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Donatello

Publié le 26/02/2010

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Né à Florence, Donato di Nicolo Bardi, dit Donatello, fut l'élève du sculpteur Lorenzo Ghiberti et travailla dans son atelier entre 1404 et 1407. Son intérêt pour la sculpture s'était éveillé au contact des artistes qui réalisaient la cathédrale de Florence, et il est probable que c'est en les regardant qu'il apprit à tailler la pierre. Il affirma son originalité dès ses premières oeuvres, notamment dans les figures de marbre de Saint Marc et Saint Georges où pour la première fois depuis l'Antiquité, une statue exprimait et sublimait une dimension psychologique. Il inventa également la technique du modelé très peu prononcé, présente dans le bas-relief ornemental du socle en marbre de Saint Georges tuant le dragon à Orsanmichele. Vers 1423, Donatello s'associa avec l'architecte et sculpteur Michelozzo et ils réalisèrent en collaboration plusieurs projets. Parallèlement, Donatello continuait à honorer ses propres commandes, parmi lesquelles son oeuvre la plus remarquable, le bronze de David, premier nu sur socle de la Renaissance. En 1443, Padoue lui commanda la statue équestre controversée de Erasme de Narni, sculpture en bronze connue sous le nom de Gattamelata. Il resta à Padoue jusqu'en 1453, où il réalisa une série de statues pour la basilique Saint-Antoine, avant que la maladie le contraigne à interrompre son travail. De retour à Florence, Donatello s'aperçut que son talent était délaissé au profit du style sensuel développé par la nouvelle génération de sculpteurs. Il voyagea, exécutant plusieurs commandes dans des villes italiennes. Il retourna à Florence à la fin de sa vie et y mourut en 1466, laissant inachevée la chaire de bronze de l'église de San Lorenzo.

« La rupture est totale avec la technique de Ghiberti.

Matériellement parlant, puisque, désormais, les plans du reliefsont créés par le creusement de l'épaisseur du métal, tandis que Ghiberti ajoutait les plans en saillie sur un fondlisse.

Ce qui veut dire que, pour Donatello, il ne s'agit plus de poser sur une porte, un décor, mais d'organiser dans lamatière, si peu profonde soit-elle, un lieu imaginaire où tout l'univers matériel et moral puisse se refléter.

La doctrinedu microcosme scénographique, celle qui fera de l'univers une scène cubique et géométrique où s'agitera l'humanité,la doctrine d'où sortiront et le théâtre et la peinture et la géométrie des Temps Modernes est découverte, nonthéoriquement mais en acte.

On ne saurait dire, en effet, que Donatello ait reçu la perspective de Brunellesco ;aucune transmission de doctrine n'aurait, en 1421, été capable de donner au sculpteur, avant les traités d'Alberti,avant Piero, les méthodes d'application à suivre.

Dans la découverte des principes figuratifs des Temps Modernes,Brunellesco et Donatello sont des égaux, ayant eu, au surplus, le même entourage de savants et de peintres.

Maisni Manetti, ni Masaccio, ni Masolino, ni Angelico n'ont été capables de réaliser d'un coup des oeuvres positives quiincarnent littéralement dans la matière un principe d'organisation intellectuelle de tout l'univers comme Brunellescoet Donatello en ont eu, l'un et l'autre, l'étonnant privilège.

Aussi bien, en dépit de son étonnante qualité, le bas-relief de Sienne ne constitue-t-il pas encore l'oeuvre maîtresse, unique, qui est, d'une manière absolue, le témoin,extraordinairement charmant et émouvant du génie de Donatello.

Je veux parler du second David, qui se trouveaujourd'hui au Bargello.

Il est si connu et si charmant qu'on se contente de le regarder en passant d'un oeil amical,un peu comme un enfant.

Peu d'oeuvres, cependant, dans l'histoire de la plastique, sont plus chargées depuissance.

Comme tant d'artistes Donatello reprenait volontiers ses thèmes.

Il y a cinq ou six Saint Jean, il y a troisDavid.

Entre celui de la cathédrale, en 1408, et celui du Bargello, en 1435, il y en a un autre, le David Martelli, quiest à Berlin et qui marque une étape de la recherche.

Le David du Bargello est si parfait qu'il est trop modeste.Replaçons-le, par la pensée, dans son cadre.

Quand, en 1435, Cosme l'Ancien rentre d'exil à Florence entriomphateur et en maître absolu, il appelle dans sa familiarité Donatello qui devient garde de ses collectionsd'antiques.

Il embellit, en outre, son beau palais de la via Larga où s'accumulent, avec les antiques, les chefs-d'oeuvre contemporains.

Ce palais possède une cour qui s'ouvre sur un jardin.

Cette cour est décorée de huit bas-reliefs encastrés dans les écoinçons des arcades et sur lesquels ont été inscrites les images de quelques-unes desplus rares intailles de la collection.

Le monde des dieux et des héros se substitue à celui du christianisme.

Danscette cour, devant le jardin, le David.

Il est de nouveau la jeunesse, l'aventure qui consacre la destinée ; il estl'image de la puissance de l'esprit avisé.

