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Faut-il opposer être et paraître ?

Publié le 22/01/2004

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Analyse du sujet -          L'opposition entre être et paraître est un lieu commun de la philosophie. Elle sert aussi à décrire des expériences quotidiennes. Ainsi, lorsque nous découvrons un nouveau lieu ou une nouvelle personne, nous disons facilement : « en apparence, elle est ainsi, mais en réalité, elle est autrement. » Cette opposition a donc pour nous un sens immédiat, qui évoque plutôt l'image d'un voile déformant. Derrière les apparences, ont découvre la réalité. On voit d'emblée l'opposition de deux « couches » de réalité, de deux « mondes » coexistants. Cette « précompréhension » permet-elle de saisir les enjeux philosophiques qui sont à l'origine de la séparation de l'apparence et de la réalité. Cette dernière aboutit en effet à un paradoxe dans la définition de l'objet de la connaissance : la réalité véritable est précisément ce qui ne apparaît pas, ce qui est au-delà des apparences. Comment comprendre ce paradoxe ? -          Etre et paraître semble donc, d'après le sens commun s'opposer. L'être peut en effet se définir comme ce qui reste toujours identique à lui-même, quand le paraître est plutôt, parce qu'engager dans le monde sensible, soumis à un changement continuel et perpétuel. -          Ce qui est ici mis à la question c'est non seulement la légitimité mais encore la pertinence d'une telle opposition entre être et paraître. On peut se demander justement dans quelle mesure cette opposition pourrait nous apparaître nécessaire, comme un impératif : l'on sera donc amener à traiter de la perspective épistémologique, ou gnoséologique dans la mesure où il nous semble, a priori, difficile de pouvoir connaître véritablement ce qui apparaît puisque précisément ce paraître est soumis au changement et n'est jamais identique à lui-même. c'est donc a fortiori nos modalités propres de connaissance qui sont ici mis à la question : est-il de la nature de notre esprit de pouvoir connaître ce qui par définition change tout le temps, n'est jamais identique à soi-même. -          C'est donc autant la valeur que la nécessité de cette opposition qui sont ici mise à la question. Et c'est à travers cette interrogation qu'il va falloir tenter de penser non seulement une conciliation possible entre les deux, mais encore de la penser de manière dialectique. Problématique             L'opposition être et paraître est-elle nécessaire pour pouvoir penser, voire sauver, la principe d'une connaissance possible ? Cette opposition n'est-elle pas au contraire qu'abstraite et inapte à rendre compte justement de la richesse de l'être ? Une pensée dialectique de l'être et du paraître est-elle possible et à quelle condition ?

« poser, par contraste avec l'être sensible (c'est-à-dire en réalité l'apparence) un mode d'être absolu.

Il faut pour celadénoncer le sensible comme étant seulement l'apparence de la réalité, celle qui est véritablement.

Cela suppose unrenversement de nos habitudes de pensée.

Etre, c'est être invisible ; c'est-à-dire précisément l'être s'oppose au paraîtreparce qu'il ne saurait apparaître justement.Les Idées de Platon sont souvent comprises comme des entités plus ou moins nébuleuses.

Mais c'est négliger la nécessitéqui est à leur origine : Platon cherche à sauver la possibilité de connaître en redéfinissant l'objet de la connaissance.l'hypothèse des Idées est ainsi indissociable du désir de philosopher.

Elle seule permet de penser un discours de vérité.Contre la sophistique, il faut penser une réalité qui existe en elle-même, indépendamment des effets du langage, pour que cequi est soit norme du discours.C'est dans la perspective de cette opposition être/paraître et de ses conséquences relatives à la connaissance qu'il fautcomprendre le sens du mythe de la caverne exposé au livre VII de la République.

En effet, les prisonniers de la caverne quisont enchaînés et qui voient les ombres de la réalité (que nous connaissons et que nous prenons pour la réalité) projeter surla paroi de la caverne et qu'ils prennent pour l'être réel du monde, sont en réalité figurative de notre propre position : ce quenous prenons pour la réalité, pour l'être réel du monde, ne sont en fait que de pâles copies du véritable être du monde quiest avant tout le monde intelligible des Idées.

