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Les " Lettres portugaises " et le roman épistolaire

Publié le 23/03/2018

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La Troisième lettre est désemparée : le silence de l'amant a continué, sa mau­vaise foi fait de moins en moins de doute; Mariane en vient à penser qu'il ne l'a jamais réellement aimée : « vous aviez fait de sens froid un dessein de m'enflammer, vous n'avez regardé ma passion que comme une victoire, et votre cœur n'en a jamais été profondément touché »; à l'épreuve, l'amour solitaire de Mariane est moins fort que ce silence; Mariane lui voudrait une confirmation éclatante : mourir pour son amour serait en prouver la puissance et la réalité; l'idée de la mort s'introduit d'abord obliquement (« je me tuerais, ou je mourrais de douleur sans me tuer >>, si je vous savais aussi malheureux que moi), mais la mort n'aurait de sens que reconnue par l'amant; Mariane, par un détour étonnant et d'une vérité profonde, désire recevoir de son amant l'ordre de mourir, et pour obtenir cet ordre elle se déclare coupable : c'est elle qui est infidèle, c'est elle qui a trahi (« je vis, infidèle que je suis [ ... 1 je vous ai trompé, c'est à vous à vous plaindre de moi [ ... 1 je vous ai trahi, je vous en demande pardon 4>

Les \" Lettres portugaises \" et le roman épistolaire

 

En 1669 parut chez Barbin un petit livre qui n'a pas encore fini d'étonner et d'inquiéter le lecteur : Lettres portugaises traduites en françois; c'étaient cinq lettres d'une religieuse portugaise, Mariane - elle se nomme elle-même en deux . endroits - qui exprimait à un officier français revenu en France son amour, sa tristesse, ses plaintes d'être abandonnée, son désespoir, et finalement sa déci­sion de ne plus l'aimer et de ne plus lui écrire. Le succès fut immédiatement très vif; le recueil fut plusieurs fois réédité, imité, on écrivit des Réponses aux lettres, une Suite, on entremêla ces textes forgés aux textes originaux $• En général les contemporains crurent à l'authenticité des Lettres portugaises; elles satisfai­saient leur curiosité pour la vie réelle, pour la vérité des sentiments, à une époque oit ils étaient dégoûtés des conventions romanesques; on nommait même le desti­nataire des lettres, Chamilly ), qui avait effectivement servi au Portugal; on admi­rait l'accent brûlant avec lequel la passion se faisait entendre, ou au contraire, comme Mme d'Aulnoy, on était choqué par son « extravagance >> avouée. Rares furent les sceptiques qui, comme G. Guéret, soupçonnèrent dans les Lettres l'invention d'un « libraire artificieux » : mais Guéret appuyait ses soupçons sur la ma~adresse de l'ouvrage, la lourdeur des phrases, les répétitions lassantes, la monotonie des sentiments - c'est-à-dire qu'il interprétait comme les défauts d'un travail bâclé sur commande par un mauvais écrivain ce qui, aux yeux des

« admirateur s, prouvait la spon tanéité et le naturel des Lettres 1• Meilleur juge, Jean-Jacques Rousseau, au siècle suivant, parlait de > et de. »

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