L'une des idées favorites de ce cercle est la puissance de l'homme ouvrierde son propre destin autrement que par la force.

La Fortune maîtrisée par l'intelligence devient la loi souveraine à laplace de l'Obéissance et de la Foi.

Et toute l'Histoire est prise à témoin comme en fournit la preuve le cortèged'Eros, l'autre force toute-puissante de l'univers qui, d'après un camée antique, orne le casque ailé du géant écraséqui a trouvé son maître dans l'enfant avisé.

David, c'est à la fois Cosme l'Ancien et Donatello, c'est Florence et c'estle monde moderne qui entreprend de mesurer, en imagination, l'univers pour le plier à ses desseins.

Et pour mieuxexprimer cette puissance de la raison ordonnatrice des apparences, Donatello a modelé le bronze parfait suivant lesmêmes règles qui ont permis à Brunellesco de réaliser le merveilleux équilibre de la coupole de Sainte-Marie-des-Fleurs, de la cité du lis et du merveilleux vallon de l'Arno.

Regardez-la, le matin, de la terrasse de San Miniato, puisregardez le David, hélas ! enfermé au Bargello.

Vous verrez comment la lumière pénètre la matière, comment il n'y aplus de masse, mais des plans qui se pénètrent, comment des lignes, des volumes et des rayons sont maniés et nonplus des blocs de marbre ou de bronze, comment chaque point de l'oeuvre est lié à tout le cadre, comment, enfin,Donatello, après Brunellesco, y a prouvé que l'art consiste dans le maniement des forces et non dans l'accumulationdu drapé ou de la matière, comment il est essentiellement une oeuvre de l'esprit, inséparable par là du temps qui l'acréée et, cependant, communicable éternellement à tout homme qui pense.

Comment Donatello est parvenu à cetterévélation d'une forme neuve de la plastique, il faut le demander à une triple discipline : l'imitation de la nature, leculte de l'antique et une maîtrise sans égale des techniques.

Il semble, pourtant, qu'on commette une erreur graveen dissociant, comme on le fait souvent, chacun de ces éléments par l'analyse.

La révélation de l'antique, Donatellol'a eue dès son premier voyage à Rome avec Brunellesco ; la nature, il l'a toujours observée.

Le génie de Donatello,ce n'est pas d'avoir découvert une nouvelle source d'inspiration et de l'avoir ensuite suivie ; il n'y a pas de phasestranchées dans son oeuvre.

Il est grand pour avoir créé des ouvrages où se concilient des attitudes et desméthodes.

Ni le réalisme ni l'antique ne constituent des systèmes éternels, correspondant à des facultés immuablesde l'esprit ou à des catégories esthétiques absolues.

On ne crée pas en imitant des formes mais en en substituantde nouvelles, toujours plus ou moins chargées de valeurs multiples.

C'est pour avoir cru que le secret de Donatelloc'était soit son réalisme, soit sa connaissance de l'antique que l'académisme est né déjà avec Michel-Ange.

Il esttout à fait faux de croire que le principe essentiel de la beauté donatellesque soit le caractère intransigeant de sonattitude et la parfaite intégration d'une forme à une idée.

Il y a dans l'oeuvre achevée quelque chose de plus quin'est pas la conformité d'une forme à un principe mais cette puissance d'intégration dans la matière d'images etd'idées multiples.

Un art qui se borne à incarner un point de vue est pauvre.

C'est un art d'imitation, le néo-classicisme par exemple.

Celui de Donatello n'illustre pas un principe, il produit des êtres véritables.

On ne chercheradonc pas à savoir ce qui l'a emporté dans sa vie de la passion du vrai et de l'amour de l'antiquité.

Ce ne sont ni lesbustes véristes comme le Nicolas da Uzzano de la sacristie de Florence, ni les Amours des Cantorias de Prato et dela cathédrale de Florence qui nous livreront le secret de l'artiste.

C'est l'immensité de son oeuvre.

Donatello a vécuau milieu d'un peuple de figures qu'il ne cessait d'animer, toujours à la recherche de plus d'idées, de plus de moyenspour plier la matière.

Associé longtemps avec Michelozzo, possédant des chantiers de tombeaux, il transporte,passée la cinquantaine et après le David des Médicis, son activité à Padoue où il demeure plus de dix ans.

Il y dirigeun immense chantier de fondeur de bronze et, tour à tour, on voit jaillir de son cerveau le Gattamelata et trenteautres pièces de métal.

Le Gattamelata, c'est le héros brutal des Temps Modernes opposé au David triomphateurpar l'esprit ; il incarne l'autre tentative des princes de la Renaissance et préfigure l'État moderne avec tout ce qu'ildoit à la force et à la volonté, aux réminiscences de l'ordre antique et à la maîtrise des actions actuelles.

LeGattamelata annonce la série des statues équestres qui, de Louis XIV au Grand Électeur, à travers Girardon etDesjardins, Schlüter et Bouchardon, jalonneront l'Europe des lumières.

En même temps, Donatello poursuit son. »

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