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Victoria (reine)

Publié le 13/02/2013

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reine victoria

1   PRÉSENTATION

Victoria (reine) (1819-1901), reine de Grande-Bretagne et d’Irlande (1837-1901), et impératrice des Indes (1876-1901).

Exceptionnellement long (soixante-trois ans), le règne de Victoria a marqué la monarchie britannique — alors à l’apogée de sa puissance — au point qu’on nomme depuis lors cette période l’« ère victorienne «.

2   UN RÈGNE SOUS LE SIGNE DE LA LONGÉVITÉ

Née à Kensington Palace (Londres), Alexandrina Victoria est la fille de Victoria, duchesse de Saxe-Cobourg, et d’Édouard-Auguste, duc de Kent et troisième fils du roi George III de Grande-Bretagne et d’Irlande. George IV et Guillaume IV étant morts sans descendance (respectivement en 1830 et en 1837), leur nièce Victoria devient l’héritière du trône britannique et, le 20 juin 1837, est proclamée reine à l’âge de 18 ans. La transmission de la souveraineté au Hanovre obéissant à la loi salique (interdiction faite aux femmes de régner), son accession au trône entraîne la fin de l’union personnelle du Hanovre et de la Grande-Bretagne — depuis 1714, la région est gouvernée par les rois d’Angleterre issus de la maison de Hanovre.

En février 1840 et contre l’avis de sa mère, la jeune reine indépendante et volontaire épouse son cousin germain Albert de Saxe-Cobourg-Gotha, avec lequel elle a neuf enfants.

2.1   Une politique souveraine et austère

Dès le début de son règne, Victoria montre un intérêt manifeste pour les affaires de l’État, auxquelles elle est initiée par le Premier ministre en place, lord Melbourne, chef du Parti whig (de tendance libérale). Le prince Albert, son époux de sensibilité conservatrice, l’ayant mise en garde contre une politique trop libérale, la reine se détourne bientôt du Parti whig. Après la chute du cabinet Melbourne (1841) et à l’arrivée au pouvoir de sir Robert Peel, Victoria soutient ardemment le Parti conservateur. Toujours sous l’influence de son mari, elle remet en question la tradition selon laquelle le souverain britannique n’a qu’un rôle consultatif et, sans pour autant enfreindre le cadre des règles constitutionnelles, elle acquiert un rôle plus important dans les affaires de l’État. Pour exemple, Victoria, respectueuse de la démocratie parlementaire, a, son règne durant, choisi ses Premiers ministres au sein de la majorité ; c’est la raison pour laquelle elle s’est successivement entourée de conservateurs et de libéraux ; c’est pour cette même raison qu’elle a tissé des relations plus ou moins amicales avec les différents chefs de gouvernement.

En 1850, Victoria défie l’autorité de Palmerston, secrétaire aux Affaires étrangères du gouvernement whig, au pouvoir depuis 1846. Selon elle, le souverain doit au moins être consulté en matière de politique étrangère, exigence que Palmerston ignore. Leur querelle atteint son paroxysme en 1851 lorsque le Premier ministre, lord Russell, révoque Palmerston. Les nombreuses altercations avec Palmerston, qui a l’estime de l’ensemble des Britanniques, coûtent à Victoria et à son époux une bonne part de leur popularité. Celle-ci chute davantage en 1854, lorsque le couple cherche à éviter la guerre de Crimée contre la Russie. Mais une fois le conflit ouvert, Victoria apporte un soutien sans réserve aux Turcs. En 1856, peu avant la fin de la guerre, elle institue même la plus prestigieuse décoration militaire britannique : la Victoria Cross.

En 1857, la reine associe officiellement son mari à son pouvoir en lui conférant le titre de prince consort. Mais en 1861, le prince Albert meurt, laissant Victoria inconsolable. Durant les premières années de son veuvage, elle quitte Londres, se retire dans ses châteaux de Windsor, d’Osborne et de Balmoral et refuse toute prestation publique. Abandonnant au prince de Galles (son fils aîné et héritier Édouard) le soin de remplir la plupart des fonctions de représentation dévolues à la royauté, la souveraine continue cependant à montrer de l’intérêt pour les affaires de l’État.

2.2   La rivalité Disraeli-Gladstone

De nombreux Premiers ministres se succèdent durant le long règne de Victoria, mais seul le responsable du Parti conservateur, Benjamin Disraeli, en charge en 1868 et de 1874 à 1880, obtient la confiance et la sincère amitié de la reine ; ne le définit-elle pas elle-même en ces mots, « un ami véritable, si sage, si bon, si calme « ? Alors que Disraeli laisse la reine libre de nommer les responsables ecclésiastiques, militaires et politiques, Victoria le soutient entièrement dans sa politique de renforcement et d’expansion de l’Empire colonial britannique. En 1876, Disraeli lui attribue le titre d’impératrice des Indes, ce qui lui vaut en contrepartie celui de comte de Beaconsfield. Grâce à une lente orchestration de Disraeli, Victoria revient donc sur le devant de la scène politique, ce qui la rend à nouveau populaire auprès des Britanniques.

