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À, AU, AUX, préposition.

Publié le 27/09/2015

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 à

À, AU, AUX, préposition.  

I.—  À dans le syntagme verbal  (à sert à construire un complément du verbe) 

A.—  À introduit un complément unique. 

1. À introduit un complément unique après un verbe à la forme active. 

a) À + substantif de l'animé ou de l'inanimé : 

appartenir à

céder à

convenir à

croire à

déplaire à

désobéir à

échapper à

échoir à

importer à

incomber à

manquer à

mentir à

nuire à

obéir à

penser à

plaire à

recourir à

en remontrer à

renoncer à

résister à

ressembler à

rêver à

servir à

sourire à

succéder à

survivre à

tenir à. 

Ø 1. L'amour était un mot trop faible pour exprimer le torrent de feu qui le brûlait, dès qu'il pensait à elle. Ce n'était pas de l'amour, et c'était mille fois plus que l'amour...

ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, Le Buisson ardent, 1911, page 1379. 

Ø 2. Il n'y a pas encore un an que ce rêve a pris fin et il me semble que j'ai déjà tout oublié de nos détresses. Je ne pense qu'à nos élévations, à nos enchantements, à notre joie.

GEORGES DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Les Maîtres, 1937, page 8. 

Ø 3. Je crois en vous, comme je n'ai jamais cru à personne au monde. Je vous crois. Je crois en vous plus encore que je ne vous aime, par une sorte de nécessité, par un mouvement de l'être aussi fort, aussi spontané que l'instinct de conservation.

GEORGES BERNANOS, Dialogues d'ombres,  1928, page 41. 

Remarque 1. Opposition à / -; à / de (confer aussi historique II A 1). —  Certains de ces verbes admettent également la construction directe La différence de constructions va de pair avec une différenciation sémantique : céder à quelqu'un (ou quelque chose), « ne plus résister » / céder quelque chose, « abandonner quelque chose » (confer manquer, penser, servir, tenir.) D'autres se construisent par ailleurs avec de + substantif (ou de + infinitif) : convenir à quelqu'un / convenir de quelque chose (de + infinitif) (confer manquer, profiter, sourire, servir, tenir). Échapper à s'oppose à s'échapper de : la préposition de signifie l'éloignement d'un lieu concret (s'échapper de prison). À marque au contraire que l'on s'est approché de si près du lieu (abstrait) signifié par le complément circonstanciel que l'on a manqué d'y être pris (échapper à la prison; échapper à « éviter de justesse »). L'idée d'éloignement n'est plus marquée dans ce cas que par le préfixe é-. 2. Le verbe croire admet la construction avec à et la construction avec en. Confer croire et exemple 3. 3. Certains des verbes cités peuvent être complétés aussi par à + infinitif : penser à, renoncer à, servir à, suffire à, tenir à... 

b) À + substantif de l'inanimé ou à + infinitif. 

—   Verbes se construisant avec à + substantif de l'inanimé : 

accéder à

acquiescer à

adhérer à

applaudir à

assister à

atteindre à

attenter à

compatir à

conclure à

contrevenir à

correspondre à

déroger à

émarger à

faillir à

forfaire à

insulter à

mordre à

obtempérer à

obvier à

parer à

préexister à

présider à

procéder à

réfléchir à

remédier à

retoucher à

satisfaire à

souscrire à

subvenir à

succomber à

suppléer à

toucher à

vaquer à. 

Pour (veiller) à ce que, confer que. 

Ø 4. La voici qui procède à une redistribution des rôles :...

PAUL CLAUDEL, L'Échange, 2e.  version, 1954, page 727. 

—   Verbes se construisant soit avec un substantif de l'inanimé, soit avec un infinitif : 

aspirer à

collaborer à

concourir à

consentir à

contribuer à

coopérer à

équivaloir à

jouer à

participer à

regarder à

travailler à

veiller à

viser à. 

Ø 5. En attendant cette harmonie suprême, il est juste que ceux qui ne sont que propriétaires aspirent à devenir savants;...

CHARLES BAUDELAIRE, Salon de 1846,  1846, page 97. 

Ø 6. Après un certain nombre d'années j'ai fini par comprendre que la nature des choses me faisait une loi d'aspirer à la mort.

JOE BOUSQUET, Traduit du silence,  1936, page 7. 

Remarque : Admettent par ailleurs une construction directe : aspirer quelque chose, consentir quelque chose, jouer quelque chose, travailler quelque chose, regarder quelqu'un ou quelque chose, veiller quelqu'un, viser quelqu'un ou quelque chose. 

—   Verbes se construisant avec à + infinitif (ou exceptionnellement le substantif verbal correspondant) : 

balancer à

chercher à

commencer à

condescendre à

consister à

conspirer à

continuer à

exceller à

hésiter à

incliner à

lésiner à

marchander à

peiner à

persévérer à

persister à

prêter à

renâcler à

répugner à

réussir à

tarder à

tendre à. 

Ø 7. Ils étaient vêtus de noir et cherchaient à se faire tout petits. Ils s'arrêtèrent, saisis, sur le pas de la porte, et le monsieur se découvrit machinalement.

JEAN-PAUL SARTRE, La Nausée,  1938, page 119. 

—  être à + infinitif   signifie l'obligation, la destination... : 

Ø 8. N'ayant pas le courage d'écarter de telles suppliques, je finis par écrire deux billets, l'un au signataire de la missive qui me parvint et l'autre, au couvent; plus, quelquefois, si des points sont à préciser, si des informations plus étendues sont nécessaires.

GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, En route, tome 1, 1895, page X. 

—  être à + infinitif   \" être en train de \", périphrase exprimant l'aspect duratif : 

Ø 9. Tous deux devaient être à causer sous le hangar, lorsque lui s'était avancé pour appeler le sous-chef.

ÉMILE ZOLA, La Bête humaine,  1890, page 59. 

Remarque : 1. Sens des verbes construits avec à. —  Les verbes qui se construisent avec à + infinitif expriment généralement l'imminence de la décision ou l'hésitation (balancer à, condescendre à, consentir à, hésiter à, lésiner à...), l'effort en vue d'aboutir à un résultat (concourir à, conspirer à, contribuer à, peiner à, tendre à...). Équivaloir à et consister à impliquent un jugement dont le complément représente l'aboutissement. Quelques verbes signifient sans plus divers stades de la réalisation du procès exprimé par l'infinitif (commencer à, continuer à, réussir à...). Confer aussi les verbes de mouvement ou de position, employés dans leur signification la plus abstraite, qui ont obligatoirement pour complément un substantif ou un infinitif introduit par à - et qui expriment une idée d'aboutissement (aboutir à, (en) arriver à, parvenir à, (en) venir à, (en) rester à...) (confer D 1). 2. Pour être à, confer être. 3. Concurrence avec de (confer aussi historique I A 1). —  La concurrence entre la préposition à et la préposition de n'est réelle que pour les verbes commencer et continuer. Certains verbes actuellement construits avec à ont pu l'être avec de*. Cette construction n'est plus vivante ou répond à une volonté d'archaïsme :

aimer à / de

balancer à / de

consentir à / de

hésiter à / de

penser à / de

réussir à / de

songer à / de

veiller à / de

2 verbes généralement construits avec de le sont parfois avec à (par archaïsme) : tâcher de / à et essayer de / à. Quelques verbes peuvent être construits soit directement avec l'infinitif soit avec à + infinitif :

adorer - / à

aimer - / à

penser - / à

prétendre - / à

4. Insertion d'un complément d'attribution —  Quelques verbes du type montrer ont pour objet principal à + infinitif et admettent l'insertion d'un complément d'attribution :

apprendre (à quelqu'un) à + infinitif

 

enseigner (à quelqu'un) à + infinitif

 

montrer (à quelqu'un) à + infinitif

 

Confer demander à + infinitif / demander à quelqu'un de + infinitif. 

2. À introduit un complément unique après un verbe à la forme pronominale. 

a) À + substantif de l'animé ou de l'inanimé. 

—   Construction typiquement pronominale : 

s'apparenter à (*apparenter quelqu'un à...)

s'appliquer à

s'attacher à

se confesser à

se cramponner à

se dévouer à

se donner à

s'égaler à

se fier à

se heurter à

se joindre à

se mesurer à

s'offrir à

s'en prendre à

se raccrocher à

se rendre à « se soumettre » : se rendre à ses arguments. 

Ø 10. C'était un procès gagné d'avance par les conditions écrites que j'ai; mais la situation du gérant de la presse était telle aux yeux du public qu'en le faisant j'aurais paru me joindre à ses ennemis.

HONORÉ DE BALZAC, Correspondance,  1838, page 467. 

Ø 11. Comme un aveugle qui a perdu son guide, je me suis heurté à tous les arbres de la route, et je m'en suis pris aux arbres au lieu de m'en prendre à ma cécité.

MAXIME DU CAMP, Mémoires d'un suicidé,  1853, page 271. 

Ø 12. Mon Dieu! Que c'est bête, de s'attacher à un homme!

JULES FLEURY-HUSSON, DIT CHAMPFLEURY, Les Aventures de Mademoiselle Mariette, 1853, page 70. 

—   Constructions pronominales, issues de verbes à double construction (confer infinitif B) : 

s'arracher à quelqu'un / quelque chose < arracher quelqu'un / quelque chose à quelqu'un / quelque chose

s'abandonner à

s'annoncer à

se comparer à

se destiner à

s'intéresser à

se présenter à. 

Ø 13. C'était une occasion de me faire voyager et m'arracher à cette oisiveté dangereuse de la maison paternelle et des villes de province...

ALPHONSE DE LAMARTINE, Les Confidences,  1859, page 135. 

Ø 14. Je recommence à m'intéresser aux étalages.

VALÉRY LARBAUD, A. O. Barnabooth,  1913, page 177. 

Confer aussi le type dire quelque chose à quelqu'un/se dire quelque chose (à soi-même) : 

Ø 15. « Sent-elle la force de ce qu'elle dit, se demandait-il à lui-même... »

HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Lamiel,  1842, page 99. 

Ø 16. « C'est bien dommage! se murmurait-il à lui-même... bien dommage! »

ALPHONSE DE CHATEAUBRIANT, Monsieur des Lourdines,  1911, page 2. 

Remarque : S'appliquer à, s'attacher à, se destiner à se construisent également avec à + infinitif. 

b) À + substantif de l'inanimé. 

—   Construction typiquement pronominale : 

s'adonner à

s'arrêter à

s'attendre à

s'élever à

se monter à

se porter à. 

Ø 17. J'avais compté sur les plus nobles promesses, je m'attendais à cette publication comme au lever du soleil.

EUGÉNIE DE GUÉRIN, Lettres,  1842, page 454. 

[S'attendre à se construit également avec l'infinitif : s'attendre à trouver quelqu'un] 

—   Constructione issues de verbes à double complément : 

s'abonner à quelque chose < abonner quelqu'un à quelque chose

s'affilier à

s'assimiler à

s'étendre à

s'intégrer à

se limiter à

se mélanger à

se mêler à

se plier à. 

[Se borner à, se limiter à, se préparer à admettent également la construction avec l'infinitif] 

Ø 18. Il fut un temps où je n'avais souci de rien autre chose que de me préparer à la noble carrière où ma naissance et mes lumières naturelles me paraissaient appeler;...

OSCAR VLADISLAS DE LUBICZ-MILOSZ, L'Amoureuse initiation,  1910, page 7. 

c) À + infinitif (éventuellement substantif d'action) 

—   Verbes typiquement pronominal. 

·    [Verbes exprimant l'attrait] 

se complaire à

s'entendre à

se laisser aller à

se plaire à

se prendre à

se prêter à 

Ø 19. La Cibot put d'autant mieux ôter le mouchoir où la clef du secrétaire était nouée, et qui se trouvait sous l'oreiller de Pons, que le malade avait exprès laissé passer son mouchoir dessous son traversin, et qu'il se prêtait à la manoeuvre de La Cibot...

HONORÉ DE BALZAC, Le Cousin Pons,  1848, page 260. 

·    [Verbes exprimant l'effort] 

s'acharner à

s'apprêter à

s'évertuer à

s'ingénier à

s'obstiner à

s'opiniâtrer à. 

Ø 20. Quelques heures lui restaient encore, que nul ne prenait au sérieux. Les quatre dernières, de trop, s'obstinaient à sonner tout de même, dans la nuit de samedi à dimanche,...

JOSEPH MALÈGUE, Augustin ou le Maître est là, tome 1, 1933, page 12. 

·    [Verbes marquant l'engagement dans l'action] 

s'aventurer à

s'enhardir à

s'essayer à

se mettre à

se résigner à

se vouer à. 

Ø 21. Je m'approchai d'elles, et elles se mirent à pousser des cris aigus, en essayant de se sauver, comme si j'allais les tuer aussi.

GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 2, Les Rois, 1887, page 301. 

—   Constructions pronominales issues de verbes à double complément, du type décider quelqu'un à + infinitif -› se décider à. 

s'astreindre à

s'autoriser à

se contraindre à

se décider à

se destiner à

se déterminer à

s'entraîner à

s'exercer à

se forcer à

s'habituer à

s'initier à

s'obliger à

s'occuper à

se préparer à. 

Ø 22. Après une longue résistance qui l'a mené jusqu'au bout du monde, il s'est décidé à y répondre. Menant en laisse sa volonté frémissante, il s'est présenté à l'autel, et c'est de Dieu même qu'il a reçu réponse.

PAUL CLAUDEL, Partage de midi, 1re.  version, préface, 1906, page 983. 

Ø 23. Depuis le retour d'Étretat, on s'occupait à tout changer dans l'appartement des Dandillot, et il ne s'agissait presque jamais que de contrarier les goûts du disparu.

HENRI DE MONTHERLANT, Les Lépreuses,  1939, page 1371. 

—  Concurrence à / de. 

1. Un certain nombre de verbes construits avec de + infinitif à la forme active se construisent avec à à la forme pronominale

a) Verbes à complément unique :

attendre de faire quelque chose « ne rien faire avant de » / s'attendre à quelque chose « prévoir que cette chose arrivera »

essayer de faire quelque chose / s'essayer à faire quelque chose

hasarder

hasarder de / se hasarder à

oublier de / s'oublier à

risquer de / se risquer à

b) Verbes à double complément :

refuser à quelqu'un de faire quelque chose / se refuser à faire quelque chose

offrir 

offrir à quelqu'un de faire quelque chose / s'offrir à faire quelque chose

 

Certains verbes à construction simple avec de exigent à à la fois dans la forme pronominale et dans la double construction : décider de faire quelque chose, décider quelqu'un à faire quelque chose, se décider à faire quelque chose. 

2. On notera d'autre part les oppositions :

s'arrêter de faire quelque chose / s'arrêter à quelque chose

s'amuser

s'amuser de quelque chose / s'amuser à faire quelque chose

se délecter

se délecter de quelque chose / se délecter à faire quelque chose

se divertir

se divertir de quelque chose / se divertir à faire quelque chose

se fatiguer

se fatiguer de quelque chose / se fatiguer à faire quelque chose

s'occuper

s'occuper de quelque chose / s'occuper à faire quelque chose. 

3. De tient quelquefois la place de à dans une langue archaïsante :

s'accorder de

se contraindre de

se décider de

se forcer de

s'obliger de

s'offrir de

se refuser de

se résoudre de. 

4. Un certain nombre de verbes qui prennent aujourd'hui la préposition de ont pu se construire avec à :

s'efforcer à

s'empresser à

épargner à

essayer à

manquer à

être obligé à

être pressé à. 

Ø 24. Ces caractères [les tyrans d'Italie] donnent à l'histoire quelques anecdotes scandaleuses, mais lui épargnent à raconter la mort cruelle de vingt millions d'hommes.

HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Histoire de la peinture en Italie, tome 1, 1817, page 13. 

Ø 25. Obligé à nourrir pour lui la chaleur agréable du foyer, il détourne de temps en temps la cendre qui s'amoncelle; il ranime d'un souffle léger une étincelle qui s'étend peu à peu sur un charbon prêt à s'éteindre, et finit par embraser toute sa noire surface.

CHARLES NODIER, Trilby ou le lutin d'Argail,  1822, page 132. 

Ø 26.... et, de bonne heure, elle fut accoutumée à ne jamais manquer à se rendre à la grande messe, à vêpres, complies, etc.

HONORÉ DE BALZAC, Annette et le criminel, tome 1, 1824, page 48. 

Ø 27. Sur une habitation américaine que gouverne un maître humain et généreux, de nombreux esclaves s'empressent à recueillir la cerise du café; les enfants la précipitent dans des bassins d'une eau pure;... [A noter que s'empresser à signifie ici « accourir en foule pour ».]

FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Les Natchez,  1826, page 297. 

Ø 28. Pour danser d'autres bals elle [la jeune fille] était encore prête Tant la mort fut pressée à prendre un corps si beau!

VICTOR HUGO, Les Orientales,  1829, page 177. 

Ø 29. Elle partit dès le lendemain, et, sur le seuil, comme il essayait à la retenir, elle répliqua :...

GUSTAVE FLAUBERT, Madame Bovary, tome 2, 1857, page 125. 

Ø 30. En 1837, à Lausanne, j'ai côtoyé le calvinisme et le méthodisme, et j'ai dû m'efforcer à l'intéresser.

CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Pensées et maximes,  1869, page 48. 

B.—  À introduit le complément indirect dans une double construction. 

1. À + substantif de l'animé, complément d'attribution (le complément direct est généralement de l'inanimé) 

a) Après des verbes signifiant \" donner \", \" acheter \", \" promettre \", \" envoyer \" ou leurs antonymes :

abandonner quelque chose à quelqu'un

accorder, acheter, adjuger, adresser, allouer, asséner, assigner, attribuer, bailler 

causer (causer des ennuis à quelqu'un)

céder, communiquer, compter, concéder, conférer, confier, consacrer, consentir, décerner, destiner, devoir, dispenser, disputer, donner, envoyer, expédier, fournir, garantir, infliger, inoculer, jeter, laisser, léguer, ménager, offrir, pardonner, payer, prêter, porter, procurer, prodiguer, promettre, racheter, rapporter, remettre, rendre, renvoyer, reporter, représenter, retourner, rétrocéder, rogner, sacrifier, servir

susciter (susciter des ennuis à quelqu'un)

tendre, transmettre, 

 Antonymes :

arracher, dérober, enlever, ôter, prendre, ravir, refuser, retirer, soustraire, voler. 

