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Claude Debussy

Publié le 26/02/2010

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debussy

Il serait agréable et de bon profit de vivre davantage avec les grands hommes, selon la vérité de leur personnalité. Il serait bon de pouvoir se les représenter tels qu'ils ont été en réalité. Or, nous ne pouvons toujours accepter en bloc les récits et les descriptions qui paraissent sur eux. Nous ne pouvons croire aveuglément certaines biographies, cependant détaillées et bien intentionnées. En connaissant, en pénétrant les Oeuvres, nous arrivons à une espèce de divination de l'homme tel qu'il fut, et nous sentons mieux, alors, le moment où le biographe a touché juste, lorsqu'il a saisi, dans son sujet, un trait caractéristique, évocateur, ou lorsque au contraire il a glissé dans une interprétation erronée. Les "vies romancées" sont un attrait et un danger. A vouloir mettre trop d'émotion dans le récit que l'on fait d'une existence passée, à vouloir envelopper ce récit d'un halo de poésie, on risque de s'écarter de la vérité initiale du personnage et des circonstances, pour ne suivre que l'appel secret et passionné de ce qui nous plaît en lui ou dans son Oeuvre. Nous le voyons d'après nous-mêmes et il n'est plus là pour nous prouver notre erreur. Ce sont souvent les petites anecdotes rapportées sur les grands disparus par ceux qui les ont connus qui, comme autant de touches de couleur, nous les rendent vivants, proches, qui nous les donnent avec une voix, des gestes, un visage, une apparence humaine et sympathique.

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« est une réplique admirable, lyrique et passionnée, intense et féerique, mais tout empreinte du génie français, c'est-à-dire de distinction, de finesse, de tendre humanité, d'équilibre et de culture extrême. Précédant Pelléas et parfois l'annonçant, avaient paru en moins de dix ans, avant 1902, les Ariettes oubliées d'oùdate sa collaboration musicale avec la muse verlainienne, les Cinq Poèmes de Baudelaire, le premier recueil des Fêtesgalantes, le Quatuor à cordes, les Proses lyriques, les Chansons de Bilitis, le Prélude, la Sarabande et la Toccatapour le Piano et les Trois Nocturnes pour orchestre (Nuages, Fêtes, Sirènes).

Debussy avait ainsi indiqué le sens destrois morceaux : "Le titre Nocturnes veut prendre ici un sans plus général et surtout décoratif.

Il ne s'agit donc pasde la forme habituelle du Nocturne, mais de tout ce que ce mot contient d'impressions et de lumières spéciales.Nuages, c'est l'aspect immuable du ciel avec la marche lente et mélancolique des nuages, finissant dans une agoniegrise, doucement teintée de blanc.

Fêtes, c'est le mouvement, le rythme dansant de l'atmosphère avec des éclatsde lumière brusque, c'est aussi l'épisode d'un cortège (vision éblouissante et chimérique) passant à travers la fête,se confondant en elle ; mais le fond reste, s'obstine et c'est toujours la fête et son mélange de musique, depoussière lumineuse participant à un rythme total.

Sirènes, c'est la mer et son rythme innombrable, puis, parmi lesvagues argentées de lune, s'entend, rit et passe le chant mystérieux des Sirènes." C'est pendant la flânerie d'un soir d'été que Debussy s'arrêta à la devanture de la librairie Flammarion, et arrêta sonregard sur le Pelléas et Mélisande de Maeterlinck, qui venait de paraître.

Poussé par un élan profond, le musicienpénètre dans la librairie et achète le livre.

Rentré chez lui, il le lit avec avidité, et à mesure qu'il avance dans salecture, il se sent charmé, puis conquis, et finalement, il se rend compte, avec la puissance soudaine d'unerévélation, que c'est le texte qu'il lui faut pour composer l'opéra dont il rêve.

Aucun doute, c'est bien là la poésieintense et communicative qui se mêlera le mieux à sa musique, ce sont ces paroles sibyllines, cette simplicitéprofonde, ce divin mystère ambiant que sa musique animera, et dont elle prolongera le pouvoir d'expression. Les poètes sont les détecteurs de l'insaisissable ; ils aperçoivent autour de nous des choses qui demeurent invisiblesà nos yeux.