Victoria n’entretient pas les mêmes relations avec tous les chefs de gouvernement. En particulier, elle entre fréquemment en conflit avec le chef du Parti libéral, William Gladstone, Premier ministre à quatre reprises entre 1868 et 1894. La reine s’oppose en effet à certaines réformes démocratiques qu’il a annoncées, comme l’abrogation de l’achat des titres militaires et l’autorisation des syndicats, et apprécie peu son art achevé de la discussion. Elle combat également sa politique de « Home Rule « (« autonomie «) en Irlande. Le chef du Parti conservateur, Salisbury, trois fois Premier ministre de 1885 à 1902, sait mieux se faire apprécier. Tout comme Disraeli, il protège les intérêts de la Couronne et élargit l’influence britannique à l’étranger.

3   L’« ÈRE VICTORIENNE «

La souveraine britannique a donné son nom à la période dite « victorienne «, laquelle se caractérise notamment par la montée d’une classe bourgeoise issue de la révolution industrielle et par les révoltes sociales qui en découlent, par un conservatisme et un puritanisme social, par un nationalisme intense et une gloire impériale.

3.1   Une prospérité économique sans précédent

Malgré les délicates expériences socio-économiques du début de règne (chartisme, famine en Irlande, etc.), l’ère victorienne correspond à une période de croissance et de prospérité économique sans précédent. En 1849, le Royaume-Uni abroge les Actes de Navigation — en cours dans le royaume depuis 1651 — et adopte le système du libre-échange.

3.1.1   Un empire colonial en plein essor

Dans la même lignée, l’ancien système colonial est abandonné au profit du principe de « gouvernement responsable « ; les colonies canadiennes sont les premières à bénéficier du statut de dominion (État politiquement indépendant au sein de l’Empire) en 1867. Mais déjà en 1857 en Inde, la révolte des cipayes a engendré la liquidation de la Compagnie des Indes orientales et une réforme de gouvernement dans la colonie ; rappelons qu’en 1876, Victoria reçoit le titre d’impératrice des Indes.

Puis, avec l’ouverture du canal de Suez en 1869, l’expansionnisme britannique devient effréné — comme celui de la France et de l’Allemagne d’ailleurs — et la Couronne prend part au partage de l’Afrique : protectorat sur le Bechuanaland (aujourd’hui Botswana) en 1885 ; création de la Rhodésie en 1894 ; acquisition de l’Ouganda en 1894 ; première implantation au Kenya, guerre des Boers contre les colons du Transvaal et d’Orange (aujourd’hui Afrique du Sud) à partir de 1899, etc.

3.1.2   Une économie britannique renouvelée

Outre ces colonies, le Royaume-Uni devient à cette époque la première puissance industrielle mondiale. Symbole de l’industrialisation, le chemin de fer n’est pas de reste ; la volonté affichée de construire un réseau de taille exige une production industrielle considérable de fonte et de charbon ; le pari est gagné puisque le réseau ferroviaire passe de 5 000 km en 1848 à 22 000 km en 1871. De même, l’industrie textile bat son plein durant le règne de Victoria. Partout sur l’île l’industrie se développe et des villes entières, telle Manchester, perdent leurs couleurs, noircies par le charbon.

Mise en scène et exaltation de cette puissance britannique, la première Exposition universelle au monde est organisée à Londres en 1851. Sous la présidence du prince Albert lui-même, plusieurs millions de visiteurs déambulent six mois durant dans de grandioses bâtiments construits pour l’occasion, dont le Crystal Palace, chef-d’œuvre de verre et de fer inaugurant l’âge mécanique.

3.1.3   Les conséquences sociales de la prospérité

La pleine production britannique n’est pas sans conséquences sociales. Fruits de la prospérité, les classes « moyennes « (middle class) cherchent à imiter le mode de vie de la vieille aristocratie britannique et des grands patrons de l’industrie. Face à eux se trouve une nébuleuse classe laborieuse (working class) vivant dans l’insécurité quotidienne et la misère des bas-fonds urbains. Pour des salaires de misère, hommes, femmes et enfants travaillent dans les mines, les forges et les manufactures textiles entre douze et quinze heures par jour ; à ce sujet, il est à noter que les premières lois légiférant sur le travail des enfants sont relativement tardives (1878), alors que les lois sociales se multiplient durant le règne de Victoria. Conscient du dualisme de la société victorienne, Friedrich Engels publie en 1845 la Situation de la classe laborieuse en Angleterre. De même, c’est à Londres qu’est publié le Manifeste du parti communiste de Marx et Engels en 1848 et que la Ire Internationale ouvrière est proclamée (1864).

