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- 1492 : Christophe Colomb accoste aux Antilles - 1519-1521 : Hernan Cortés conquiert l'Empire

Publié le 06/01/2014

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- 1492 : Christophe Colomb accoste aux Antilles - 1519-1521 : Hernan Cortés conquiert l'Empire aztèque - 1531-1535 : Pizarro conquiert l'Empire Inca, fondation de Lima - 1534 : Jacques Cartier au Canada, prise de possession au nom du roi de France - 1552 : publication par le dominicain espagnol Las Casas de la dénonciation des exactions commises contre les Indiens Très Brève Relation de la destruction des Indes, Tout à leur route africaine, les Portugais ont commis une erreur : ils n'ont pas cru la thèse audacieuse d'un Génois un peu exalté qui faisait un autre pari. Puisque la terre est ronde (point sur lequel la plupart des savants du temps étaient d'accord depuis longtemps), pourquoi ne pas essayer de passer par l'ouest pour atteindre les royaumes fabuleusement riches dont avait parlé naguère un Marco Polo ? L'homme, on l'a compris, s'appelle Christophe Colomb. Rejeté par les Portugais, il tente sa chance auprès d'Isabelle la Catholique, reine de Castille. Elle n'aura pas à le regretter. Le 12 octobre 1492, après deux mois et demi de voyage, Colomb accoste dans des îles qu'il pense être les Indes. Ce sont les Antilles. Il vient de découvrir l'Amérique, il vient d'ouvrir une voie où toutes les ambitions s'engouffreront bientôt : ce sera le temps des conquérants, les conquistadors. En 1519-1521, le premier d'entre eux, Hernan Cortés, pose pied en Amérique centrale, monte vers le nord et, avec une poignée d'hommes, en s'alliant habilement avec les tribus hostiles aux Aztèques, réussit à mettre à bas leur puissant empire, à en prendre la capitale Tenochtitlan, et, sur ses ruines, à fonder Mexico, centre de la NouvelleEspagne. En 1532, Pizarro, jouant perfidement des rivalités autour de l'Inca, l'empereur du lieu, défait la grande puissance qui depuis le Pérou dominait toute la cordillère andine. Il aura fallu quarante ans pour que les Espagnols mettent la main sur la moitié d'un continent, s'emparent de ses immenses richesses et déversent sur l'Europe, par caravelles entières, l'or et l'argent qu'ils y ont pillés. Les Portugais, grâce au navigateur Cabral qui y a accosté par hasard, ont conquis le Brésil en 1500. Très officiellement, dès la fin du xve siècle, les papes eux-mêmes (traité de Tordesillas de 1494) ont garanti le partage entre les deux pays de ces immenses territoires encore inconnus que l'on va bientôt appeler « le Nouveau Monde ». François Ier en sera furieux - « Le soleil luit pour moi comme pour les autres, s'exclamera-t-il, je voudrais voir la clause du testament d'Adam qui m'exclut du partage du monde » -, mais bien tard. Lui aussi rêve de la route fabuleuse qui doit mener vers les richesses et les épices. Mais le chemin du sud-ouest est déjà pris. En son nom, des marins téméraires essayent donc par le haut : c'est ainsi que le Malouin Jacques Cartier (1491-1557), cherchant le « passage du Nord-Ouest », commence par explorer l'embouchure du Saint-Laurent, remonte le grand fleuve, établit un poste à Montréal et revendique le Québec au nom de la France. Il faudra attendre près d'un siècle encore et Samuel Champlain (début du xviie siècle) pour que la colonie se développe. Au xvie siècle, la France, comme l'Angleterre d'ailleurs, a donc raté le coche, et n'est présente qu'à la marge dans l'épopée dont nous parlons. Faut-il pour autant, dans une histoire de notre pays, clore aussitôt ce chapitre ? Ce serait dommage. Ces « Grandes Découvertes » ont posé et continuent de poser de nombreuses questions philosophiques, humaines et historiques sur lesquelles on peut s'arrêter un instant. Le génocide indien Cette « conquête » du Nouveau Monde, vue du côté espagnol, est une page glorieuse. Vue du côté des vaincus, elle raconte l'histoire d'un effroyable anéantissement. Les historiens ne sont guère d'accord sur les estimations démographiques concernant le continent tout entier, la plupart des peuples qui y vivaient n'usaient pas de l'écriture, et le recensement est difficile à établir. Contentons-nous de chiffres parcellaires, ils sont éloquents : pour Hispaniola, la grande île que se partagent aujourd'hui la République