Devoir de Philosophie

Emmanuel Chabrier

Publié le 22/02/2012

Extrait du document

1841-1894 L'apparition lumineuse et fantasque d'un lutin, en quelque songe de nuit d'été, l'irruption d'un bon diable, ensemble malicieux et bénévole, à travers un conte légendaire d'Orient : tel fut, parmi le trantran artistique et mondain de la capitale, le sillage d'impressions et de souvenirs que laissèrent la brève existence d'Emmanuel Chabrier et sa carrière, plus écourtée encore, de musicien professionnel. Tel s'y manifesta roulant comme boule à travers quilles, bousculant les poncifs, narguant les pontifes — ce petit gros homme à barbiche de chèvre-pied, à cerveau olympien, à nez bourbonien ("L'Ange du Cocasse", disait de lui son ami Vincent d'Indy). Il venait à Paris (vers 1857) du fin fond des provinces : on veut dire, de l'Auvergne rude. Il était né à Ambert le 18 janvier 1841. Il tirait son ascendance paternelle d'une antique souche de bourgeois d'Ambert — marchands, gens d'église, gens de robe. Son grand-père était magistrat, son père, avocat. Tous ces Chabrier étaient naturellement tenus à un certain décorum. Ils s'en revanchaient par une singulière propension à l'humour, à la mystification, aux inventions plaisantes. C'est d'eux assurément qu'Emmanuel Chabrier hérita ce don de la bouffonnerie dont furent marqués son caractère, sa vie quotidienne, et finalement, son génie de musicien. L'aptitude musicale elle-même, il est vraisemblable qu'il la devait à sa mère, la gracieuse Evelina Durozay, par laquelle il avait des attaches dans le Bourbonnais cher aux Muses.

« jeune groupement animé des plus louables tendances, auquel il collaborait avec zèle et où il était fort prisé.

En1881, c'est la haute estime dont il jouissait auprès de Charles Lamoureux qui lui permit de prendre rang parmi lesprofessionnels.

La Société des Concerts Lamoureux, alors dans son essor et qui déjà tenait dans le monde musicalun emploi souverain, s'attacha Emmanuel Chabrier comme "chef des chOeurs" ; en fait, Lamoureux fit de Chabrierson second, son factotum.

A titre de vacances, le compositeur put accomplir avec sa femme, en automne 1882, unvoyage de quelques semaines en Espagne.

Il en rapporta les éléments d'Espana, l'éblouissante rhapsodie qui futexécutée par l'orchestre Lamoureux en novembre 1883 et reçut un accueil enthousiaste.

Ce fut là un succès décisif: le nom du compositeur comptait désormais parmi les plus représentatifs de la jeune École française. Par ailleurs, Chabrier travaillait avec acharnement, depuis 1879, à l'élaboration de son drame lyrique Gwendoline, oùil avait mis toute sa dilection, tous ces espoirs.

Présentée à la direction de l'Opéra dès 1883, Gwendoline attenditvainement — et dut attendre dix années encore — d'être accueillie sur notre grande scène parisienne.

Le théâtre dela Monnaie, à Bruxelles, offrit au compositeur une compensation non négligeable.

Gwendoline, en 1886, y futreprésentée avec éclat.

Le directeur, malheureusement, était à la veille de déposer son bilan, et sa faillite mit fin,au bout de quelques représentations, au succès de Gwendoline.

L'Oeuvre ne put longtemps se produire que surquelques scènes de province, et en Allemagne. Après Gwendoline, Chabrier avait mis sur le chantier un autre ouvrage de théâtre lyrique auquel semblait promis undestin plus clément.

Le Roi malgré lui fut en quelques mois mis au point, et reçu à l'Opéra-Comique.

Il y futreprésenté les 18, 21 et 23 mai 1887 : or, c'est le 25 mai que les bâtiments de ce théâtre furent détruits par unincendie...

La carrière du Roi malgré lui se trouva ainsi arrêtée dès le départ, et pour longtemps suspendue, commecelle de Gwendoline. Grâce à son ami dévoué, le ténor fameux Ernest Van Dyck, Chabrier fut à cette époque mis en relation avec lesgrands chefs d'orchestre wagnériens Félix Mottl et Hans Richter ; et par ceux-ci, il put obtenir que ses deuxouvrages de théâtre lyrique trouvassent en Allemagne un accueil qui leur était refusé en France.

De 1889 à 1891,Gwendoline et le Roi furent joués avec succès à Karlsruhe, à Leipzig, à Dresde, Munich, Stuttgart, Dusseldorf,Cologne.

Ces représentations procurèrent au compositeur l'occasion de plusieurs voyages en Allemagne, où saferveur wagnérienne trouvait d'incomparables jouissances. Hormis ces randonnées outre-Rhin, et de fréquents retours à Paris, où le ménage Chabrier maintenait son train demaison, le musicien menait depuis 1883, une vie retirée, une existence campagnarde dont son état de santé et lesexigences de son labeur lui avaient fait une nécessité.

Sa belle-mère avait loué une petite propriété à la Membrolle,près de Tours.

C'est là qu'Emmanuel Chabrier passa, chaque année, tous les mois de belle saison.

Il avait, dès lesannées 1880, ressenti les prodromes aggravés du mal funeste auquel il devait succomber et qui allait aboutir, en1892-1894, à la paralysie générale.

Toutefois, bien que le travail lui fût à certains moments pénible, jamais sonesprit ne fut plus alerte, plus aiguisé, que dans ces années de retraite à la Membrolle ; et c'est au cours de cettepériode qu'il écrivit quelques-uns de ses chefs-d'Oeuvre, ceux peut-être qui illustrent le mieux sa mémoire : JoyeuseMarche (pour orchestre), le chOeur pour voix de femmes, la célèbre Bourrée fantasque pour piano, et enfin lesfragments de Briséis, drame lyrique sur lequel il s'acharna, où il voulait mettre le plus haut de son génie. Le premier acte seulement de Briséis put être mené à l'achèvement.

Il a bénéficié, après la mort du musicien, dequelques belles exécutions qui furent chaleureusement accueillies par un public de musiciens et de dilettantes.

Dès1892, les troubles cérébraux empirèrent.

Quand fut enfin accordée au compositeur, en décembre 1893, lasatisfaction de voir sa Gwendoline montée à l'Opéra, on doute qu'à la soirée de répétition générale (20 décembre)Chabrier ait eu même conscience que les ovations du public s'adressaient à lui et à son ouvrage de prédilection.

Ilmourait quelques mois plus tard, le 13 septembre 1894. A cette date, il n'était assurément pas un inconnu, mais il demeurait un méconnu pour la généralité de l'opinionmusicale en France, et il resta un méconnu, ou un oublié, vingt ans encore.

Il n'avait eu, pour le priser à son justeet très haut prix, qu'une élite de connaisseurs.

Or, c'est eux finalement — c'est ce cercle de fidèles et d'amateursavisés — qui eurent raison des ignorances de l'opinion, des indifférences de la presse, des incompréhensions de lacritique.

Tel a été bien souvent le destin, on ne l'ignore pas, des plus grands entre les artistes vraiment créateurs,de ceux par lesquels l'histoire de l'art est amenée à jalonner ses étapes.

Tel a été le sort, par exemple, du maîtreque Chabrier aimait entre tous, du "père Franck".. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles