Faut-il toujours laisser à désirer ?
Publié le 27/02/2008
Extrait du document
Or, comme l?écrit Canguilhem
dans Le normal et le pathologique une norme diffère d?une loi : elle ne
s?impose pas mais se propose seulement. Certes c?est de manière souvent
involontaire que le sujet s?écarte de la norme, mais ce peut être aussi
délibérément. Il s?agit alors de mettre une norme en question en lui faisant
violence.
Une norme vitale peut laisser à désirer selon les courbes
statistiques prises pour référence par le physiologiste : pourtant le sujet qui
présente, en apparence, des troubles objectifs, ne ressent aucun malaise,
ce qui est pathologique pour le plus grand nombre peut tenir lieu de norme pour
quelques hommes. A l?inverse le médecin peut dire à son patient que tous les
examens effectués sont normaux, tandis que le patient juge de lui-même que sa
santé laisse à désirer. Laisser à désirer est donc l?indice d?une divergence
entre une norme générique et une subjectivité singulière. Or, une telle
discordance est probablement vitale pour le sujet : on n?existe pas sans
enfreindre quelque norme, l?existence ne saurait être générique ou alors le
sujet devient entièrement asservi, nié par les normes dont il n?est qu?une
incarnation.
Aussi laisser à désirer prend désormais un sens tout différent :
loin d?être le corrélat d?un accident, le signe d?un écart à résorber, c?est une
opération nécessaire à la subjectivité elle-même. En effet, si rien ni
personne ne laisse à désirer c?est la plasticité des normes, la créativité
humaine et la singularité de chacun qui se trouve menacée. Laisser à désirer
c?est échapper à la norme, affirmer les siennes propres, refuser que la norme
devienne loi.
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