Ø 31. Je ne crois pas interrompre l'ordre de mon récit en consacrant encore quelques pages à mes amis.

AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, Histoire de ma vie, tome 4, 1855, page 266. 

Ø 32. Nommé curé de la paroisse Sainte-Croix-Saint-Ouen à Rouen, le Père Du Breuil y jouissait de l'estime et de l'affection universelles, lorsque cette malheureuse imprudence commise par d'autres, et dont il fut l'innocente victime, vint l'enlever à son troupeau.

CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Port-Royal, tome 5, 1859, page 175. 

Ø 33.... son amitié pour Lamartine, son aptitude naïve à prêter de la noblesse à des politiciens radicaux.

MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 13, juin 1920-janvier 1921, page 6. 

Confer avec un complément dit \" de prix \" : coûter (des efforts à quelqu'un) valoir (des soucis à quelqu'un) 

Remarque : Les verbes signifiant « ôter » se construisent par ailleurs avec de suivi d'un substantif de l'inanimé : arracher quelque chose de quelque chose, ôter quelque chose de quelque chose. 

b) Après des verbes signifiant \" dire \", \" enseigner \", \" commander \" ou leurs antonymes :

affirmer,annoncer, apprendre, avancer, cacher, celer, certifier, commander, communiquer, confesser, confier, conseiller, crier, défendre 

demander, dérober, dévoiler, dire, dissimuler, écrire, enseigner, imputer, inculquer, insinuer, inspirer, interdire, jurer 

lire, mander, montrer, nommer, notifier, objecter, ordonner, pêcher, prédire, prescrire, prononcer, prouver, 

raconter, rappeler, réciter, redire, remémorer, répéter, reprocher, révéler 

seriner, signifier, souffler, soutenir, suggérer, télégraphier, téléphoner, témoigner, vanter 

Ø 34. Elle te dit tout ce que doit dire une mère à une fille chérie.

HONORÉ DE BALZAC, Correspondance,  1821, page 115. 

Ø 35. Demande-le aux mères, qui n'osent plus laisser sortir seuls leurs fils lorsqu'ils ont un visage agréable; demande-le surtout à Abbas-Pacha qui, pendant mon séjour au Kaire, fit faire à Boulaq une razzia d'enfants.

MAXIME DU CAMP, Le Nil, Égypte et Nubie,  1854, page 40. 

c) Après des verbes signifiant \" fabriquer \" ou son contraire :

briser, casser, confectionner, construire, fabriquer, faire 

d) Dans la construction verbe + à + quelqu'un + de + infinitif  —  A côté de la construction verbe + quelque chose à quelqu'un, de nombreux verbes cités ci-dessus peuvent avoir la construction verbe + à quelqu'un + de + infinitif; elle présente une nette analogie avec la précédente : de + infinitif joue le rôle du complément direct de l'inanimé; seule est changée la position du complément d'attribution de l'animé introduit par à :

accorder quelque chose à quelqu'un / accorder à quelqu'un de + infinitif

ommander quelque chose à quelqu'un / commander à quelqu'un de + infinitif

conseiller quelque chose à quelqu'un / conseiller à quelqu'un de + infinitif

crier quelque chose à quelqu'un / crier à quelqu'un de + infinitif

défendre quelque chose à quelqu'un / défendre à quelqu'un de + infinitif

demander quelque chose à quelqu'un / demander à quelqu'un de + infinitif

devoir quelque chose à quelqu'un / devoir à quelqu'un de + infinitif

dire quelque chose à quelqu'un / dire à quelqu'un de + infinitif

écrire quelque chose à quelqu'un / écrire à quelqu'un de + infinitif

garantir quelque chose à quelqu'un / garantir à quelqu'un de + infinitif

inculquer quelque chose à quelqu'un / inculquer à quelqu'un de + infinitif

interdire quelque chose à quelqu'un / interdire à quelqu'un de + infinitif

jurer quelque chose à quelqu'un / jurer à quelqu'un de + infinitif

mander quelque chose à quelqu'un / mander à quelqu'un de + infinitif

notifier quelque chose à quelqu'un / notifier à quelqu'un de + infinitif

offrir quelque chose à quelqu'un / offrir à quelqu'un de + infinitif

ordonner quelque chose à quelqu'un / ordonner à quelqu'un de + infinitif

pardonner quelque chose à quelqu'un / pardonner à quelqu'un de + infinitif

prescrire quelque chose à quelqu'un / prescrire à quelqu'un de + infinitif

promettre quelque chose à quelqu'un / promettre à quelqu'un de + infinitif

redire quelque chose à quelqu'un / redire à quelqu'un de + infinitif

refuser quelque chose à quelqu'un / refuser à quelqu'un de + infinitif

reprocher quelque chose à quelqu'un / reprocher à quelqu'un de + infinitif

seriner quelque chose à quelqu'un / seriner à quelqu'un de + infinitif

signifier quelque chose à quelqu'un / signifier à quelqu'un de + infinitif

suggérer quelque chose à quelqu'un / suggérer à quelqu'un de + infinitif

télégraphier quelque chose à quelqu'un / télégraphier à quelqu'un de + infinitif

téléphoner quelque chose à quelqu'un / téléphoner à quelqu'un de + infinitif

valoir quelque chose à quelqu'un / valoir à quelqu'un de + infinitif. 

Ø 36. Mais à cinq heures, voyant le péril de Wellington, Blucher ordonna à Bulow d'attaquer et dit ce mot remarquable : « Il faut donner de l'air à l'armée anglaise. »

VICTOR HUGO, Les Misérables, tome 1, 1862, page 405. 

Ø 37. Je reproche à Hugo de manquer de sens critique, de discipline critique, de goût de vérité, de besoin de propreté dans les choses historiques,...

MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 12, 15 janvier-30 juin 1919, page 4. 

Ø 38.... elle demanda à la comtesse De Coantré, sa mère, d'accompagner l'enfant Alban.

HENRI DE MONTHERLANT, Les Bestiaires,  1926, page 385. 

Remarque : 1. Concurrence à / de.  —  Certains verbes présentent par ailleurs une construction double avec de. La différence de construction va de pair avec une différenciation sémantique :

dispenser quelque chose à quelqu'un « donner » / dispenser quelqu'un de quelque chose « exempter »

fournir quelque chose à quelqu'un / fournir quelqu'un de quelque chose

garantir quelque chose 

garantir quelque chose à quelqu'un / garantir quelqu'un de quelque chose

payer quelque chose 

payer quelque chose à quelqu'un / payer quelqu'un de quelque chose

servir quelque chose 

servir quelque chose à quelqu'un / servir de quelque chose à quelqu'un

Quelques verbes de la forme pronominale construite avec de admettent un complément d'attribution introduit par à :

s'ouvrir à quelqu'un de quelque chose

se plaindre 

se plaindre à quelqu'un de quelque chose

s'en prendre 

s'en prendre à quelqu'un de quelque chose

se rapporter 

se rapporter à quelqu'un de quelque chose

se recommander 

se recommander à quelqu'un de quelqu'un. 

Remarque : 2. Genre du complément direct  —  Le complément direct est généralement de l'inanimé. Un certain nombre de verbes, cependant, appellent indifféremment un complément direct de l'inanimé ou de l'animé :

abandonner quelqu'un (ou quelque chose) à quelqu'un

adresser quelqu'un (ou quelque chose) à quelqu'un

annoncer quelqu'un (ou quelque chose) à quelqu'un

confier quelqu'un (ou quelque chose) à quelqu'un

envoyer quelqu'un (ou quelque chose) à quelqu'un

présenter quelqu'un (ou quelque chose) à quelqu'un

ravir quelqu'un (ou quelque chose) à quelqu'un

vanter quelqu'un (ou quelque chose) à quelqu'un. 

2. À + substantif de l'animé, complément d'agent dans une tournure factitive. 

a) [Après faire. —  À l'emporte sur par après les verbes subjectifs ou dans des phrases où l'agent ne joue pas véritablement de rôle actif :] 

(Personne) n'avait fait ressentir à Don Cesare (...) des sentiments aussi vifs. 

ces visions faisaient (...) désirer à tous la libération. 

Le déferlement de razzias... faisait perdre aux Templiers leurs terres... 

(des histoires) qui faisaient hocher la tête aux vieilles gens. 

Comment ferez-vous avaler cela à vos parents? 

(Elle) fait quitter le lycée à ses enfants. 

Tu fais boire ce jus de tomate à ton fils? 

(un grand seigneur) qui fait visiter ses domaines à un croquant. 

(Il) fait faire à son adversaire un merveilleux saut. 

Exceptionnellement, l'agent est de l'inanimé : 

... (Le danger que ce parti) faisait courir à l'unité de la nation. 

... (pour) faire rendre à la terre de nouvelles richesses. 

Les manifestants... font suivre aux machines le même chemin. (Ebbe Spang-Hanssen, Les Prépositions incolores du français moderne, pages 129-133). 

b) [Après laisser, la tournure est archaïque] 

—  À + substantif de l'inanimé : 

Ø 39.... s'il ne fit pas arrêter Céluta, c'est qu'il se laissa fléchir aux larmes d'Adélaïde.

FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Les Natchez,  1826, XX, page 142. 

Ø 40. Il avait son ordre secret pourtant; je me suis laissé un peu trop décevoir peut-être à sa pure grâce de causeur et d'écrivain : quelques points sont à reprendre.

CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Port-Royal, tome 1, 1840, page 257. 

—  À + substantif de l'animé : 

Ø 41.... mais j'étais trop timide d'un côté, trop exalté de l'autre, pour me laisser séduire à des filles de joie.

FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, tome 1, 1848, page 164. 

c) La tournure est également possible après les verbes de perception :

entendre dire à quelqu'un que...

voir faire la même chose à quelqu'un

Confer par et infinitif, historique II A 3 a. 

3. À + substantif de l'inanimé. 

a) [Après les verbes d'\" attribution \" :] 

adjoindre quelque chose à quelque chose. 

apporter quelque chose à quelque chose. 

consacrer quelque chose à quelque chose. 

donner quelque chose à quelque chose. 

fixer un délai à quelque chose. 

Ø 42. Le délai que je fixe à leur divulgation m'en est un assez sûr garant

PIERRE BENOIT, L'Atlantide,  1919, page 9. 

Ø 43. Je veux adjoindre à nos efforts, mettre au service de la France les forces morales pour tenir en échec les forces économiques, les forces bestiales coalisées contre nous.

MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 13, juin 1920-janvier 1921, page 3. 

Ø 44. Quelque réponse qu'apporte la suite des événements à cette question passionnante, l'honneur de l'école française restera sauf.

ABBÉ HENRI BREMOND, Histoire littéraire du sentiment religieux en France, tome 3, 1921, page 513. 

Ø 45. Ils donnent à leur toilette les derniers soins.

MARCEL ACHARD, Voulez-vous jouer avec moâ?,  1924, I, 1, page 23. 

Confer aussi intéresser quelqu'un à quelque chose : 

Ø 46.... pour intéresser un Anglais à une guerre, rien de tel que de lui suggérer qu'elle ressemble à un match de boxe.

ÉMILE HERZOG, DIT ANDRÉ MAUROIS, Les Silences du colonel Bramble,  1918, page 10. 

b) [Après les verbes signifiant \" mettre \", \" poser \", \" unir \", \" comparer \" :] 

allier quelque chose à quelque chose. 

annexer quelque chose à quelque chose. 

assimiler quelque chose à quelque chose. 

associer quelque chose à quelque chose. 

comparer quelque chose à quelque chose. 

confronter quelque chose à quelque chose. 

coudre quelque chose à quelque chose. 

fixer quelque chose à quelque chose. 

incorporer quelque chose à quelque chose. 

joindre quelque chose à quelque chose. 

lier quelque chose à quelque chose. 

mêler quelque chose à quelque chose. 

proportionner quelque chose à quelque chose. 

rapporter quelque chose à quelque chose. 

réduire quelque chose à quelque chose. 

relier quelque chose à quelque chose. 

subordonner quelque chose à quelque chose. 

substituer quelque chose à quelque chose. 

c) [Après les verbes :] 

borner quelque chose à quelque chose. 

limiter quelque chose à quelque chose. 

objecter quelque chose à quelque chose. 

répliquer quelque chose à quelque chose. 

rétorquer quelque chose à quelque chose. 

Ø 47. Jusqu'ici, il avait su limiter sa curiosité à des tentatives prudentes, à des demi-avances qui n'engagent pas le partage de l'être.

GABRIELLE ROY, Bonheur d'occasion,  1945, page 255. 

4. À + infinitif (ou substantif d'action), complément de destination. 

a) Le complément direct est un substantif de l'animé : il est \" sujet \" de l'infinitif ou éventuellement du substantif d'action. 

—   [Après des verbes exprimant l'appel à l'action :] 

amener quelqu'un à faire quelque chose. 

appeler quelqu'un à. 

autoriser quelqu'un à. 

conduire quelqu'un à. 

convertir quelqu'un à. 

convier quelqu'un à. 

décider quelqu'un à. 

destiner quelqu'un à. 

déterminer quelqu'un à. 

encourager quelqu'un à. 

engager quelqu'un à. 

exciter quelqu'un à. 

exhorter quelqu'un à. 

gagner quelqu'un à. 

induire quelqu'un à. 

inviter quelqu'un à. 

porter quelqu'un à. 

pousser quelqu'un à. 

vouer quelqu'un à. 

Ø 48. Ceux qui conduisent les hommes à la conquête des choses n'ont que faire de la justice et de la charité.

JULIEN BENDA, La Trahison des clercs,  1927, page 9. 

Ø 49. Vous qui vivez auprès d'elle, vous savez combien je la vois rarement, combien sa présence m'enchante, et je suis touchée que vous m'invitiez à venir la voir.

GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, La Naissance du jour,  1928, page 5. 

Confer en emploi absolu : 

Ø 50. —  C'te question! fit-elle avec mépris, mais non d'une façon définitive, comme si elle eût tenté de lui imposer le silence. Au contraire, sa voix invitait à une réplique.

GABRIELLE ROY, Bonheur d'occasion,  1945, page 10. 

—   [Après des verbes exprimant la contrainte :] 

assigner quelqu'un à faire quelque chose. 

astreindre quelqu'un à. 

commettre quelqu'un à (archaïsme) 

condamner quelqu'un à. 

contraindre quelqu'un à. 

employer quelqu'un à. 

forcer quelqu'un à. 

obliger quelqu'un à. 

occuper quelqu'un à. 

réduire quelqu'un à. 

résoudre quelqu'un à. 

utiliser quelqu'un à. 

Ø 51.... ils me reprochaient la faute de ma mère, et voulaient me forcer à rougir d'elle...

AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, La Petite Fadette,  1840, XVIII (Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française (PAUL ROBERT) ). 

—   [Après des verbes exprimant la préparation à l'action :] 

aider quelqu'un à faire quelque chose. 

dresser quelqu'un à. 

endurcir quelqu'un à. 

entraîner quelqu'un à. 

exercer quelqu'un à. 

former quelqu'un à. 

habiliter quelqu'un à. 

habituer quelqu'un à. 

initier quelqu'un à. 

préparer quelqu'un à. 

styler quelqu'un à. 

Ø 52. Je n'aiderai personne à contempler ce qui s'attache de splendeur, dans mon souvenir, aux cordons rouges d'une vigne d'automne que ruinait son propre poids, cramponnée, au cours de sa chute, à quelque bras de pin.

GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, La Maison de Claudine,  1922, page 8. 

Ø 53. En effet, alors qu'on le préparait à sa première communion, Mme.  de Coantré avait donné à son petit-fils l'édition pour la jeunesse de Quo Vadis et depuis ce temps Alban était Romain.

HENRI DE MONTHERLANT, Les Bestiaires,  1926, page 385. 

—   [Après le verbe laisser. —  Laisser est généralement suivi de l'infinitif sans préposition (laisser quelqu'un travailler). Cependant, quand l'infinitif est un verbe d'entendement, la construction avec à est possible :] 

je vous laisse à imaginer l'étrange nouvelle. 

je vous laisse à entendre ce que... 

je vous laisse à penser la... 

je vous laisse à deviner qui... 

b) Le complément direct (généralement de l'inanimé) est simultanément objet du verbe et de l'infinitif. 

—   Type avoir quelque chose à faire : 

il n'a pas encore grand effort à faire. 

il avait une revanche à prendre. 

Avez-vous d'autres informations à me demander. 

quand il a une colère à cuver. 

si j'avais un conseil à vous donner. 

avaient toutes leurs études à compléter. 

n'aurait jamais assez de jours à vivre pour. 

il avait le tramway à prendre. 

comme si elle avait eu une faute à se faire pardonner. 

peut-être aurons-nous du nouveau à raconter. 

quand j'aurai de l'argent à dépenser. 

qu'il a bien d'autres gens à haïr. 

je n'ai plus que mon chapeau à brosser. 

il n'avait que la cour à traverser. 

vous n'avez qu'un mot à dire. 

je n'ai plus que ma robe à enfiler. 

il n'avait qu'un signe à faire. 

il n'eut plus que sa femme de chambre à aimer. 

il n'a que de mauvais coups à récolter. 

comme j'avais à le craindre. 

j'ai exactement tout à apprendre. 

j'avais encore tout à connaître. 

n'avoir rien de mieux à faire qu'à. 

n'a pas autre chose à faire. 

ont toujours quelque chose à demander. 

a quelque chose à faire savoir... 

(Confer Syntaxe du français contemporain (KRISTIAN SANDFELD) tome 3, 1943, § 203). 

Remarque : Le complément de l'infinitif, qui s'interprète aussi bien comme le complément de avoir, peut se placer soit après avoir, soit après l'infinitif Une nuance de signification sépare cependant ces deux types de constructions : avoir de l'argent à dépenser signifie \" posséder de l'argent que l'on peut dépenser \"; avoir à dépenser de l'argent signifie \" devoir dépenser de l'argent \". La forme négative accentue cette opposition : n'avoir pas d'argent à dépenser/n'avoir pas à dépenser d'argent. 

—   Type trouver quelque chose à faire : 

elle trouva d'emblée la phrase à dire. 

pour trouver des noms à donner à... 

confer mettre du linge à sécher/mettre à sécher du linge : le complément direct est « sujet » de l'infinitif. 