dominicaine et Haïti, on estime une population indienne dépassant le demi-million à la veille de la conquête. En 1514, soit vingt-deux ans plus tard, elle tourne autour de 60 000 personnes. Pour le Mexique1, on passe en un siècle de 20 millions d'Indiens à 2. La proportion est la même partout : près de 90 % de la population disparaît. Les causes de cet effondrement sont multiples. On parle beaucoup du « choc microbien », causé par les virus apportés par les Espagnols contre lesquels les populations autochtones n'étaient pas immunisées. Il ne faut pas oublier non plus les guerres, les massacres, la réduction en esclavage, les monstrueuses conditions de travail imposées dans les mines, par exemple, et enfin les suicides de masse qui ravagèrent des populations désespérées par l'effondrement si soudain de leurs valeurs, de leur univers. Aujourd'hui, personne ne nie plus ces pages noires dont l'évocation soulève le coeur. Même le vocabulaire a changé. Nul historien ne parle plus, par exemple, de « découverte de l'Amérique », qui marque trop clairement le point de vue européen. Depuis les commémorations de 1992, on parle plus fréquemment de la « rencontre des deux mondes ». C'est encore un euphémisme. Les Indiens ont « rencontré » les conquistadors comme la victime rencontre les balles du peloton d'exécution. Quoi qu'il en soit, plus grand monde aujourd'hui n'ignore cette façon de voir les choses, les mentalités ont évolué, et c'est heureux, car on sait tous qu'il y a peu de temps encore l'histoire n'était pas racontée ainsi. Ouvrons par exemple un des livres de référence des années 1970 chez les Anglo-Saxons, l'Oxford History of American People2 de Samuel Eliot Morison, amiral et universitaire, fort célèbre en son temps. Il représente parfaitement le point de vue conventionnel de l'époque, c'est-à-dire celui qui dominait chez 80 % des Blancs. Voyons comment la conquête y est racontée. C'est assez vite vu. Les Espagnols étaient des bienfaiteurs. N'ont-ils pas amené le vrai Dieu à ces « Indiens dont la religion exigeait le meurtre de milliers d'innocents chaque année » ? N'ont-ils pas amené ensuite « les beaux-arts » et les églises qui donnent à leurs villes « cet air de grandeur » ? En clair, les Indiens étaient des sauvages à qui les Européens ont donné « la civilisation », air connu. Que les mêmes « sauvages » aient payé ce merveilleux cadeau de millions de victimes, il n'est pas dit un mot, le fait ne passe pas sous la casquette de notre historien amiral. Comme tant d'autres avec lui, l'homme raisonnait toujours, au milieu du xxe siècle, avec les schémas du xixe et son idée-force de « mission civilisatrice » de l'Occident. Elle permit à un continent d'asservir le monde sans se préoccuper des dégâts occasionnés par cet asservissement. On oublie trop au passage que bien des grands esprits s'étaient scandalisés de cette contradiction longtemps avant notre époque. Nous croyons que l'intérêt pour le sort des populations découle de nos mentalités modernes. C'est faux. La mise en cause des horreurs du xvie siècle occupait déjà nombre de contemporains. Citons le Français Montaigne, dans ses Essais (livre III, chap. vi) : « Tant de villes rasées, tant de nations exterminées, tant de millions de peuples passés au fil de l'épée et la plus riche et belle partie du monde bouleversée par la négociation des perles et du poivre... : méprisables victoires ! » Il écrit cela dans les années 1580, c'est-à-dire soixante ans à peine après les premiers pas des conquistadors au Mexique. Le plus célèbre des dénonciateurs de l'horreur de la Conquista est espagnol : c'est le dominicain Las Casas. Il sait de quoi il parle, il fut colon dans les Antilles, puis, entré en religion, il devint évêque du Chiapas, au Mexique. Il n'a de cesse de dénoncer les massacres, les tortures dont les Indiens sont victimes. Et, contrairement à ce que l'on pourrait penser, ses protestations ne sont pas des cris isolés que personne ne veut entendre. Elles arrivent jusqu'à l'oreille de l'empereur et roi d'Espagne Charles Quint. Ému, scandalisé même par ce qu'on lui raconte, il ordonne qu'on mette fin aux abus, et promulgue les leyes nuevas, les « lois nouvelles », faites pour atténuer le système terrifiant mis en place, l'encomienda, c'est-à-dire la réduction en esclavage des Indiens. Mais les colons