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Alain : l'origine de la société

Publié le 18/04/2009

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alain
On serait tenté d'expliquer toute l'organisation sociale par le besoin de manger et de se vêtir, l'Economique dominant et expliquant alors tout le reste ; seulement il est probable que le besoin d'organisation est antérieur au besoin de manger. On connaît des peuplades heureuses qui n'ont point besoin de vêtements et cueillent leur nourriture en étendant la main ; or elles ont des rois, des prêtres, des institutions, des lois, une police ; j'en conclus que l'homme est citoyen par nature. J'en conclus autre chose, c'est que l'Economique n'est pas le premier des besoins. Le sommeil est bien plus tyrannique que la faim. On conçoit un état où l'homme se nourrirait sans peine ; mais rien ne le dispensera de dormir, si fort et si audacieux qu'il soit, il sera sans perceptions, et par conséquent sans défense, pendant le tiers de sa vie à peu près, il est donc probable que ses premières inquiétudes lui vinrent de ce besoin-là ; il organisa le sommeil et la veille : les uns montèrent la garde pendant que les autres dormaient ; telle fut la première esquisse de la cité. La cité fut militaire avant d'être économique. Je crois que la Société est fille de la peur, et non pas de la faim. Bien mieux, je dirais que le premier effet de la faim a dû être de disperser les hommes plutôt que de les rassembler, tous allant chercher leur nourriture justement dans les régions les moins explorées. Seulement, tandis que le désir les dispersait, la peur les rassemblait. Le matin, ils sentaient la faim et devenaient anarchistes. Mais le soir ils sentaient la fatigue et la peur, et ils aimaient les lois. Alain, Propos sur les pouvoirs

Au premier abord, Alain concède que toute société semble construite pour répondre aux besoins humains de « manger et de se vêtir «. Cette hypothèse correspond au bon sens et à ce que l'on observe couramment : toute société repose sur l'échange des produits, la division du travail, c'est à la fois sa fonction et son origine. Platon le montre par exemple dans le livre II de la République, à partir du constat que chaque individu ne peut se suffire à lui seul pour survivre : il a donc besoin des autres. Et c'est parce que la société est faite pour nos besoins qu'elle s'organise autour du travail et des biens matériels.  Alain précise bien : c'est « toute « l'organisation sociale qui est ainsi concernée. Autrement dit la nécessité de produire constitue l'âme et le cœur de tout ce qui existe socialement. L'économie est première et fondatrice, elle conditionne « tout le reste « : le domaine proprement politique n'est là que pour répondre à l'urgence économique. On pense ici à la thèse de Marx : les lois, le Droit, même les mentalités ou les idéologies des gens sont déterminés par les structures économiques en place.  Mais Alain ne s'arrête justement pas à cette thèse.  

alain

« «On serait tenté d'expliquer toute l'organisation sociale par le besoin de manger et de se vêtir,l'Économique dominant et expliquant alors tout le reste ; seulement il est probable que le besoind'organisation est antérieur au besoin de manger.

On connaît des peuplades heureuses qui n'ont pointbesoin de vêtements et cueillent leur nourriture en étendant la main ; or elles ont des rois, desprêtres, des institutions, des lois, une police ; j'en conlus que l'homme est citoyen par nature.J'en conclus autre chose, c'est que l'Économique n'est pas le premier des besoins.

Le sommeil est bienplus tyrannique que la faim.

On conçoit un état où l'homme se nourrirait sans peine ; mais rien ne ledispensera de dormir, si fort et si audacieux qu'il soit, il sera sans perceptions, et par conséquent sansdéfense, pendant le tiers de sa vie à peu près.

Il est donc probable que ses premières inquiétudes luivinrent de ce besoin-là ; il organisa le sommeil et la veille : les uns montèrent la garde pendant que lesautres dormaient ; telle fut la première esquisse de la cité.

La cité fut militaire avant d'êtreéconomique.

Je crois que la Société est fille de la peur, et non pas de la faim.

Bien mieux, je dirais quele premier effet de la faim a dû être de disperser les hommes plutôt que de les rassembler, tous allantchercher leur nourriture justement dans les régions les moins explorées.

Seulement, tandis que le désirles dispersait, la peur les rassemblait.

Le matin, ils sentaient la faim et devenaient anarchistes.

Mais lesoir ils sentaient la fatigue et la peur, et ils aimaient les lois.» Alain, Propos sur les pouvoirs Introduction « L'homme est un loup pour l'homme » est la phrase souvent utilisée pour évoquer la nature profondément égoïste,associable, voire cruelle, de l'être humain envers ses congénères.

Mais dans ce cas, d'où provient la société ?Comment expliquer que nous en ayons besoin ? Alain dans ce texte réfute l'idée courante selon laquelle le besoin desociété se greffe sur la nécessité de produire tout ce dont l'homme a besoin et qu'il ne peut assurer seul.

La sociéténe se base pas sur l'échange des biens, mais sur l'échange des services de surveillance.

Elle est faite pour que secrée une sorte de super-organisme qui possède l'avantage de ne dormir jamais.

De ce fait toute société se dote àl'origine et par principe d'une structure militaire.

Dans une première partie, le philosophe présente et réfute le rôleprépondérant de l'économie comme moteur de l'union des hommes.

Pour lui substituer, dans la seconde partie, lanécessité naturelle du sommeil et la faiblesse qu'il engendre.

C'est donc paradoxalement le rouage psychologique dela peur qui unit les hommes entre eux.

Nous verrons dans un dernier moment s'il n'est pas possible de nuancer cettethèse. I.

La société est une nécessité naturelle 1.

Le rôle supposé de l'économie Au premier abord, Alain concède que toute société semble construite pour répondre aux besoins humains de «manger et de se vêtir ».

Cette hypothèse correspond au bon sens et à ce que l'on observe couramment : toutesociété repose sur l'échange des produits, la division du travail, c'est à la fois sa fonction et son origine.

Platon lemontre par exemple dans le livre II de la République, à partir du constat que chaque individu ne peut se suffire à luiseul pour survivre : il a donc besoin des autres.

Et c'est parce que la société est faite pour nos besoins qu'elles'organise autour du travail et des biens matériels.Alain précise bien : c'est « toute » l'organisation sociale qui est ainsi concernée.

Autrement dit la nécessité deproduire constitue l'âme et le cœur de tout ce qui existe socialement.

L'économie est première et fondatrice, elleconditionne « tout le reste » : le domaine proprement politique n'est là que pour répondre à l'urgence économique.On pense ici à la thèse de Marx : les lois, le Droit, même les mentalités ou les idéologies des gens sont déterminéspar les structures économiques en place.Mais Alain ne s'arrête justement pas à cette thèse. 2.

La place du politique À la « tentation » de l'évidence première, Alain oppose la « probabilité » plus rationnelle.

Celle qui dissocie le besoin. »

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