—   Type laisser quelque chose à faire (laisser à quelqu'un quelque chose à faire). Laisser admet la double construction lorsqu'il signifie \" laisser derrière soi, abandonner... \" (sens concret) : 

elle ne laissait rien à dire. 

il laissait à louer cette propriété. 

avant de te laisser à développer en toi-même la leçon... 

—   Type donner quelque chose à faire (avec insertion possible d'un complément d'attribution donner à quelqu'un quelque chose à faire) : 

pour la donner à traduire. 

donner du fil à retordre. 

donne-les-moi donc à porter. 

donne ça à composer. 

donnez-moi des pommes de terre à éplucher. 

et donne son enfant à soigner. 

je donnerais mon poing à couper. 

donner un os à ronger. 

je donne à garder mon mulet. 

lui donnais à feuilleter mes brochures. 

avant de lui donner à lire deux lettres. 

on lui donna juste à recopier quelques rapports. 

il donnait à entendre que. 

il nous donne à penser que. 

c) Le complément direct est de l'inanimé; il n'est ni \"sujet\", ni objet de l'infinitif : 

ils mettent leur élégance à ne pas se montrer. 

il mit pareille patience à parfaire... 

il ne mettait donc aucune bonne volonté à fournir... 

elle mettait tout son orgueil à faire reconnaître... 

il mit tous ses efforts à me maintenir... 

ils mettaient bien du temps à pousser... 

il mit quelques instants à comprendre. 

il mit plus de vingt ans à retrouver... 

il mit une semaine à mourir. 

consacrer du temps à faire quelque chose. 

dépenser son existence à faire fortune. 

dépenser une partie de son argent à décorer... 

employer cette demi-heure à visiter... 

utiliser ses connaissances à faire... 

attacher le plus grand prix à démontrer... 

(Confer Syntaxe du français contemporain (KRISTIAN SANDFELD) tome 3, § 231). 

Ø 54. Christophe avait passé la moitié de la nuit à achever un travail insipide de transcription musicale...

ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, Les Amies, 1910, page 1089. 

d) Locution. avoir à, trouver à, donner à, laisser à (sans complément dir) 

—  Avoir à. —  Marque l'obligation. (Employé le plus souvent en tournure négative ou restrictive) : 

j'ai à parler à quelqu'un. 

je puis avoir à parler à quelqu'un. 

je n'ai pas à entrer dans ces considérations. 

je n'ai plus qu'à revenir. 

ils n'ont pas à craindre une bévue. 

vous n'aurez pas beaucoup à patienter. 

elle a beaucoup à grandir. 

on n'eut pas longtemps à attendre. 

elle n'a pas longtemps à vivre. 

qui avait encore deux ans à courir. 

elle n'a que cinq minutes à rester. 

j'ai quatre jours à rester absent. 

qui ait encore eu bien longtemps à faire semblant de. 

j'en ai pour trois nuits à rêver de. 

j'en ai pour toute la journée à travailler. 

(Confer Syntaxe du français contemporain (KRISTIAN SANDFELD) tome 3, § 195-202). 

Ø 55. Je vous dédie ce livre, mon cher maître, comme j'ai dédié « Lorely » à Jules Janin. J'avais à le remercier au même titre que vous.

GÉRARD DE NERVAL, Les Filles du feu,  1854, page 491. 

—  Trouver à (le complément de l'infinitif n'est pas complément du verbe trouver) : 

jamais elle ne trouvera à les marier. 

elle avait trouvé à s'employer. 

que vous trouviez à vous distraire. 

elle trouva vite à se consoler. 

si je trouvais à vendre. 

si vous trouvez à conclure. 

on n'avait jamais trouvé à dire sur... 

il trouvait toujours à dire que. 

—  Donner à : 

angoisses (qui) donnent trop à souffrir. 

une livre (qui) donne fort à penser. 

mieux que ces vers ne donnent à croire. 

lui donne à choisir entre. 

écrits qui donnent à rire ou à pleurer. 

nous donna beaucoup à réfléchir. 

ne lui donnait d'ailleurs à réfléchir. 

qui donne à aimer. 

qui donnent à dîner. 

elle donnait à vivre. 

m'a donné à penser. 

(Confer Syntaxe du français contemporain (KRISTIAN SANDFELD) tome 3, § 163). 

Pour donner à manger, donner à boire à quelqu'un, donner à téter, Confer Syntaxe du français contemporain (Kristian Sandfeld) tome 3, § 203. 

—  Laisser à : 

la solution laisse à désirer. 

son attitude laisse à penser. 

C.—  À entre dans la construction d'une locution verbale. 

1. Locutions verbales contenant la préposition à. 

a) À + substantif non actualisé : 

à bail (avoir, mettre, prendre, tenir) 

à bout (être, mettre, pousser) 

à charge (avoir, être, prendre) 

à coeur (avoir, prendre) 

à cheval (être, monter, aller) 

à cran (être, mettre) 

à crime (imputer) 

à égalité (être, arriver) 

à faveur (avoir) 

à flot (être, mettre) 

à gage (avoir) 

à genoux (être, mettre) 

à honneur (avoir, tenir) 

à injure (tenir) 

à jour (mettre) 

à mal (tenir, tourner) 

à mépris (avoir, tenir) 

à part (être, mettre) 

à partie (prendre) 

à poil (être, mettre) (vulgaire) 

à tâche (avoir, prendre) 

à terme (être, arriver, mener) 

Pour aller à bicyclette / aller en bicyclette, Confer en. 

Ø 56.... nous n'abuserons pas de nos avantages, de peur qu'en pressant trop l'évidence, nous ne finissions par jeter les ennemis du Christianisme dans l'obstination, dernier refuge de l'esprit de sophisme poussé à bout.

FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Le Génie du Christianisme, 1803, page 119. 

b) À + substantif actualisé. 

—   [Après le verbe être :] 

aux abois (être) 

à l'affût (être) 

aux anges (être) 

à l'article de la mort (être) 

à l'avenant (être) 

au beau (être) 

aux cent coups (être) 

au comble (être) 

au complet (être) 

aux côtés de (être) 

à la dérive (être) 

au diapason (être) 

à l'écoute (être) 

aux écoutes (être) 

à la hauteur (être) 

au mieux (être) 

à la mode (être) 

aux ordres de (être) 

au pain et à l'eau (être) 

au poil (être) (familier) 

à la renverse (être) 

à la six quatre deux (être) (familier) 

à l'unisson (être) 

—   [Après le verbe être commutant avec mettre :] 

à l'abri (mettre / être) 

à l'aise (mettre / être) 

à l'épreuve (mettre / être) 

au fait (mettre / être) 

à la page (mettre / être) 

à la porte (mettre / être) 

au supplice (mettre / être) 

à la charge de (mettre / être) 

au courant (mettre / être) 

à son aise (mettre / être) 

à son compte (mettre / être) 

à sa place (mettre / être) 

à sa merci (être / réduire) 

Ø 57. S'il n'avait été engourdi par le sommeil, il eût mis l'homme à la porte;...

ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, Les Amies, 1910, page 1090. 

—   [Après mettre, prendre, tirer, etc. :] 

à l'actif de (mettre, porter) 

au clair (mettre, tirer) 

au compte de (mettre, porter) 

à la courte paille (tirer) 

au défi (mettre) 

au dépourvu (prendre) 

à l'évidence (se rendre) 

à ses fins (arriver) 

au flanc (tirer) (familier) 

aux mains (en venir) 

à l'ordre (rappeler) 

à la raison (appeler, mettre) 

à la rigolade (prendre) (familier) 

au sérieux (prendre) 

au sort (tirer) 

à sa tête (en faire) 

aux voix (mettre) 

2. À introduit le complément d'une locution verbale. 

a) À + substantif. 

—   Le substantif de la locution verbale n'est pas actualisé : 

avoir accès à quelque chose. 

avoir affaire à quelqu'un. 

avoir foi à quelque chose (vieux) 

ajouter créance à quelque chose. 

demander conseil à quelqu'un. 

demander pardon à quelqu'un. 

dire adieu à quelqu'un. 

donner assaut à quelque chose. 

donner audience à quelqu'un. 

donner carrière à quelque chose. 

donner congé à quelqu'un. 

donner cours à quelque chose. 

donner ordre à quelqu'un. 

faire affront à quelqu'un. 

faire allusion à quelqu'un. 

faire appel à quelqu'un. 

faire attention à quelque chose. 

faire concurrence à quelqu'un. 

faire confiance à quelqu'un. 

faire crédit à quelqu'un. 

faire honneur à quelqu'un. 

faire mal à quelqu'un. 

faire plaisir à quelqu'un. 

fausser compagnie à quelqu'un. 

porter bonheur à quelqu'un. 

prendre goût à quelque chose. 

prendre plaisir à quelque chose. 

prêter assistance à quelqu'un. 

rendre grâces à quelqu'un. 

Ø 58. Il revint avec des bonds de coeur, en s'accusant d'avoir douté d'un frère, en priant pour sa conversion à l'entière vérité, en ayant foi plus que jamais à l'union définitive des hommes.

CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Volupté, tome 2, 1834, page 171. 

Ø 59. La preuve en est que nul ne dépensait plus largement, quand l'intérêt du pays était en jeu. Au reste, faisant confiance à ses agents et leur demandant rarement des comptes.

RENÉ GROUSSET, L'Épopée des Croisades,  1939, page 193. 

—   Le substantif de la locution est actualisé : 

brûler la cervelle à quelqu'un. 

clouer le bec à quelqu'un. 

couper le chemin à quelqu'un. 

donner l'accolade à quelqu'un. 

donner l'assaut à quelque chose. 

donner le branle à quelque chose. 

donner le change à quelqu'un. 

donner la chasse à quelqu'un, quelque chose. 

donner son compte à quelqu'un. 

donner un coup de main à quelqu'un. 

donner un coup d'oeil à quelque chose, quelqu'un. 

faire un accroc à quelque chose. 

faire son affaire à quelqu'un. 

faire un affront à quelqu'un. 

faire ses amitiés à quelqu'un. 

faire la barbe à quelqu'un. 

faire la charité à quelqu'un. 

faire ses compliments à quelqu'un. 

faire la conversation à quelqu'un. 

faire la cour à quelqu'un. 

fermer la bouche à quelqu'un. 

mettre le comble à quelque chose. 

mettre le feu à quelque chose. 

renvoyer la balle à quelqu'un. 

river son clou à quelqu'un (familier) 

rogner les ailes à quelqu'un. 

souhaiter la bienvenue à quelqu'un. 

tordre le cou à quelqu'un. 

b) À + infinitif. 

—   Le substantif de la locution verbale n'est pas actualisé : 

avoir avantage à refuser. 

avoir mauvaise grâce à insister. 

avoir grand'peine à faire asseoir. 

avoir intérêt à connaître. 

avoir peine à croire que. 

avoir plaisir à pardonner. 

avoir propension à critiquer. 

avoir scrupule à marcher. 

avoir tendance à penser. 

donner matière à jaser. 

prendre plaisir à observer. 

trouver joie à parcourir. 

trouver matière à ne pas désespérer. 

Ø 60. Vous m'avouerez cependant que j'aurais bien mauvaise grâce à vouloir lutter d'agréments contre Sainval, par exemple, qui n'a pourtant que deux ans moins que moi.

THÉODORE LECLERCQ, La Scène double,  1835, I, page 346. 

Ø 61. Je goûte toujours grande joie à supprimer tout l'inutile. Mes corbeilles à papier s'emplissent de « repentirs » qui, maintenus, eussent paru du foisonnement;... [plus courant : goûter une grande joie à]

ANDRÉ GIDE, Journal,  1930, page 963. 

—   Le substantif de la locution verbale est actualisé : 

n'avoir pas de difficultés à se trouver. 

avoir une disposition à s'enrhumer. 

avoir des difficultés à passer. 

avoir de la facilité à apprendre. 

avoir une grande facilité à parler. 

n'avoir plus de goût à jouer. 

avoir de la joie à mortifier... 

avoir du mal à comprendre. 

avoir beaucoup de mal à rejoindre... 

avoir de la peine à croire... 

avoir beaucoup de peine à faire quelque chose. 

avoir du plaisir à faire quelque chose. 

avoir une propension à mentir. 

avoir de la propension à critiquer. 

avoir une tendance à accepter... 

avoir une certaine tendance à penser que... 

avoir une petite tendance à prendre... 

éprouver une joie à prendre possession de... 

fournir un prétexte à ne rien faire. 

montrer un réel plaisir à accepter. 

se réserver du plaisir à faire quelque chose. 

trouver de la joie à sentir... 

D.—  [À introduit un complément de lieu (de nature ponctuelle)] 

1. [Le complément de lieu est indispensable au sens du verbe] 

a) [Après des verbes marquant un déplacement (réel ou figuré) du sujet] 

—   [Verbes construit avec à (ou une préposition équivalente), mais excluant de] 

aborder à. 

aboutir à. 

accéder à. 

accoster à. 

aller à. 

confiner à. 

courir à. 

entrer à. 

passer à. 

pénétrer à. 

se cogner à. 

se heurter à. 

se réfugier à. 

se rendre à. 

tendre à. 

s'arrêter à. 

atteindre au port (vieux) 

avancer au combat (vieux) 

marcher à la victoire. 

Ø 62. Partons maintenant, dit Corinne, et retournons à la ville.

GERMAINE NECKER, BARONNE DE STAËL, Corinne ou l'Italie, tome 2, 1807, page 84. 

Ø 63. Deux mois plus tard, par une après-midi grise et douce de novembre, Mme.  Caroline monta à la salle des épures, tout de suite après le déjeuner, pour se mettre au travail.

ÉMILE ZOLA, L'Argent,  1891, page 219. 

Remarque : Parmi ces verbes, les uns expriment le mouvement sans plus, auquel la préposition à confère une direction (exemple passer). Les autres signifient par eux-mêmes le mouvement et le terme de ce mouvement, signification que à se borne à confirmer (exemple accéder à). Avec les verbes imperfectif aller, courir..., à peut être renforcé par jusqu(e). Constructions avec la préposition de, approcher et se rapprocher constituent la seule exception à cette classe de verbes. Ils reflètent une représentation mentale qui consiste à poser l'idée d'un repère avant celle du mouvement qui y conduit, à l'encontre des verbes comme atteindre à qui envisagent d'abord le mouvement, et ensuite son terme. S'approcher de signifie un mouvement en direction d'un point, de manière à être près de ce point; la première idée est traduit par le préverbe a, la seconde par la préposition de (confer supra I A 1, Remarque : 1, l'analyse de échapper à). 

—   [Verbes construit tantôt avec à (ou une préposition équivalente), tantôt avec de. L'opposition \" approche \"/\" éloignement \" est traduite par le jeu des prépositions : 

arriver à / de. 

partir à / de. 

revenir à / de. 

s'en aller à / de. 

tomber à / de. 

b) [Après des verbes dits de \" position \". —  Ces verbes excluent de; la préposition à marque une référence à l'espace, indépendamment de toute idée de direction] 

demeurer à. 

être à. 

habiter à. 

rester à. 

s'arrêter à (au sens de \" habiter \") 

vivre à. 

Ø 64. Très ennuyé, l'ancien beau résistait, lorsque Hourdequin, apprenant de Macqueron que plusieurs des conseillers municipaux étaient à la mairie, où ils l'attendaient depuis une demi-heure, dit en homme sans gêne :

—  C'est ça, allez donc voir l'église...

ÉMILE ZOLA, La Terre,  1887, page 158. 

c) [Après des verbes à double construction marquant un déplacement ou l'accompagnement] 

accrocher quelque chose à quelque chose. 

accompagner quelqu'un à la gare. 

appliquer quelque chose à quelque chose. 

attirer quelque chose à soi. 

conduire quelqu'un à la gare. 

étendre quelque chose à quelque chose. 

placer quelque chose à la banque. 

ramener quelqu'un à la maison. 

ramener quelque chose à soi. 

suspendre quelque chose à quelque chose. 

traîner quelqu'un au supplice. 

Ø 65. Chacune de ces habitudes d'obéir exerce une pression sur notre volonté. Nous pouvons nous y soustraire, mais nous sommes alors tirés vers elle, ramenés à elle, comme le pendule écarté de la verticale.

HENRI BERGSON, Les Deux sources de la morale et de la religion, 1932, page 2. 

Confer en emploi absolu : 

Ø 66. J'ai voulu que l'expérience conduise où elle menait, non la mener à quelque fin donnée d'avance. Et je dis aussitôt qu'elle ne mène à aucun havre (mais en un lieu d'égarement de non-sens).

GEORGES BATAILLE, L'Expérience intérieure,  1943, page 17. 

2. [Complément circonstanciel proprement dit] : 

Ø 67. Plus loin, à l'orient, au bas de la montagne que domine la Wartbourg, et entre cette montagne et l'ancienne chartreuse consacrée à la Sainte en 1394, on voit se déployer une vallée charmante arrosée par un paisible ruisseau qui coule au milieu de prairies pleines de roses et de lis;...

CHARLES, COMTE DE MONTALEMBERT. Histoire de Sainte Elisabeth de Hongrie, duchesse de Thuringe (1207-1231),  1836, page 111. 

Ø 68. Quelques personnes, au balcon et à l'orchestre, attendaient, perdues parmi les fauteuils de velours grenat, dans le petit jour du lustre à demi-feux.

ÉMILE ZOLA, Nana,  1880, page 1095. 

Remarque : 1.—   Concurrence à / en ou une autre préposition locale (confer historique I A 3).

La préposition en n'alterne avec à que devant certains substantifs féminins et quelques substantifs masculins à initiale vocalique qui ne sont pas incompatibles avec l'idée d'intériorité. L'article livre en combinaison avec à une valeur de détermination, celle de généralité étant fournie par en qui exclut l'article; on notera que la préposition en figure essentiellement dans des syntagmes plus ou moins figés :

il travaille à l'usine (de chez Renault) / il travaille en usine

à l'appartement / en appartement

à la Bourse / en Bourse

à la campagne / en campagne

à la cour / en cours d'assises

à la face / en face

à la faculté / en faculté

à la gare / en gare

à l'hôtel / en hôtel

à la maison / en maison de

à la mer / en mer

à la place de / en place

à la prison / en prison

à la tête / en tête

à l'usine / en usine

à la ville / en ville

On notera également l'opposition à l'air / en l'air, où le maintien de l'article après en fait exception à la règle et où en l'air s'oppose à sur le sol ou en mer, tandis que à l'air s'oppose à enfermé dans, à l'intérieur de.