refusent de les appliquer et Las Casas, inlassable, reprend son combat. Il lui fera affronter un autre érudit de son temps, Sepulveda, lors d'une dispute publique, la « controverse de Valladolid3 ». Le point passionnant de la polémique est que les deux hommes partent des mêmes présupposés intellectuels : tous deux sont chrétiens, tous deux ont baigné dans la culture humaniste dont nous parlions au chapitre précédent. Las Casas bien sûr, mais Sepulveda aussi, qui est un homme instruit, un esprit qui se veut ouvert, qui a lu les bons auteurs. Seulement, lire les bons auteurs ne doit pas être suffisant pour penser juste, puisqu'il s'en sert pour arriver à des conclusions qui nous font horreur : en se fondant sur Aristote, il pose que certaines races sont vouées par Dieu à être asservies par d'autres. Son adversaire Las Casas a un point de vue plus proche du nôtre : pour lui, les Indiens sont des hommes, nos frères, nos égaux et il est scandaleux de les maltraiter. Hélas, son opiniâtreté et la justesse de ses vues ne serviront à rien : les conquérants continueront à piller et les Indiens à mourir sous leur joug. C'est le point déprimant. Aujourd'hui, la conquête des Indes nous apparaît clairement comme un effroyable carnage, mais avec cinq siècles de recul, toute notre commisération ne fera ressusciter ni les victimes ni les civilisations séculaires englouties avec elles. Il y a cinq cents ans quelques hommes courageux tentèrent d'arrêter le massacre, leur époque était parfaitement capable d'entendre leurs arguments. Elle est restée sourde. Qu'est-ce qu'une civilisation supérieure ? Avec chacun une poignée d'hommes, Cortés au Mexique, Pizarro au Pérou ont conquis en un temps record deux empires extraordinaires et puissants, qui régnaient sur des terres immenses et des centaines de milliers de gens. Il est difficile de nier l'évidence : si les Espagnols ont vaincu, c'est qu'ils étaient les plus forts. On peut néanmoins s'interroger sur les raisons avancées pour expliquer cette victoire. On le verra, cela permet un tour d'horizon de quelques-unes des facettes amusantes de l'ethnocentrisme. Les conquistadors, bons chrétiens, étaient sûrs de leur supériorité sur les sauvages qu'ils ont dominés. On vient d'en parler, ils étaient assez mal placés pour donner à quiconque des leçons de morale. Il est un de leurs sentiments, toutefois, que l'on ne peut que partager : l'horreur qu'ils ont éprouvée devant un rite répandu, le sacrifice humain. Chez les Incas, il était rare. Les Aztèques, en revanche, le pratiquaient à très grande échelle, des dizaines de milliers de prisonniers de guerre étaient immolés chaque année à des dieux assoiffés. Quand les Espagnols sont arrivés à Tenochtitlan, du sang tout chaud encore, dit-on, ruisselait sur les escaliers majestueux des grandes pyramides où se consommait cet holocauste. Nul ne songerait à défendre cette épouvante. Pourquoi, cependant, personne ne songe à la mettre en parallèle ou au moins à tenter une équivalence avec ce qui se pratiquait, au même moment, en Occident ? Les bûchers de l'Inquisition espagnole, par exemple, ou encore les massacres presque contemporains des guerres de Religion. Comment ? Ça n'a rien à voir ! s'exclamera-t-on. Vous confondez tout ! Vraiment ? D'un côté, pour satisfaire ses dieux, on immole des innocents, de l'autre on en brûle, on en assassine au nom de la Sainte Foi ou de la conception que l'on se fait soi-même de son Dieu. L'intention n'est pas la même, le rite est tout autre, certes, mais pour la victime, franchement ? Entre celui qui périt sous le couteau d'obsidienne dont se servaient les prêtres indiens et celui qui meurt sur les fagots dont se servaient les prêtres catholiques, quelle différence ? Citons encore Montaigne, dont on ne se lasse pas : « Chacun appelle barbarie ce qui n'est pas de son usage. » Les Indiens ont été victimes de leur crédulité. Les pauvres « bons sauvages » des Antilles qui accueillirent les premiers Espagnols avec des fruits et des présents, mais aussi les très civilisés Aztèques. Ainsi, lorsque paraît Cortés, blanc et barbu, sur son cheval, animal inconnu, l'empereur Moctezuma croit-il d'abord au retour du dieu Quetzalcóatl que l'on attend depuis si longtemps ? Il lui offre cadeaux et sacrifices humains, il le fait venir dans sa capitale. Quand il s'aperçoit