Devoir de Philosophie

Dépend-il de nous d’être heureux ?

Publié le 26/06/2012

Extrait du document

Pour terminer, c’est donc indéniablement au cours de l’existence que l’Homme se forge un chemin à travers les obstacles afin d’arriver au but suprême, le bonheur, en faisant face à ses propres questionnements et aux aléas extérieurs. Il passe sa vie à tenter l’impossible pour y accéder, à s’inventer toujours de nouveaux rêves, de nouveaux désirs, de nouveaux buts afin d’assouvir ses besoins et de se créer un futur bien être permanent et jouissif. Mais est-il réellement dans le juste lorsqu’il ne voit que le bout ? Comme il a souvent été dit, le voyage est plus important que la destination : «  Le bonheur, c’est de le chercher «, ou encore « Le bonheur n’existe pas, seul existe le désir d’y parvenir «. Jules Renard et Anton Tchekhov témoignent ici de la primordialité de s’intéresser au chemin qui mène au bonheur, et pas seulement à la finalité. Etre heureux c’est finalement rechercher à l’être, toujours s’éblouir, s’enchanter devant ces nouveaux rêves, ces nouveaux désirs, ces nouveaux buts, et non pas attendre leur consécration, en vain.

« Un exemple de problématisation : l'analyse préalable de l'intitulé du sujet « Dépend-il de nous d'être heureux ? » ( En philosophie, il ne faut pas s'en tenir à la littéralité de l'intitulé du sujet de dissertation, mais en analyser les termes afin d'en extraire le problèmesous-jacent initialement inapparent.

Avant même de puiser dans votre culture philosophique et de partir à la recherche des références qui vouspermettront de traiter un sujet de dissertation, vous devrez vous livrer à une analyse préalable, à la fois sémantique et philosophique des termes dusujet, pour en dérouler la logique propre et en exhiber les rapports, voire les tensions.

C'est ainsi que vous construirez votre problématique.

Ceci est unexemple de problématisation possible, ce n'est ni un modèle ni l'état définitif de la réflexion qui est exigée de vous.

Vous avez là un aperçu de ce quepourrait être une problématisation préalable à toute construction de plan. À la question de savoir s'il dépend de nous d'être heureux, au lieu de répondre mécaniquement et successivement par oui ou par non, on répondra parla mise en valeur préalable d'un certain nombre de problèmes qu'une simple analyse des termes de la question permettra de dégager.

On s'interrogeraainsi :• sur les conditions externes et internes qui déterminent notre accès au bonheur et justifient ou non et dans quelle mesure, que l'on s'interroge sur lapossibilité qu'il dépende de nous.

Se demander s'il dépend ou non de nous d'être heureux, c'est donc dans un premier temps, s'interroger sur lesconditions matérielles, psychologiques, sociales, culturelles, qui autorisent cet éventuel accès au bonheur ;• mais c'est aussi dans un second temps, et à un second niveau, se demander si la reconnaissance de ces conditions déterminantes interdit ou non quel'on considère que l'accès au bonheur dépende de nous.

En d'autres termes, reconnaître l'existence de conditions (principalement matérielles)déterminant notre accès au bonheur, laisse-t-il une marge de manœuvre à notre volonté dans sa quête du bonheur ?• Il faut donc s'interroger sur ce que signifie l'expression « dépendre de nous » :1) Première manière de comprendre l'expression « dépendre de nous » : au sens fort, ce qui dépend de nous ne dépendrait ainsi que de nous.

Selon cepoint de vue, l'accès au bonheur se penserait selon une autarcie exclusive de toute intervention ou influence issue de l'extérieur [autarcie =autosuffisance intégrale d'un territoire ou d'un État ; ici, nous transposons métaphoriquement ce concept à la sphère individuelle].

Pour répondre demanière affirmative à la question de savoir s'il dépend de nous d'être heureux, il faudrait pouvoir prouver dans tous les domaines de la vie dont l'enjeuest l'accès au bonheur, qu'aucune cause autre que nous n'est impliquée : c'est une première possibilité… qui nous conduit à une impasse.

En effet, s'ilfaut entendre la question dépend-il de nous d'être heureux ? en son sens fort, c'est-à-dire : ne dépend-il que de nous exclusivement d'être heureux,exception faite de toute détermination issue de l'extérieur ?, la réponse risque fort d'être immédiatement négative, et le problème d'être ainsi clos,puisque nous reconnaissons tous que parmi les ingrédients de l'état que nous qualifions d'heureux, figurent un certain nombre d'éléments relevant duconfort matériel ou de la survie biologique, qui nous mettent nécessairement dans une situation de dépendance vis-à-vis de l'extérieur et d'autrui(dépendance physiologique à l'égard de l'environnement ; dépendance matérielle à l'égard de nos conditions de vie/survie quotidienne ; dépendancesociale à l'égard de nos prochains dont nous ne saurions nous passer, etc.).2) D'où une seconde manière de s'interroger sur l'expression « dépendre de nous : » s'agit-il au contraire de désigner par ce qui dépend de nous uneprise de conscience libre du fait que l'indépendance matérielle ne peut jamais nous être acquise, mais qu'une autre forme d'indépendance peut êtreconquise ? Dans ce cas, ce qui dépend de nous, c'est bien la prise de conscience de ceci que bien des choses ne dépendent pas de nous… S'il nedépend pas de nous d'être bien nés, riches, etc., il dépend bien de nous de décider d'accepter cet état de fait, de le reconnaître, en somme, de mettrementalement à distance les conditions extérieures de notre existence sur lesquelles nous n'avons aucune maîtrise.

