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Faut-il se méfier de l'écriture ?

Publié le 05/03/2004

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Il interpelle intellectuellement le savoir de ceux qui sont autorisés à lui parler. C'est qu'il y a sans doute un rapport entre la parole vivante et le sacré, duquel est à exclure le profane qui doit rester hors du temple. De même peut-on distinguer, et justement chez Platon, un enseignement théorique adressé à tous, et un enseignement ésotérique, qui ne concerne que quelques uns. Le lieu de la parole vivante est un lieu polémique où des thèses sont à soutenir. La force de la parole vivante tient à la fois à la justice de la thèse soutenue (Socrate) ou à l'habileté avec laquelle elle est défendue (les sophistes). Le discours écrit est comme un enfant qui « a toujours besoin du secours de son père ». * Le discours vivant et animé est le discours « de celui qui sait » Le « discours vivant et animé » est celui qui, selon Socrate, « s'écrit avec la science », ou encore c'est le discours, selon Phèdre, « de celui qui sait ». C'est ce savoir, cette science qui animent le discours parlé, lui donnent un souffle, une vie. Le discours écrit est coupé de cette vie, il a perdu l'impulsion que donne tout savoir authentique. On peut le copier et le recopier à loisir, il n'est qu'une image, copie pâle et fixe, loin de la réalité de la science, familière des Idées ■ C'est dans cette ligne qu'on trouve également chez Rousseau une critique de l'écriture : « Les langues sont faites pour être parlées, l'écriture ne sert que de supplément à la parole.

« La parole vivante « une fois » écrite, perd par là même son statut et, avec le papyrus, devient une chose, unrouleau qui « roule partout ».

La parole précieuse choisit son interlocuteur et sait même se taire.

Le discoursécrit au contraire, devenu objet, s'offre à tous et passe entre toutes les mains.

Seul le sujet vivant et parlanta la possibilité du choix de l'interlocuteur.

Il interpelle intellectuellement le savoir de ceux qui sont autorisés àlui parler.

C'est qu'il y a sans doute un rapport entre la parole vivante et le sacré, duquel est à exclure leprofane qui doit rester hors du temple.

De même peut-on distinguer, et justement chez Platon, unenseignement théorique adressé à tous, et un enseignement ésotérique, qui ne concerne que quelques uns.Le lieu de la parole vivante est un lieu polémique où des thèses sont à soutenir.

La force de la parole vivantetient à la fois à la justice de la thèse soutenue (Socrate) ou à l'habileté avec laquelle elle est défendue (lessophistes).

Le discours écrit est comme un enfant qui « a toujours besoin du secours de son père ». * Le discours vivant et animé est le discours « de celui qui sait » Le « discours vivant et animé » est celui qui, selon Socrate, « s'écrit avec la science », ou encore c'est lediscours, selon Phèdre, « de celui qui sait ».

C'est ce savoir, cette science qui animent le discours parlé, luidonnent un souffle, une vie.

Le discours écrit est coupé de cette vie, il a perdu l'impulsion que donne toutsavoir authentique.

On peut le copier et le recopier à loisir, il n'est qu'une image, copie pâle et fixe, loin de laréalité de la science, familière des Idées C'est dans cette ligne qu'on trouve également chez Rousseau une critique de l'écriture : « Les langues sontfaites pour être parlées, l'écriture ne sert que de supplément à la parole.

» Plus encore, l'écriture altère lalangue : « Elle n'en change pas les mots mais le génie ; elle substitue l'exactitude à l'expression » ou encore «L'on rend ses sentiments quand on parle, et ses idées quand on écrit » (Essai sur l'origine des langues).

Enperdant l'écriture, la pensée perdrait donc la précision et son caractère abstrait : à la limite, la pensée toutentière se perdrait (au profit des sentiments et de leur expression). L'écriture est un instrument de pouvoir et d'exploitationLa fonction essentielle de l'écriture serait de favoriser surtout la puissance et la domination.

Dans l'histoire descivilisations, l'écriture devient le moyen pour un groupe social d'affirmer sa supériorité.

Elle sert d'instrumentde domination et d'exploitation.Puisqu'il a pour fonction essentielle l'expression de la pensée et la communication entre les hommes, il est clairque le langage joue un rôle éminent dans les phénomènes de pouvoir.

Il permet ou facilite l'action; il l'interditou la sanctionne; le droit se dit et s'écrit et ceux qui dirigent la Cité exercent leur fonction par l'intermédiairedu langage, tout comme ils sont attentifs à en capter les signes.Dans toutes les sociétés, les titulaires du pouvoir ont possédé la maîtrise du langage ou des langages propresà orienter l'action d'autrui.

Ceux-là sont détenteurs de ce "maître-mot" que Kipling attribuait dans la jungle àl'enflant démuni mais qui finirait par s'emparer de la fleur rouge.

Prêtres et scribes, pontifes et rois, légistes etavocats, journalistes et hommes des médias connaissent tour à tour cette puissance.

L'agora d'Athènes étaitle lieu de disputes, de collusions oratoires.

De même, Dieu se manifeste par cet acte de langage: " Aucommencement était le Verbe" disait déjà Saint-Jean.Dans les sociétés complexes, le langage est l'expression du pouvoir.

A tel point que le fait de nommer, dequalifier un Pouvoir, lui donne sa cohérence, sinon son existence: qui dit monarchie se met en mesured'élaborer le système monarchique, formule la série des concepts qui se trouvent mis dans la langue.Toutes les institutions majeures ont pour rôle de tester et d'élaborer le langage du Pouvoir.

L'un des privilègesles plus incontestables du milieu dirigeant est précisément de conserver la langue.

Le langage de la culture seconfond avec celui de la classe dirigeante.

Les faits langagiers montrent la capacité "performative" desclasses dirigeantes.

Et, le propre de ces dernières est d'éviter ou d'intégrer la "gheottisation" du langage:culture jeune (BD, musique, expressions "branchées"...).

Dès lors, si le pouvoir manifeste son emprise sur lelangage, ce dernier à son tour influence le Pouvoir, à tel point que l'évolution des phénomènes langagiers aune signification historique et politique considérable: l'invasion du franglais traduit ainsi notre infériorité àl'égard de l'Amérique anglophone, lorsque la France était puissante, on parlait français à Saint-Pétersbourg.De même, à la limite, on obtient le phénomène de la langue de bois qui est une conséquence de la glaciationdu langage et/ou de la glaciation du Pouvoir.Aussi, il faut bien qu'un jour, change ce langage jugé rétrograde.

Et, la révolution se manifeste aussi par unacte de langage.

La prise du pouvoir ne s'accompagne pas par hasard de déclarations solennelles, de thèsesou de profession de foi.En bref, on peut dire que le rêve de puissance est un rêve de langage.

Il fonde et manifeste le Pouvoir etcelui-ci s'exerce par celui-la. [Les systèmes philosophiques traditionnels ont privilégié laparole au détriment de l'écriture.

Ce n'est qu'un préjugé qu'il. »

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