de sa méprise, il est trop tard, le loup est dans la place. L'histoire est connue. Elle enfonce le clou à propos d'Indiens abusés par leurs croyances et leur mysticisme. Le point est indiscutable. Pourquoi oublier cependant qu'une même crédulité fut le principal moteur de la conquête par les Européens ? Qu'est-ce qui pousse au voyage, qu'est-ce qu'on vient chercher dans ces terres que l'on croit être les portes de la Chine ? Des certitudes ? Pas du tout : les richesses parfaitement légendaires décrites par Marco Polo dans le récit de ses voyages. Ou encore l'idée qu'en faisant le tour du globe, on va pouvoir prendre les musulmans à revers en faisant alliance avec le « Prêtre Jean » et son immense royaume chrétien d'Afrique - parfaitement légendaire également. Bien sûr, il y a, pour inciter à la première traversée de Colomb, une base juste : le pari sur la rotondité de la Terre. Qu'y a-t-il d'autre qui soit rationnel chez ce mystique exalté qui, après avoir cru des années qu'il était vraiment arrivé en Inde, mourra seul en Espagne, dans un pur délire, persuadé d'avoir découvert le paradis terrestre ? Partout les Européens sont à la recherche de ce qu'ils croient aussi réel que le fer de leurs épées : des royaumes dont les maisons ont des toits d'or, des villes dont les forteresses sont serties de pierres précieuses. Et à chaque fois qu'on leur en promet, ils foncent ! Si Cartier revient au Canada lors de plusieurs voyages, c'est que les Indiens rencontrés lui ont promis de l'amener au Saguenay, ce royaume où tout est pierrerie et où les hommes volent comme les chauves-souris. C'est même ce que vient raconter devant le roi et la Cour le chef iroquois ramené à Paris, et le roi comme la Cour le croient et financent l'expédition. Lors de ce dernier voyage, Cartier est d'ailleurs tellement certain de trouver des richesses qu'il en trouve ; il revient avec des caisses pleines de diamants et d'or du Canada. L'or est de la pyrite, les diamants du quartz. Il faudra qu'il soit en France pour s'en rendre compte. Enfin, arme ultime, les Européens avaient pour eux la supériorité technique. Les empires de l'Amérique précolombienne étaient arrivés à un haut niveau de civilisation, la qualité des routes incas était exceptionnelle, l'urbanisme de Tenochtitlan, le système des canaux sur lesquels on se déplaçait, la propreté, la richesse des marchés éblouirent les conquérants qui n'avaient de leur vie jamais vu de ville plus belle. Mais ils avaient pour eux les chevaux - inconnus en Amérique -, les armes à feu - qui terrifièrent les Indiens -, et l'art maritime qui leur avait permis d'arriver jusque-là, les instruments de navigation et les bateaux à haut bord qui permettent d'affronter l'océan - les célèbres caravelles. Notons que rien de tout cela, ni la poudre à canon, ni la boussole, ni le sextant, n'était né en Occident, mais avait été inventé en Chine et était arrivé en Europe par l'intermédiaire des Arabes. Ne l'oublions pas en effet : d'autres civilisations avaient montré avant la nôtre leur degré de développement. Avant les Portugais, combien d'autres peuples capables de former des navigateurs intrépides ! Les Arabes bien sûr, grands voyageurs sur les routes du monde durant ce que nous appelons le Moyen Âge, mais aussi les Chinois. Leurs explorations précèdent de peu les aventures de Colomb. Nombre d'entre elles furent entreprises dans la première moitié du xve sous la conduite d'un incroyable personnage de la Chine impériale, Zheng He, amiral et eunuque. Elles permirent de nouer des relations de commerce en Insulinde, à Java, à Sumatra, en Inde, et d'établir des relations diplomatiques jusqu'aux royaumes de la côte orientale de l'Afrique. Il s'est même trouvé, il y a quelques années, un ancien marin britannique devenu historien, un certain Gavin Menvies, pour affirmer que les
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« rencontre lesballes dupeloton d’exécution. Quoi qu’ilensoit, plusgrand monde aujourd’hui n’ignorecettefaçon devoir leschoses, lesmentalités ontévolué, et c’est heureux, caronsait tous qu’ilya peu detemps encore l’histoire n’étaitpasracontée ainsi.Ouvrons par exemple undes livres deréférence desannées 1970chezlesAnglo-Saxons, l’ Oxford History ofAmerican People 2 de Samuel EliotMorison, amiraletuniversitaire, fortcélèbre enson temps.

