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Bergson: la réalisation matérielle du poème en mots.

Publié le 18/04/2005

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bergson
Pour que la pensée devienne distincte, il faut bien qu'elle s'éparpille en mots : nous ne nous rendons bien compte de ce que nous avons dans l'esprit que lorsque nous avons pris une feuille de papier, et aligné les uns à côté des autres des termes qui s'entrepénétraient. (...) La pensée qui n'est que pensée, l'oeuvre d'art qui n'est que conçue, le poème qui n'est que rêvé ne coûtent pas encore de la peine ; c'est la réalisation matérielle du poème en mots, de la conception artistique en statue ou tableau, qui demande un effort. L'effort est pénible, mais il est aussi précieux, plus précieux encore que l'oeuvre où il aboutit, parce que, grâce à lui, on a tiré de soi plus qu'il n'y avait, on s'est haussé au-dessus de soi-même. Or, cet effort n'eût pas été possible sans la matière : par la résistance qu'elle oppose et par la docilité où nous pouvons l'amener, elle est à la fois l'obstacle, l'instrument et le stimulant ; elle éprouve notre force, en garde l'empreinte et en appelle l'intensification. Bergson

POUR DÉMARRER    L'esprit doit s'appuyer sur la réalisation matérielle pour se créer et se dépasser : Bergson nous donne à voir la relation entre matière et esprit. La matière nous offre une résistance et, ainsi, nous stimule dans notre effort de création.    Conseils pratiques    Dans ce court texte apparaissent très clairement les théories bergsoniennes sur la pensée et le langage, dont la connaissance vous sera précieuse pour bien saisir le sens des termes et surtout la nature des arguments.    Bibliographie    BERCSON, L'énergie spirituelle, PUF ; œuvres complètes, PUF.  R. LE SENNE, Traité de morale générale, PUF, pp. 643 et sqq.

bergson

« peuvent valoir pour moi.

Ce qui est vécu dans l'intériorité de la durée a donc besoin de la discursivité dulangage qui spatialise, découpe dans l'extériorité, pour que je puisse en faire une véritable pensée. [II.

Dépréciation de la simple pensée par rapport à sa réalisation matérielle (deuxième phrase).] [1.

La pensée et l'œuvre d'art comme de simples possibles.] Bergson revient alors sur ce que serait une pensée qui n'aurait pas d'autre réalité que celle, fugace, de lapensée: elle ne coûte aucun effort.

Tout le monde s'est imaginé écrivant un poème ou un roman.

Mais detelles œuvres, à l'état de simples projets, ne sont pas grand-chose; il leur manque l'essentiel, commeBergson le dit un peu plus loin, c'est-à-dire d'exister matériellement.

Il est difficile de se prononcer sur laquestion de savoir jusqu'à quel point de telles œuvres sont quelque chose, quel est leur degré d'être: ilsemble cependant que, pour Bergson, de telles œuvres ne soient rien.

Il n'y a pas d'œuvre possible quipuisse exister en dehors de sa réalisation matérielle : ce n'est qu'une fiction de l'esprit de se représenter leschoses ainsi. [2.

L'effort comme condition de la réalisation de la pensée et de l'œuvre d'art.] Ce qui permet à l'œuvre ou à la pensée d'exister réellement, c'est l'effort: ce qui existe n'existe que parl'effort, la peine que sa réalisation a demandé à son auteur.

L'effort est l'intermédiaire entre la simplepossibilité de l'œuvre qui n'existe pas encore, l'œuvre en puissance, et la réalité de cette même œuvre,l'œuvre en acte.

L'effort actualise (mène à l'existence) le possible.

L'effort, qui mène à l'être ce qui n'existaitpas encore, est un travail, une dépense d'énergie.

Les choses ne viennent pas à jour par générationspontanée.

Il y a comme une résistance, que Bergson explicitera un peu plus loin, à ce que les choses voientle jour. [III.

L'effort comme ce qui donne sa valeur à l'œuvre (troisième phrase).] [1.

La valeur de l'effort.]L'effort est, par définition, pénible, mais il est aussi précieux, dit Bergson.

Ce qui donne du prix aux choses,ce n'est pas la pensée que nous en avons lorsque nous les concevons, puisque alors elles ne sont encorerien; ce n'est pas non plus les choses elles-mêmes, comme Bergson l'expliquera; c'est l'effort qu'il m'a coûtéde les produire.

- Bergson semble ainsi pencher pour la théorie qui voit l'origine de la valeur des biens nondans l'utilité qu'elles ont pour moi, ou que je veux leur accorder, mais dans le travail qu'il a fallu accomplirpour les obtenir.

Comme chez Marx, c'est la valeur propre du travail humain qui donne aux choses leur prix:ce que l'on paie - ou plutôt ce que l'on devrait payer, les lois du marché modifiant les prix des marchandisesen fonction de l'offre et de la demande, ce n'est pas l'usage que je pourrai en avoir, mais la quantité detravail dépensé par l'ouvrier qui les a produites. [2.

La création.] Ce qui rend l'effort précieux, ce n'est pas le fait qu'il soit pénible (rien n'indique en effet que la peineconsentie doive être rémunérée: un effort sans résultat ne mérite pas récompense), mais le fait que ceteffort soit créateur d'une œuvre, le fait, en d'autres termes, que l'œuvre produite dépasse ce qu'on adépensé pour la produire.

Créer signifie ici non pas donner une autre forme à ce qui existait déjà (commechez Descartes pour lequel on n'imagine jamais que des choses existant déjà, en reprenant des parties çà etlà pour composer par exemple une chimère, et pour lequel il ne peut jamais y avoir davantage dans l'effet, lerésultat, que dans la cause); créer, c'est ici ajouter de l'être là où il n'y en avait pas.

«On a tiré de soi plusqu'il n'y avait, on s'est haussé au-dessus de soi-même»: par ces mots, Bergson donne une image saisissantede ce que doit être une création véritable (n'oublions pas le rôle clef de la création dans la philosophie deBergson : la vie est d'abord pensée comme création).

C'est en faisant effort que je crée de la valeur, parcequ'il y a plus dans les choses créées que dans celles qui ne sont que des projets et que, par conséquent, il ya plus en moi-même qu'il n'y avait auparavant. [IV.

La matière comme condition de l'effort (quatrième phrase).] [1.

La matière, obstacle de l'effort.] S'il est nécessaire de faire effort pour donner une expression à nos pensées, c'est parce que nous nesommes pas de purs esprits, parce que nous ne pouvons donner à nos pensées d'expression que matérielle.La matière est ce qui s'oppose directement à la pensée.

Si nous étions de purs esprits, il nous suffirait, àl'image du Dieu cartésien, de penser pour créer immédiatement.

Mais nous avons affaire à la matière.

Nousrencontrons dans notre effort de création cette matière.

Celle-ci ne se plie pas à notre moindre caprice;inerte, elle offre de la résistance à notre action.

Agir dans le monde, chercher à créer une œuvre d'art, c'estrencontrer à tout moment une force contraire à la nôtre, celle de la matière qui obéit à ses propres lois.Créer, c'est donc entrer dans un rapport de forces avec une matière, et tâcher de dominer celle-ci en luiimposant notre forme. [2.

La matière, adjuvant de l'effort.]. »

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