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Faut-il laisser une place à l'irrationnel dans la conduite de la vie ?

Publié le 01/03/2005

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Par le seul jeu de ma conscience, je transforme en règle de vie ce qui était invitation à la mort. «. Ainsi, dans cette perspective « existentielle «, vivre, c'est mettre à jour l'irrationnel de l'existence et, du même coup, exalter l'intelligence de l'homme donnant un sens aux choses. En accordant la primauté à l'irrationnel dans la conduite de la vie, le « penseur absurde « fonde un humanisme cohérent : le sens lui-même vient de l'homme, à partir de sa réflexion sur un univers dépourvu en lui-même d'explication et de raison. Mais il faut aller plus loin : nous n'avons considéré, jusqu'à présent que l'irrationnel de l'existence. Mais l'irrationnel ne renvoie-t-il pas aussi à l'Autre de la raison, que nous trouvons dans l'esprit de l'homme ? L'irrationnel de l'esprit humain doit aussi se voir accorder une place essentielle. L'irrationnel ne désigne pas seulement cette trame absurde de l'existence irrationnelle, que le moraliste doit expérimenter et prendre en compte, lui accordant la première place. L'irrationnel exprime également, en un deuxième sens, ce qui n'est pas le produit d'une activité consciente. Ici l'irrationnel représente la vie de l'esprit sous sa forme la plus spontanée, qu'il s'agisse des puissances souterraines du rêve, du désir ou de l'inconscient.

Nous ne pouvons faire autrement. D'ailleurs, si nous ne nous conduisions que rationnellement, nous serions tous sages. Les surréalistes préconisaient une conduite non rationnelle. C'est la condition de la créativité. Schelling : celui qui n' apas un grain de folie est un entendement vide et stérile. " Laisser une place " à l'irrationnel, ou lui confier la conduite de la vie, non ! (S'abandonner à la superstition peut être désastreux.)

« pouvoirs.De cet assujettissement de l'irrationnel par la raison, nous pouvons développer quelques exemples.

Ainsi, chezPlaton, la sphère irrationnelle des passions et des désirs est complètement niée en tant que telle et soumise aucontrôle de la raison.

Loin d'accorder une place au fond sauvage et irrationnel de notre être, Platon tente de lemaîtriser grâce aux pensées raisonnables et il le nie donc en tant que tel.

Ainsi, dans la République, est posée laquestion « Que faire de nos désirs bestiaux, irrationnels et anormaux ? ».

Le fond irrationnel, loin de se voir accorderune place, un rang, dans la conduite et la direction de la vie, est dissous en tant que tel.

En effet, qui dit conduitede la vie, dit précisément rationalité, hégémonie de la partie rationnelle.

Tout en notant la présence d'uneirrationalité profonde, Platon veut la dompter et finalement la nier.II y a en chacun de nous une espèce de désir terrible, sauvage, sans frein, qu'on trouve même dans le petit nombrede gens qui paraissent être tout à fait réglés.

A la raison d'intégrer et de nier cet irrationnel, de maîtriser le désirsauvage.Dans le Stoïcisme, l'irrationnel se voit également accorder une place très limitée.

Il y a, en effet, nous dit Epictète,les choses qui dépendent de nous, nos opinions, nos jugements, nos vouloirs, nos aversions.

II y a également leschoses qui n'en dépendent pas : ce sont les corps, les biens, les réputations, les dignités.

Il est évident que leschoses qui ne dépendent pas de nous semblent renvoyer à l'irrationnel de notre existence.

Le corps signifie latemporalité, la mort, et par conséquent, ce qui est autre que la raison.

Mais aux yeux d'Epictète, cet Autre que laraison exprime, finalement, le Principe rationnel universel partout présent.

En réalité, la raison est immanente à toutle réel.

Le monde est une totalité rationnelle.

Le mal et l'irrationnel ne peuvent trouver une place dans cet universparfait.