Ilreprésente parfaitement le point devue conventionnel del’époque, c’est-à-dire celuiquidominait chez80 % desBlancs.

Voyons comment la conquête yest racontée.

C’estassez vitevu.Les Espagnols étaientdesbienfaiteurs.

N’ont-ilspasamené levrai Dieu àces « Indiens dontlareligion exigeait lemeurtre demilliers d’innocents chaqueannée » ? N’ont-ilspas amené ensuite « lesbeaux-arts » etles églises quidonnent àleurs villes « cetairdegrandeur » ? Enclair, les Indiens étaientdessauvages àqui lesEuropéens ontdonné « lacivilisation », airconnu.

Quelesmêmes « sauvages » aientpayécemerveilleux cadeaudemillions devictimes, iln’est pasditunmot, lefait nepasse pas sous lacasquette denotre historien amiral. Comme tantd’autres aveclui,l’homme raisonnait toujours,aumilieu duxxe  siècle, aveclesschémas duxixe  et son idée-force de« mission civilisatrice » del’Occident.

Ellepermit àun continent d’asservirlemonde sansse préoccuper desdégâts occasionnés parcetasservissement.

Onoublie tropaupassage quebien desgrands esprits s’étaient scandalisés decette contradiction longtempsavantnotreépoque.

Nouscroyons quel’intérêt pourlesort des populations découledenos mentalités modernes.