La nécessité de l'opposition entre être et paraître est alors d'ordreépistémologique : c'est parce qu'on opposera être et paraître, c'est-à-dire qu'on saurait que le monde sensible n'est que del'ordre du paraître mais non pas de l'être, que l'on sera susceptible de connaître réellement l'être intelligible – et le seul êtrequi soit véritablement tel.

L'opposition être et paraître semble donc revêtir un fondement gnoséologique, épistémologique. II.

En quel sens peut-on penser une complémentarité des deux et non pas une stricte opposition ? Mais de cette distinction entre être et paraître ne naît pas a fortiori nécessairement une opposition.

Ainsi, si l'on reprend lathéorie platonicienne des Idées, l'on a bien un phénomène de participation.

En réalité il faut comprendre que l'être réel dumonde, c'est-à-dire le monde des Idées intelligibles, participent à l'être sensible du monde qui en est une copie.

Il faut doncbien prendre conscience de cette distinction, et en tant qu'on a pris conscience de cette distinction, alors il n'y a plus deraison d'opposer être et paraître puisqu'ils apparaissent tous les deux comme des plans différents.C'est à ce niveau que l'on peut convoquer l'entreprise critique kantienne qui distingue les phénomènes (tout ce qui est del'ordre du paraître justement) des noumènes (l'être, l'essence des choses).

En tant qu'être finis que nous nous rapportons aumonde que par la sensibilité (qui possède les forme a priori de l'espace et du temps), nous ne pouvons connaître les chosesqu'en tant que phénomènes, c'est-à-dire qu'en tant qu'elles se rapportent à nous.Il nous est impossible de connaître une chose en elle-même et pour elle-même mais seulement selon la manière dont ellenous apparaît.

L'ordre de l'être, de l'essence, u encore pour parler en termes kantiens l'ordre du noumène doit seulementêtre postulé.

On ne peut pas connaître l'être d'une chose puisque nous ne pouvons la connaître qu'en tant que nous lapercevons, c'est-à-dire qu'en tant qu'elle se donne à nous comme phénomène.La distinction phénomène/noumène qui reprend la distinction être/paraître en appelle à son tour une autre : celle qui existeentre penser et connaître.

Le phénomène, c'est-à-dire la chose en tant qu'il nous apparaît est susceptible, et est seulesusceptible, d'être objet de connaissance : nous pouvons en effet appliquer sur elle toutes les lois de la nature dans laquellepar ailleurs elle s'inscrit.

Nous pouvons donc connaître le phénomène.

Et ce que nous connaissons par là même ce n'est pasla chose en soi, telle qu'elle est en elle-même et par elle-même, mais bien plutôt la chose en tant qu'elle nous apparaît.

Parceque, au contraire, cette chose en soi, c'est-à-dire l'être, l'essence de la chose en elle-même et pour elle-même n'est passusceptible d'être, pour nous, objet de connaissance : l'être de la chose, le noumène est seulement pensable.

On peut lepenser mais certainement pas le connaître parce qu'il échappe justement à nos propres instruments dont nous disposonspour connaître une chose.Cela veut donc dire qu'on ne peut plus tout simplement, et de manière quasi manichéenne, opposer être et paraître.

Carpour les opposer, il faudrait qu'ils se contredisent, qu'il soit contradictoire de les poser dans un même espace et dans unmême temps.

Or, la distinction kantienne du phénomène et du noumène, qui recoupe la distinction entre penser et connaître,nous montre justement qu'être et paraître ne sont pas situés sur le même plan : on peut donc tout à la fois connaître unechose en tant que phénomène et la penser comme noumène.

Cela n'est pas contradictoire.L'opposition ne vient que si l'on considère que l'on peut, à proprement parler, connaître l'être de la chose même.

Or, c'estjustement en quoi consiste l'entreprise critico-transcendantale de Kant : la métaphysique ne peut prétendre connaître ausens fort l'être des choses.

Celui-ci ne peut être tout au plus que penser.

Et c'est un danger que l'étude critique kantienne apour objet de prévenir.

De droit donc, même si en fait il n'en va toujours pas de même (du fait de la soif de la raison à tout. »

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