« Avoir le dernier mot »
Publié le 12/01/2013
Extrait du document
Ne pourrions nous pas en ce sens faire l'éloge de celui qui cherche à avoir le dernier mot ? En effet,
défendre ses thèses et opinions , quel qu'en soit le motif , laisse entrevoir une grande force de
caractère:je n'accepte pas bêtement les propos d'un individu voire d'un groupe si je ne les trouve pas
fondés comme le ferai un individu sans réparti, mais développe mon argumentation sans me soucier des
"qu'en dira t-on" et de la critique.L'individu qui cherche à avoir le dernier mot ne se cache pas , il s'expose
et se met ainsi en danger mais au moins il est en accord avec lui même et n'adhère par exemple pas à
l'opinion publique simplement pour être conforme à la majorité . De plus , il fait preuve de persévérance et
d'une grande motivation :je vais par tous les procédés possibles tenter d'emporter l'adhésion de mon
adversaire et ceci quelqu'en soit le côut .Je vais dès alors tenter de développer mes capacités
argumentatives,ma force de persuasion ,mon sens de la logique et bon nombre de stratagèmes pour
ressortir gagnant du débat
«
l'ardeur qui m'anime vise, non pas à rendre parfaitement clair le sujet de notre discussion, mais bien à
critiquer l'autre.
Il montre que s'il arrive que les individus soient en désaccord sur quelque chose, si l'un
déclare que l'autre se trompe ou parle de façon confuse, ils s'irritent l'un contre l'autre, et chacun d'eux
estime que son interlocuteur s'exprime avec mauvaise foi, pour avoir le dernier mot, sans chercher à
savoir ce qui est au fond de la discussion.
Enfin, si on poursuit l’analyse, le mot "avoir"(dans avoir le
dernier mot) se définit comme posséder, obtenir .Ainsi, ne pourrait-on pas appréhender le désir d'avoir le
dernier mot comme la volonté du sujet à posséder autrui, obtenir de lui ce qu'il veut ? Pour ce faire, peu
importe la recherche de la vérité, sa principale préoccupation est de rompre le dialogue, et si on va plus
loin c'est refuser l'existence de l'autre, sa manière de penser, dans le seul but de le dominer.
En effet, en refusant le dialogue, je ne permets pas à l'autre d'exister indépendamment de ma pensée.
Dès lors, je refuse l'enrichissement possible qu'autrui peut m’apporter: détails pertinents, nouvelle façon
de voir les choses, arguments fondés qui corrigent ma thèse...
.Aussi, au lieu de s'instruire mutuellement
, les individus resteront campés sur leurs positions, n'ayant pas pris en compte le discours de l'autre tel
Calliclès qui refuse d'écouter et de prendre en compte le point de vue de Socrate dans Giorgias.Une fois
de plus ,celui qui cherche à avoir raison s'écarte de la vérité, car ici il se prive des bienfaits de l'échange ,
et se renfermant sur sa pensée , il n'essai ni de nuancer ou d'affiner son propos , ni de l'enrichir :son
cheminement vers la vérité s'en trouve entravé.
II) Par ailleurs, si on vient de montrer qu'animé par
l'orgueil et un besoin de supériorité, le sujet qui cherche à avoir le dernier mot accorde peu d'importance à
la recherche de la vérité, ne pourrait -on pas montrer dans une 2nd partie, que même lorsque l'individu
est convaincu de la pertinence ou de la validité de son propos , il ne peut réellement détenir la vérité et ne
peut donc pas justifier son
désir d'avoir le dernier mot ? En d'autres termes, ne pourrait-on pas montrer que chercher à avoir le
dernier mot est critiquable dans le sens où on ne peut affirmer
détenir la vérité ? Tout d'abord, si on se penche sur la pensée sceptique, doctrine qui considère que rien
n'est indubitable (la pensée humaine ne peut se déterminer sur la possibilité de la découverte d'une
vérité), chercher à avoir le dernier mot apparait évidemment critiquable puisque personne ne peut certifier
connaitre la vérité et donc déclarer que sa thèse prévaut sur une autre.
*On peut ici s'appuyer sur la
pensée de Sextus Empiricus, dans Esquisses pyrrhoniennes.
En effet, ce dernier s'interroge et montre
qu'alors que depuis le début de son existence, l'homme mène une quête acharnée pour la vérité,
l'atteindre serait impossible voire illusoire : quand je vois une bouteille d’eau rouge sur la table en face de
moi, puis je être sûr qu’elle existe ? Un daltonien par exemple la voit déjà d’une couleur différente, et en
poussant le raisonnement encore plus loin je peux penser que mes sens me trompent et inventent cette
bouteille, de la même façon qu’un bâton plongé dans l'eau parait rompu.
Ici, la pensée d'Empiricus
s'apparente à celle de bien d'autres auteurs qui nie la possibilité d'atteindre la vérité, tel Socrate qui dit ne
savoir qu'une chose, c’est qu’il ne sait rien ou Descartes pour qui ,excepté notre existence ,je peux douter
de tout.
Dès lors,comment pourrais je prétendre avoir le dernier mot, avoir raison face à mes
interlocuteurs ,si je peux
douter de tout et que la recherche de la connaisance est une démarche veine ? *En outre , si on prolonge
la théorie d'Empiricus,toute argumentation rationelle admet une contre-argumentation , qui est toute aussi
rationelle et tout aussi convaincante .Ceci montre une fois de plus que la raison n'est pas capable de dire
quoi que se soit de sûr sur le réel mais également que je ne peux affirmer que le dernier mot me revient
puisque mon adversaire peut formuler une thèse tout aussi pertinente , et en cela même si j'avais raison ,
je ne serais pas nécessairement le seul.(+Chercher à avoir le
dernier mot pourrait alors etre un procesus sans fin , dans la mesure ou convaincu par leur
argumentation,les deux parties ne trancheraient jamais.).
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