Dès lors, les choses qui ne dépendent pas de nous, comme la mort ou les biens, sont soumises à l'ordre dujugement rationnel et ne se voient accorder nulle place dans la conduite de l'existence, Le Sage est précisémentcelui qui est en mesure de dissoudre l'irrationnel grâce à l'efficacité d'un jugement tout puissant accordé à la raison.Ainsi en est-il de toutes les grandes pensées rationalistes : Le sage est celui qui vit sous la conduite de la raison etqui pulvérise, grâce à elle, l'irrationalité illusoire liée à l'imagination et aux sens.Néanmoins, cette attitude n'est pas sans poser problème : en effet, pour un penseur rationaliste, l'irrationnel n'a pasd'existence réelle.

Il représente seulement ce qui n'est pas encore dépendant de la raison ou, plus exactement,compris par elle.

Mais, en réalité, l'irrationnel ne désigne-t-il pas autre chose, une dimension vraiment existante duréel, que la conduite de la vie doit prendre effectivement en compte, de manière à lui assigner un rang et une place? Telle est la question que nous allons maintenant poser. Quand la raison prédomine, la place de l'irrationnel est réduite à la portion congrue.

Est irrationnel ce qui échappeaux puissances de la raison ou ce qui lui est étranger, ce qui ne participe pas de son essence ou de ses pouvoirsmédiateurs, ce qui est contraire à la raison et à ses normes.

Cette sphère de l'irrationnel paraît englober tant dedimensions de notre vécu que la question même peut sembler étrange.

L'irrationnel correspond à l'énigme de notreexistence, mais aussi au mouvement infini du désir, qui dépasse la raison et ne résulte pas de son exercice, audynamisme des passions, au rêve, à l'inconscient, à toute une sphère désignant, dans le monde et en nous, unelimite permanente à l'intelligibilité.

Cette sphère est si vaste que le penseur semble destiné à se rendre aux vastespuissances de l'irrationnel et à s'y soumettre.Mais cette analyse correspond davantage à un sentiment qu'à une évidence Mais, en réalité, l'irrationnel désignepeut-être fondamentalement ce qui est autre que la raison, et ce de manière absolue et irréductible.

En effet, noustrouvons, dans le réel, une limite permanente à l'intelligibilité et il semble qu'il faille lui accorder une place dans laconduite de la vie.

Ainsi les philosophies existentielles ont-elles fort bien décrit le tissu irrationnel et dépourvu desens de toute notre existence, tissu qui forme la trame même du vécu et auquel il faut donner la première placedans la conduite de la vie, car le choix libre se fait sur fond d'irrationalité, de « non-sens », d'« absurde ».

Citons ici Soeren Kierkegaard, mais aussi Sartre.

Dans le Post-Scriptum aux miettesphilosophiques, le premier a montré qu'il ne peut y avoir un système del'existence : l'existence est irréductible et au concept et au système, il estimpossible de dissoudre l'existence dans le déploiement de la raisonuniverselle.

Philosopher et conduire sa vie, c'est donc prendre en compte cetirrationnel et lui accorder le premier rang.

La conduite de la vie correspond icià un paradoxe absolu, à une saisie des éléments ou contradictoires ouirrationnels de notre existence.

La conduite ne désigne plus alors legouvernement totalement rationnel de notre vie, mais une direction pénétréepar le paradoxe existentiel.Il est impossible de saisir l'existence dans un système, car le système est pardéfinition un monde clos et achevé, tout le contraire de l'existence qui estune totalité en mouvement, ouverte sur le devenir.

L'existence pourrait êtreun système du point de vue absolu de Dieu, mais non point pour l'esprithumain.

Elle est une donnée de fait, immédiate, objective, concrète et pour lapenser comme un système, il faudrait précisément la supprimer commeexistence pour en faire quelque chose d'abstrait, de général, d'idéal, brefd'inexistant.

Alors que le propre du système est de relier les choses dans unetotalité close, l'existence tend au contraire à affirmer et maintenir desdistinctions et des différences.

Penser systématiquement, c'est se maintenirdans l'illusion contemplative, faire comme si nous n'étions pas existants,c'est-à-dire fils d'une époque, d'un milieu donné, d'une culture et d'un temps. Alors que l'universalité systématique de la pensée dénature et étouffe l'individu par l'effort d'abstraction et dedéréalisation, Kierkegaard est le premier philosophe à proposer une pensée de l'existence.L'homme est un être apparu dans le mystère de l'existence.

Bien avant d'être savant, le philosophe est homme,. »

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