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Les Juives de Robert Garnier

Publié le 21/02/2013

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Robert Garnier (1545-1590) fut magistrat à Paris et au Mans. Sa tragédie Les Juives, datée de 1583, est sa dernière oeuvre, et peut-être sa meilleure. Garnier nous a laissé au total huit tragédies, inspirées pour la plupart de sujets grecs ou romains...

« EXTRAITS~~~~~~~- La puissance de Nabuchodonosor Pareil aux dieux je marche, et depuis le réveil Du soleil blondissant jusques à son sommeil, Nul ne se parangonne à ma grandeur royale.

En puissance et en biens Jupiter seul m'égale.

Et encore, n 'estait qu'il commande immortel, Qu'il tient un foudre en main dont le coup est mortel, Que son thrône est plus haut et qu'on ne le peut joindre, Quelque grand dieu qu'il soit, je ne serais pas moindre.

Il commande aux éclairs, aux tonnerres, aux vents, Aux gresles, auxfrimats et aux astres mouvans, Insensibles sujets : moy, je commande aux hommes, Je suis l'unique dieu de la terre où nous sommes.

S'il est, alors qu'il marche, armé de tourbillons, Je suis environné de mille bataillons Le supplice de Sédécie LES ROYNES.

- Hélas ! mais nos enfans ? AMITAL.

- Hélas ! mais Sédécie ? LE PROPHÈTE.

-Cela n'a du tyran la rancœuradoucie, Ains forcenant plus fort, et se voulant gorger, Du sang de vos enfants, les fait tous égorger.

LES ROYNES.

- Ô monstre abominable ! LE PROPHÈTE.

-Et ce pendant, le père Voyant choir à ses pieds sa géniture chère Qui l'appelle en mourant et qui lui tend les bras , Transpercé de douleur, donne du chef à bas, S'outrage de ses fers , se voître contre terre, Et tasche à se briser le test contre une pierre, Rugist comme un Lyon, ronge ses vestements, Adjure terre et ciel, et tous ses éiémens.

Puis, voyant les bourreaux à la hideuse face De soudars indomtez, dont les armes, luisantes Comme soudains éclairs, brillent étincelantes.

Tous les peuples du monde ou sont de moy sujetz, Ou Nature les a delà des mers logez.

Teints de sang s'approcher, humblement leur rend grâce De venir terminer par une prompte mort L'indomtable douleur qui ses entrailles mord.

L'aquilon, le midy , l'orientje possède.

Le Parthem 'obéist, le Persan et le Mède, Les Bactres, les Indois, et cet Hébrieu cuidoit, Rebelle, s'affranchir du tribut qu'il me doit! Mais il a tout soudain esprouvé ma puissance, Et receu le guerdon de son outrecuidance.

Mais eux, branlant le chef et montrant à leur trongne Qu'ils s'alloyent empescher à une autre besongne , L'estendent sur le dos, la face vers les cieux, Et Luy cernent d'unfer la prunelle des yeux.

La complainte d' Amital Tous les cuisants malheurs qui sur nos chefs dévalent, Et dévalèrent one, mes encombres n'égalent.

Je suis le malheur mesme, et ne puis, las ! ne puis Souffrir plus que je souffre en mon âme d'ennuis.

Mais mon grief tourment est ma vie obstinée, Que les desastres n'ont ny les ans terminée.

Je vy pour mon martyre : hélas ! ciel endurci, Quand seras-tu lassé de me gesner ici ? Ne m'auras-tufait naistre en ce monde immortelle, Ô cruelle influence ! Ô méchef ! Ô destin ! « Sus donc prions-le captives, I Sur ces infidèles rives/ Qu'il veuille après son courroux I Se ressouvenir de nous.,.

Quand veux-tu m 'infecter de ton dernier venin ? Ne viendra point le jour que mes langueurs je noye Dans un sombre tombeau, faite des vers la proye ? Hélas ! je croy que non : il y a trop long temps Qu'en vain je le réclame et qu 'en vain je l 'attens.

« Les pauvres enfants avec leurs doigts menus/ Se pendent à son cou et à ses bras charnus I Criant et lamentant d'une façon si tendre/ Qu'ils eussent de pitié fait une roche fendre» , NOTES DE L'EDITEUR «Le médiocre développement de l'action entraîne comme conséquence l'importance donnée aux récits.

Il en est pour rappeler des faits antérieurs : tel est celui où Amital raconte à la reine (Acte III) la prise de Jérusalem (où ne manquent pas les souvenirs du récit de la dernière nuit de Troie au quatrième chant de l' Énéide et de la prise de Jérusalem par Titus), la fuite et la capture du roi.

Surtout on doit au 1 Har lingue-Vio llet 2.

3.

4 lithographies de Léon Zack / Sipa lcono cinquième acte noter les récits pathétiques du prophète qui nous mettent si puissamment sous les yeux les supplices ordonnés par Nabuchodonosor.

Ici Garnier est fidèle à l'avance au précepte de la tragédie classique formulé ainsi par Boileau : "Ce qu'on ne doit point voir, qu'un récit nous l'expose. "».

Marcel Hervier, Les Juives, introduction, Garnier, 1945.

« Au commencement était le monologue.

On reste confondu, en étudiant la littérature dramatique du début du xvne siècle, de voir la place exorbitante que le monologue y occupe.( ...

) Sans doute, à l'époque classique, le monologue peut-il se· rencontrer à n'importe quel endroit d'une pièce de théâtre .

Mais au début du xvue siècle, il a tendance à toujours tout commencer .

Et même à commencer toute scène importante.

On discernerait déjà cette tendance du monologue à commencer la scène dans l'œuvre de Robert Garnier, en particulier dans Les Juives.

»Jacques Scherer, Nizet, 1986.

GARNIER 02. »

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