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Le personnage d'Hermione dans Andromaque de Racine

Publié le 30/04/2011

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andromaque

Elle est la première en date des amoureuses forcenées de Racine. Mais elle n'est pas, loin de là, la première du théâtre classique. Nous avons dit que l'on trouverait par dizaines, avant Andromaque, les femmes qui haïssent celui qui les trahit ou qui veut les trahir, qui font tuer ou qui veulent faire tuer par jalousie, même si elles ne sont pas trahies et simplement parce qu'elles ne sont pas aimées. Seulement Hermione est la première qui soit vivante. Et elle est vivante parce qu'elle est à la fois plus complexe, plus nuancée — et plus naturelle et plus simple. 

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« Le triomphe est aussi cruel qu'il est illusoire.

Comme Andromaque vient la supplier d'épargner Astyanax elle lui répondavec une féroce ironie :S'il faut fléchir Pyrrhus qui le peut mieux que vous ?Vos yeux assez longtemps ont régné sur son âme.Faites-le prononcer.

J'y souscrirai, Madame. Le triomphe dure peu.

Andromaque a consenti à épouser Pyrrhus.

Hermione est rejetée dans l'humiliation et ledésespoir.

Et son âme n'est plus possédée, ne semble plus possédée que par la soif de vengeance : « Fais-tu venirOreste ? » : Courez au temple.

Il le faut immoler ORESTEQui ? HERMIONEPyrrhus. Et comme Oreste se défend d'un lâche assassinat et argumente, Hermione ordonne avec ce qui, pour Oreste, est lapire menace :Ne vous suffît-il pas que je l'ai condamné ? Ne vous suffit-il pas que ma gloire offensée Demande une victime à moiseule adressée ; Qu'Hermione est le prix d'un tyran opprimé ; Que je le hais ; enfin, Seigneur, que je l'aimai ? Je nem'en cache point : l'ingrat m'avoit su plaire, Soit qu'ainsi l'ordonnât mon amour ou mon père, N'importe ; mais enfinréglez-vous là-dessus.

Malgré mes vœux, Seigneur, honteusement déçus, Malgré la juste horreur que son crime medonne, Tant qu'il vivra craignez que je ne lui pardonne.

Doutez jusqu'à sa mort d'un courroux incertain : S'il ne meurtaujourd'hui, je puis l'aimer demain. Armez, avec vos Grecs, tous ceux qui m'ont suivie ;Soulevez vos amis : tous les miens sont à vous.Il me trahit, vous trompe, et nous méprise tous.Mais quoi ? déjà leur haine, est égale à la mienne :Elle épargne à regret l'époux d'une Troyenne.Parlez : mon ennemi ne vous peut échapper.Ou plutôt il ne faut que les laisser frapper.Conduisez ou suivez une fureur si belle ;Revenez tout couvert du sang de l'infidèle ;Allez : en cet état soyez sûr de mon cœur. Donc Pyrrhus va périr.

Il le mérite d'autant plus qu'il est venu gauchement, nous l'avons dit, s'excuser auprèsd'Hermione et reconnaître qu'il l'a trahie.

Devant la présence insultante l'orgueil de la jeune fille lui fait retrouver lamaîtrise d'elle-même et la plus cinglante ironie (IV, 5) :Tout cela part d'un cœur toujours maître de soi, D'un héros qui n'est point esclave de sa foi.

Pour plaire à votreépouse, il vous faudroit peut-être Prodiguer les doux noms de parjure et de traître.

Vous veniez de mon frontobserver la pâleur, Pour aller dans ses bras rire de ma douleur.

Pleurante après son char vous voulez qu'on me voie;Mais, Seigneur, en un jour ce seroit trop de joie ; Et sans chercher ailleurs des titres empruntés, Ne vous suffit-ilpas de ceux que vous portez ? Du vieux père d'Hector la valeur abattue Aux pieds de sa famille expirante à sa vue,Tandis que dans son sein votre bras enfoncé Cherche un reste de sang que l'âge avoit glacé ; Dans des ruisseauxde sang Troie ardente plongée ; De votre propre main Polyxène égorgée Aux yeux de tous les Grecs indignés contrevous : Que peut-on refuser à ces généreux coups ?Un moment de faiblesse encore lorsque Pyrrhus insinue que leur mariage était un mariage diplomatique et qu'elle nel'épousait que par devoir.

Mais tandis qu'elle se laisse aller à demander un délai d'un seul jour l'attitude de Pyrrhus luienlève ses dernières illusions : « Qu'il l'épouse ! » c'est- à-dire qu'il meure !Je ne t'ai point aimé, cruel ? Qu'ai je donc fait ? J'ai dédaigné pour toi les vœux de tous nos princes ; Je t'ai cherchémoi-même au fond de tes provinces ;J'y suis encor, malgré tes infidélités, Et malgré tous mes Grecs honteux de mes bontés.

Je leur ai commandé decacher mon injure ; J'attendois en secret le retour d'un parjure ; J'ai cru que tôt ou tard, à ton devoir rendu, Tu merapporterois un cœur qui m'étoit dû.

Je t'aimois insconstant, qu'aurois-je fait fidèle ? Et même en ce moment où tabouche cruelle Vient si tranquillement m'annoncer le trépas, Ingrat, je doute encor si je ne t'aime pas.

Mais,Seigneur, s'il le faut, si le ciel en colère Réserve à d'autres yeux la gloire de vous plaire, Achevez votre hymen, j'yconsens.

Mais du moins Ne forcez pas mes yeux d'en être les témoins.

Pour la dernière fois je vous parle peut-être :Différez-le d'un jour ; demain vous serez maître.

Vous ne répondez point ? Perfide, je le voi, Tu comptes lesmoments que tu perds avec moi ! Ton cœur, impatient de revoir ta Troyenne, Ne souffre qu'à regret qu'un autre. »

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