La présence de à dans les 2 exemples suivants est tout à fait insolite; le sens « à l'intérieur de » entraîne normalement l'emploi des prépositions en ou dans :

69. On se prêtait ces petits livrets; chacun transcrivait à la marge de son exemplaire les mots, les paraboles qu'il trouvait ailleurs...

E. RENAN, Vie de Jésus, 1863, page LVI.

70. ... l'abbé se rappela qu'un jour il avait croisé les jambes, à la classe.

É. ZOLA, La Faute de l'Abbé Mouret, 1875, page 1302.

L'alternance de la préposition à avec des prépositions de sens concret telles que dans, sur, vers, contre, est possible, surtout dans l'expression des relations spatiales les plus concret; mais à tend à se maintenir devant les substantifs précédés de l'article singulier de la généralité, en particulier lorsqu'ils sont pris dans un sens abstrait, et dans des groupes qui se situent à la limite de la locution verbale : être à la rue / être dans la rue; à la cuisine / dans ma cuisine; à l'usine / dans cette usine; au coeurœur / dans mon coeur. œur. Par archaïsme, la préposition à apparaît dans des énoncés où l'on attendrait aujourd'hui des prépositions de sens concret; peut-être est-elle ressentie comme vieillie dès le XIXe.  siècle :

—  À pour dans :

71... les frères Almagrurins, de Lisbonne, pénétrèrent, dit-on aux terres les plus reculées de l'Occident.

F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Voyage en Amérique, en France et en Italie, tome 6, préface, 1827, page XLII.

72. Vous autres hérétiques, vous n'avez point foi aux reliques?

P. MÉRIMÉE, Chronique du temps de Charles IX, 1829, page 106.

73. Il [le cardinal de Retz] passait ses jours aux églises...

F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Vie de Rancé, 1844, page 127.

74. Ce bonhomme... ôta sa pipe de sa bouche... et le mettant à sa poche :

—  Si le curé risque sa peau, dit-il, je risque la mienne!

O. FEUILLET, Histoire de Sibylle, 1862, page 97.

—  À pour sous :

75. ... vous paraissez déterminée à passer une partie de l'hiver à notre beau soleil de Provence.

P. MÉRIMÉE, Lettres à une autre inconnue, 1870, page 53.

—  À pour sur :

76. ... quand nous sommes assis en plein air autour du feu, les cheveux m'en dressent à la tête, des aventures qu'elle nous conte.

P. MÉRIMÉE, Chronique du temps de Charles IX, 1829, page 24.

77. ... il [Charles X] s'en est allé avec une ère entière du monde; la poussière de mille générations est mêlée à la sienne; l'histoire le salue, les siècles s'agenouillent à sa tombe...

F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, tome 4, 1848, page 572.

78. La foule noire et serrée sur les perrons se dispersait aux trottoirs blancs...

A. DAUDET, Le Nabab, tome 2, 1877, page 244.

—  À pour vers :

79. La façade de la basilique de Tyr, construite vers l'an 313, était dirigée à l'orient.

A. LENOIR, Architecture monastique, tome 1, 1852, page 95.

Remarque 2. À / chez, auprès de, vers (confer aussi historique II A 3). —  La préposition à ne construit pratiquement plus, dans le sens local, un substantif de l'animé. Cependant on trouve au XIXe.  siècle :

—  À pour chez (devant un substantif au pluriel) :

80. Rien de tout cela aux peuples de la solitude : leur nom n'est point écrit sur les arbres;...

F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 1, 1848, page 308.

81. Un beau jour, il mourut subitement; on courut chercher son fils unique qui étudiait aux Jésuites.

P. MÉRIMÉE, Portraits historiques et littéraires, 1870, page 156.

—  À pour auprès de :

82. Tenez, informez-vous à votre prédécesseur de ce que vous avez à faire.

P. MÉRIMÉE, Théâtre de Clara Gazul, 1825, page 379.

83. Les enfants (...) étaient demeurés tranquillement assis devant la table (...) Mme.  Faujas s'était arrêtée un instant à chacun d'eux, les dévisageant comme pour pénétrer d'un coup dans ces jeunes têtes.

É. ZOLA, La Conquête de Plassans, 1894, page 909.

—  À pour vers 

84. L'inconnue ... courut à cet homme, qui parut la comprendre à demi-mot.

P. MÉRIMÉE, Arsène Guillot, 1847, page 87.

À s'est maintenu dans la locution envoyer au diable et, en langue familière, dans aller au coiffeur (pour chez le coiffeur).

Remarque 3. À introduit un toponyme. —  Se construisent avec à :

—  Les noms de pays (ou de régions du globe) masculin et à initiale consonantique (contrairement aux noms de pays féminin et aux noms de pays masculins à initiale vocalique qui se construisent avec en) : au Honduras, au Maroc, au Luxembourg, en France, au Monténégro, au Proche-Orient, en Espagne, en Israël, en Orient.

—  Certains noms de régions (du masculin et à initiale consonantique) dont les locuteurs connaissent mal le statut politique (par opposition aux noms de provinces, de départements, etc. introduits par en ou par dans) :

au Bénin

au Biafra

au Coromandel

au Fayoum

au Gandhara

au Kasaï

au Kashmir

au Katanga

au Texas

H. Glättli (confer bibliographie opere citato page 137) note une tendance toute récente à mettre au devant les noms de provinces masculin restés d'un usage courant (au Languedoc, au Périgord).

—  Les noms de pays et d'îles au pluriel :

aux Antilles

aux Baléares

aux États-Unis

aux Indes

—  Quelques noms féminin de grandes îles précédés de l'article défini :

à la Guadeloupe

à la Martinique

à la Nouvelle-Amsterdam

à la Réunion

—  Les noms d'îles employés sans article :

à Bornéo

à Ceylan

à Chio

à Cuba

à Haïti

à Java

à Madagascar

à Minorque

à Noirmoutier

à Nouméa

à Ouessant

à Terre-Neuve

Pour l'île d'Elbe, de Ré, de Sein, on dit à l'île de (ou dans l'île de).

—  Les noms de villes (employés sans article, à moins que l'article ne fasse partie du nom lui-même : La Rochelle, Le Mans) :

à Paris

à Florence

à Londres

Noter l'usage (régional ?) en Avignon pour à Avignon.

On trouve encore au XIXe.  siècle à + article féminin ou à + article élidé au lieu de en devant des noms de pays (ou de régions du globe) :

85. Après l'insurrection de la Morée, en 1770, des familles grecques se réfugièrent à la Floride : ...

F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, tome 1, 1848, page 335.

86. La peste noire du XIVe.  siècle, connue sous le nom de la mort noire, prit naissance à la Chine : ...

F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, tome 4, 1848, page 60.

87. Je ne croyais pas que l'on peignît si bien à la Chine...

P. MÉRIMÉE, Lettres aux Grasset, 1870, page 60.

88. Il l'enverra à l'hôpital et peut-être à l'Amérique. J'en suis fâché pour elle. C'était une jolie fille.

ANATOLE FRANCE, La Rôtisserie de la Reine Pédauque, 1893, page 222.

89. J'étais le plus jeune et le plus turbulent; mon père disait, par plaisanterie, qu'il faudrait m'envoyer à l'Amérique faire le flibustier...

IDEM, Les Dieux ont soif, 1912, page 179.

On notera aussi :

90. M. Eugène Delacroix, dans son voyage à Maroc...

P. MÉRIMÉE, Études sur les arts au Moyen Âge, 1870, page 16.

Remarque 4. À dans les locutions adverbiales de lieu. —  A la différence des autres compléments circonstanciels, les groupes sans article introduits par à sont peu nombreux : à bord, à côté, à distance, à droite, à gauche, à main gauche, à bon port, à proximité, à quai, à terre, à table. Le possessif ou l'article défini peuvent s'introduire dans quelques-unes de ces locutions : à son bord, à son côté, à ses côtés, au côté de, etc. A noter les locutions adverbiales :

bout à bout

corps à corps

face à face

seul à seul

terre à terre

tête à tête

vis à vis

—   La préposition à sert à introduire de nombreuses locutions prépositionnelles de sens spatial :

Remarque 5. La préposition à sert à introduire de nombreuses locutions préposition de sens spatial :

à l'abri de

à l'adresse de

à l'approche de

à la barbe de

à l'encontre de

au bout de

au bras de

au centre de

au coeurœur de

au coin de

au dedans de

au delà de

à l'endroit de

à l'entour de

à l'entrée de

à l'issue de

au haut de

au milieu de

au pied de

au sein de

au sortir de

aux yeux de

à l'ombre de

à la place de

à la sortie de

à la tête de

au devant de

au dos de

aux environs de

au fond de

au fort de

au front de

Certaines connaissent l'alternance à sans article / à + article :

à flanc de + substantif / au flanc de + article + substantif

 

à ras de + substantif / au ras de + article + substantif

 

à travers + substantif / au travers de + article + substantif

 

Confer aussi sans article à fleur de

91. Le soleil se couchait et nous marchions depuis longtemps dans l'ombre, lorsque enfin ma jeune guide m'indiqua du doigt, à flanc de coteau, une chaumière qu'on eût pu croire inhabitée, sans un mince filet de fumée qui s'en échappait, bleuissant dans l'ombre, puis bondissant dans l'or du ciel.

A. GIDE, La Symphonie pastorale, 1919, page 878.

Confer à même :

92. Si je vous disais qu'à des moments, la nuit, quand j'ai réussi à m'assoupir et que je m'éveille pour le voir toujours à la même place, dans son coin d'ombre, ses pauvres fesses à même le carreau, je ne peux pas m'empêcher de le plaindre, je m'attendris, je le raisonne...

G. BERNANOS, Monsieur Ouine, 1943, page 1503.

Dans bon nombre de ces locutions prépositionnelles, à s'oppose à la préposition d'éloignement de : au fond de / du fond de, au milieu de / du milieu de; à côté de marque le contact, tandis que du côté de localise de manière vague et signifie « aux alentours de ». Le français moderne dit des deux côtés de, de chaque côté, de tous les côtés. On trouve encore au XIXe.  siècle aux deux côtés de :

93. La route de Nice, aux deux côtés de laquelle se trouve bâti le faubourg, était bordée, en 1851, d'ormes séculaires,...

É. ZOLA, La Fortune des Rougon, 1871, page 18.

94. ... au-dessus des portes, aux deux côtés de l'alcôve, des peintures laissaient encore voir les ventres et les derrières roses de petits amours ...

IDEM, La Faute de l'Abbé Mouret, 1875, page 1316. 

E.—  [À introduit un complément circonstanciel de temps] 

1. [Le complément situe le procès dans le temps] 

a) [À introduit un substantif relatif au temps] 

à l'aube. 

à l'aurore. 

à l'avance. 

au début. 

à cette époque. 

à l'heure. 

à l'heure dite. 

à l'heure fixée. 

à l'ère quaternaire. 

à cette heure. 

à cinq heures. 

au jour dit. 

à l'instant. 

à midi. 

à minuit. 

à la minute. 

à ce moment. 

à Pâques. 

à la Pentecôte. 

à présent. 

à la Saint-Glinglin. 

à la Saint-Valentin. 

à temps. 

Ø 95. J'en tiens la nouvelle de Jeannette la veilleuse qui au moment où Catherine entrait... à l'hôpital, en sortait après y avoir été retenue pour un mal dont elle est guérie à st'heure...

ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, La Rôtisserie de la Reine Pédauque,  1893, page 278. 

Par archaïsme.  au matin, au jour prochain : 

Ø 96.... premier baiser ignorant, cueilli comme un bouquet, au matin du mariage.

ÉMILE ZOLA, La Faute de l'Abbé Mouret,  1875, page 1341. 

Ø 97. Mais quoi! m'abandonner! je renierais mon service, je délaisserais le culte que je me dois! Il faut que je veuille et que je me tienne en main pour pénétrer au jour prochain dans un univers que je vais délimiter, approprier et illuminer...

MAURICE BARRÈS, Un Homme libre,  1889, page 77. 

b) [À introduit un substantif d'action ou un substantif signifiant un signal ou un repère; le complément peut glisser insensiblement vers la valeur causale] : 

à l'annonce de. 

à son arrivée. 

à son avènement. 

à ce dernier chiffre. 

au commencement. 

à la demande de. 

à ces mots. 

à la nouvelle. 

à ces paroles. 

à leur réveil. 

au coup de sifflet. 

à votre dernier voyage. 

à la vue de. 

à première vue... 

Ø 98. Edmond demeura impénétrable; il ne sourit même pas à l'énumération des avantages qu'il eût partagés s'il eût pu quitter l'île;...

ALEXANDRE DUMAS PÈRE, Le Comte de Monte-Cristo, tome 1, 1846, page 298. 

Ø 99. Au-dessus de ma tête une haute coupole où, par une ouverture, glisse de biais un rayon de soleil qui m'aveugle à mon entrée.

JEAN THARAUD, JÉRÔME THARAUD, L'An prochain à Jérusalem,  1924, page 5. 

c) [À introduit un infinitif à valeur temporelle-causale] 

Ø 100. Insensé qui perd sa force ainsi et qui ne sait pas que les mortels s'enflent d'orgueil à découvrir chaque matin sur leur oreiller les cheveux de Jupiter!

GUSTAVE FLAUBERT, La Tentation de Saint Antoine,  1849, page 461. 

2. Le syntagme préposition marque une idée itérative ou distributive, grâce à la présence d'un élément nominal suggérant l'idée de retour ou d'intervalle : 

à chaque coup. 

à ses heures. 

à la quinzaine. 

à maintes reprises. 

à son tour. 

à temps perdu. 

Ø 101. Le mobilier est loué à la quinzaine chez Fitily, le tapissier des cocottes.

ALPHONSE DAUDET, Le Nabab, tome 1, 1877, page 196. 

Ø 102. Un temps indéterminé s'écoule. —  Profond silence. —  On entend un coq chanter à deux reprises à longs intervalles.

PAUL CLAUDEL, La Jeune fille Violaine, 2e.  version, 1901, page 571. 

Ø 103. Pour ma part, je m'acquittais de ma tâche avec zèle et mon orgueil grandissait à chaque fil que je tirais.

ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Le Petit Pierre,  1918, page 82. 

Ø 104. L'homme c'est bien malaisé à définir. Admettons que ça reste un enfant, pas vrai, Monsieur? Gentil et câlin à ses heures, mais plein de vices —  les dégoûtées n'ont qu'à rester filles.

GEORGES BERNANOS, Monsieur Ouine,  1943, page 1503. 

On notera l'absence de prédéterminant dans :

à coups répétés

à heure(s) fixe(s)

à intervalle(s) régulier(s)

à longs intervalles. 

Remarque : La locution à la fois se rapproche de l'idée d'itération par la présence obligée de plusieurs sujets, attributs ou objets. À cette fois a été supplanté par cette fois, à + numéral + fois, par + numéral + fois :

105. Il fallut lui arracher la cape, autrement il se faisait tuer à cette fois.

P. MÉRIMÉE, Mosaïque, 1833, page 270.

106. Il [Rougon] m'a répété à trois fois qu'il ne voulait plus s'occuper de cette vilaine histoire.

É. ZOLA, Son Excellence Eugène Rougon, 1876. 

À entre dans un certain nombre de locutions adverbiales signifiant la progression : bout à bout, feuille à feuille, pas à pas, petit à petit, peu à peu. 

3. [Le complément marque une durée dont on vise le terme :] 

à bref délai. 

à échéance. 

à brève échéance. 

à courte échéance. 

à huitaine. 

à terme. 

à court terme. 

à long terme. 

à moyen terme. 

à l'avenir. 

à la fin. 

à la longue. 

à cette date (en phrases négatives) 

à cette époque (en phrases négatives) 

à ce jour (en phrases négatives) 

Confer aussi à jamais et à la semaine prochaine, familièrement à la prochaine. 

Ø 107. Périodiquement revenaient des moments difficiles, où l'on était obligé de se serrer le ventre. On se dédommageait, en mangeant double ration, quand on avait de l'argent. Mais c'était, à la longue, un régime exténuant Pour le moment, ils étaient dans la période des vaches maigres.

ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, Les Amies, 1910, page 1089. 

Confer à nuit \" aujourd'hui \" (régional) : 

Ø 108. C'est que... fit-il timidement... enfin, si vous pouviez vous acquitter à nuit?...

OCTAVE MIRBEAU, Le Journal d'une femme de chambre,  1900, page 80. 

et, par archaïsme,  au printemps   \" jusqu'au printemps \" : 

Ø 109. Il voulait attendre au printemps...

PROSPER MÉRIMÉE, L'Abbé Aubain,  1847, page 158. 

[La préposition peut se combiner avec un adverbe de temps :]  à bientôt, à demain, à tantôt.   [Dans le parler populaire, à peut introduire un complément circonstanciel construit avec dans :]  à dans quinze jours. 

Remarque : 1. L'opposition à / zéro devant un substantif relatif au temps est révélatrice de la valeur de à (confer aussi historique I A 3 b) :

à 10 h / le 10 août

à la nuit (tombante) / la nuit

parler à 5 h / parler 5 h

À marque qu'il s'agit d'une date, d'un repère dans le temps, alors que le complément direct de temps délimite un espace temporel à l'intérieur duquel le procès se situe (il viendra le 10 août = « il viendra au cours de la journée du 10 août »), à moins qu'il ne signifie l'étendue de durée du procès lui-même (il a dormi cinq heures = « durant cinq heures »). 2. Opposition à / en (ou dans). —  À présente une valeur inchoative, en (dans) marque qu'on se situe à l'intérieur de l'espace de temps défini par le substantif ou que cet espace est vu dans toute son étendue de durée; à l'automne signifie « au début de l'automne », en automne « l'espace de temps que dure l'automne ».

Confer à 8 h / en 8 h (durée)

à ce moment / en ce moment

aux premiers temps de la conquête / en ce temps-là

À se substitue quelquefois à en (dans des tours aujourd'hui archaïques) :

110. ... les jardins des environs étaient à cette saison pleins de fleurs...

G. DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, En famille, tome 1, 1881, page 350.

111. O Violaine! Oubliez à ce moment, comme je les oublie, hier, demain, et comme un être intact et neuf, recueillie tout entière sur l'heure présente, accueillez cette parole inconnue dont je sens en moi le travail et la poussée.

