DÉPLORER, verbe transitif.

DÉPLORER, verbe transitif.  

A.—  [Le sujet désigne une personne, parfois un attribut de la personne ou un objet personnifié]  Manifester de la douleur, de la compassion. Synonymes : pleurer sur, s'affliger de. 

1. Vieilli, généralement poétique.  [Le complément d'objet direct désigne une personne morte ou qui va mourir] :

Ø 1. Les masques blafards [des portraits] se colorent

Comme au temps où je les connus.

Ô vous que mes regrets déplorent,

Amis, merci d'être venus!

THÉOPHILE GAUTIER, Émaux et camées,  1852, page 110. 

2. [Le complément d'objet direct désigne un inanimé abstrait, en particulier un événement, un fait, une situation, parfois un objet concret]  Déplorer amèrement; déplorer la perte, le sort de quelqu'un; déplorer un malheur. Il déplorait en silence les ruines de la maison (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Monsieur Bergeret à Paris,  1901, page 17) : 

Ø 2. Cet aveugle, qui semblait accablé par l'âge, psalmodiait d'un ton nasillard une espèce de complainte, où il déplorait sa cécité et implorait la charité des passants,...

THÉOPHILE GAUTIER, Le Capitaine Fracasse,  1863, page 363. 

—  emploi absolu. Cerisiers aux feuillages pendants, qui ont toujours l'air de déplorer (ALEXANDRE ARNOUX, Rhône, mon fleuve,  1944, page 184 ). 

—  Emploi pronominal réfléchi, vieux. Son talent d'écrivain ne commence à se produire qu' (...) en se plaignant et se déplo rant comme incapable et nul (CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Nouveaux lundis, tome 11, 1863-69, page 355 ). 

B.—  [Le sujet désigne une personne, une collectivité ou un de leurs attributs, un mode d'expression; le complément d'objet direct désigne un inanimé abstrait (fait, situation, etc.) et parfois une chose concrète, une personne, une collectivité]  Juger fâcheux, regrettable, désapprouver vivement, en raison notamment de son caractère irréversible. Déplorer l'absence, l'aveuglement de quelqu'un; déplorer des erreurs, des excès. Qu'on le déplore ou qu'on s'en réjouisse, l'ère d'autorité dans les arts est (...) révolue (PAUL VALÉRY, Variété V,  1944, page 300 ). 

—  Déplorer comme + adjectif ou substantif, de + infinitif, ou que + subjonctif. Il déplorait comme scandaleuse et dangereuse la licence de la presse telle qu'elle existait sous Napoléon III (GEORGES SOREL, Reflexions sur la violence,  1908, page 97 ). Doctrine qui déplorait qu'on accordât plus d'importance aux « notes » (...) qu'aux « sons » (JULIEN BENDA, La France byzantine ou le Triomphe de la littérature pure,  1945, page 284) : 

Ø 3.... nous étions seuls dans le wagon, et de mauvaise humeur tous les deux, ennuyés de quitter Paris, déplorant d'avoir cédé à cette idée de voyage, regrettant Marly si frais, la Seine si belle,...

GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, Les Soeurs Rondoli, 1884, page 1256. 

—  En incise, rare. On est si mal servi aujourd'hui, déplora l'hôtelier (PAUL-JEAN TOULET, La Jeune fille verte,  1918, page 111 ). 

Remarque : On rencontre dans la documentation le substantif masculin déplorateur. Celui qui manifeste de la douleur devant certains événements, qui demande quelque chose. Jérémie et tous les déplorateurs de la Bible (Edmond et Jules de Goncourt, Journal, 1857, page 411). 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 728. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 1 070, b) 697; XXe.  siècle : a) 1 299, b) 1 024.