Et dans ce cas, l'idée selon laquelle ildépendrait de nous d'être heureux, revêt immédiatement une dimension qu'elle n'avait pas immédiatement : la maîtrise ainsi évoquée serait unemaîtrise mentale.

Ce qui dépendrait bel et bien de nous relèverait d'une disposition mentale, d'une attitude, d'une décision volontaire [ici joue ladistinction intérieur/extérieur : ce qui s'impose à nous de l'extérieur ≠ ce qui relève d'une décision intérieure].• Or, ces questions préliminaires masquent mal toutefois, un élément indéterminé, que l'intitulé du sujet donne pourtant comme un état de fait définitif :« être heureux » apparaît ici comme un résultat, un état clairement identifié par tous, un état consensuel et immédiatement définissable, puisque l'on sedemande s'il dépend de nous d'être heureux, comme si l'existence d'un tel état ne faisait pas de doute.

Or, ce qui semble constituer une fin évidente etininterrogée, pour peu qu'on l'analyse de plus près, se révèle hautement problématique :1) les caractérisations du bonheur varient autant que les individus, les peuplades, les confessions, les mœurs : en ce sens, être heureux semblecaractériser un état différent selon la manière dont chacun de nous l'entend.

En quel sens entend-on donc qu'il dépend de nous d'être heureux, s'il y aautant de définitions du bonheur que d'individus, de sociétés, de cultures ? Cet état de satisfaction intense se caractérise-t-il intégralement de manièrematérielle ? S'agit-il d'un bonheur de type affectif, corporel, intellectuel, etc.

?2) Par ailleurs, on s'interrogera sur la forme même de l'expression être heureux : on constatera ainsi que l'intitulé du sujet n'est pas « Le bonheurdépend-il de nous ? » mais « Dépend-il de nous d'être heureux ? ».

C'est donc que manifestement, c'est une certaine attitude qui est visée par laquestion, une manière d'envisager la vie et le monde, et non un bien dont nous aurions une possession immédiate.

Le sujet semble ainsi nous inviter ànous demander si ce qui apparaît comme un résultat exprimé par un verbe d'état (être heureux) est compatible avec une certaine activité, du moinsavec une décision volontaire (dépendre de nous), en somme, si cela peut relever de notre fait.• Une manière de résoudre cette contradiction entre l'existence de conditions extérieures exerçant sur nous une contrainte dans notre quête dubonheur, et l'existence d'une volonté libre désireuse de ne dépendre que de soi [? autonomie = se donner à soi-même sa propre loi] : si l'on situe parexemple le bonheur dans l'exercice réfléchi d'une pensée libre, on caractérise à la fois l'autonomie (? une pensée libre non soumise aux vicissitudesmatérielles du quotidien), donc l'absence de dépendance à l'égard de tout facteur extérieur + ce bonheur même.

On souligne ainsi par la même occasionque celui-ci n'est pas un état définitif mais ne peut que faire l'objet d'une aspiration sans cesse renouvelée, c'est-à-dire d'une manière d'êtrecaractérisée par la prise de conscience non soumise aux illusions, de tous les déterminismes qui nous enchaînent (? et on retrouve la spécificité del'expression être heureux distinguée du simple substantif de bonheur).

C'est une caractérisation possible de l'état être heureux, une caractérisation quenous dirons intellectualiste du bonheur, qui repère, au cœur même des dépendances multiples qui nous lient au monde, un espace de liberté possible,situé dans une disposition mentale particulière.

? Ce qui dépendrait de nous dans l'accès au sentiment de bonheur, serait de nature strictement mentale,psychologique ou intellectuelle. ( Conclusion méthodologique : il ne faut jamais réduire le sujet de philosophie à sa formulation littérale, mais l'analyser selon la logique des conceptsqu'il met en présence, pour mettre en valeur le problème qui lui est sous-jacent.

Ici, la logique des concepts qui est en jeu, c'est celle de la compatibilitéentre la définition volontariste d'une attitude disposant au sentiment de satisfaction intense que nous qualifions de bonheur, et l'existence dedépendances multiples qui semblent interdire cette compréhension volontariste.

En d'autres termes, il s'agit de la compatibilité des notions d'autonomieet de bonheur : voilà un exemple de problématique à partir de laquelle une ébauche de plan pourra être construite.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles