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Doit-on enterrer le passé ?

Publié le 25/08/2005

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Le fait est que certaines choses représentent un danger grave pour le maintient de l'équilibre psychique, ils générent un déploiement d'énergie psychique trop intense pour être conservés dans le champ de la conscience. Ils sont ainsi refoulés dans une zone qui demeure inaccessible à la conscience: l'inconscient, encore appelé dans la deuxième topique freudienne le ça. Cette dynamique de l'oublie serait « pratique » si elle ne représentait pas un revers plus inquiétant. Ce qui se charge en nous de ce mécanisme de refoulement, c'est une censure, le surmoi qui incarne en notre esprit l'intériorisation des règles et lois parentales et sociétales. Avant d'aller plus en avant, analysons deux exemples freudiens dans les Cinq leçons sur la psychanalyse, et tentons de comprendre pourquoi l'esprit ne parvient en fait jamais à éradiquer ce qui le dérange. Notre premier exemple concerne une patiente de Freud qui présente des troubles psychiques depuis la disparition de sa propre soeur. A première vue, on est facilement tenté croire qu'il s'agit d'un deuil difficile. En vérité, Freud apprend bien vite que sa patiente nourrissait des sentiments très forts pour le mari de sa soeur. Lorsque cette dernière est décédée, sa première et plus spontanée pensée fût de se dire « Maintenant, il est enfin pour moi ». Ce qui représente en cette patiente les règles morales socio-parentales, l'encouragea bien vite à occulter définitivement cette « horrible » pensée avec une force terrible, si bien que ce fût l'entièreté des sentiments qu'elle nourrissait à l'endroit de son beau-frère qui furent enterrés, rejeté dans son inconscient.

 Enterrer quelque chose ou quelqu'un, c'est l'enfouir dans la terre, entendons loin de soi, de la surface visible. Une bonne part des choses que nous enterrons le sont pour la simple raison qu'elles ne peuvent et ne doivent pas rester accessible au regard. On enterre ce qui doit rester secret, ce qui doit être tû. Si l'on prend l'exemple d'une corps, sa décomposition et tout l'aspect déplaisant que cela représente, échappera à notre regard. Mais si l'on prend cet exemple comme modèle d'enterrement, nous sommes à vrai dire bien vite surpris. Le corps que l'on enfouie sous terre n'est pas pour autant oublié. Il a une destiné en dehors de son cercueil, les hommes à la surface continuent de se le représenter. Comme nous le rappelle Edgar Morin dans son ouvrage L'homme et la mort, il y a une étonnante proportion entre le temps de décomposition d'un cadavre, et celui du deuil du disparu. Ce qui se passe sous terre en terme biologique, ou physico-chimique, se retransmet dans le même temps en termes mentaux chez ceux qui continuent de vivre après le décès de leur proche. Nous n'oublions pas ce que nous enterrons, nous lui donnons un autre sens. Le fait qu'il demeure loin des yeux entraîne l'esprit à créer des représentations nouvelles, détachées de la réalité empirique. Le corps décomposé est oublié au profit de l'apparition d'autre chose, les souvenirs par exemple qui survivent dans l'esprit de ceux qui ont partagé son existence, sa destiné dans un paradis ou un enfer religieux. Une coutume japonaise consistait à planter un arbre près du corps que l'on enterre: ainsi, la sève, l'écorce seraient nourris du processus de décomposition du cadavre. L'homme mort continuerait de cette façon à exister à travers la croissance et la vie de l'arbre planté: ce qui est laissé en hors-champ continue ainsi à inspirer ce qui se passe au coeur du champ, l'absence continue de se signaler à travers l'existence de ceux qui survivent mais sous une autre forme, une forme adaptée. Il s'agit donc de ne pas confondre « enterrer « son passé et « l'oublier «: nous le voyons, enterrer quelque chose n'implique pas forcément qu'il disparaisse de notre esprit, mais plutôt qu'il persiste sous une autre forme. Nous nous poserons peut-être même la question de savoir si nous n'enterrons pas les choses pour mieux nous les représenter, si nous ne les cachons pas pour mieux les voir?

« Supposons, nous dit Freud lors d'une de ses conférences, qu'un individu dans l'audience dérange le déroulement deson exposé.