P. CLAUDEL, La Jeune fille Violaine, 2e.  version, 1901, I, page 573.

ou à pendant, au cours de :

112. Rancé eut le bonheur de rencontrer aux études un de ces hommes auprès desquels il suffit de s'asseoir, pour devenir illustre, Bossuet.

F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Vie de Rancé, 1844, page 9.

Pour de nouveau / à nouveau, confer nouveau. 

F.—  [À introduit un complément circonstanciel de manière, de matière, d'indice, de cause, de moyen, etc.] 

1. À + substantif non actualisé (le plus souvent complément de manière) 

a) Le syntagme verbal a un caractère plus ou moins figé. Mais le complément n'est pas aussi indispensable au sens du verbe qu'il l'est dans la locution verbale proprement dite et le verbe de base n'a pas une extension aussi considérable (Confer supra C) : 

à balle (charger, tirer) 

à bien (conduire, mener) 

à blanc (charger, tirer) 

à bloc (gonfler, serrer) 

à bras (porter) (archaïsme) 

à carreau (se garder, se tenir) (familier) 

à clef (fermer) 

à composition (amener, venir) 

à conséquence (tirer) 

à crédit (acheter, vendre) 

à découvert (agir) 

à défaut (condamner, payer) 

à dessein (se tromper) 

à discrétion (avoir \" posséder \") 

à facettes (tailler) 

à fond (aller, s'engager) 

à forfait (vendre) 

à égalité (se battre) 

à genoux (prier, tomber) 

à glace (geler) 

à intérêt (acheter, vendre) 

à loisir (s'entretenir) 

à merveille (aller) 

à patience (exhorter) 

à mort (foncer) (familier) 

à outrance (se battre) 

à perte (travailler, vendre) 

à pic (arriver, couler, tomber) 

à pied (aller) 

à plaisir (répéter) 

à point (arriver, cuire) 

à profusion (avoir \" posséder \") 

à rebours (compter) 

à résipiscence (arriver) 

à satiété (avoir, manger) 

à suffisance (avoir \" posséder \") 

à tempérament (vendre) 

à terme (louer, mener) 

à tort (agir, considérer) 

à verse (pleuvoir) 

à vue (tirer) 

Ø 113.... il était grand amateur d'huîtres et se plaignait de n'en avoir jamais mangé à satiété, ou, comme il le disait : tout son soûl.

JEAN-ANTELME BRILLAT-SAVARIN, Physiologie du goût ou Méditations de gastronomie transcendante,  1825, page 91. 

Ø 114. Ce vieillard était vêtu de son bel habit de taffetas épinglé, orné de larges boutons d'acier, taillés à facettes.

ALEXANDRE DUMAS PÈRE, Le Comte de Monte-Cristo, tome 1, 1846, page 46. 

Ø 115. Il neigea ce jour-là. Dans les îles de la Manche, un hiver où il gèle à glace est mémorable, et la neige fait l'événement.

VICTOR HUGO, Les Travailleurs de la mer,  1866, page 55. 

Ø 116. Il finit par glisser à genoux, comme on coule à pic.

GEORGES BERNANOS, Sous le soleil de Satan,  1926, page 234. 

à armes égales (lutter) 

à bâtons rompus (parler) 

à boulets rouges (tirer) 

à bout portant (tirer) 

à bras ouverts (recevoir) 

à bras raccourcis (tomber) 

à bride abattue (aller, arriver) 

à coeur ouvert (parler) 

à corps perdu (se lancer) 

à coup sûr (agir) 

à deniers comptants (payer) 

à fonds perdu (miser) 

à gorge déployée (rire) 

à livre ouvert (lire) 

à main armée (attaquer) 

à main levée (voter) 

à mains jointes (prier) 

à mots couverts (parler) 

à pas comptés (marcher) 

à pieds joints (sauter) 

à poings fermés (dormir) 

à point nommé (arriver) 

à tombeau ouvert (foncer) 

à voix haute (parler) 

Ø 117. Il se décida enfin à me parler à coeur ouvert, comme autrefois : « Non. Je ne peux pas... ».

GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, Un Sage, 1883, page 918. 

à belles dents (arracher, mordre) 

à bon compte (s'en tirer) 

à bon droit (agir, penser) 

à bon escient (agir) 

à bon marché (acheter, vendre) 

à bonne fin (mener) 

à bonne intention (agir) 

à chaudes larmes (pleurer) 

à double tour (fermer) 

à grand fracas (annoncer) 

à grand'peine (obtenir, réussir) 

à grande eau (laver) 

à grandes enjambées (avancer) 

à grands frais (obtenir) 

à grands pas (marcher) 

à haute et intelligible voix (parler) 

à juste titre (refuser) 

à longs traits (boire) 

à petit feu (cuire) 

à petit train (avancer) 

à petites journées (avancer) 

à pleine bouche (aspirer) 

à pleine voix (crier) 

à pleines mains (cueillir) 

à pleins bords (couler) 

à pleins gaz (rouler) 

à pleins seaux (verser) 

à première vue (considérer, penser) 

à ras bord (couler) 

à vil prix (vendre) 

Ø 118. La représentation, annoncée à grand fracas par l'honorable Batulcar, devait commencer à trois heures,...

JULES VERNE, Le Tour du monde en quatre-vingts jours,  1873, page 132. 

Ø 119. Il (...) se pencha hors du fauteuil de fer, aspira l'air à pleine bouche, physiquement suffoqué par son âme.

HENRI DE MONTHERLANT, Le Songe,  1922, page 5. 

à bout de bras (porter) 

à dos de mulet (porter) 

à perte de vue (s'étendre) 

à prix d'or (acheter, vendre) 

à tour de rôle (agir, se succéder) 

à vue d'oeil (grandir, progresser) 

à bouche que veux-tu (embrasser) 

à bras le corps (prendre) 

à chaux et à sable (bâtir) 

à coeur joie (s'en donner) 

à cor et à cri (réclamer) 

b) Certains compléments peuvent fonctionner comme locutions adverbiales de phrase, totalement indépendants du verbe : 

à coup sûr. 

à point nommé. 

à propos. 

à juste titre. 

à tort ou à raison. 

à tort et à travers. 

A la limite, certaines locutions adverbiales se rapportent à un adjectif ou un participe : 

à peine levé. 

à peine sensible. 

c) Les groupes du type à + substantif + de tendent à former des locutions préposition : 

à bout de. 

à charge de. 

à condition de. 

à coup(s) de. 

à fin de. 

à seule fin de. 

à défaut de. 

à force de. 

à proportion de. 

à propos de. 

à raison de. 

à tour de. 

Ø 120. Il n'aurait certes pas eu la force d'en dire davantage. Mais la justesse de sa comparaison lui faisait jouir la cervelle. Il but un coup, à seule fin de se féliciter.

LOUIS FARIGOULE, DIT JULES ROMAINS, Les Copains,  1913, page 4. 

Remarque : Ces compléments circonstanciels s'organisent parfois en champs sémantiques :

—  à souhait, à volonté, à discrétion, à foison, à profusion, à satiété, à suffisance

—  à coeur, œur, à dessein

—  à crédit, à intérêt, à perte, à tempérament.

Dans certaines tournures adverbiales au schéma syntaxique figé, la qualification adjectif reste plus ou moins libre :

à grands pas

à menus pas

à petits pas

à pas précautionneux

à pas pressés

à pas traînants

à menus gestes

à gestes sacrés

Cette organisation sémantique assure une certaine productivité à ces types syntaxiques. 

2. À + substantif actualisé. 

a) À introduit un complément de manière (le syntagme verbal a un caractère plus ou moins figé) : 

à l'aveuglette (avancer) 

à la baguette (mener) 

au change (gagner, perdre) 

à la criée (vendre) 

à ses dépens (apprendre) 

aux dépens (condamner) 

à la dérobée (regarder) 

aux éclats (rire) 

à l'esbroufe (agir) (familier) 

à sa faim (manger) 

à la folie (aimer) 

au jugé (tirer) 

aux larmes (rire) 

au pair (loger) 

à la pièce (travailler) 

aux pièces (travailler) 

au ralenti (marcher, travailler) 

à la régalade (boire) 

à la renverse (tomber) 

à la rescousse (appeler, arriver) 

à la sauvette (vendre) 

à la tire (voler) 

aux trousses (courir) 

au vif (piquer) 

au vol (saisir) 

à la volée (jeter, semer) 

à la cloche de bois (déménager) (familier) 

au doigt et à l'oeil (mener, obéir) (familier) 

à la force du poignet (réunir) 

à la fortune du pot (recevoir) 

à l'oeil nu (observer) 

à deux mains (applaudir) 

à l'oeil nu (observer) 

aux petits oignons (cuisiner) 

au pied levé (remplacer) 

à deux râteliers (manger) 

à la sueur de son front (gagner quelque chose) 

à toute bride. 

à tous crins. 

à toutes jambes. 

à toutes les sauces. 

à toute vapeur. 

à tout vent. 

à toute volée. 

Remarque : Certains des compléments qui entrent dans la formation de locutions verbales (confer supra C 1) peuvent compléter par ailleurs des verbes de sens plein et fonctionner dans ce cas comme complément circonstanciel de manière, soit par exemple : 

à l'affût (chasser) (être à l'affût) 

à l'aise (marcher) (être à l'aise) 

à l'unisson (chanter) (être à l'unisson) 

b) À introduit un complément de moyen, de manière, de matière..., libre à l'intérieur d'un certain champ sémantique : 

—  aboyer : à la lune, au voleur... 

—  aller (se déplacer) : au galop, au pas, au trot. 

—  appeler : à l'aide, au secours. 

—  crier : à l'assassin, à l'aide, aux armes, au martyre, à la rescousse, au scandale, au voleur. 

—  jouer : aux billes, à la marelle. 

—  marcher (fonctionner) : à l'essence, au fuel, à la vapeur. 

—  monter : à l'assaut, à l'attaque. 

—  passer (peindre, enduire) : à l'alcool, au bleu. 

—  passer : au crible, à la critique, au peigne fin. 

—  pavoiser (orner) : aux couleurs de, aux initiales de. 

—  peindre : à l'eau, à la gouache, à l'huile, au pinceau, au pistolet, au rouleau. 

—  se battre : au couteau, à l'épée, au revolver. 

—  jouer : au plus fin, à l'innocent, au martyr. 

—  passer (tourner, virer) : à l'aigre, au jaune. 

—  prendre (considérer) : à la légère, au sérieux, au tragique. 

Ø 121. Pour les âmes plus méfiantes de notre époque la légende dorée apparaît au moins encore, telle que l'un de ces purs vélins où de candides enlumineurs peignirent des figures de saintes, à l'eau de gomme ou au blanc d'oeuf, sur des fonds d'or.

GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, En route, tome 1, 1895, page 9. 

Un type particulièrement fréquent est fourni par la combinaison d'un verbe de comportement et d'un adjectif substantivé —  en particulier d'un adjectif ethnique —  employé auféminin (avec une valeur souvent péjorative) : 

à l'allemande (saluer) 

à l'anglaise (filer) 

à l'espagnole (aimer) 

à la française (vivre) 

à la garçonne (s'habiller) 

à la hussarde (aimer) 

à la prussienne (combattre) 

à la russe (boire) 

Ø 122. Nous n'étions pas élevés à la française, et, du reste, nous Français, nous n'étions qu'une bien faible minorité dans le collège;...

VALÉRY LARBAUD, Fermina Márquez,  1911, page 10. 

c) À introduit un complément d'indice ou de cause. 

—   Le verbe de base est un verbe de perception ou d'entendement. Le complément désigne un indice : reconnaître quelqu'un au pas. 

je vois ça à des tas de petits trucs. 

découvrir le coupable à un indice. 

il s'apercevait à d'imperceptibles affleurements que... 

il peut se dépister à un symptôme commun à... 

tu le sens à un léger fourmillement de tout ton dos. 

mais au mouvement de ses bras, je pouvais croire que... 

on devinait, aux rides profondes qui se creusaient dans son visage, que... 

à l'accent méprisant qu'elles avaient,... la fille entendait qu'elles mentaient. 

et je surpris d'ailleurs, au ton employé par lui, qu'il... 

à cette colère, Jean vit que... 

il comprit, à la description, que... 

il se demanda, à la seule lecture de la lettre, si... 

Ø 123. La maison entière le sentait, l'oignon frit, cette bonne odeur qui rancit vite et qui pénètre les briques des corons d'un empoisonnement tel, qu'on les flaire de loin dans la campagne, à ce violent fumet de cuisine pauvre.

ÉMILE ZOLA, Germinal,  1885, page 1234. 

Ø 124. Cette après-midi de dimanche, le juge était assis, avec sa femme et la tante Sabine, dans le pavillon du jardin, quand ils le virent venir, montant péniblement la route; Mme.  Suzanne l'eut vite reconnu à son parasol vert; tout le monde fut étonné.

CHARLES-FERDINAND RAMUZ, Aimé Pache, peintre vaudois,  1911, page 9. 

—  À + complément de cause (Confer supra E 1 b). —  Cette valeur de à n'est guère possible que dans une langue littéraire : 

Ø 125. On raconta aussi, mais ce fut plusieurs années après, qu'une pauvre femme possédée, ayant fait un pèlerinage à Notre-Dame-De-Lorette, fut miraculeusement délivrée de sept démons, et que l'un d'eux assura que le duc avait été assassiné à son instigation.

PROSPER DE BARANTE, Histoire des ducs de Bourgogne de la maison de Valois, tome 4, 1824, page 263. 

Ø 126. Il faut que l'herbe tombe au tranchant des faucilles...

VICTOR HUGO, Les Orientales,  1829, page 171. 

Ø 127. Vous [femmes riches] avec la beauté, vous avez l'ornement;

La fête vous enivre à son bourdonnement...

VICTOR HUGO, Les Chants du crépuscule,  1835, page 56. 

Ø 128. Le calme, voilà le rêve de cette pauvre femme [Mme.  Chèbe] agitée à toutes les tergiversations d'un compagnon incommode.

ALPHONSE DAUDET, Fromont jeune et Risler aîné,  1874, page 153. 

Ø 129. La Vie Française avait gagné une importance considérable à ses attaches connues avec le Pouvoir.

GUY DE MAUPASSANT, Bel-Ami,  1885, page 290. 

Ø 130.... car le dernier lien qui unissait les deux soeurs, toujours près de se rompre, renoué toujours, s'était tellement aminci à l'usure des querelles quotidiennes, qu'il cassa net, pour ne plus jamais se rattacher, et à l'occasion d'une bêtise où il n'y avait vraiment pas de quoi fouetter un chat.

ÉMILE ZOLA, La Terre,  1887, page 361. 

Ø 131. Les routes parcourues avaient été pénibles, mais bientôt elle se ranimerait au sucre acidulé des myrtilles.

FRANCIS JAMMES, Clara d'Ellébeuse,  1899, page 49. 

Ø 132. Ma douleur s'endormait aux teintes et aux sonorités, semblable à ce pâle extatique, plus pâle que son burnous, et qui s'hypnotisait aux grêles cris des fifres nasillards...

FRANCIS JAMMES, Clara d'Ellébeuse,  1899 page 283. 

Confer cependant dans l'usage moderne (on peut hésiter entre l'interprétation temporelle et l'interprétation causale) : 

Ø 133. Dans cette nature nerveuse et sans équilibre, les sentiments sautaient aux extrêmes, à la moindre secousse.

ÉMILE ZOLA, La Joie de vivre,  1884, page 1038. 

d) Certains complément introduit par à tendent à devenir des locutions adverbiales : 

à l'aise. 

au besoin. 

au demeurant. 

à l'envi. 

à l'excès. 

au hasard. 

à la hâte. 

à l'improviste. 

à l'inverse. 

au juste. 

au plus juste. 

au plus mal. 

au mieux. 

à l'ordinaire (archaïsme) 

à la perfection. 

au reste. 

à la rigueur. 

à la vérité. 

à son gré. 

à sa guise. 

au petit bonheur. 

à peu de choses près. 

à son corps défendant. 

à peu de frais. 

au bas mot. 

au dernier point. 

au plus haut point. 

à ses risques et périls. 

au vu et au su de... 

à ce compte. 

à ce compte-là. 

à cet égard. 

à certains égards. 

à ce prix-là. 

Ø 134. Vous y trouvez des républicains et des doctrinaires, des légitimistes et des philippistes, des parisiens, des banquiers, des colonels, des marins, des classiques et des romantiques; et tout cela joue des proverbes, tout cela se raconte à l'envi des histoires.

ALFRED DE MUSSET, dans la Revue des Deux Mondes, Chronique de la quinzaine, 31 décembre 1832, page 104. 

Ø 135.... un printemps gai, charmant, exquis, tout frais débarqué de la nuit sans avoir averti de sa venue, en bon provincial qui arrive du midi, tombe sur les gens à l'improviste et s'amuse de leur surprise.

GEORGES MOINAUX, DIT GEORGES COURTELINE, Messieurs-les-Ronds-de-Cuir,  1893, I, page 20. 

Ø 136. Il s'habilla à la hâte, monta dans une voiture, descendit en avance à la gare;...

GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, En route, tome 2, 1895, page 7. 

e) Certains compléments tendent à devenir des locutions prépositionnelles : 

à l'aide de. 

à l'appui de. 

à l'avis de. 

au bénéfice de. 

au détriment de. 

à la différence de. 

à l'égal de. 

à l'égard de. 

à l'encontre de. 

à l'exception de. 

à l'exemple de. 

à l'exclusion de. 

à la faveur de. 

à seule fin de. 

aux frais de. 

à l'instigation de. 

à la mode de. 

au moyen de. 

au nom de. 

au nombre de. 

à l'occasion de. 

à l'opposé de. 

à la garde de. 

au hasard de. 

à l'imitation de. 

à l'instar de. 

à l'insu de. 

à l'intention de. 

à l'inverse de. 

au lieu de. 

à la merci de. 

au péril de. 

à la place de. 

au point de. 

au préjudice de. 

au prix de. 

au profit de. 

au reçu de. 

au regard de. 

à la requête de. 

au risque de. 

au sujet de. 

au taux de. 

à l'usage de. 

au vu de. 

aux yeux de. 