C’estfaux.Lamise encause deshorreurs duxvie  siècle occupait déjànombre decontemporains.

CitonsleFrançais Montaigne, dansses Essais (livre III, chap. vi) : « Tant devilles rasées, tantdenations exterminées, tantdemillions depeuples passésaufilde l’épée etlaplus riche etbelle partie dumonde bouleversée parlanégociation desperles etdu poivre… : méprisables victoires ! »Il écrit celadans lesannées 1580,c’est-à-dire soixanteansàpeine aprèslespremiers pasdes conquistadors au Mexique. Le plus célèbre desdénonciateurs del’horreur dela Conquista est espagnol : c’estledominicain LasCasas.

Il sait dequoi ilparle, ilfut colon danslesAntilles, puis,entré enreligion, ildevint évêque duChiapas, auMexique.

Il n’a decesse dedénoncer lesmassacres, lestortures dontlesIndiens sontvictimes.

Et,contrairement àce que l’on pourrait penser,sesprotestations nesont pasdes crisisolés quepersonne neveut entendre.

Ellesarrivent jusqu’à l’oreille del’empereur etroi d’Espagne CharlesQuint.Ému,scandalisé mêmeparcequ’on luiraconte, ilordonne qu’on mette finaux abus, etpromulgue les leyes nuevas , les « lois nouvelles », faitespouratténuer lesystème terrifiant misenplace, l’ encomienda , c’est-à-dire laréduction enesclavage desIndiens.

Maislescolons refusent de les appliquer etLas Casas, inlassable, reprendsoncombat.

Illui fera affronter unautre érudit deson temps, Sepulveda, lorsd’une dispute publique, la« controverse deValladolid 3  ». Le point passionnant delapolémique estque lesdeux hommes partentdesmêmes présupposés intellectuels : tous deux sontchrétiens, tousdeux ontbaigné danslaculture humaniste dontnous parlions auchapitre précédent.

LasCasas biensûr,mais Sepulveda aussi,quiestunhomme instruit, unesprit quiseveut ouvert, quia lu les bons auteurs.

Seulement, lirelesbons auteurs nedoit pasêtre suffisant pourpenser juste,puisqu’il s’ensert pour arriver àdes conclusions quinous fonthorreur : ensefondant surAristote, ilpose quecertaines racessont vouées parDieu àêtre asservies pard’autres.

Sonadversaire LasCasas aun point devue plus proche dunôtre : pour lui,lesIndiens sontdeshommes, nosfrères, noségaux etilest scandaleux deles maltraiter.

Hélas,son opiniâtreté etlajustesse deses vues neserviront àrien : lesconquérants continueront àpiller etles Indiens à mourir sousleurjoug. C’est lepoint déprimant.

Aujourd’hui, laconquête desIndes nousapparaît clairement commeuneffroyable carnage, maisaveccinqsiècles derecul, toutenotre commisération nefera ressusciter niles victimes niles civilisations séculairesenglouties avecelles.

Ilya cinq cents ansquelques hommescourageux tentèrentd’arrêter le massacre, leurépoque étaitparfaitement capabled’entendre leursarguments.

Elleestrestée sourde.

Qu’est-ce qu’unecivilisation supérieure ? Avec chacun unepoignée d’hommes, CortésauMexique, PizarroauPérou ontconquis enun temps record deux empires extraordinaires etpuissants, quirégnaient surdes terres immenses etdes centaines demilliers degens.

Il est difficile denier l’évidence : siles Espagnols ontvaincu, c’estqu’ils étaient lesplus forts.

Onpeut néanmoins s’interroger surlesraisons avancées pourexpliquer cettevictoire.

Onleverra, celapermet untour d’horizon de quelques-unes desfacettes amusantes del’ethnocentrisme. Les conquistadors, bonschrétiens, étaientsûrsdeleur supériorité surles sauvages qu’ils ontdominés.

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