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Être reconnu, est-ce donc si important pour moi ?

Publié le 27/07/2005

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Qui pourrait bien vouloir demeurer toute sa vie « caché » ? Tel est bien le sort auquel se livrerait celui qui se passerait de toute reconnaissance. Il serait, à vrai dire, ignoré des autres. Entendons par le fait de « ne pas être reconnu » que tout autre personne ignorerait qui nous sommes. La re-connaissance, en effet, n'est rien d'autre qu'une connaissance de nous-mêmes portée aux yeux d'autrui, partagée par quelqu'un d'autre que nous-mêmes. Chercher la reconnaissance est dans ce sens une recherche des honneurs, d'un pouvoir qui est admiré de tous. Or, cette reconnaissance apparaît comme fondamentale dans le processus de construction d'une identité. Il faut bien que nous partagions quelque chose avec autrui pour comprendre et saisir qui nous sommes. De la même façon, la reconnaissance peut être une vertu au sens où être reconnaissant envers qui nous a aidés n'est pas particulièrement chose commune. Le moi, cette entité représentant la conscience de soi, doit donc à sa propre constitution la présence d'un autre moi qui le reconnaît. Seulement, rappellerons-nous, autrui a-t-il véritablement accès à notre intériorité ? Ce que les autres voient de nous-mêmes, ce n'est jamais que la façon dont nous apparaissons. Or, cet apparaître ne peut jamais réduire et comprendre toute l'identité d'une personne. Les autres peuvent ainsi se tromper sur ce que nous sommes et leur reconnaissance n'a pas nécessairement une grande valeur d'authenticité. Il s'agit donc de savoir si la reconnaissance par les autres de ce que nous sommes est essentielle pour notre identité ou si elle ne reste jamais qu'un simulacre de notre subjectivité.

« III/ Tous ont besoin de reconnaissance Nous venons ainsi de poser comme essentiel ce qui se distinguait de la pure et simple apparence.

La part la plusimportante de nous-mêmes se passerait donc de la reconnaissance comme renommée.

Or, il n'est pas dit que cedédain vis-à-vis de la reconnaissance ne soit pas lui-même une façon de chercher à être reconnu.

Celui qui fuit leshonneurs qui lui sont dus, en effet, peut très bien chercher à être distingué dans sa singularité.

Une pensée dePascal nous guide particulièrement en ce sens : « La vanité est si ancrée dans le cœur de l'homme, qu'un soldat, ungoujat, un cuisinier, un crocheteur se vante et veut avoir ses admirateurs ; et les philosophes mêmes en veulent ;et ceux qui écrivent contre veulent avoir la gloire d'avoir bien écrit, et ceux qui les lisent veulent avoir la gloire deles avoir lus ; et moi qui écris ceci, ai peut-être cette envie ; et peut-être que ceux qui le liront… » Ainsi, lareconnaissance s'affiche véritablement comme un besoin.

Elle ne dépend pas de la personnalité ou d'un quelconquecaractère mais se présente comme essentiellement liée à notre nature.

Chacun cherche à être reconnu, au moins,pour ce qu'il est.

Dans ce cas là, la reconnaissance d'autrui ne vaut-elle pas autant que la nôtre ? Tel est cequ'inspire l'exemple de Sartre dans L'Etre et le Néant.

Si nous faisons un geste vulgaire et que quelqu'un s'en aperçoit, nous pouvons avoir honte de la façon dont nous apparaissons àautrui.

Nous pouvons alors en être énervés ou bouleversés mais en aucun casnous ne saurions « être atteints jusqu'aux moelles : la honte est, par nature,reconnaissance.

Je reconnais que je suis comme autrui me voit.

» Cette façondont autrui nous voit n'est donc pas une simple image de nous-mêmes,différente de notre être.

C'est bel et bien lorsque nous admettons que leregard d'autrui nous détermine dans notre être qu'il y a reconnaissance.Chercher la reconnaissance ne va pas sans admettre que cela a un pouvoirdéterminant sur ce que nous sommes et que tous en ont besoin.