Ø 137. Votre amitié, que je n'avais pas prévue et que j'ai dû croire envoyée du ciel, est certainement une des rares merveilles qu'il m'aura été donné de voir sur la terre. À l'exception de notre grand peintre Henry De Groux, qui donc est descendu aussi profondément que vous et d'aussi bon coeur dans ma fosse noire?

LÉON BLOY, La Femme pauvre,  1897, page 5. 

3. À + adjectif : 

à bas (jeter, mettre) 

à blanc (chauffer, tirer) 

à chaud (opérer) 

à cru (monter) 

à faux (porter) 

à froid (opérer, traiter) 

à jeun (être, rester) 

à neuf (mettre, remettre) 

à nu (être, mettre) 

à plat (être, mettre, tomber) 

à plein (fonctionner, tourner) 

à ras (couper) 

à sec (être, mettre) 

à vide (tourner, revenir) 

à vif (être, mettre) 

Ø 138. Dans l'eau, dit-on, tu puisas ta rudesse;

je n'en bois pas, et, censeur, plus joyeux,

En moins d'un mois, pour loger ma sagesse,

J'ai mis à sec un tonneau de vin vieux.

PIERRE-JEAN DE BÉRANGER, Chansons, tome 1, 1829, page 141. 

4. À + infinitif. 

a) À + infinitif a une valeur causale. 

—   Le verbe principal est à la forme active : 

je le taquine à lui dire... 

ne rien perdre à le connaître. 

on ne risque rien à le consulter. 

on court des risques à se montrer. 

il blêmit de fureur à lire cette lettre. 

prendre la maladie à courir les curés. 

prendre de l'aplomb à être riche. 

suis-je donc une pleutre à tomber ainsi. 

il frissonna à voir... 

tu m'amuses trop à être continuellement... 

il m'agace à toujours nous traiter de. 

vous me gênez à être toujours là. 

vous souffrez plus à lui résister. 

elle les effraye à passer toute seule. 

il eut chaud à seulement assujettir son... 

tu me portes sur les nerfs à me regarder ainsi. 

ne jouait-il pas un jeu dangereux à le mettre... 

Ø 139. Et les plus tristes fronts, les plus souillés peut-être Se dérident soudain à voir l'enfant paraître, Innocent et joyeux.

VICTOR HUGO, Les Feuilles d'automne, Lorsque l'enfant paraît, 1831, page 756. 

Ø 140.... Je souffre extrêmement à vous résister en quoi que ce soit...

PROSPER MÉRIMÉE, Arsène Guillot,  1847, page 128. 

Ø 141. Un grand effort pour parler, mais la faiblesse pour trouver les mots. Et mes larmes coulent à voir cette affection qui voudrait, mais ne peut se répandre.

ANDRÉ GIDE, Journal,  1890, page 14. 

Ø 142. —  On lui fait sa piqûre, souffle la soeur, debout derrière lui, et elle va se fatiguer à parler. Dieu sait!... Ne l'écoutez pas trop longtemps.

GEORGES BERNANOS, Madame Dargent,  1922, page 6. 

—   Le verbe principal est à la forme pronominale ou à la forme passive : 

l'esprit s'aère à voyager. 

il s'aigrit à rester enfermé. 

il s'excite à le regarder. 

il s'épouvante à l'entendre. 

je m'ennuierais à ne rien faire. 

elle s'étonne à lui trouver l'air soucieux. 

elle va s'enrhumer à courir la nuit. 

se proposer une tâche surhumaine à vouloir... 

se sentir ému à découvrir. 

être rassuré à le savoir (Syntaxe du français contemporain (KRISTIAN SANDFELD) tome 3, § 241). 

Ø 143. Je me rongeais de tristesse à produire continuellement pour une irrassasiable destruction.

GUSTAVE FLAUBERT, La Tentation de Saint Antoine,  1856, page 625. 

Ø 144. Pourtant vous êtes choqués à me lire : c'est par un certain souffle de révolte que vous distinguez dans mes écrits, et je suis un peu étonné qu'il vous impressionne à ce point, étant aujourd'hui très fréquent.

MAURICE BARRÈS, L'Ennemi des lois,  1892, page 21. 

Remarque : 1. Construction appositive  —  Souvent à + infinitif est séparé de la principale par une virgule :

... vous ne manquez pas d'un certain aplomb, à nous interroger ainsi

elle le prenait peut-être pour ..., à venir l'intimider avec ses histoires ... que tu es drôle, à faire ...

tu n'es pas raisonnable, mon papa, à te désespérer toujours ainsi. Est-il ennuyeux, ce chien, à vous accompagner ...

est-ce que tu nous prends pour des mendiants, à nous laisser ainsi. est-ce qu'ils se fichent de nous, à sonner quand il n'y a rien?

(Confer SYNTAXE DU FRANÇAIS CONTEMPORAIN  (KRISTIAN SANDFELD) tome 3, § 250).

Remarque 2. On notera les constructions suivantes qui frisent l'incorrection (le « sujet » de l'infinitif n'est pas le même que celui du verbe principal) et appartiennent à la langue parlée :

ça vous amusera à regarder

qui m'amusaient à écouter

cette réponse m'assommait à écrire

le ménage me convenait mieux à faire

c'est une chose qui me dégoûte à penser

une gerbe de fleurs qui semblait l'embarrasser à tenir en même temps que sa canne

un sujet qui m'embarrasse un peu à traiter avec vous

une affaire qui l'ennuyait à traiter

même la photographie le gênait à regarder

ça vous intéresse donc à savoir

la description m'en plairait à faire par le détail

son nom seul me salit la bouche à prononcer

(Confer SYNTAXE DU FRANÇAIS CONTEMPORAIN  (KRISTIAN SANDFELD) tome 3, chapitre 4).

Remarque 3. En incise ou en tête de phrase :

à vaincre sans péril ...

à ne plus boire de café, je ...

à causer plus longuement, nous ...

à bien considérer les choses, ...

ce chant, à l'examiner de près, ...

à bien peser chaque ...,

et cependant, à y bien réfléchir, cette ...

et cependant, à bien peser les choses, je ...

à y bien songer, ...

c'était fini ..., à en juger par ...

mais à supposer que ...

à tout prendre, ...

à relire tout ce qui précède, je ...

à en croire Étienne, ...

rien qu'à regarder la ...,

à parler franchement, ...

il n'y a pas, à proprement parler, ...

à vrai dire ...

à commencer par moi ...

(SYNTAXE DU FRANÇAIS CONTEMPORAIN  (KRISTIAN SANDFELD) tome 3, § 243-244). 

b) À + infinitif a une valeur conséquentielle ou finale : 

avoir de l'argent à ne savoir qu'en faire. 

avoir faim à manger de la terre. 

faire un bruit à casser les tuiles. 

il fait une chaleur à cuire des oeufs. 

il pousse des cris à faire peur. 

il pousse un juron à faire damner... 

il exhale des soupirs à renverser un chêne. 

danser à perdre haleine. 

s'ennuyer à périr. 

rire à s'étrangler. 

il tousse à faire pitié. 

engraisser à crever. 

remercier à n'en plus finir. 

la battre à la laisser morte. 

aimer quelqu'un à en mourir. 

il sent le vin à tomber à la renverse. 

elle sent le musc à s'en boucher le nez. 

je sentais mon coeur battre à m'étouffer. 

elle disait cela à faire peur. 

ils disent des choses écoeurantes à taper dessus. 

se frotter les épaules à les écorcher. 

lui serrent le bras à le broyer. 

il s'attardait à en être indiscret. 

recevoir quelqu'un à lui faire perdre le goût de. 

perdre presque tout, à en être réduit à... 

je ne suis pas comme toi, à vouloir... 

(Syntaxe du français contemporain (KRISTIAN SANDFELD) tome 3, § 174-176). 

Ø 145. Les conscrits dansaient, ils se balançaient bras dessus bras dessous, ils poussaient des cris à fendre les nuages, et frappaient la terre du talon en secouant leurs chapeaux,...

ÉMILE ERCKMANN ET ALEXANDRE CHATRIAN, DITS ERCKMANN-CHATRIAN, Le Conscrit de 1813  1813, 1864, page 44. 

Ø 146. Une boîte de sardines apparut; elle se jeta dessus à croire que le fer blanc de la boîte lui-même y passerait;...

GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, Les Dimanches d'un Bourgeois de Paris, 1880, page 323. 

Ø 147. Elle se cassait des noix à pleines poignes... de très haut, d'un coup colossal, à fendre tout le meuble en longueur.

LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CÉLINE, Mort à crédit,  1936, page 189. 

II.—  À dans le syntagme adjectival (à sert à construire un complément de l'adjectif) 

A.—  Adjectif + à + substantif. 

1. Après des adjectifs exprimant une idée de lieu ou de temps généralement liée à une idée comparative, à une idée de proximité ou de contiguïté : 

adéquat à. 

adhérent à. 

adjacent à. 

afférent à. 

analogue à. 

antérieur à. 

applicable à. 

assimilable à. 

attenant à. 

coextensif à. 

comparable à. 

conforme à. 

connexe à. 

consécutif à. 

contigu à. 

contraire à. 

égal à. 

équivalent à. 

extérieur à. 

identique à. 

immanent à. 

inférieur à. 

inhérent à. 

irréductible à. 

parallèle à. 

pareil à. 

perpendiculaire à. 

postérieur à. 

préalable à. 

préférable à. 

proportionnel à. 

réductible à. 

relatif à. 

semblable à. 

sous-jacent à. 

supérieur à. 

tangent à. 

Ø 148. Il était si petit que la basse glace du trumeau refléta sa pauvre mine, ses joues creuses, un nez long, au bout pointu, rouge et comme usé, pareil à ces sucres d'orge qu'amincissent, en les suçant, de patients garçons.

FRANÇOIS MAURIAC, Le Baiser au lépreux,  1922, page 147. 

2. Après des adjectifs exprimant la possibilité, l'habitude, la facilité : 

commun à. 

défavorable à. 

dommageable à. 

étranger à. 

facile à. 

familier à. 

favorable à. 

funeste à. 

habituel à. 

impossible à. 

indispensable à. 

inconnu à. 

inutile à. 

naturel à. 

nécessaire à. 

néfaste à. 

nuisible à. 

ordinaire à. 

particulier à. 

possible à. 

préjudiciable à. 

profitable à. 

propre à. 

spécial à. 

spécifique à. 

utile à. 

une poésie difficilement accessible à quelqu'un qui... 

ce papotage est compréhensible aux seuls initiés. 

des dépressions invisibles à l'ennemi. 

écrire dans une langue impénétrable aux humbles. 

cette idée-là est intolérable à une mère. 

quelque affreux mystère inconnu aux hommes. 

inaccessible à toute division. 

indispensable à ce résultat. 

familière à ce public. 

un paysage propice à de patientes pensées. 

Ø 149. Son corps n'est étranger à aucune des parcelles de ce sol sec et pur...

PAUL CLAUDEL, Sous le rempart d'Athènes,  1927, page 1126. 

Remarque : À introduit obligatoirement un complément de l'inanimé après un certain nombre d'adjectif : 

invulnérable aux coups, aux balles. 

imperméable aux arguments, à la pluie. 

clair à l'esprit. 

une représentation assimilable à notre raison. 

des évidences sensibles au coeur. 

3. Après certains adjectifs marquant une appréciation affective, en particulier exprimant la sympathie ou l'hostilité. 

a) Qualifiant un substantif de l'inanimé : 

agréable : un holocauste agréable à Dieu. 

bon : la vie est bonne à ces apprentis. 

cher : une félicité chère à Voltaire. 

délicieux : un goût de péché délicieux à Edmond. 

douloureux : que l'attitude fût douloureuse à Kyo... 

doux : une créature douce au coeur des opprimés. 

intolérable : cette idée est intolérable à une mère. 

odieux : l'idée est odieuse au pays. 

pénible : cette lecture serait pénible à l'intéressé. 

précieux : la personne du Consul était précieuse au Pays. 

Ø 150. Il la pleura sans dissimulation, sans pudeur, indifférent à la douleur de sa femme qui ne lui parlait plus, ne le regardait plus, vivait seule, murée dans le dégoût, dans une colère révoltée, et priait Dieu matin et soir.

GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, Le Pardon, 1882, page 661. 

b) Qualifiant un substantif de l'animé : 

cher : il est cher à ses enfants. 

dur : dur aux infidèles. 

impitoyable : impitoyable à leurs rivaux. 

indulgent : indulgent aux humbles. 

loyaux : loyaux à la Couronne. 

odieux : il devient odieux à beaucoup d'officiers. 

pénible : il est pénible à tout son entourage. 

Ø 151. Allons donc! Il veut être attaqué de front, emporté de haute lutte, ce Paris gobeur et poltron, dur aux timides, tendre aux violents.

EUGÈNE MELCHIOR, VICOMTE DE VOGÜÉ, Les Morts qui parlent,  1899, page 46. 

B.—  Adjectif + à + infinitif ou substantif d'action. 

1. À suggère une idée de destination. —  L'adjectif suggère l'idée d'une disposition, d'une aptitude ou d'une incapacité. Le substantif qualifié par l'adjectif est \" sujet \" de l'infinitif : 

une femme adroite à le retenir. 

un enfant alerte à saisir... 

une intelligence apte à tout comprendre. 

des femmes ardentes à conquérir un... 

une nature ardente à s'épancher. 

des natures avides à respirer (les grandeurs) / généralement avide de. 

docile à poser (sa tête) 

un caractère enclin à dominer. 

enclin à se mêler de. 

des femmes énergiques à défendre leur... 

enragés à passer. 

exact à payer. 

des mains habiles à tailler les. 

hardis à parler. 

impropre à remplir ses fonctions. 

impuissant à maîtriser. 

inapte à gérer ses affaires. 

ingénieux à fabriquer... 

inhabile à demander. 

inlassables à commenter. 

maladroite à se conduire. 

négligent à écouter. 

des femmes perspicaces à deviner... 

ponctuel à s'acquitter. 

porté à faire quelque chose. 

puissants à subjuguer... 

régulier à tenir parole. 

une fille savante à tromper les hommes. 

subtile à lui tirer sa signature. 

un emploi suffisant à assurer... 

sujet à boire. 

sujet à se tromper. 

unanimes à relater... 

vif à se défendre. 

Ø 152.... sans doute il s'était assis au bord de la route, plus tranquille d'être là, voyant venir le danger, tout prêt à rentrer d'un saut et à défendre sa maison.

ÉMILE ZOLA, La Débâcle,  1892, page 164. 

Ø 153. Au reste, sa honte le mettait dans un état désaccordé et douloureux très propre à la composition littéraire, et il est seulement à regretter qu'il ne s'en soit pas servi pour animer quelques-uns des chapitres de sa Zootechnie.

MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 14, février-juillet, 1922, page 4. 

Ø 154. Bien que les médecins consultés fussent unanimes à affirmer que le gamin, tuberculeux jusqu'aux moelles, tuberculeux depuis l'enfance, n'avait jamais dû être curable, Barbazano se reprochait de s'être consacré trop tard à la santé de Michèle;...

ROGER MARTIN DU GARD, Confidence africaine,  1931, page 1109. 

Dans un certain nombre de ces constructions, l'infinitif, indifférent à la voix, prend tantôt un sens actif, tantôt un sens passif : 

un goût âpre à respirer. 

tu n'es plus bon qu'à mettre à l'asile. 

un animal bon à rôtir. 

une loque bonne... à mettre dans un cerisier. 

des épingles bonnes à éborgner. 

elles ne sont bonnes qu'à être mises au feu. 

des heures bonnes à vivre. 

des terrains bons à bâtir. 

des fruits bons à manger. 

un vin prêt à boire. 

un fruit prêt à cueillir. 

un arbre prêt à être enlevé. 

une lampe prête à allumer. 

une chaîne prête à livrer. 

un terrain propre à bâtir. 

Ø 155. Une flamme impossible à atteindre, impossible à éteindre au souffle de la mort.

CHARLES PÉGUY, Le Porche du mystère de la 2e  vertu, 1911, page 173. 

2. À suggère une idée de conséquence. —  L'adjectif, pris avec une valeur intensive, a pour conséquence le procès désigné par l'infinitif; la préposition à est l'équivalent de si... que, tellement... que; l'adjectif est appréciatif ou dépréciatif; ces tours appartiennent à une syntaxe affective : 

une nuit belle à en être insolente. 

une femme belle à le faire décorer en six mois. 

il est bête à manger du foin. 

il est bête à pleurer. 

il est bête à réjouir. 

déplaisant à crier. 

fou à charger de chaînes. 

gentille à l'embrasser. 

grosse à donner envie de pleurer. 

des herbes hautes à cacher quelque chose. 

idiot à pleurer. 

injuste à crier. 

ivre à tomber. 

jolie à croquer. 

lancinant à hurler. 

large à y coucher à trois. 

maigre à donner des frissons. 

pauvre à ne savoir que... 

plein à craquer. 

pleine à déborder. 

reconnaissable à ne pouvoir s'y tromper. 

sale à ne pas être pris avec... 

scintillantes à éblouir. 

c'est sérieux à en être grotesque. 

solennel à périr. 

c'est triste à en mourir. 

Ø 156. Son oeil profond et sa vive pantomime promettent une personnalité forte, mais cet oeil ardent flotte et rêve. Le regard est souvent mobile à faire peur;...

JULES MICHELET, Introduction à l'Histoire universelle,  1831, page 445. 

3. À suggère une idée de supposition ou d'éventualité. —  Le substantif qui sert de support à l'adjectif fonctionne généralement comme régime direct de l'infinitif. 

a) La qualité, fortement affective, est attribuée au substantif dans l'éventualité particulière suggérée par le verbe employé à l'infinitif Elle ne lui appartient pas de droit ou par nature, mais lui est conférée subjectivement par le sujet implicite (animé) de l'infinitif : 

visage dramatique à contempler (à le contempler, si on le contemple) (ce visage est dramatique) 

des soldats beaux à voir mourir. 

une dondon comique à considérer. 

un visage dramatique à contempler. 

une toux fausse à entendre. 

des accents gais à entendre. 

une salle glaciale à voir. 

la somme est grosse à demander. 

une grille haute à sauter. 

un escalier interminable à descendre. 

jolie à regarder. 

jolie à voir dormir. 

laides à voir grouiller. 

mélancoliques à entendre. 

nostalgique à chérir. 

une ville toujours nouvelle à découvrir. 

b) La qualité est attribuée en fait par la préposition à à l'infinitif, le substantif ne servant à l'adjectif que de support syntaxique (mur facile à sauter / sauter ce mur est facile / il est facile de sauter ce mur) : 

commode à exciter. 

commode à transporter. 

des idées difficiles à exprimer. 

des postulations difficiles à se figurer. 

de l'argent dur à gagner. 

un moment dur à passer. 

des noix dures à briser. 

des roueries dures à retrouver. 

un conseil facile à exécuter. 

de l'argent facile à gagner. 

un livre facile à mettre en poche. 

de l'eau facile à se procurer. 

un mur facile à sauter. 

cette France impossible à aimer. 

une souffrance impossible à gagner. 

impossible à faire voir. 

quelque chose d'impossible à penser. 

simple à comprendre. 

simple à faire. 

