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sûr, tel est bien le cas de la vue de l'unité : car nous voyons la même chose aussi bien une qu'infiniment multiple.

Publié le 22/10/2012

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sûr, tel est bien le cas de la vue de l'unité : car nous voyons la même chose aussi bien une qu'infiniment multiple. — S. Mais s'il en est ainsi de l'unité, est-ce qu'il n'en va pas de même pour tout nombre ? — G. C'est certain. — S. Or calcul et arithmétique n'ont d'autre objet que le nombre ? — G. Oui. — S. Il apparaît donc qu'ils sont propres à conduire à la vérité. — G. Extraordinairement propres, assurément. — S. Il semble donc qu'il fassent partie des disciplines dont nous sommes en quête : il faut que l'homme de guerre les apprenne pour ordonner ses troupes, et le philosophe aussi, lui qui doit émerger du devenir pour s'attacher à l'essence, sans quoi il ne deviendra pas capable de raisonner. — G. C'est un fait. — S. Or il se trouve justement que notre gardien de l'Etat est homme de guerre et philosophe. — G. C'est juste. — S. Il conviendrait donc, Glaucon, d'inscrire cette discipline dans la loi, et de convaincre ceux qui sont destinés aux plus hautes fonctions dans l'Etat de s'adonner à la science du calcul en la pratiquant non de manière vulgaire, mais en poussant jusqu'à la contemplation de la nature des nombres par la pure pensée, pour la mettre non pas au service de la vente et de l'achat comme font négociant et marchand, mais de la guerre, et pour faciliter la conversion de l'âme elle-même, la détourner du devenir et l'orienter vers la vérité et la réalité. [...] Car c'est vers la région supérieure qu'elle donne à l'âme un élan puissant, et elle la force à raisonner sur les nombres en eux-mêmes, en interdisant de faire porter le raisonnement sur des nombres ayant un corps visible ou tangible. Car tu sais sans doute comment se comportent les spécialistes de cette science : si tu te mets à diviser en pensée l'unité elle-même, ils se moquent et s'y refusent ; si tu la morcèles, ils la multiplient, de peur que l'unité perde son unité en apparaissant comme multiplicité de parties. — G. C'est parfaitement exact. — S. Suppose qu'on leur dise : quels sont donc ces nombres sur lesquels vous raisonnez, étonnants savants, en lesquels vous estimez que l'unité est telle que chacune est par- faitement égale à toute autre, sans la moindre différence et sans comporter une partie ? Que crois-tu qu'ils répondraient ? — G. Ils diraient, je suppose, qu'il s'agit de nombres que seule la pensée peut atteindre, et auxquels il est absolument impossible d'accéder autrement.— S. Il y a donc chance, vois-tu, que ce soit pour nous une discipline indispensable, puisqu'il est clair qu'elle oblige l'âme à recourir à la seule intelligence appliquée à la vérité elle-même. — G. Il est certain qu'elle possède éminemment ce pouvoir. — S. Ce n'est pas tout : as-tu déjà remarqué que tandis que ceux qui sont nés avec le don du calcul ne font avec l'âge que gagner en vivacité pour ainsi dire dans toutes les sciences, les esprits lents, s'ils sont formés et entraînés au calcul, y gagnent tous à tout le moins de devenir plus vifs qu'ils ne l'étaient par nature. — G. C'est juste. — S. Sans compter qu'à mon avis il serait difficile de trouver une discipline qui coûte plus d'effort à apprendre et à pratiquer. — G. En effet. — S. Autant de raisons de ne pas la négliger et de la faire cultiver par les meilleures natures. République VII, 524d-526c b) La géométrie. [SOCRATE-GLAUCON] — S. Dans la mesure où la géométrie a un rapport aux choses de la guerre, il est évident qu'elle nous intéresse : établir un camp, assiéger une place, concentrer et déployer l'armée, mettre une armée en position qu'il s'agisse d'ordre de bataille ou d'ordre de marche, autant d'opérations où celui qui est géomètre est supérieur à celui qui ne l'est pas. Mais à vrai dire, pour tout cela une faible part de géométrie et de raisonnement suffirait. Quant à la partie principale de cette science, celle qui va plus loin, il faut examiner si elle tend à ce qui est le but : faire voir plus facilement l'Idée du Bien. C'est à ce but, avons-nous dit, que tendent toutes les disciplines qui forcent l'âme à se tourner vers ce lieu supérieur où réside le plus heureux de l'Être, qu'elle doit à tout prix contempler. — G. C'est juste. — S. En conséquence, si c'est la réalité que la géométrie force à contempler, elle nous convient ; si c'est le devenir, elle ne nous convient pas. — G. Soit. — S. Il y a au moins une chose que ne nous contesteront pas tous ceux qui ont la moindre pratique de la géométrie, c'est que cette science comporte quelque chose d'entièrement opposé au langage qu'y tiennent ceux qui s'y appliquent. — G. Comment cela ? — S. Il y a quelque chose de passablement dérisoire et futile dans leur langage ; car ils ne cessent de parler comme des gens qui « agissent « et qui se proposent de « faire « : ils parlent de « rendre carré «, de « construire sur une ligne donnée «, de « juxtaposer «, et tout à l'avenant, alors que toute cette science n'est pratiquée que pour une fin spéculative. — G. Absolument. — S. Au surplus, ne faut-il pas convenir de ceci ? — G. De quoi ? — S. Qu'on ne la pratique que pour connaître ce qui existe toujours et non pas ce qui, à un moment donné, vient à être et vient à disparaître. — G. On en convient volontiers, car la géométrie est connaissance de ce qui est toujours. — S. Ainsi elle serait propre à entraîner l'âme vers la vérité, à promouvoir la pensée philosophique en tournant vers le haut un regard que nous avons présentement le tort de diriger vers le bas. République VII, 526d-527b c) L'astronomie. [GLAUCON-SOCRATE] — G. Es-tu d'avis de retenir en troisième lieu l'astronomie ? — S. Oui certes, car ce n'est pas seulement dans l'agriculture et la navigation qu'il convient d'être mieux averti en matière de saisons, de mois et d'années, mais tout autant dans l'art militaire. — G. Tu m'amuses, car tu as l'air de quelqu'un qui a peur que le vulgaire lui reproche de prescrire l'étude de

