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1970 – 1979 : MISES EN SCÈNE ET Théâtre en France

Publié le 29/11/2018

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Alors que, dans les années soixante, le théâtre tend à sa destruction, ou à sa <> (ce n'est pas un hasard si, en 1969, Roger Planchon monte la Mise en pièces du Cid: on met tout en pièces et en cause dans ces années-là !), il se reconstruit au cours de la décennie suivante, redéfinit son langage, élabore des formes qui sont de plus en plus rarement éclatées mais qui visent à transcrire le monde dans une manière ample et globale. Certains des grands noms de la mise en scène des années soixante-dix viennent de la contestation esthétique et politique, mais, même lorsqu'ils continuent à semer une certaine provocation, ils sont déjà en train de préparer ce nouveau théâtre, profond, visionnaire, dont le style, moins heurté, plus profond, vise à constituer une sorte de classicisme du monde moderne. Ces artistes, qui prennent ce tournant en ordre dispersé, s'appellent Mnouchkine, Bob Wilson, Strehler, Chéreau, Vitez, Kantor, Brook...

 

Pourtant, pour qui regardait la France théâtrale au moment où elle changeait de décennie, le fracas de la destruction pouvait sembler dominateur. Ainsi, venu en Europe dès 1963, le Living Thea-

« MISES EN SCÈNE ...

Pa trice Chéreau monte la Dispute en 1973: une «relecture » de Marivaux, qui fait dé sormais autorité.

© Marc Enguerrand MISES EN SCÈNE ...

Ta deusz Kantor sur la scène de la Classe morte, au festival d'A utomne en octobre 1977.

© Marc Enguerrand ter des Américains Julian Beek et Judith Malina continuait à répandre une sauvagerie contagieuse.

Organisée en communauté , cette troupe jouait, à peine vêtue, des classiques et des contemporains ou montait de violentes «pièces-r eportag es>>.

C'est elle qui, au festival d'Avignon de 1968 , avait opéré le meur tre du maître du théâtre populair e , Jean Vilar.

Le meur tre fut tout symbolique ; il se résuma à la repr ésentation de Paradise Now, qui fit scand ale, entraîna une réplique répressive de la municipalité .

Vilar, qui avait invité lui-même le Livi ng, fut trans­ formé en accusé ; il ne s'en remit jamais .

Il abandonna le festival en 19 69 et mourut en 1971.

Le Polonais Jerzy Grotowski a semé de son côté une autre forme de rév olte .

Sa nudité est celle du dépouillement esthétique et de l' exaltation des possibili!és du corps.

En 1970 , il a déj à quitté Paris (il est allé s'installer aux Etats-Unis).

Mais son enseignement a nourri toute une nouvelle génération.

En revanch e, le Br ead and Puppet, autre troupe américaine , continue à tourner en France et en Eur ope .

Elle incarne au théâtr e le message beatnik, (Paix et Fleur).

Avec de gi­ gantesques poupées manipulées par des acteurs, elle dénonce les guerr es, proclame la paix, distribue du pain dans les rues et dans les salles de spectacle .

Créée par Peter Schumann , elle reste dans ces années-là d'un évangélisme laïque extrêmement actif et séduisa nt.

R oNCONI ET WILSON : LA FÊTE ET L'IMAGE MENTALE En dépit de la vitalité de ces équip es, le nouveau théâtre est aille urs.

On trouvera bien une continuation de certaines de ces provo­ cations chez l'Italien Carmelo Bene qui stupéfiera Paris, en 1977 , avec ses somptueuses cérémonies iconoclastes et érotisé es.

Mais, en 1970 et en 1971, deux spectacles semblent sonner le glas de ce qui s'était fait auparav ant, tant ils apporte nt du nouveau.

Ils viennent tous les deux de l'étranger.

Ce sont Orlando Furioso et le Regard du sourd.

Orlando Furioso est l'œuvre de l'Italien Luca Ronconi et s'inspire du texte classique de l'Arioste .

Les représentations en France , après la création en Italie , ont lieu dans les Halles de Baltard , qui ne sont pas encore détruites.

Quarante comédie ns, juchés sur des chevaux de métal , y sont d'abord lancés sur le public .

Puis le spectacle se dér oule partout à travers l'immensité du pavill on.

Chacun court d'un tréteau à l'a utre pour suivre une multip licité d'actions .

Il n'y a plus un lieu central , mais plusieurs lieux.

Il n'y a plus une place pour le public , mais un mouv ement où il se déplace et où il se mêle aux acte urs.

En se servant paradoxalement d'un texte et de costumes historiques (l'Orlando se passe au xvf siècle), Ronconi réinvente le théâ tre en brisant les conventions de la scène et de la salle.

Cette recher che, il va ensuite la prolonger, en dilatant l'espace ou en le 44 ré duisa nt.

Mais Orlando restera son spectacle-phare car il réussit à donner vie à un autre mythe de 1968 : la Fête , la fusion du spectateur dans une immense joie collective .

L'a nnée suivante , c'es t au festival de Nancy, dirigé par Jack Lang , que survient l'extraordinaire surprise du Regard du sourd de Bob Wilson .

Que voit un sourd ? Le spectacle part de cette idée, mais la vision qu'instaure ce jeune metteur en scène américain est beau­ coup plus complexe.

Ayant sauvé de la prison un jeune délinquant noir sourd-mue t, Wilson avait recherché avec lui l'origine de cette disparition des sens.

Le jeune homme avait perdu la parole en assis­ tant à un meurtre d'enfant .

Pendant sept heures, le spectacle va dé­ ployer ces images venues de l'in conscient et d'une imagination qui se sert de l'obsession , de la répétition à l'i nfini , pour aller plus avant dans cette plongée mentale .

Les images de la nourrice noire poignardant un enfant se répètent , des tableaux célèbres sont reconstit ués, défor­ més, détour nés.

Repris à Par is, dans une version plus courte, le Re­ gard du sourd fait également sensation.

Subjugué , comme tant d'a utres, Louis Aragon écrit dans les Lettres françaises un article histor ique, qui prend la forme d'une lettre à André Breton:. »

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