3.2   Un puritanisme social

L’Angleterre demeure avant tout conservatrice et chrétienne, et une rigoureuse morale impose le puritanisme et le conformisme social ; la pruderie, la respectabilité mettent en scène des valeurs bourgeoises nouvelles où le foyer doit s’aristocratiser. Par sa droiture morale, sa dignité et l’austérité de sa cour, Victoria incarne en définitive les vertus et les préjugés de cette nouvelle bourgeoisie britannique.

D’ailleurs, en une période de religiosité exacerbée, la philosophie d’Herbert Spencer et les découvertes de Charles Darwin, tous deux « évolutionnistes «, sont fortement controversées par les « créationnistes « attachés à la théorie biblique sur la création de l’Homme ; pour sa part, plaçant l’humanité sur le même plan que les animaux, le naturaliste doit subir de véhémentes attaques d’hommes d’Église plus encore que de scientifiques.

3.3   Les arts victoriens
3.3.1   Une critique de l’ère victorienne

Outrés par le puritanisme ambiant et par la perversion de l’industrialisation, romanciers et poètes dénoncent les revers de la glorieuse société victorienne. Charles Dickens, auteur d’une abondante littérature sociale destinée à un public populaire, est sans nul doute l’écrivain contestataire le plus représentatif de cette société britannique industrialisée. Dans son roman-feuilleton David Copperfield (1849-1850), il met en scène un pauvre orphelin livré à la cruauté du monde londonien. En 1865, Lewis Carroll dévoile à son tour l’hypocrisie du monde des adultes dans son récit Alice au pays des merveilles, conjugaison de réalisme et de fantaisie qui prélude à une littérature pour la jeunesse. De même, avec son Portrait de Dorian Gray (1891), le dandy Oscar Wilde vit et publie en marge des conventions sociales et morales de l’ère victorienne.

Dans le domaine des beaux-arts, la peinture de Joseph Mallord William Turner atteint son apogée sous le règne de Victoria. C’est à cette époque que l’artiste parvient à centrer ses compositions autour d’un tourbillon de couleurs qui évoquent « la lumière spéciale née des brumes industrielles « (Roland Marx). Pour leur part, s’opposant au matérialisme victorien et aux conventions néoclassiques de l’art académique, les préraphaélites réunis autour de Dante Gabriel Rossetti réagissent contre les artifices néoclassiques de la peinture officielle, et prônent un retour à la nature prenant comme modèles les primitifs italiens antérieurs à Raphaël.

3.3.2   L’académisme victorien

Officiel, le style victorien se caractérise par un éclectisme confus et trouve sa meilleure expression dans la décoration d’intérieur, en une période où le « home sweet home « est un leitmotiv très britannique. En architecture, la plus grande réussite du style reste le palais de Westminster, néogothique. Édifié selon les plans de sir Charles Barry et d’Augustinus Pugin entre 1840 et 1867, il est dominé par trois tours, dont celle de l’horloge abritant le carillon Big Ben.

En littérature, on ne peut parler de la production victorienne sans évoquer le roman policier dont l’histoire commence à s’écrire durant cette période : précurseur du genre, Wilkie Collins publie la Dame en blanc en 1860, maître en la matière, sir Arthur Conan Doyle crée les personnages de Sherlock Holmes et du docteur Watson en 1887.

4   VICTORIA, LA « GRAND-MÈRE DE L’EUROPE «

La popularité de Victoria atteint son apogée les vingt dernières années de son règne. Son jubilé d’or (1887) puis son jubilé de diamant (1897) sont l’occasion de fastueuses réjouissances. Beaucoup de ses sujets profitent alors d’une période de prospérité sans précédent. De plus, l’enthousiasme que la souveraine consacre à la guerre des Boers accroît sa renommée tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays.

Le 22 janvier 1901, au terme d’un règne de soixante-trois ans — le plus long de l’histoire du Royaume-Uni —, Victoria meurt à Osborne, dans l’île de Wight. Parce que sa descendance (neuf enfants, quarante petits-enfants) contracte des alliances avec toutes les familles régnantes d’Europe, Victoria a été appelée la « grand-mère de l’Europe «. Pour exemple, en 1858, l’aînée de ses enfants, Victoria-Adélaïde-Marie-Louise, a épousé le prince Frédéric-Guillaume qui l’a associée à son titre lorsqu’il est devenu empereur d’Allemagne et de Prusse sous le nom de Frédéric III (1888) ; l’année même de son couronnement, Frédéric III meurt et le fils qu’il a eu d’avec Victoria-Adélaïde-Marie-Louise accède au titre impérial sous le nom de Guillaume II. En 1894, la petite-fille de Victoria, Alice de Hesse-Darmstadt, s’est mariée au tsar Nicolas II de Russie. Enfin en 1901, le fils aîné de Victoria, le prince de Galles Albert Édouard — qui a épousé en 1863 Alexandra, la fille de Christian X de Danemark —, lui succède à l’âge de soixante ans sous le nom d’Édouard VII.

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