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A quoi reconnaît on un scientifique ?

Publié le 29/09/2005

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scientifique

 

Le verbe « reconnaître « a deux sens principaux : par reconnaître, nous voulons dire que nous découvrons qu’une chose est déjà connue de nous, que nous la déterminons comme une chose que nous avons déjà rencontrée ; mais reconnaître, c’est aussi admettre quelque chose, comme vrai, réel, ou légitime. En posant la question plus spécifique « A quoi reconnait-on un scientifique ? « nous voulons savoir quel critère nous permet de subsumer un individu sous la catégorie « scientifique « qui désigne une activité autant qu’une identité sociale.

 

Un scientifique est celui qui pratique cette activité singulière qu’est la science : on nomme science une recherche qui définit un objet à connaître et procède par hypothèses afin d’atteindre une vérité objective en les confirmant ; elle est donc absolument impossible à achever. Nous n’essayerons pas davantage ici de définir ce qu’est un scientifique, dans la mesure où l’objet de notre travail consiste précisément à définir les critères en fonction desquels un scientifique se reconnait.

 

A première vue, il peut nous sembler que le premier critère qui permet de reconnaître un scientifique est à chercher dans son discours. En effet, le discours d’un historien a ceci de particulier qu’il se plie à des normes internes exigeant l’ascèse de la subjectivité autant que le refus des arguments d’autorité. Pourtant, on reconnait peut-être moins un scientifique à son discours lui-même qu’à l’encadrement de ce dernier par la surveillance de spécialistes, qui assurent sa légitimité en vérifiant son exactitude. Enfin, nous nous demanderons si on ne reconnait pas d’abord un scientifique à cette caractéristique apparemment paradoxale de son discours : le fait qu’il se fonde sur des données qui demeurent nécessairement invérifiables.

La question au centre de notre travail sera de déterminer si les critères permettant de reconnaitre un scientifique sont à rechercher dans des caractéristiques internes ou externes aux discours qu’il tient.

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« I.

Un scientifique se reconnait à l'inféodation de son discours à des normes internes a.

L'ascèse de la subjectivité Dans un premier temps, nous verrons qu'un scientifique se reconnait au fait qu'il accepte de plier son discours à desnormes internes, afin que sa démarche corresponde authentiquement à une démarche scientifique.

L'une despremières normes de ce type de discours est l'ascèse de la subjectivité : l'homme de science n'a pour guide que laraison et la démonstration, il se garde de toute contamination de son discours par sa propre individualité, quipourrait mettre en danger la validité de ses observations.

Cela se traduit par un silence sur sa propre personne et saperception intime des problèmes ; mais également par l'usage d'un style scientifique, c'est-à-dire d'un styledépourvu de style : Cohen, dans Structures du langage poétique , montre qu'un style scientifique ne produit aucun écart par rapport à l'usage commun de la langue.

On reconnait donc un scientifique au langage dépassionné,dépourvu d'images et de métaphores qu'il emploie pour décrire aussi exactement que possible des faitsrationnellement prouvés.

b.

Le refus des arguments d'autorité L'un des autres critères qui permet de reconnaitre un scientifique est le refus des arguments d'autorité.

Unscientifique produit un discours qui met à nu sa propre entreprise de découverte de la vérité, entreprisereproductible par chacun, mais elle ne proclame jamais rien dont elle ne rend pas raison.

Le souci de la rigueur etd'une démarche balisée, progressive, caractérise également la démarche proprement scientifique.

En effet, onreconnait un scientifique au fait qu'il n'accepte aucune vérité par l'intermédiaire de la croyance, mais s'efforcetoujours de fonder les données à partir desquelles il travaille par une démarche de vérification attentive.

A ce titre,un scientifique se reconnait au fait qu'il accepte de mettre en œuvre la démarche décrite par Descartes dans lesMéditations Métaphysiques, démarche qui consiste à douter systématiquement de tout et de ne rien croire sans examen préalable.

En effet, Descartes nous dit au commencement des Méditations Métaphysiques qu'il a résolu de commencer par douter de tout, prétendant ainsi rejeter tout ce qu'il tenait pour vrai en dehors de la sphère de laphilosophie avant un examen préalable.

Comme l'écrit Descartes : « Comme nous avons été enfants avant que d'être hommes et que nous avons jugé tantôt bien et tantôt mal deschoses qui se sont présentées à nos sens lorsque nous n'avions pas encore l'usage entier de notre raison, plusieursjugements ainsi précipités nous empêchent de parvenir à la connaissance de la vérité, et nous préviennent de tellesorte qu'il n'y a point d'apparence que nous puissions nous en délivrer, si nous n'entreprenons de douter une fois ennotre vie de toutes les choses où nous trouverons le moindre soupçon d'incertitude.

» (Principes de la philosophie,1) Descartes nous invite en effet à systématiser le doute, car il se peut que le jugement que nous formulons à partirdu témoignage de nos sens soit trompeur.

Le scientifique se reconnait à cette soumission à la leçon de Descartespuisqu'il renonce à toute croyance retenue sans examen.

II.

Un scientifique se reconnait au fait que son discours soit encadré par une communauté de spécialistes a.

Le contrôle du discours par la communauté des spécialistes Cependant, nous nous demanderons si on ne reconnait pas moins un scientifique aux caractéristiques définitoires deson discours qu'à son insertion dans une communauté de spécialistes qui garantissent la scientificité de sespratiques.

En effet, pour être scientifique, une démarche doit répondre à cette condition : elle doit intégrer sondiscours dans une communauté de spécialistes.

Une démarche scientifique doit être vérifiée dans ses présupposéset son argumentation par d'autres individus que ceux qui l'ont produite.

Pensons à la démarche scientifique del'historien, dont le discours sur le passé, nécessairement partiel, sinon partial, doit être complété par le discoursd'autres spécialistes s'il veut prétendre à la vérité.

L'historien n'existe qu'intégré dans une communauté scientifique,une communauté qui surveille et régi les travaux de chacun de ses membres.

Nous pouvons dire que nous sommes. »

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