Ils ajoutent aux couleurs du prisme des nuances dont nos sens sont privés.

Le théâtre de Maeterlinckbaigne entièrement dans la poésie du mystère universel, atmosphère glauque et lumineuse où tout paraît étrange,féerique et solennel.

Sur le drame flotte un voile ténu de brume et de rêve, au travers duquel chaque parole,chaque geste prend l'importance d'une action fatale.

Et la musique de Debussy propage à l'infini cette essence depoésie, la répandant comme un parfum qui gagne jusqu'à l'âme.

Comme lorsqu'il était enfant, Claude le musiciendisposait délicatement les ailes diaprées des papillons tout au long des murs de sa chambre, ainsi, devenu grand, ildisposa des harmonies rares, des tonalités exquises, en fit une moire sonore qu'il glissa sous la ligne des phrasesavec une étonnante divination poétique.

On ne connaît pas d'opéra où la musique se fasse à ce point poésie,s'infiltre dans les mots, les amplifie, les illumine, arrache du cOeur du poète tout ce qu'il rêva de mettre dans sonOeuvre et que la parole ne sut tout à fait exprimer. Les jeunes générations sont parfois comme une foule qui attend une annonciation.

Heureux alors celui qui vient avecune formule artistique exprimant l'esprit de l'époque, heureux le génie qui trouvera la parole dégageant l'âme et lesdésirs de la jeune humanité montante.

Dans ses paroles, dans sa musique, dans ses dessins, il donnera l'essor à unemultitude de jeunes cOeurs, libérés par la formule magique, impatients de battre et de brûler d'enthousiasme. Jusqu'à la révélation de Pelléas, la jeunesse musicale n'avait longtemps vécu "qu'en chuchotant autour d'unechambre fermée" comme dit le vieil Arkel à Mélisande.

C'est Claude Debussy qui lui ouvrit grandes les portes del'avenir, en lui montrant le chemin pour retrouver la tradition française.

Et cette jeunesse lutta, dans un élanpresque unanime, pour la pérennité du chef-d'Oeuvre unique, duquel on ne peut rapprocher, dans toute la musique,malgré leurs différences évidentes de genre et de langage, que le Boris Godounov de Moussorgsky, en tantqu'exploration et interprétation des âmes humaines. Après Pelléas, apparaissent, en 1903, les Estampes et l'Isle joyeuse, pour piano, le deuxième recueil des FêtesGalantes et les Trois Chansons de France.

Puis, en 1905, voici la Mer, nouvelle révélation qui va surprendre lesdebussystes eux-mêmes par sa puissance. Debussy aimait avec ferveur la mer, qu'il a souvent évoquée dans ses Oeuvres.

Chaque année, il passait sesvacances auprès "du bruit innombrable de la mer disait-il qui conseille impérieusement de ne pas perdre son temps".Alors qu'il composait sa symphonie magnifique, il écrivait à Messager : "Vous ne savez peut-être pas que j'avais étépromis à la belle carrière de marin, et que seuls les hasards de l'existence m'ont fait bifurquer...

Néanmoins, j'aigardé pour la mer une sincère passion." Nul artiste n'avait encore réussi à capter la vie marine, sa magie multiple,cette vie d'ondes et de mouvements irréguliers, profonds, ininterrompus, comme la vie même de nos pensées et denotre âme. De 1906 à 1911, Debussy écrit, pour le piano, les deux séries de ses Images, les douze Préludes et Children'sCorner, spécialement composé pour sa petite fille qu'il adore.

Pour les voix : les Trois Chansons de Charles d'Orléans,pour chOeur a cappella, le Promenoir des deux amants et les Trois Ballades de Villon.

Pour l'orchestre, il serenouvelle encore avec le vaste triptyque des Images, dont les deux volets : Gigues et Rondes de Printemps sontséparés par Iberia, celle-ci comprenant elle-même trois parties. C'est au début du mois de février 1911 que Debussy accepta d'écrire la partition du Martyre de Saint Sébastien,pour collaborer à l'Oeuvre de D'Annunzio, qui devait être représentée au mois de mai de la même année au Théâtredu Châtelet.

C'était un laps de temps trop court pour que Debussy se sentît à l'aise dans son travail.. »

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