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En Inde, la victoire du BJP : entre le marteau et l'enclume

Publié le 05/12/2018

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Le BJP a d’emblée renoncé à appliquer des points essentiels de son programme, étant donné les divergences de vues qui l’opposaient à la plupart de ses alliés. Il s’était engagé à faciliter la construction d’un temple sur les décombres de la mosquée d’Ayodhya, détruite en 1992 par des militants nationalistes hindous. Ce débordement de violence avait été suivi par des représailles musulmanes, notamment à Bombay, et la mise en chantier d’un temple à Ayodhya conduirait sans doute à des manifestations de rue susceptibles de dégénérer à nouveau et à une recrudescence du terrorisme d’origine musulmane. Ensuite, le BJP s’était déclaré favorable à l’élaboration d’un Code civil uniforme qui visait principalement à exclure le recours à la charia (loi islamique), aujourd’hui source de droit pour la communauté musulmane. Or cette minorité - en tout cas ses leaders - s’y montre très attachée. Enfin, l’article 370 de la Constitution, qui accorde une autonomie poussée au Jammu-et-Cachemire, devait selon le BJP être abrogé. Pour les nationalistes hindous, en effet, l’octroi d’une telle autonomie n’a fait qu’alimenter le séparatisme cachemiri. Ces promesses électorales ont disparu du programme de gouvernement négocié par le BJP avec ses alliés après qu’Atal Behari Vajpayee eut été nommé Premier ministre.

 

En fait, le BJP est passé du nationalisme hindou au nationalisme nucléaire, en procédant à deux essais atomiques en mai 1998, ainsi qu’au nationalisme économique, comme en témoigne le retour à un certain protectionnisme, toutefois mitigé par une politique de la main tendue aux multinationales ne travaillant pas dans le secteur des biens de consommation.

 

Le BJP n’a toutefois pas renoncé à son idéologie, à laquelle la Rashtriya Swayam-sevak Sang (RSS, Association des volontaires nationaux) le rappelle volontiers, comme l’attestent la recrudescence des tensions avec le Pakistan à propos du Cachemire et la nomination de nombreux cadres des mouvements nationalistes hindous dans l’Administration et le système éducatif.

Les douzièmes élections générales qui se sont déroulées en Inde du 23 février au 7 mars ont, pour la première fois, porté au pouvoir le parti nationaliste hindou du Bharatiya Janata Party (BJP, Parti du peuple indien).

 

Cette victoire est courte, et elle procède moins d’une adhésion sans réserves à l’idéologie du parti qu’à un rejet de la classe politique. Si le taux de participation a été très élevé, surtout pour des élections anticipées (62 %, soit seulement deux points de moins que le record absolu de 1984, 64 %, et sept de plus qu’à l’occasion du dernier scrutin), cette mobilisation visait surtout à «sortir les sortants», qu’ils exercent le pouvoir au centre ou dans les États où le BJP a aussi essuyé des revers.

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