Il fait des réflexions à haute voix, et crit même son mécontentement.

Freud demande alors à deuxpersonnes de l'assistance de le « jeter »dehors après plusieurs remontrance à l'individu même qui demeurent sanseffet sur lui.

Nous avons ici une analogie parfaite du mécanisme de refoulement psychique.

Mais voilà qu'un foisdehors cet individu continue à crier, tape sur la porte de l'extérieur (...): il continue, malgré son « refoulement » àdéranger, à avoir une incidence sur la conférence.

De même, le souvenir rejeté dans l'inconscient continue à vouloirs'exprimer dans le champs de la conscience.

Il trompe la censure, se déguise pourrions nous dire, pour apparaîtredans la conscience sous la forme d'un symptome psychique.

Ce retour de ce qui a été refoulé nous enseigne querien ne s'oublie, que ce qui a été enterré, rapparaît sous une autre forme.

La psychanalyse encourage donc lepatient à retrouver, puis à se représenter, à faire sien ce qui ne pouvait jadis demeurer dans le champs de laconscience et qui à présent la dérange sans qu'il est conscience du pourquoi de cette gêne, sans qu'il puisse enidentifier l'origine. Nietzsche: soyons injuste! II. Dans ses Considérations intempestives sur l'histoire , Nietzsche enquête sur le poids même que l'histoire représente dans la vie des hommes.

Selon lui,l'homme mérite de savoir aussi oublier son histoire pour ne pas qu'elledevienne indigeste au point d'entraver sa démarche.

Que ce soit sur le planobjectif ou subjectif, la vénération de l'histoire doit pouvoir trouver une limite.En effet, toute création nécessite quelque part d'être injuste avec le passé,de l'oublier ou de le sacager un peu.

Il faut parfois s'émanciper de la tradition,des icones d'une civilisation, remettre l'héritage en question pour tenter decréer du neuf. Nietzsche se lève contre cette histoire monumentale devant laquelle on pose le genoux à terre, empli de respect, comme devant un monument respectueuxqu'on ne doit surtout pas remettre en question.

D'un côté, nous sommessilencieux de respect devant ces vestiges du passé, et d'un autre côté, nousenvions le chien qui aboit parce qu'il demeure « attaché au piquet de l'instant ».

Ce qu'il vit aujourd'hui, il l'oubliera dans un instant.

Au-delà du simple fait que cette vision de l'animal est aujourd'hui une éthologie périmée,nous saisissons le point de vue nietzschéen: nous voudrions oublié, ne plus être soucieux de ce qui pèse parfois sur notre conscience, et que nietzsche représente par la morsure d'un serpent,comprenons la morsure de la mauvaise conscience.

La culpabilité, cet affect triste, freine notre action d'un point devue individuel, et ronge notre esprit. Du point de vue de l'histoire collective, l'artiste qui veut créer doit piétiner ce passé, être irrespectueux envers-lui.Sans cela, il ne sera qu'un philistin cultivé nous dit Nietzsche, i-e celui qui déteste la nouveauté, qui vit sous le poids de la culture et des apports du passé sans jamais les remettre en question, angoissé de perdre ses repères.Les grands hommes doivent être capable de créer une rupture, un gouffe entre eux et le passé.

Mieux quesimplement l'enterrer, ils doivent par la suite le profaner, le traiter sans aucun respect, le violenter.

Ils doivent ensomme être injustes envers le poids de la tradition. Les fantômes existent III. Aristote faisait une distinction entre ce qui est en puissance , et ce qui est en acte .

La neige par exemple, en puissance, pourrait être verte, bleue, noire, ou de n'importe quelle autre couleur.

Mais il se trouve qu'elle s'actualise en blanc.

Ainsi, si potentiellement, elle peut revêtir n'importe quelle couleur, elle passe dans la réalité, en blanc.

Il ya avait donc pour Aristote, un champ en dehors du réel, le champs des possibles où était contenu tout ce qui estjustement possible, contrairement à la réalité qui n'est que l'actualisation d'un seul possible.

C'est cette séparationentre puissance et acte que va critiquer Spinoza, cette pseudo marge en retrait de l'univers.. »

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