Pour Sartre autrui est le fondement constitutif de la relation à autrui.

Chaqueconscience est une liberté qui rêve d'être absolue et de transformer en chosepassive la liberté d'autrui.

Peu importe qu'autrui m'aime, me haïsse ou soitindifférent à mon égard : son simple surgissement est violence.

Sartre illustrece conflit, dans « L'Etre & le Néant », à travers l'expérience du regard. La notion de regard ne doit pas être comprise en un sens empirique, commeune propriété d'un être apparaissant dans le monde, comme une faculté desyeux.

L'appréhension du regard se produit toujours sur fond d'une disparitiondes yeux : je ne peux à la fois voir les yeux de l'autre et voir qu'il me regarde.Dès l'instant où on me regarde, il m'est impossible d'adosser ce regard sur unêtre du monde, de le saisir à sa source ; et, si je me retourne pour tenter de l'affronter, je me fais regard à montour et retombe alors sur une face d'où tout regard est absent.

L'expérience du regard n'est qu'expérience de monêtre-regardé.

Il suit de là que si, le plus souvent elle est associée à une forme empirique, qualifiée comme face, ellepeut procéder d'un tout autre événement.

Lorsque je rampe dans les fourrés afin de ne pas être « repéré », et quesoudain s'allume une maison sur le coteau, je me sens objectivité et cette lueur est alors un regard.

Lorsque, parjalousie, j'épie ce qui se passe derrière une porte, le bruit des pas dans le couloir est bien un regard.

Celui-ci nedésigne donc en aucun cas un événement empirique, mais la modalité même du surgissement d'autrui comme sujet. La honte est bien une certaine conscience, où je me découvre moi-même : elle est toujours honte de soi ; mais elleest structurellement honte de soi devant autrui : j'y suis révélé à moi-même comme ce que je suis à ses yeux, jem'y aperçois comme m'échappant vers autrui. Reprenons l'exemple de la situation de jalousie.

On peut la décrire en termes d'intentionnalité : les événementsobjectifs « provoquant » ma jalousie ne sauraient être distingués de la conscience jalouse que j'en prends, c'est aucontraire par cette jalousie même que je les fais exister.

Mais, dans cette mesure, je n'ai pas connaissance de cettejalousie : je ne me sais pas jaloux, je suis au monde sur le mode de la jalousie, et celle-ci ne se distingue donc pasde l'action d'écouter à la porte.

En tant qu'elle est pure ouverture au monde, la conscience ne possède aucuneconsistance propre, rien ne vient s'interposer en elle, la séparer d'elle-même.

La conscience peut être définie commerapport immédiat à soi, comme conscience irréfléchie.

Elle est par conséquent impersonnelle : elle n'est même pasmienne, ne jouit pas de la consistance lui permettant de s'éprouver comme « moi ». Lorsque je cours après le bus il n'y a aucun moi dans cette conscience, mais seulement « le bus-devant-être-rejoint».

Ainsi, pure extériorité à soi, la conscience irréfléchie est sans intimité, sans habitant ; elle a l'impersonnalité dumonde vers lequel elle ouvre. L'apparition d'autrui, qui se marque ici par le bruit des pas, correspond à une transformation radicale de laconscience irréfléchie : un moi surgit au sein de celle-ci.

Toutefois, contrairement à ce qui advient dans la réflexion,ce moi ne m'est pas connu : j'en fais certes l'expérience, mais comme d'une réalité qui m'échappe.

Je ne peuxpasser de l'autre côté du spectacle, afin d'en prendre possession ; ce moi se donne précisément comme ce qui n'estque pour autrui, comme fuite de ma substance vers lui, et j'en suis donc séparé par toute la liberté d'autrui.

Ce moisurgissant au sein de la conscience irréfléchie est de l'ordre du non-révélé : il demeure totalement indéterminéquant à ce qu'il est, et cette indétermination est portée par le regard d'autrui.

Il ne faut cependant pas oublier la. »

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