Autrui
Publié le 05/05/2013
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AUTRUI
Texte MerleauPonty, Phénom énologie de la perception : Comment sais
je que Paul est triste? Et en col
ère?
MERLEAUPONTY
Je per
çois autrui comme comportement; par exemple je per çois le
deuil ou la col
ère d'autrui dans sa conduite, sur son visage et sur
ses mains, sans aucun emprunt
à une exp érience "interne" de la
souffrance ou de la col
ère et parce que deuil et col ère sont des
variations de l'
être au monde, indivises entre le corps et la
conscience, et qui se posent aussi bien sur la conduite d'autrui,
visible dans son corps ph
énom énal, que sur ma propre conduite
telle qu'elle s'offre
à moi. Mais enfin le comportement d'autrui et
m
ême les paroles d'autrui ne sont pas autrui. Le deuil d'autrui et sa
col
ère n'ont jamais exactement le m ême sens pour lui et pour moi.
Pour lui, ce sont des situations v
écues, pour moi ce sont des
situations appr
ésent ées. Ou si je peux, par un mouvement d'amiti é,
participer
à ce deuil et à cette col ère, ils restent le deuil et la col ère
de mon ami Paul: Paul souffre parce qu'il a perdu sa femme ou il est
en col
ère parce qu'on lui a vol é sa montre, je souffre parce que Paul
a de la peine, je suis en col
ère parce qu'il est en col ère, les
situations ne sont pas superposables. Et si enfin nous faisons
quelque projet en commun, ce projet commun n'est pas un seul
projet, et il ne s'offre pas sous les m
êmes aspects pour moi et pour
Paul, nous n'y tenons pas autant l'un que l'autre, ni en tout cas de la
m
ême fa çon, du seul fait que Paul est Paul et que je suis moi. Nos
consciences ont beau,
à travers nos situations propres, construire
une situation commune dans laquelle elles communiquent, c'est du
fond de sa subjectivit
é que chacun projette ce monde "unique".
M. MerleauPonty, La Ph
énom énologie de la perception (1945), Éd.
Gallimard, p. 409..
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