Ø 157. Je serai couché sous un plafond pauvre, Dans un froid silence épais comme l'eau, Terrible à entendre.

PIERRE-JEAN JOUVE, Tragiques, Livre de la nuit, 1922, page 11. 

Remarque : Certains adjectifs pourraient se ranger dans les 2 catégories précédentes : 

c'est abject à dire. 

c'est affreux à dire. 

une personne agréable à fréquenter. 

un village agréable à fréquenter. 

une odeur agréable à savourer. 

charmantes à voir batifoler. 

c'est curieux à connaître. 

curieux à noter. 

curieux à voir. 

dangereux à traverser. 

les plus dégoûtants à regarder. 

délicieux à noter. 

un moment désagréable à passer. 

désespérant à attendre. 

une écorce douce à caresser. 

drôle à raconter. 

quelqu'un d'embêtant à confesser. 

épouvantable à supporter. 

étonnantes à voir en détail. 

étrange à dire. 

un poulet exquis à regarder rôtir. 

des litres gênants à porter. 

c'est grotesque à dire. 

grotesque à vouloir. 

c'est honteux à voir. 

c'est important à connaître. 

des détails indispensables à connaître. 

insupportable à penser. 

une douleur lourde à porter. 

c'est malheureux à dire. 

rafraîchissants à entendre. 

redoutable à humer. 

une montagne scabreuse à escalader. 

un contrat terrible à signer. 

voilà le plus troublant à penser. 

un détail utile à connaître. 

On ajoutera un certain nombre de tournures dans lesquelles le substantif n'est ni le « sujet » de l'infinitif, ni son régime direct (verbe employé intransitivement ou verbe transitif ayant déjà un complément) : 

une personne agréable à vivre. 

une personne facile à vivre. 

une route mauvaise à marcher. 

la somme nécessaire à prendre le train. 

la tendresse nécessaire à supporter cette chose. 

le jour nécessaire à bien voir le tableau. 

un recoin propice à s'y glisser. 

une occasion propice à montrer quelque chose. 

un temps propice à remettre quelque chose. 

III.—  [À dans le syntagme nominal (à sert à construire un complément de nom)] 

A.—  Le substantif déterminé par le complément introduit par à est un substantif d'action. 

1. Il correspond à un verbe à complément unique (Confer supra I A 1) 

a) Il correspond à un verbe actif : 

accéder à la propriété / l'accession à la propriété. 

il aspire à réussir / son aspiration à réussir. 

—  À introduit un substantif : 

son accession au trône. 

l'acquiescement à sa proposition. 

l'adhérence des pneus au sol. 

son adhésion aux thèses de Bergson. 

mon appartenance à la race blanche. 

son aspiration à un monde meilleur. 

l'assistance aux séances. 

sa collaboration au journal. 

son consentement à la médiocrité. 

sa contribution aux Mélanges Brunot, 

la croyance au mal. 

un manquement à la discipline. 

l'obéissance aux ordres. 

la participation aux séances. 

un penchant à la mélancolie. 

le recours à l'aide. 

le renoncement à la violence. 

la résistance à l'érosion. 

la souscription à l'emprunt. 

sa tendance à la tristesse. 

Ø 158.... il n'est de vraie faiblesse que dans l'intime consentement à l'illusion, non dans l'illusion elle-même : de celle-ci on se délivre, et on est fort.

RAYMOND ABELLIO, Heureux les pacifiques,  1946, page 10. 

Remarque : Les substantifs d'action sont rarement suivis de l'animé (le complément introduit par à est quelquefois un collectif ou un singulier à valeur de généralité ou désignant un être surnaturel) : 

la croyance au Diable. 

la désobéissance aux parents. 

l'obéissance aux parents. 

la résistance à l'ennemi. 

le recours au médecin. 

—  À introduit un infinitif : 

son aspiration à réussir. 

sa condescendance à refuser. 

son consentement à n'être que... 

son hésitation à répondre. 

son inclination à bien faire. 

son penchant à s'abîmer dans... 

sa persistance à conserver les... 

sa prétention à commander. 

la répugnance à laisser. 

la tendance à critiquer... 

b) Le substantif d'action correspond à un verbe pronominal (Confer I A 2) : 

sa résignation au mal / se résigner au mal. 

son obstination à refuser / il s'obstine à refuser. 

—  À introduit un substantif : 

son adaptation au climat. 

son application au travail. 

son attachement à la religion. 

sa conversion au catholicisme. 

sa résignation à l'injustice. 

Ø 159. Tu es digne de l'attachement que je te porte. Aussi vas-tu recevoir une haute récompense de ton application à mes affaires.

HONORÉ DE BALZAC, Histoire de la grandeur et de la décadence de César Birotteau,  1837, page 89. 

—  À introduit un infinitif : 

cet acharnement à pervertir. 

son application à ne pas quitter. 

sa complaisance à écouter. 

cet entêtement à ne pas lui donner. 

son obstination à refuser. 

Ø 160. Mais d'après mon dilemme, j'étais tout à fait indifférent au résultat. Cependant, ma complaisance à me laisser donner tout ce qui pouvait empêcher l'effet de ce que je venais de faire dut persuader les spectateurs qu'il n'y avait rien de sérieux dans toute cette tragédie.

BENJAMIN HENRI CONSTANT DE REBECQUE, Le \"Cahier rouge\",  1830, page 41. 

2. Le substantif d'action correspond à un verbe à double complément. 

a) Le substantif correspond à un verbe à double construction où à introduit un complément d'objet secondaire de l'animé appelé complément d'attribution (Confer supra I B 1) : 

l'annonce de la nouvelle aux invités / annoncer la nouvelle aux invités. 

l'abandon du fort aux ennemis. 

l'application du traitement au malade. 

l'assignation d'une résidence à un fonctionnaire. 

l'assujettissement d'un peuple à un autre. 

l'attribution du prix à un Français. 

l'aveu de sa faute à ses parents. 

la communication du dossier à la police. 

la consécration d'un autel à la Vierge. 

l'enseignement des mathématiques aux enfants. 

l'envoi d'une lettre aux adhérents. 

l'expédition d'un colis aux vieillards. 

l'inoculation du virus à un animal. 

la promesse d'un cadeau à l'enfant. 

b) Le substantif correspond à un verbe à double construction où à introduit un complément d'objet secondaire de l'inanimé (Confer supra I B 3) : 

l'annexion de la Savoie à la France. 

l'assimilation de la vie à un songe. 

l'association du fils aîné au trône. 

la condamnation du soldat à la prison. 

l'initiation des enfants aux mathématiques. 

l'objection d'un argument à sa manière de voir. 

la préparation des élèves au baccalauréat. 

la réduction des fractions à un dénominateur commun. 

la subordination des intérêts privés à l'intérêt général. 

3. Le substantif d'action est suivi d'un complément circonstanciel (Confer supra I D, E et F) 

a) Le substantif d'action est suivi d'un complément circonstanciel de lieu ou de but : 

son arrivée à l'hôtel. 

la course au succès. 

le dépôt de la somme à la banque. 

la descente aux enfers. 

une entrée au bal. 

l'envoi d'un représentant à la firme. 

l'expédition du paquet à la maison. 

ses fiançailles à Paris. 

la mise au tombeau. 

sa mort à Tombouctou. 

son passage au théâtre. 

une promenade à la campagne. 

un séjour à la campagne. 

une sortie au restaurant. 

son travail à l'usine. 

la vie à la campagne. 

son voyage à la campagne. 

 

Ø 161. J'ai reconduit Poinsot à Bicêtre, le jour même de son entrée à l'internat.

JULES MICHELET, Journal,  1820, page 75. 

b) Il est suivi d'un complément circonstanciel de temps : 

son arrivée à 5 h, à l'aube. 

son départ à la nuit. 

son passage à midi. 

une promenade à 5 h précises. 

c) Il est suivi d'un complément circonstanciel de manière, de moyen... 

—   Le substantif d'action est suivi d'un complément circonstanciel non actualisé : 

achat à tempérament, à prix d'or, à crédit,... 

action à court terme. 

arrivée à point nommé. 

bavardage à coeur ouvert. 

chasse à courre. 

combat à outrance. 

compte à rebours. 

condamnation à défaut. 

conversation à bâtons rompus. 

course à pied. 

cuisson à petit feu. 

départ à fond de train. 

déplacements à dos de..., à bicyclette. 

engagement à corps perdu. 

estimation à vue de nez. 

garde à vue. 

lavage à grande eau. 

marche à pied. 

mise à flot, à sec. 

payement à crédit, à tempérament, à terme. 

prêt à fonds perdu. 

progression à petit train, à pas de loup. 

renvoi du jugement à huitaine. 

reproches à voix haute. 

rire à gorge déployée. 

saut à pieds joints. 

tir à vue, à boulets rouges, à blanc. 

transports à dos de... 

travail à perte. 

vente à crédit, à perte. 

vote à bulletin secret, à main levée. 

voyage à dos de... 

Ø 162. Malheureusement on se trouve entraîné dans ce souffle de dénigrement à outrance...

ANDRÉ GIDE, Journal,  1910, page 289. 

Confer aussi un duel à mort (se battre à mort) : 

Ø 163. Ce fut avec la pensée d'un duel à mort qu'il proclama de nouveau son ban de guerre contre Hilperik, parmi les franks orientaux et les peuples d'outre Rhin.

AUGUSTIN THIERRY, Récits des temps mérovingiens, tome 2, 1840, page 36. 

—   Le substantif d'action est suivi d'un complément circonstanciel actualisé : 

un appel au secours. 

un chant à l'unisson. 

la chasse à l'affût. 

une condamnation aux dépens. 

la mise à l'épreuve. 

l'observation à l'oeil nu. 

la peinture à l'huile, au pistolet. 

un remplacement au pied levé. 

la réussite à la force du poignet. 

le tir au jugé. 

le travail aux pièces. 

une vente à la criée. 

Ø 164. L'expérience est la mise en question (à l'épreuve), dans la fièvre et l'angoisse, de ce qu'un homme sait du fait d'être.

GEORGES BATAILLE, L'Expérience intérieure,  1943, page 18. 

B.—  Le substantif déterminé par le complément introduit par à est un substantif qui entre dans une locution verbale suivie de à. 

1. Substantif + à + substantif. 

a) Le syntagme nominal obtenu correspond à un syntagme verbal transitif direct : 

l'accueil aux nouveaux / faire un bon - à / accueillir quelqu'un, quelque chose. 

l'aide aux pays sous-développés / apporter son - à / aider quelqu'un. 

l'appui à quelqu'un / donner son - à / appuyer quelqu'un. 

pour non-assistance à personne en danger / accorder son assistance à / assister quelqu'un. 

la caution à quelque chose / apporter sa - à / cautionner quelque chose. 

ses compliments à quelqu'un / faire des - à / complimenter quelqu'un. 

ses conseils à quelqu'un / donner des - à / conseiller quelqu'un. 

un défi au bon sens / lancer un - à / défier quelqu'un, quelque chose. 

la visite aux Dupont / faire une - à / visiter quelque chose. 

b) Le syntagme nominal obtenu ne correspond pas à un syntagme verbal : 

l'adieu à quelque chose / faire ses adieux à. 

des allusions à quelque chose / faire allusion à. 

son affront à quelqu'un / faire affront à. 

ses avances à quelqu'un / faire des avances à. 

un clin d'oeil à quelqu'un / lancer un clin d'oeil à. 

ses coups d'oeil à quelqu'un / lancer des coups d'oeil à. 

l'exception à quelque chose / faire exception à. 

des signes à quelqu'un / faire signe à. 

Ø 165. Nous ne savons qu'une exception à l'asservissement universel, et c'est à Rotrou qu'en appartient l'honneur.

CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Tableau historique et critique de la poésie et du théâtre français au XVIe.  siècle, 1828, page 259. 

Confer le mal à s'ouvrir / avoir du mal à s'ouvrir : 

Ø 166. Plus bas, sur les moisissures des sous-bois, des papillons lourds et larges et bordés comme des « faire-part » tremblottent de mal à s'ouvrir et puis, plus bas encore, c'était nous, en train de patauger dans la boue jaune.

LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CÉLINE, Voyage au bout de la nuit,  1932, page 223. 

Confer la foi à / avoir foi à : 

Ø 167. C'était encore la foi en la vie, en la santé, en la force, à l'éternel recommencement.

ÉMILE ZOLA, Le Docteur Pascal,  1893, page 171. 

Ø 168. Notre dévouement, notre foi à une idée qui nous dépasse, nous confèrent une force que nous ne nous connaissions pas.

MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 13, juin 1920-janvier 1921, page 8. 

2. Substantif + à + infinitif (ou substantif d'action) 

a) Le syntagme nominal correspond au groupe mettre, éprouver, sentir... + indéfini, partitif ou possessif + substantif + à + infinitif (en concurrence avec le groupe avoir + article défini + substantif + de + infinitif) : 

art : avoir l'- de / mettre son - à + infinitif : son - à + infinitif. 

assurance : avoir l'- de / éprouver de l'- à + infinitif : son - à + infinitif. 

générosité : avoir la - de / mettre sa - à + infinitif : sa - à + infinitif. 

honte : avoir - de / éprouver de la - à + infinitif : sa - à + infinitif. 

ingéniosité : avoir l'- de / mettre de l'- à + infinitif : son - à + infinitif. 

joie : avoir la - de / éprouver de la - à + infinitif : sa - à + infinitif. 

obligeance : avoir l'- de / mettre de l'- à + infinitif : son - à + infinitif. 

plaisir : avoir le - de / éprouver du - à + infinitif : son - à + infinitif. 

pudeur : avoir la - de / avoir de la - à + infinitif : sa - à + infinitif. 

rage : avoir la - de / éprouver de la - à + infinitif : sa - à + infinitif. 

sincérité : avoir la - de / mettre sa - à + infinitif : sa - à + infinitif. 

soin : avoir le - de / mettre son - à + infinitif : son - à + infinitif. 

volupté : avoir la - de / éprouver de la - à + infinitif : sa - à + infinitif. 

Ø 169.... tous les traits du méfiant naufragé des Grecs je les retrouvais en lui. L'expérience des choses publiques, des nations et des hommes (...) un soupçon général de tous les coeurs et un amer plaisir à se jouer des vanités;...

ALFRED DE VIGNY, Mémoires inédits,  1829, page 109. 

b) Le syntagme nominal est issu d'un groupe verbe + à + infinitif (en concurrence avec verbe + de) : 

affectation : affecter de..., mettre son - à / son - à vouloir. 

angoisse : être angoissé de..., éprouver de l'- à / son - à demander. 

dégoût : être dégoûté de..., éprouver du - à / son - à sortir. 

embarras : être embarrassé de..., éprouver de l'- à / son - à me répondre. 

empressement : s'empresser de..., mettre de l'- à / son - à accepter. 

gêne : être gêné de..., sentir de la - à / sa - à se montrer. 

hâte : se hâter de..., mettre de la - à / sa - à le rejoindre. 

jouissance : jouir de..., éprouver de la - à / une - à se mouvoir. 

négligence : négliger de..., mettre de la - à / cette - à rejoindre. 

satisfaction : se satisfaire de..., éprouver de la - à / sa - à refuser. 

Remarque : Est issu d'un groupe verbe + pour + infinitif : 

son insistance à demander / insister pour. 

c) Certaines constructions s'expliquent par l'analogie avec les constructions précédentes : 

son incurie à + infinitif. 

sa précipitation à + infinitif. 

sa propension à + infinitif. 

sa répulsion à + infinitif. 

son zèle à + infinitif. 

C.—  Le substantif déterminé par le complément introduit par à correspond à un adjectif construit avec à. 

1. Substantif + à + substantif : 

l'antériorité à l'ère quaternaire. 

la conformité à l'original. 

la conformité aux usages établis. 

l'extériorité au monde. 

sa fidélité à ses convictions. 

son hostilité à cette solution. 

l'identité au modèle. 

l'infidélité à la parole donnée. 

la loyauté au trône. 

la postériorité à la Révolution. 

Remarque : À construit très rarement un substantif de l'animé : 

sa fidélité au roi, à sa femme. 

2. Substantif + à + infinitif ou substantif d'action. 

a) Le substantif correspond souvent à adjectif + à + infinitif : 

son adresse à faire des robes. 

son âpreté à refuser. 

son aptitude à regarder... 

une ardeur à vivre. 

son assiduité à venir. 

son attention à l'écouter. 

son avidité à être admis. 

sa chaleur à accepter... 

cette constance à se reproduire. 

cette difficulté à croire. 

cette facilité à se lire. 

cette frénésie à jouir. 

cette impétuosité à ramener... 

l'impossibilité à imaginer... 

son impuissance à être heureux. 

son incapacité à comprendre. 

cette indolence à se faire belle. 

sa lenteur à s'éloigner. 

cette promptitude à adapter... 

la rapidité à dire... 

sa rudesse à vouloir. 

cette souplesse à endosser... 

la spontanéité à expliquer... 

sa témérité à riposter. 

sa tiédeur à réprimer... 

votre vigueur à défendre... 

Ø 170. Il ne croyait certes pas offenser Dieu par ce blasphème qui n'était que l'aveu de son impuissance à imaginer cette vie éternelle...

GEORGES BERNANOS, Journal d'un curé de campagne,  1936, page 1182. 

Ø 171.... tant de mes compagnons m'y ont aidé, soit par leur témoignage, soit par leur vigilance à préserver mes notes de l'inquisition allemande, que ces pages qui ne porteront que mon nom sont issues d'une véritable gestation collective.