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Ils diraient, je suppose, qu'il s'agit de nombres que seule la pensée peut atteindre, et auxquels il est absolument impossible d'accéder autrement.- S.

Il y a donc chance, vois-tu, que ce soit pour nous une discipline indispensable, puisqu'il est clair qu'elle oblige l'âme à recourir à la seule intelligence appliquée à la vérité elle-même.

- G.

Il est certain qu'elle possède éminemment ce pouvoir.- S.

Ce n'est pas tout: as-tu déjà remarqué que tandis que ceux qui sont nés avec le don du calcul ne font avec l'âge que gagner en vivacité pour ainsi dire dans toutes les sciences, les esprits lents, s'ils sont formés et entraînés au calcul, y gagnent tous à tout le moins de devenir plus vifs qu'ils ne l'étaient par nature.

-G.

C'est juste.

- S.

Sans compter qu'à mon avis il serait difficile de trouver une discipline qui coûte plus d'effort à apprendre et à pratiquer.

- G.

En effet.

- S.

Autant de raisons de ne pas la négliger et de la faire cultiver par les meilleures natures.

République VII, 524d-526c b) La géométrie.

[SOCRA TE-Gl.AUCON] -S.

Dans la mesure où la géométrie a un rapport aux choses de la guerre, il est évident qu'elle nous intéresse : établir un camp, assiéger une place, concentrer et déployer l'armée, mettre une armée en position qu'il s'agisse d'ordre de bataille ou d'ordre de marche, autant d'opérations où celui qui est géomètre est supérieur à celui qui ne l'est pas.

Mais à vrai dire, pour tout cela une faible part de géométrie et de rai­ sonnement suffirait.

Quant à la partie principale de cette science, celle qui va plus loin, il faut examiner si elle tend à ce qui est le but : faire voir plus facilement l'Idée du Bien.

C'est à ce but, avons-nous dit, que tendent toutes les disciplines qui forcent l'âme à se. »

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