ.

Jetant un regard atone sur ses parures, qui sont des hochets,symboles d'une vanité qu'elle abjure, elle embrasse une foi neuve avec l'absolutisme du néophyte. «: Puisque le seul que j'aime est mort [devant la loi, Des splendeurs de mon front conservez [les ruines. Je le suivrai partout, jusques au fond des [mines Vous qui savez aimer, vous feriez comme [moi! » Vigny se plaît à faire ressortir le caractère d'un amour irremplaçable et exclusif, par lequel Wanda expliquesimplement les raisons de son acte.

La mort civile dont son mari est frappé inverse pour elle toutes les valeurs.

Elleconsidère avec lassitude ces parures qui ne sont plus pour elle que pacotille, dont elle se défait.

Placée en face del'irréparable, elle élèvera son courage à la hauteur des circonstances.

C'est pourquoi elle exprime sa volontéimplacable d'être la compagne de travail et de souffrance, celle dont l'obstacle ne peut que stimuler la force.

Avecune horreur non dissimulée pour toute pensée de réclame personnelle, elle refuse à être considérée comme un être d'exception; elle est persuadée qu'un sacrifice tel que le sien entre dans la norme quotidienne, et àsa sœur, qui doit savoir aussi bien qu'elle distinguer l'amour véritable de ce qui en est l'imitation, elle interdit toutéton-nement et toute admiration. « L'empereur tout-puissant qui voit d'en [haut les choses Du prince, mon seigneur, voulut faire un [forçat Dieu seul peut réviser un jour les grandes [causes Entre le souverain, le sujet, et l'état.

» Wanda admet avec une déférente soumission la notion du pouvoir basé sur la notion de droit divin.

Les décrets del'empereur qui règne dans une sorte d'empyrée sont incontestables de par leur essence même.

A ces décrets, ilappartient à Dieu seul de faire appel.. »

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