FRANCIS AMBRIÈRE, Les Grandes vacances,  1946, page 9. 

Par analogie : 

cette démence à jouir. 

sa rigueur à tirer. 

son élégance à accepter... 

son orgueil à refuser... 

sa paresse à sortir. 

sa timidité à aborder la question. 

sa tranquillité à oser. 

sa pudeur à masquer... 

sa vanité à vouloir... 

Ø 172. Il faudra donc que je surmonte ma paresse à écrire et que je ne fatigue plus ma mémoire;...

ANDRÉ CHÉNIER, L'Amérique,  1794, page 83. 

b) Rare. Le substantif correspond à un adjectif suivi de de : 

sa fierté à constater / être fier de constater. 

votre impatience à vaincre / être impatient de vaincre. 

D.—  Le substantif déterminé par le complément introduit par à est un substantif de sens concret (désignant des êtres inanimés ou des animaux) 

1. À introduit un complément de destination. 

a) À + substantif non actualisé : 

arbre à pain. 

boîte à cigares. 

brosse à chaussures. 

brosse à dents. 

caisse à outils. 

corbeille à papier. 

cornet à dés. 

couteau à pain. 

épingles à linge. 

étui à lunettes. 

film à suspens. 

fourchette à escargots. 

livre à suites. 

moulin à café. 

montagne à vaches. 

papier à lettre(s) 

papier à musique. 

pièce à scandale. 

pièce à thèse. 

piège à souris. 

plateau à fromage. 

pot à lait. 

robe à effet. 

sac à main. 

sac à provisions. 

seau à champagne. 

table à ouvrage. 

tasse à thé / de thé : contenu / 

tête à claques. 

vache à lait. 

verre à vin / de vin : contenu / 

b) Rare. À + substantif actualisé : 

l'assiette au beurre (populaire) 

la boîte aux lettres (néologisme : boîte à lettres) 

la cruche au cidre (populaire) 

c) À + infinitif. 

—   \" Qui sert à \" (actif) : 

air à danser. 

cartes à jouer. 

chambre à coucher. 

couteau à découper. 

crème à raser. 

fer à repasser. 

fer à souder. 

machine à battre. 

machine à écrire. 

machine à laver. 

machine à voter. 

pâte à reluire. 

poêle à frire. 

poil à gratter. 

salle à manger. 

verre à boire. 

—   \" Qui est à \" (passif) : 

bois à brûler. 

cire à modeler, à cacheter. 

gomme à mâcher. 

l'homme à abattre. 

maison à vendre. 

tabac à priser. 

terrain à bâtir. 

vin à emporter. 

Confer avec un verbe intransitif : 

siècle à venir. 

2. À introduit un complément indiquant le moyen par lequel fonctionne un instrument, un appareil... (à + substantif non actualisé) 

a) Le substantif introduit par à désigne la source d'énergie : 

appareil à sous. 

appareil à force humaine. 

armes à feu. 

briquet à gaz. 

chambre à gaz. 

frein à main. 

fusil à air comprimé. 

lampe à huile. 

lampe à pétrole. 

machine à système musculaire. 

machine à vapeur. 

moteur à essence. 

moulin à vent. 

poêle à charbon. 

b) Le substantif introduit par à désigne l'élément spécifique du fonctionnement : 

armoire à glace. 

bateau à voile. 

boîte à casiers. 

bombe à ailettes. 

instruments à cordes. 

lampe à arc. 

moteur à hélice. 

moulin à aubes. 

patins à roulettes. 

c) Le substantif introduit par à marque la spécificité du fonctionnement : 

avion à réaction. 

bombe à retardement. 

fauteuil à bascule. 

moteur à explosion, à réaction. 

système à échappement libre. 

Ø 173.... cette bombe à retardement était déjà montée avec une minutie dont j'étais fier...

FRANÇOIS MAURIAC, Le Noeud de vipères,  1932, page 14. 

3. À introduit un complément d'accompagnement.  —  À signifie \" avec \", \" qui a \" :  un char à banc \" avec bancs / qui a des bancs \" : 

a) À + substantif non actualisé : 

un arbre à feuilles conifères. 

les bêtes à cornes. 

un bonnet à poil. 

la bourgeoisie à talent. 

un chapeau à fleurs. 

le char à banc. 

un chinois à bedaine. 

une femme à barbe. 

une femme à cheveux bruns. 

un habit à queue. 

un homme à femmes. 

un homme à moustaches. 

un homme à talents. 

une moquette à fleurs. 

des rentiers à lorgnons. 

une robe à carreaux. 

un serpent à lunettes. 

des souliers à talons. 

Ø 174. Vous autres femmes à principes, vous avez des idées singulières. Vous voudriez qu'un homme vînt au monde tout raisonnable, et que, jusqu'au moment où il se marie, il n'eût connu l'amour que dans les romans.

THÉODORE LECLERCQ, Proverbes dramatiques, La Scène double ou Il ne faut pas badiner avec le feu, 1835, 1, page 348. 

Ø 175. Mais, cousine Bette, je donnerais bien, c'est-à-dire je dépenserais bien cinquante mille francs pour enlever à ce grand bel homme sa maîtresse, et lui prouver qu'un gros père à ventre de chef de bataillon et à crâne de futur maire de Paris ne se laisse pas souffler sa dame sans damer le pion...

HONORÉ DE BALZAC, La Cousine Bette,  1847, page 112. 

Ø 176. Les vantaux du portail tapèrent, rabattus comme par un coup de vent fou, et des hommes à grands chapeaux de paysans se jetèrent dans la cour.

HENRI POURRAT, Gaspard des Montagnes, La Tour du Levant, 1931, page 6. 

b) À + substantif actualisé : 

une Bible à la tranche vert chou. 

la chambre nue aux persiennes closes. 

l'Europe aux anciens parapets. 

une femme aux yeux de braise. 

la fille aux yeux d'or. 

un garçon à l'air triste. 

un homme à l'oeil fixe. 

l'homme à l'oreille cassée. 

la mère au frais sourire. 

les routes aux vieux calvaires. 

un vieillard au gilet mal fermé. 

la vieille aux regards fatidiques. 

la Vierge à l'enfant. 

Ø 177. Il y a même des gens, presque aussi inconnus de nous que du public, qui disent nous admirer. Il y a dans tout ce monde un beau jeune homme, au gilet en coeur, à la chemise en échelle, au revers d'habit noir en velours,... 

EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  février 1868, page 406. 

Ø 178. Cet enfant d'une extrême beauté, aux yeux bleu vif, aux cheveux blonds bouclés, à teint délicat, montrait une inquiétude morale bien extraordinaire chez un homme de son rang...

ÉMILE HERZOG, DIT ANDRÉ MAUROIS, Ariel ou la Vie de Shelley,  1923, page 6. 

4. À introduit un complément de manière.  —  À signifie \" qui est à \" : un rôti à point (\" qui est à point \") : 

a) À + substantif non actualisé : 

un chasseur à pied. 

cet homme à cheval. 

une langue à part. 

une plaie à nu, à vif. 

des racines à nu. 

un rocher à pic. 

un rôti à point. 

Ø 179. Cette personne n'avait rien d'ailleurs que de naturel et d'ouvert; jeune encore, d'une taille robuste, d'un embonpoint marqué, mais plein d'aisance; une de ces physionomies qui préviennent par un mélange de distinction et de rondeur; l'accent agréable, l'oeil à fleur de tête, clair et résolu.

CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Volupté, tome 1, 1834, page 205. 

Ø 180. Cette fois, j'étais de la louée des foulaisons à Marigrate, un gros ménage sur les bords de Durance, une campagne avec des blés à perte de vue, des bois chasseurs, des vignes, tout le tremblement.

JEAN GIONO, Un de Baumugnes,  1929, page 9. 

b) À + substantif actualisé : 

un bateau à la dérive. 

une carpe à la Chambord. 

une choucroute à l'alsacienne. 

une crème à la vanille. 

une femme à l'aise partout. 

un jardin à la française. 

un jugement à l'emporte-pièce. 

un jugement à leur honneur. 

un livre à mon goût. 

un nez à la Cléopâtre. 

des oeufs à la coque. 

un ouvrier à la tâche. 

des pâtes à l'italienne. 

une pelouse à l'anglaise. 

une pose à la Napoléon. 

une robe à la mode. 

une tarte aux pommes. 

des théories à l'état naissant. 

un tuyau à la noix (argotique) 

Ø 181. Mobilier disparate et démodé, qui contraste avec les vestiges somptueux du cadre, et témoigne qu'ici, depuis un demi-siècle, on « fait des affaires », non seulement sans aucun souci d'élégance, mais sans même utiliser de classeurs à l'américaine.

ROGER MARTIN DU GARD, Un Taciturne,  1932, page 1245. 

Ø 182. Ce coquillage que je tiens et retourne entre mes doigts, et qui m'offre un développement combiné des thèmes simples de l'hélice et de la spire, m'engage, d'autre part, dans un étonnement et une attention qui produisent ce qu'ils peuvent : remarques et précisions tout extérieures, questions naïves, comparaisons « poétiques », imprudentes « théories » à l'état naissant...

PAUL VALÉRY, Variété V,  1944, page 12. 

Remarque : Le substantif de base est exceptionnellement un substantif abstrait : 

Ø 183. Qu'importe son mérite! Si une chambre composée de demi-sots s'amuse de ses quolibets et prend ses conversations de tribune pour l'éloquence à haute portée d'un véritable homme d'état, que vous importe?

HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Lucien Leuwen, tome 3, 1836, page 337. 

Ø 184. Un bourdonnement à mille pétillements et crépitements lui emplit les oreilles. Des fumées, qu'une rougeur éclairait d'en dessous, filaient sur le toit du hangar.

HENRI POURRAT, Gaspard des Montagnes, La Tour du Levant, 1931, page 6. 

5. À introduit un complément de lieu ou de temps. 

a) À + substantif non actualisé : 

Ø 185. Le théâtre représente une salle du château de M. de Bremont; porte et deux croisées au fond; deux portes latérales. La porte à gauche de l'acteur est celle de la chambre d'Édouard;...

EUGÈNE SCRIBE, A.-F. VARNER, Le Mariage de raison,  1826, I, 1, page 384. 

b) À + substantif actualisé : 

Ø 186. L'aiguille a fait son tour. Votre tâche est finie; comme un pâle vieillard le siècle à l'agonie se lamente et se tord.

THÉOPHILE GAUTIER, La Comédie de la mort,  1838, page 22. 

Ø 187. J'aime à vingt-trois ans cette ride de rien, presque invisible, ce pli à votre beau front, entre vos deux sourcils.

GEORGES BERNANOS, Dialogues d'ombres,  1928, page 41. 

6. À introduit un infinitif d'obligation ou un infinitif conséquentiel. 

a) L'infinitif a pour objet le substantif de base du syntagme : 

le but à atteindre.  

la conduite à tenir.  

un coup à faire.  

cinq enfants à nourrir.  

quarante gamins à instruire.  

un ordre à donner.  

un os à ronger.  

une réclamation à satisfaire.  

une résolution à prendre.  

la route à suivre.  

la suite à donner.  

un tour à jouer. 

b) À + infinitif n'a pas pour objet le substantif de base du syntagme (verbe intransitif ou verbe transitif ayant déjà un objet) : 

une bouche à rendre jalouse. 

des contes à dormir debout. 

des cris à faire peur. 

des épaules à démolir les portes. 

une injustice à crier. 

un nom à coucher dehors. 

un sourire à damner tout un concile. 

une tête à tourner toutes les autres. 

une tête à vendre des camemberts. 

le type d'affaire à tout casser. 

Ø 188. Bref, elle m'adorait. C'était des cajoleries, des mamours, des p'tits noms de chien, un tas d'gentillesses à me donner des réflexions.

GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 2, Histoire vraie, 1882, page 336. 

Ø 189.... puis, c'étaient des fêtes à tout casser, chaque trimestre, quand le notaire lui versait sa rente de trente-sept francs cinquante.

ÉMILE ZOLA, La Terre,  1887, page 322. 

Ø 190. A mon arrivée, il achevait la lecture d'un journal qu'il jeta sur la table, comme s'il se débarrassait d'une couleuvre, avec cet air d'ennui suprême et ce sourire à donner des engelures que vous lui connaissez,...

LÉON BLOY, La Femme pauvre,  1897, page 275. 

Remarque : 1. À + substantif de l'animé marquant l'appartenance (confer historique II B). —  La construction n'existe plus que dans le parler populaire ou paysan (le cousin à ma femme), sauf dans quelques expressions qui appartiennent au langage familier ou hypocoristique (un fils à papa). 2. Un certain nombre de syntagmes nominaux correspondent, en emploi appositif, à un syntagme verbal du type avoir le sourire aux lèvres :

un couteau à la main

la joie au coeur

le poignard œur

le poignard au côté

le sourire aux lèvres

le stylo au poing

191. Vers trois heures de l'après-midi, dans le mois d'octobre de l'année 1844, un homme âgé d'une soixantaine d'années, mais à qui tout le monde eût donné plus que cet âge, allait le long du boulevard des Italiens, le nez à la piste, les lèvres papelardes, comme un négociant qui vient de conclure une excellente affaire, ...

H. DE BALZAC, Le Cousin Pons, 1848, page 1.

Cette préposition a un sens si éloigné de toute donnée concret et se prête, selon les contexte, à des différenciations sémantiques si nombreuses qu'il est hasardeux de procéder à une classification des « sens », qui ne serait autre qu'une classification sémantique des contexte dans lesquels cette préposition peut apparaître. Certes, par opposition à la préposition d'éloignement de (venir de Paris, être de Paris), à signifie la direction vers un point (qu'il s'agit d'atteindre) (aller à Paris) ou la coïncidence avec un point (considéré comme une limite sans idée de dépassement) (être à Paris)

 

Mais ces valeurs fondamentales (« direction vers » et « coïncidence ») se prêtent aux exploitations les plus diverses : —  L'idée de « direction vers » se perçoit plus ou moins confusément dans bon nombre de verbes à construction indirecte :

aspirer à

tendre à

s'abandonner à quelque chose

s'adonner 

s'adonner à la boisson

s'attacher à quelque chose

se complaire 

se complaire à

ou dans les adjectifs construits avec à : (terrain) bon à bâtir; enclin à dominer. C'est elle qui prédomine dans les doubles constructions :

donner quelque chose à quelqu'un

entraîner quelqu'un à agir

forcer quelqu'un à faire quelque choseElle permet à la préposition à de fournir, avec les verbes de mouvement l'idée de direction ou de destination (aller à, se rendre à), et, sur le plan temporel, à construire quelques locutions qui signifient le parcours d'une certaine étendue de durée (à vie, à brève échéance, à l'avenir ...). Elle donne lieu, enfin, à l'idée de finalité dans le syntagme nominal (moulin à café, machine à coudre). —  L'idée de « coïncidence » (ou de « situation ») connaît de son côté les exploitations les plus variées : . elle apparaît non seulement au sens local avec les verbes dits « de position » (se trouver, être à Paris) ou, plus généralement dans le complément « circonstanciel » de lieu (qui n'est pas indispensable au sens du verbe : se promener à la campagne) et, au sens temporel, pour situer dans le temps un procès répété ou non (à huit heures, à chaque fois); . mais elle permet aussi à la préposition à d'exprimer des notions comme le moyen (peindre à l'huile), la manière (vendre à crédit), l'indice (reconnaître au pas), la conséquence (s'ennuyer à mourir) et même l'hypothèse ou la cause (à lire ce texte avec attention, on ...). Cette diversité dans l'usage sémantique de la préposition à, à quoi s'ajoute le fait que dans bon nombre de cas, le sens de à paraît si ténu qu'il en est quasiment insaisissable (pourquoi atteindre à mais s'approcher de, s'échapper de mais échapper à? confer cependant supra. I A 1, remarque I et I D 1 a, remarque) conduit le lexicographe à préférer pour son étude un cadre proche des données syntaxiques. À fonctionne tantôt dans le syntagme verbal : atteindre à (I), dans le syntagme adjectif : apte à (II), dans le syntagme nominal : moulin à café (III). —  Dans le 1er, il sert à construire bon nombre de verbes actifs (atteindre à) ou pronominaux (s'attendre à) ou de verbes à double construction (reprendre quelque chose à quelqu'un) dans lesquels : . le complément est à place fixe (après le verbe); . le complément est indispensable au sens du verbe; . à n'est pas commutable avec une autre préposition (sauf, exception, avec de); . le complément est commutable avec y lorsqu'il est de l'inanimé mais non avec où (il aspire à /... à quoi aspire-t-il et non *où aspire-t-il?). Ainsi le complément d'objet indirect introduit par à s'oppose avec netteté au complément circonstanciel. (complément de lieu commutable avec où et y; complément de temps, de moyen, de manière commutable ni avec où, ni avec y). Toutefois les complément de certains verbes « déterminés » (aller à Paris), tout en se rapprochant du complément circonstanciel. en ce sens qu'ils expriment un lieu et qu'ils sont commutables avec où et y, restent cependant apparentés au complément d'objet indirect par le fait que, nécessairement postposés, ils sont indispensables pour l'achèvement de la phrase : je vais au théâtre à Paris / à Paris je vais au théâtre mais non, * au théâtre je vais à Paris (au théâtre : complément déterminé de lieu du verbe aller, proche du complément indirect; à Paris : complément circonstanciel de lieu proprement dit, libre du verbe). D'autre part, à + complément circonstanciel fonctionne fréquemment dans des expression plus ou moins figées (vendre à crédit, lutter à armes égales). —  Dans le syntagme adjectif, à appartient de même à certains adjectifs qui se construisent régulièrement avec lui (enclin à, apte à ...); avec d'autres il introduit un complément proche du complément circonstanciel. (curieux à regarder). —  Enfin, dans le syntagme nominal, il convient de distinguer : . les substantifs issus de verbes ou d'adjectifs construits avec à (l'abandon à; l'aptitude à ...); . les syntagmes issus de certaines constructions doubles (lancer un défi au bon sens > le défi au bon sens); on mettra en évidence l'autonomie du syntagme nominal par le fait qu'il peut fonctionner comme sujet ou comme complément préposition (à cause de ce défi au bon sens ...); . le syntagme nominal proprement dit (machine à coudre). 

 

 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 1 396 290. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 2 023 201, b) 2 054 474; XXe.  siècle : a) 1 830 617, b) 2 010 176. 

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